Il n’a pas la langue dans la poche. Et ne fais pas la fine bouche. Alfred Obrou, l’agent de Kader Kéita, Kouamatien Emmanuel, Ya Konan et bien d’autres professionnels ivoiriens, va toujours droit au but. La même attitude qu’il a adoptée dans cette interview dans laquelle il dépeint l’actualité sportive ivoirienne. Il y va à fond. Sans porter de gants.
L’actualité brûlante c’est le choix de l’entraîneur des Eléphants. A votre avis, quel technicien sied à la sélection nationale dans la situation actuelle?
Pour moi, on n’a pas vraiment un problème d’entraîneur. Le vrai problème c’est l’équilibre du groupe. Trouver un entraîneur maintenant pour la Coupe du monde n’a aucune importance. La Coupe du monde, c’est trois matches. On connait déjà le résultat. On ne pourra pas passer aussi facilement le Portugal et le Brésil. Donc il faut déjà préparer la CAN 2012.
Qu’entendez-vous par équilibrer le groupe ?
Il faut vraiment parler aux joueurs. Essayer de créer une amitié entre eux, une cohésion, c’est ce qui est plus important.
C’est dans ce sens que Troussier est beaucoup évoqué dans le milieu…dans la même veine, il aurait élaboré un programme jusqu’en 2014…
C’est du lobbying. Il faut laisser Anouma prendre une décision tranquille. Il ne sert à rien de l’influencer. Il faut un rassembleur autour de l’équipe. Faire revenir un monsieur comme Sidi Diallo que les joueurs respectaient vraiment pour recréer une bonne ambiance. Je n’ai pas le programme de Troussier, mais on en parle un peu trop. Soyons correcte, il a quel palmarès ? Même à l’Asec il n’a pas remporté de trophée majeur. Qu’on arrête. On veut plutôt des gens autour de l’équipe qui peuvent motiver les gamins. Même avec un mauvais entraîneur, s’ils sont motivés et qu’ils retrouvent l’ambiance, on peut aller loin. Il faut que les Drogba, Kader, Kolo puissent recommencer à rigoler ensemble après un match. Comme le faisaient Gouamené Alain, Gadji Céli et autres qui se rendaient visite. En équipe nationale aujourd’hui, certains ne savent même pas où habitent leurs coéquipiers. Ils n’ont même leurs numéros de téléphones. Il faut recréer l’ambiance comme avant. Comme la bande d’amis qui a remporté la Coupe en 1992. Aujourd’hui on a 22 multimillionnaires voire milliardaires difficiles à gérer. Il faut quelqu’un pour leur dire qu’on se moque de leurs milliards. Ils doivent manger ensemble, se pardonner des choses sur le terrain. Un remplaçant doit soutenir ceux qui sont sur le terrain, c’est ce qu’on recherche. Quel entraîneur ces joueurs n’ont jamais eu ?
Guus était-il un bon choix ?
Non, on n’a pas besoin d’un mercenaire, mais d’un entraîneur qui puisse travailler sur le long terme. Si tous les deux ans on doit en changer, on n’obtiendra rien.
Que faut-il pour recréer cette cohésion qui fait tant défaut ?
C’est un problème qui existe. La situation que vit notre équipe nationale est la même que connait la Côte d’Ivoire. Il y a même des hommes politiques qui appellent les joueurs la veille des matches. Ils veulent faire de la récupération. Ils le savent. Je vous le dis parce que je sais. Et comme ici on ne veut jamais voir les choses en face, on déplace toujours les problèmes. Vahid n’a perdu qu’un seul match, donc ce n’est pas un problème d’entraîneur. Un tel est Dioula ou Bété, les hommes politiques savent ce qu’ils disent aux joueurs.
Vous faites des affirmations graves…
Je persiste et je signe. Que les hommes politiques s’éloignent du football. Et de l’équipe nationale. Qu’ils cessent d’appeler les joueurs la nuit. Qu’ils cessent de les inviter chez eux nuitamment quand ils sont à Abidjan pour leur dire des choses. Je suis l’employé des joueurs, donc je sais de quoi je parle. Qu’ils laissent mes patrons tranquilles.
Ok ! Parlons du football local. Que pensez-vous de l’entrée des présidents de clubs à la Ligue professionnelle ?
Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Ce n’était pas normal que les acteurs principaux du football ne travaillent pas avec celui qu’ils ont mandaté. C’est exactement ce qui se passe dans le monde politique africain. On vote un président, après on s’en fiche. Pour moi ils sont les bienvenus.
Les observateurs estiment que ce sont les 4 milliards du Mondial qui les attirent…
Pourquoi voit-on l’argent partout ? Et si c’est le cas, où est le problème ? S’ils peuvent utiliser cet argent pour le développement du football c’est bien ! De toutes les façons, ce sont les clubs qui donnent les joueurs à l’équipe nationale. S’ils exigent leur quote part pour gérer leurs clubs, il n’y a pas de mal à ça. Ils prennent ce qui leur appartient. Ma crainte, c’est qu’à un moment donné, la politique s’ingère dans le foot. On a l’impression qu’on ne peut pas avancer ici sans les hommes politiques. Que les hommes politiques s’éloignent des footballeurs ivoiriens. On leur donne déjà suffisamment d’argent pour nous trouver des idées et diriger le pays. Les partis politiques sont financés à hauteur 800 millions l’an, donc ils ont suffisamment d’argent. Les présidents de clubs sont en train de s’unir pour réorganiser notre football, j’espère que les politiques ne vont pas encore les emmerder.
Pour vous, que faut-il pour réaliser une bonne Coupe du monde et faire une bonne projection sur la CAN 2012 ?
Le Mondial ce n’est pas la fin du monde. Il faut plutôt se poser la question de savoir pourquoi notre football est en train de mourir. L’année dernière on n’avait aucune équipe en Ligue des Champions ni en Coupe de la Confédération. Le Mali a gagné cette compétition. Or c’était notre affaire. C’est ça le vrai problème du football ivoirien. Ce n’est pas le Mondial. Reprenons la formation. Ne faisons pas du Mondial et de la CAN une fixation. On a vu le fruit de la formation avec Jean Marc Guillou. Essayons de trouver les moyens pour restructurer les clubs. Donnons les moyens aux formateurs pour nous sortir de bons footballeurs. Pour faire des enfants de la rue des footballeurs.
Que faut-il faire pour redonner au football son lustre d’antan ?
Au lieu de donner 800 millions aux politiciens qui viennent embêter le football, il faut le donner aux formateurs. Qu’on crée une caisse pour aider les clubs. Il y a plein d’argent qu’on distribue à gauche et à droite, qu’ils en donnent au football. Il faut construire des terrains. A part l’Asec qui en a un, le reste s’entraîne dans la rue. Parfois sur des terrains empruntés ici et là à des sociétés. Si cette société fait un terrain, l’Etat de Côte d’Ivoire peut en faire dix. Les joueurs n’ont pas d’équipement. Un joueur qui ne joue pas devant un public n’a pas le courage de se donner. Même l’Asec qui forme a du mal aujourd’hui. Avant la crise l’Asec a sorti 10 à 15 joueurs. Il faut former les formateurs ou les recycler. Qu’on arrête de nous faire rêver avec le Mondial. Des présidents de clubs garantissent leur maison pour donner à manger aux joueurs. Ils font du social. Savez-vous combien l’Asec dépense-t-elle pour sauver des jeunes gens de la prison ? Qu’on arrête de nous emmerder. Que les politiciens s’éloignent du football. On leur a demandé la paix qu’ils nous la ramènent.
Interview réalisée par Tibet Kipré
L’actualité brûlante c’est le choix de l’entraîneur des Eléphants. A votre avis, quel technicien sied à la sélection nationale dans la situation actuelle?
Pour moi, on n’a pas vraiment un problème d’entraîneur. Le vrai problème c’est l’équilibre du groupe. Trouver un entraîneur maintenant pour la Coupe du monde n’a aucune importance. La Coupe du monde, c’est trois matches. On connait déjà le résultat. On ne pourra pas passer aussi facilement le Portugal et le Brésil. Donc il faut déjà préparer la CAN 2012.
Qu’entendez-vous par équilibrer le groupe ?
Il faut vraiment parler aux joueurs. Essayer de créer une amitié entre eux, une cohésion, c’est ce qui est plus important.
C’est dans ce sens que Troussier est beaucoup évoqué dans le milieu…dans la même veine, il aurait élaboré un programme jusqu’en 2014…
C’est du lobbying. Il faut laisser Anouma prendre une décision tranquille. Il ne sert à rien de l’influencer. Il faut un rassembleur autour de l’équipe. Faire revenir un monsieur comme Sidi Diallo que les joueurs respectaient vraiment pour recréer une bonne ambiance. Je n’ai pas le programme de Troussier, mais on en parle un peu trop. Soyons correcte, il a quel palmarès ? Même à l’Asec il n’a pas remporté de trophée majeur. Qu’on arrête. On veut plutôt des gens autour de l’équipe qui peuvent motiver les gamins. Même avec un mauvais entraîneur, s’ils sont motivés et qu’ils retrouvent l’ambiance, on peut aller loin. Il faut que les Drogba, Kader, Kolo puissent recommencer à rigoler ensemble après un match. Comme le faisaient Gouamené Alain, Gadji Céli et autres qui se rendaient visite. En équipe nationale aujourd’hui, certains ne savent même pas où habitent leurs coéquipiers. Ils n’ont même leurs numéros de téléphones. Il faut recréer l’ambiance comme avant. Comme la bande d’amis qui a remporté la Coupe en 1992. Aujourd’hui on a 22 multimillionnaires voire milliardaires difficiles à gérer. Il faut quelqu’un pour leur dire qu’on se moque de leurs milliards. Ils doivent manger ensemble, se pardonner des choses sur le terrain. Un remplaçant doit soutenir ceux qui sont sur le terrain, c’est ce qu’on recherche. Quel entraîneur ces joueurs n’ont jamais eu ?
Guus était-il un bon choix ?
Non, on n’a pas besoin d’un mercenaire, mais d’un entraîneur qui puisse travailler sur le long terme. Si tous les deux ans on doit en changer, on n’obtiendra rien.
Que faut-il pour recréer cette cohésion qui fait tant défaut ?
C’est un problème qui existe. La situation que vit notre équipe nationale est la même que connait la Côte d’Ivoire. Il y a même des hommes politiques qui appellent les joueurs la veille des matches. Ils veulent faire de la récupération. Ils le savent. Je vous le dis parce que je sais. Et comme ici on ne veut jamais voir les choses en face, on déplace toujours les problèmes. Vahid n’a perdu qu’un seul match, donc ce n’est pas un problème d’entraîneur. Un tel est Dioula ou Bété, les hommes politiques savent ce qu’ils disent aux joueurs.
Vous faites des affirmations graves…
Je persiste et je signe. Que les hommes politiques s’éloignent du football. Et de l’équipe nationale. Qu’ils cessent d’appeler les joueurs la nuit. Qu’ils cessent de les inviter chez eux nuitamment quand ils sont à Abidjan pour leur dire des choses. Je suis l’employé des joueurs, donc je sais de quoi je parle. Qu’ils laissent mes patrons tranquilles.
Ok ! Parlons du football local. Que pensez-vous de l’entrée des présidents de clubs à la Ligue professionnelle ?
Il n’est jamais trop tard pour bien faire. Ce n’était pas normal que les acteurs principaux du football ne travaillent pas avec celui qu’ils ont mandaté. C’est exactement ce qui se passe dans le monde politique africain. On vote un président, après on s’en fiche. Pour moi ils sont les bienvenus.
Les observateurs estiment que ce sont les 4 milliards du Mondial qui les attirent…
Pourquoi voit-on l’argent partout ? Et si c’est le cas, où est le problème ? S’ils peuvent utiliser cet argent pour le développement du football c’est bien ! De toutes les façons, ce sont les clubs qui donnent les joueurs à l’équipe nationale. S’ils exigent leur quote part pour gérer leurs clubs, il n’y a pas de mal à ça. Ils prennent ce qui leur appartient. Ma crainte, c’est qu’à un moment donné, la politique s’ingère dans le foot. On a l’impression qu’on ne peut pas avancer ici sans les hommes politiques. Que les hommes politiques s’éloignent des footballeurs ivoiriens. On leur donne déjà suffisamment d’argent pour nous trouver des idées et diriger le pays. Les partis politiques sont financés à hauteur 800 millions l’an, donc ils ont suffisamment d’argent. Les présidents de clubs sont en train de s’unir pour réorganiser notre football, j’espère que les politiques ne vont pas encore les emmerder.
Pour vous, que faut-il pour réaliser une bonne Coupe du monde et faire une bonne projection sur la CAN 2012 ?
Le Mondial ce n’est pas la fin du monde. Il faut plutôt se poser la question de savoir pourquoi notre football est en train de mourir. L’année dernière on n’avait aucune équipe en Ligue des Champions ni en Coupe de la Confédération. Le Mali a gagné cette compétition. Or c’était notre affaire. C’est ça le vrai problème du football ivoirien. Ce n’est pas le Mondial. Reprenons la formation. Ne faisons pas du Mondial et de la CAN une fixation. On a vu le fruit de la formation avec Jean Marc Guillou. Essayons de trouver les moyens pour restructurer les clubs. Donnons les moyens aux formateurs pour nous sortir de bons footballeurs. Pour faire des enfants de la rue des footballeurs.
Que faut-il faire pour redonner au football son lustre d’antan ?
Au lieu de donner 800 millions aux politiciens qui viennent embêter le football, il faut le donner aux formateurs. Qu’on crée une caisse pour aider les clubs. Il y a plein d’argent qu’on distribue à gauche et à droite, qu’ils en donnent au football. Il faut construire des terrains. A part l’Asec qui en a un, le reste s’entraîne dans la rue. Parfois sur des terrains empruntés ici et là à des sociétés. Si cette société fait un terrain, l’Etat de Côte d’Ivoire peut en faire dix. Les joueurs n’ont pas d’équipement. Un joueur qui ne joue pas devant un public n’a pas le courage de se donner. Même l’Asec qui forme a du mal aujourd’hui. Avant la crise l’Asec a sorti 10 à 15 joueurs. Il faut former les formateurs ou les recycler. Qu’on arrête de nous faire rêver avec le Mondial. Des présidents de clubs garantissent leur maison pour donner à manger aux joueurs. Ils font du social. Savez-vous combien l’Asec dépense-t-elle pour sauver des jeunes gens de la prison ? Qu’on arrête de nous emmerder. Que les politiciens s’éloignent du football. On leur a demandé la paix qu’ils nous la ramènent.
Interview réalisée par Tibet Kipré