Des citoyens honnêtes tombent régulièrement dans le piège d’arnaqueurs professionnels à travers des coups de bien ficelés et des complicités insoupçonnées. Notre Voie a enquêté sur les méthodes des escrocs qui continuent de semer la désolation chez de nombreux travailleurs. Un des stratagèmes très utilisé dans un passé récent par ces arnaqueurs était d'user de téléphonie portable pour appâter leurs victimes. Imaginatifs à souhait et rusé ces escrocs à col blanc jouent sur la cupidité de leurs "clients" en leur proposant un éventuel gros lot qu'ils ont remporté à l'issue d'un tirage au sort d'une société de téléphonie mobile. Le jeu de téléphonie mobile K.D est planteur à N’zikro, un gros bourg situé à une trentaine de kilomètres d’Aboisso, au nord d’Abidjan. Des escrocs lui ont soutiré, courant 2008, trois cent mille francs en cartes de recharge. “Après avoir posé deux questions sur la qualité du service Orange, un individu m’a fait croire que je venais de gagner à un jeu. Il m’a dit que je gagnais soit une villa d’une valeur de 23 millions de francs CFA, soit une voiture de marque Peugeot”, explique K.D. Pour le mettre en confiance, l’escroc lui dit qu’il est prêt à lui donner un coup de pouce en le positionnant, par nationalisme, avant un Libanais bien placé sur la liste des gagnants. Il demande à K.D. d’acheter immédiatement trois cartes de recharge de cent mille francs chacune et de lui communiquer les codes de rechargement. C’est ce qu’il va faire naïvement. “Quand je communiquais les quatorze chiffres, j’entendais des bruits de touche, comme si quelqu’un relevait les chiffres”, poursuit le planteur. A sa grande surprise, les escrocs sont devenus injoignables juste après leur coup. Ce système d’escroquerie ayant été découvert par les sociétés de téléphonie mobile, les arnaqueurs ont changé de stratégie pour expérimenter d’autres techniques. La page de nécrologie comme moyen d’escroquerie Cette nouvelle trouvaille consiste à feuilleter les pages de nécrologie dans les journaux. Ici, les cas de familles aisées intéressent plus les truands. Ils repèrent sur la liste des parents et connaissances du défunt, les personnes socialement bien placées, puis recherchent leur contact dans l’annuaire des abonnés au téléphone. “Bonjour madame ! Je vous présente mes condoléances à la suite du décès de votre époux. J’étais son bon petit. Je fais de l’importation de véhicules et votre époux avait commandé une 4X4 chez moi. La voiture est à la douane à Noé. Votre époux avait déjà payé une bonne partie. Il ne reste qu’un million de francs à payer”. Voici ce que des escrocs ont déclaré à la veuve d’un haut responsable de la police nationale. L’infortunée dame a mordu à l’appât. Au moment où elle se rend compte de l’arnaque, les malfrats lui ont déjà extorqué plus d’un million de francs CFA. “Expédiez l’argent uniquement à Western Union à Aboisso”, disent-ils aux victimes, alors qu’ils sont basés à Abidjan. Un colonel des douanes a perdu plus de quatre millions dans ce genre d’affaires. Quand il s’est rendu compte de l’arnaque et qu’il a voulu en savoir plus, les truands lui ont répondu ceci : “Vieux père, quitte dans ça !” Les victimes de cette nouvelle race de truands ne se comptent plus. Mais ce n’est pas la seule stratégie des escrocs, qui ont plusieurs tours dans leur sac. Des équipements pour hôtel au port Un ami, hôtelier, a failli se faire gruger en 2008 par une bande d’escrocs. Voici leur stratégie : “Monsieur O. A, nous sommes une ONG .Nous avons séjourné récemment dans votre hôtel. Le cadre nous a beaucoup plu. Nous avons pensé à vous équiper gratuitement. Pour ce faire, nous avons expédié gratuitement des climatiseurs, des magnétoscopes, des ventilateurs, des splits, etc. Ces équipements se trouvent stockés au port de San Pedro. Vous pouvez entrer en contact avec M. Bilé, colonel des douanes, qui va vous faciliter le dédouanement, » ont expliqué les arnaqueurs à O. A. Ce dernier, visiblement heureux, appelle le colonel en question. « Effectivement, une ONG anglaise a expédié du matériel en votre nom. Vous donnez juste trois cent cinquante mille FCFA et je vous remets les marchandises. Expédiez l’argent à Western Union de San Pedro ». O.A a échappé aux escrocs grâce à un ami déjà informé de l’existence d’un tel réseau. Un dernier groupe de malfrats a encore vu le jour. Il est de loin celui qui a fait et qui continue de faire de nombreuses victimes. Les graines médicinales vendues à trois mille francs le kilogramme Ce groupe fait croire aux ignorants et autres personnes cupides qu’un Européen séjourne en ce moment dans le pays à la recherche de graines qui soignent l'insuffisance rénale ou d’autres maladies. Le kilogramme s’achèterait à trois mille francs et serait racheté par le Blanc à sept mille voire dix mille francs. A. U., opérateur économique à Aboisso, est tombé, l’année dernière, dans le piège de ces escrocs qui lui ont soutiré la somme de quatre millions de francs CFA. “Ils m’ont fait croire que ces graines viennent de Soubré et qu’elles étaient vendues par un vieux planteur. On m’a présenté deux kilogrammes à raison de trois mille francs le kilo. Celui qui me les a proposées m’a fait savoir qu’il était capable de me produire une bonne quantité, pendant ce temps, quelqu’un d’autre me harcèle en disant qu’il peut acheter ces graines à dix mille francs le kilo au nom d’un Blanc”, explique A. U qui s’est engagé à en acheter pour quatre millions de francs CFA. Juste après l’opération, le fameux Blanc l’appelle pour lui dire qu’il l’attend dans un hôtel de luxe au Plateau pour acheter les graines qu’il venait de prendre. Mais quand A.U se rend à l’hôtel indiqué, point de Blanc. Il tente vainement de joindre celui qui venait de lui vendre les graines à quatre millions. C’est alors qu’il se rend compte qu’il est victime d’une grosse arnaque. A la police criminelle où il se rend, de nombreux sachets de graines lui sont présentés par les flics comme pour lui dire qu’il n’est ni la première, ni la dernière victime. Nous même avons été joint récemment par téléphone par l’un de ces truands qui nous proposait de nous mettre au service de son patron, un français actuellement en Côte d’Ivoire, selon lui, pour acheter des graines vendues à trois mille francs , le kilo, au pays et revendues à sept mille francs le kilo sur le marché international. Il s’est même fait passer pour une ancienne connaissance actuellement en France. “Mon patron est actuellement au pays pour acheter des graines qui soignent l’insuffisance rénale et qui s’achètent à trois mille francs le kilo. Ces graines sont revendues à sept mille francs sur le marché international. Tu peux manger dans cette affaire et moi aussi, je pourrais avoir quelque chose”, nous a expliqué l’escroc, qui nous a fait croire que nous avions vécu ensemble dans un quartier d’Abobo (Abidjan). Quand nous avons décliné l’offre, le truand ne nous a plus jamais rappelé. Les stratégies des malfrats sont tellement bien ficelées que malheureusement, des citoyens honnêtes continuent à les croire.
Enquête réalisée par Sam K.D
Enquête réalisée par Sam K.D