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Politique Publié le mardi 2 mars 2010 | Nord-Sud

Guerre civile : Les historiens interpellent Gbagbo

Le chef de l'Etat a assisté, hier, en personne à une soutenance de thèse en histoire à l'université de Cocody. Ce qui était une première dans le ''Temple du savoir''.

Plus de trois heures d'écoute non pas dans un fauteuil moelleux comme il en a régulièrement le privilège, mais assis sur un banc d'amphithéâtre, en se contentant d'un verre de jus de gingembre (gnamacoudji) qui lui a été apporté par son aide de camp. Le chef de l'Etat s'est essayé hier avec succès à cet exercice pour ne rater aucune seconde de la soutenance de thèse qui l'a amené hier à l'université de Cocody. « Le thème m'a intéressé », a expliqué Laurent Gbagbo. Ce thème, c'était « les guerres civiles en Afrique de 1955 à 2002. » Après tous ces jours marqués par une tension politique née de la double dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante(Cei), Laurent Gbagbo avait peut-être besoin de se détendre dans l'ambiance d'un amphithéâtre Lorougnon Guédé bondé d'étudiants visiblement attirés plus par sa présence que par le sujet du jour, et d'enseignants heureux de l'accueillir. Il a pu également se déplacer pour soutenir un impétrant proche d'un de ses proches collaborateurs, le ministre Bertin Kadet, et du chef d'état- major des Forces armées nationales(Fanci), le général de division Philippe Mangou. Mais, toute l'attention avec laquelle le président historien a suivi les débats a démontré qu'il était venu surtout pour écouter un thème d'histoire dont le contenu pouvait lui être utile dans la gestion des suites de la guerre qu'il a dû affronter le 19 septembre 2002. Dans ce cas, il n'aura pas eu tort. Le jury composé de d'éminences grises de diverses spécialités, et l'exposant, le Dr Kouassi Yao, ont trouvé les mots et la manière qu'il fallait pour lui donner des conseils et des enseignements, sans violence. Ils lui ont subtilement rappelé que contrairement à ce qu'il a annoncé lors de la cérémonie de la ''flamme de la paix'' du 30 juillet 2007, la fin d'une belligérance n'équivaut pas à la fin de la guerre. La question a été posée par le Pr Lézou Dago Gérard, homme de lettres et membre du jury. Dans sa reponse, l'impétrant a choisi de citer le Français Constantin Bricker qui pense qu'après une guerre, il faut attendre 50 ans de paix pour s'égayer pendant quelques minutes. Pour le Pr Anzoumana Ouattara, philosophe, il faut tout au moins un dialogue solide entre les belligérants ou la tenue d'une bonne élection au cas où les raisons de la guerre sont politiques. Il a d'ailleurs reproché au postulant de s'être limité, en citant les conditions de la fin d'une guerre civile, dans son document, à la mort du chef de rebelle et à l'indisponibilité d'armes. Au total, les intervenants ont été unanimes sur le fait que même quand les armes se sont tues, il faut encore beaucoup d'effort pour obtenir la paix définitive. Certes, les délimitations temporelles du thème ne lui ont pas permis de toucher la crise ivoirienne, mais, les tout récents soubresauts de la situation nationale qui ont causé une dizaine de morts à Abidjan et à l'intérieur du pays étaient bien placés pour convaincre toute l'assistance. Autrement dit, la guerre n'est pas finie en Côte d'Ivoire.

La crise ivoirienne s'invite dans le débat

Les profs ont aussi rappelé que l'une des causes centrales des 27 guerres civiles survenues en l'Afrique entre 1955 et 2002, est le manque d'alternance politique ou l'usage de moyens anti-démocratiques par des dirigeants pour se maintenir permanemment au pouvoir. Le Pr Simon Pierre Ekanzan, historien et directeur de la thèse a par ailleurs cité la marginalisation d'une partie de la population. C'est certainement à ce titre que le Pr Lézou a relevé que le conflit, évènement dont fait partie la guerre, n'est pas toujours négatif. « Ils(les conflits) amènent les protagonistes à prendre conscience d'une situation et d'ajuster ce qui ne l'est pas. Ils amènent les belligérants à se jauger et à prendre des dispositions pour éviter une situation plus grave », a-t-il précisé. Le professeur Mélèdje Djédjro a quant à lui, proposé une reformulation de la problématique pour placer ces guerres au centre de la construction de l'Etat. Le chef de l'Etat est allé dans le même sens. Pour Laurent Gbagbo, la première cause des guerres civiles en Afrique est l'inexistence de véritables Etats. « Dans le cas de la guerre civile de Côte d'Ivoire, je suis obligé d'agir et de défendre l'intégrité du territoire parce que la fonction que j'occupe m'oblige à le faire. Mais, en tant qu'historien, je me dis qu'il faut laisser les temps avancer. D'ici 20 ans, 30 ans, on aura des Etats modernes. Pour le moment, nous avons des Etats à cheval entre les Etats dont nous avons hérités et notre propre culture », a-t-il tranché. Après avoir salué la qualité du travail du maître assistant Kouassi Yao, le jury présidé par le Pr N'Da Paul lui a décerné la mention très honorable avec félicitations. Ce qui lui confère le titre de docteur d'Etat en histoire.


Cissé Sindou
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