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Politique Publié le mardi 4 mai 2010 | Le Patriote

Marche du 15 mai, Assemblées de la BAD, date des élections, CEI, changement de régime politique, menaces de Tagro : Le RJDP crache du feu sur Gbagbo

Questions-Réponses

charles Sanga (modérateur) : Quel est l’objectif réel de la marche du 15 mai prochain?

Karamoko Yayoro: L’objectif, c’est d’arracher les élections à Laurent Gbagbo. Nous marchons pour avoir les dates de la publication de la liste électorale définitive, de la distribution de la carte d’électeur, et des cartes d’identité. Ensuite, pour avoir la démocratie et la liberté. Nous marchons pour que les questions sociales soient réglées par un pouvoir légal et légitime. Parce que cela fait 10 ans que Laurent Gbagbo est au pouvoir, mais contrairement aux autres, pour lui, gouverner ce n’est pas prévoir. Il semblerait que la CIE lui ait adressé une correspondance, il y a de cela 3 ans pour lui dire que si rien n’est fait, la Côte d’Ivoire va connaître un grave problème de distribution et de fourniture d’électricité. Voilà, nous sommes en plein dans le délestage et le manque d’eau. Il a été surpris parce qu’il avait oublié que gouverner, c’est prévoir. Il nous avançait toujours l’argument de l’attaque du pays par des étrangers. Mais aujourd’hui, ils sont rattrapés par les faits. C’est pour cela, nous avons dit que comme ils ne savent pas prévoir, ils ne savent pas gouverner, il faut les renvoyer là où ils savent mieux s’exprimer, c’est-à-dire, dans l’opposition. Gbagbo nous disait que l’opposition, c’est le gouvernement de la parole. Nous allons l’y envoyer à partir du 15 mai. Ce sera une marche pacifique qui va aboutir à la place de la République.

Stéphane Beyniouah (Le Jour Plus)

Il se trouve qu’en même temps, il y a un certain nombre de vos partisans en tournée qui disent que vous resterez dans la rue jusqu’à ce que Gbagbo parte du pouvoir. Et vous n’avez pas encore recadré le débat. Alors, est ce que vous n’êtes pas en train de donner les armes d’une éventuelle répression au parti au pouvoir, parce que vous seriez en train de créer une certaine insurrection?

Marie- Chantale Obindé (Fraternité Matin)

Le ministre de l’Intérieur vous a demandé de reporter la marche du 15 mai. Qu’avez-vous décidé? Vous la maintenez, ou vous la reportez?

KKB: C’est une marche nationale. Comme vous devez le savoir, elle se déroule sur l’ensemble du territoire national. C’est-à-dire qu’à Gagnoa, Korhogo, Guiglo et partout, dans tous les hameaux de Côte d’ivoire, les gens marcheront sur place. Ils ne viendront pas à Abidjan. Il faut que le peuple de Côte d’Ivoire dise, le 15 mai, on n’est pas content. On a besoin d’avoir nos cartes d’identité, nos cartes d’électeurs, on a besoin d’avoir une date des élections, ainsi que la publication de la liste électorale définitive. La Côte d’Ivoire ne peut pas courir indéfiniment après des élections. Non loin de nous, Abdoulaye Wade nous a donné une belle leçon de transition politique. Le ciel n’est pas tombé sur le Sénégal. Le Sénégal se développe. Le Mali, le Burkina Faso se développent. Le Ghana tout près de nous, vient de se donner des élections claires et propres. Le pouvoir a perdu et la vie continue au Ghana. Pourquoi voulez-vous qu’un pays comme la Côte d’Ivoire, qui est abonné aux élections depuis belle lurette, soit à poursuivre une élection qui ne viendra jamais. Nous devons nous battre. Nous appartenons tous ici, à une même génération. C’est de notre avenir qu’il s’agit. Soyons-en certains. Depuis 15 ans, nous nous rendons compte que ce n’est ni à Bédié, ni à Ouattara, ni à Gbagbo qu’on fait du tort. Ils ont déjà vécu. Savez-vous que tous ceux qui avaient 40 ans en 2000, en ont aujourd’hui 50? Est-ce que vous savez que l’âge de la retraite en Côte d’Ivoire, c’est 55 ans et que beaucoup risquent d’aller à la retraite sans jamais avoir eu à travailler ? Est-ce que dans les rédactions, on est content des conditions dans lesquelles on travaille? Est-ce qu’on est content de la façon dont on vit aujourd’hui? S’il vous plait, ce n’est pas une fatalité. Il faut qu’on se réveille et qu’on s’assume pour dire ‘’voici ce que je veux’’. La marche, elle est nationale. Mais elle s’étend aussi sur toutes les capitales européennes, américaines, partout où se trouve le RHDP. Le 15 mai au matin, il faut qu’on nous appelle pour nous dire qu’aux Etats-Unis, les Ivoiriens marchent. En France, en Angleterre, partout dans le monde, il faut que les Ivoiriens marchent. Nous ne marchons pas pour créer l’insurrection. Nous l’avons dit et il faut le noter. Hier, (ndlr jeudi dernier) nous étions avec la Police nationale. La Police, elle-même a reconnu que c’est la première fois, en 38 ans de carrière, que les marcheurs marchent en Côte d’Ivoire, et qu’après la marche, ils viennent pour féliciter la Police. Parce qu’il y a une sorte de complicité entre les policiers et le RJDP. Souvenez-vous de la première marche sur la RTI. Tant qu’il n’y aura personne pour tirer sur les marcheurs aux mains nues, nous serons toujours les vrais patriotes. Nous ne voulons qu’une seule chose : la démocratie. Et nous n’avons jamais cassé. Il est clair que si Gbagbo ne peut pas nous donner nos cartes nationales d’identité, nos cartes d’électeur, si on ne peut pas avoir de lisibilité sur notre avenir, on ne doit pas croiser les bras pour dire que c’est une fatalité. Alors, nous ne condamnons pas ceux qui pensent que quand ils sortent, ils ne rentrent plus. Ils veulent trouver la solution à leurs problèmes. Ils sont fatigués par le poids de la misère. Oui, nous le vivons tous, à divers niveaux, de diverses façons.

Diomandé Mamadou Noël : En ce qui concerne le report de la marche du 15 mai, nous sommes allés rencontrer le ministre de l’Intérieur, à sa demande. Et, il était louable pour nous, en tant jeunes bien éduqués, de l’écouter. Il nous a fait une proposition. Ce n’était pas de notre devoir de lui dire que la marche était reportée ou pas. Ce n’est pas avec lui que nous avons décidé de marcher. La marche est maintenue. Il n’est pas question qu’on revienne en arrière. Il s’agit de notre avenir. Comme l’a dit le président KKB, partout, le 15 mai doit sonner la mobilisation parfaite pour faire barrage à une dictature qu’on n’arrive pas à cerner. Parce que chaque jour, elle change de couleur.

Charles Sanga : Que répondez-vous à ceux qui pensent que vous voulez empêcher la tenue des Assemblées annuelles de la BAD à Abidjan?

Karamoko Yayoro: Ce sont de faux alibis pour réprimer ou avoir une attitude de répression par rapport à notre manifestation. Quand on programmait notre marche, on n’avait pas encore annoncé les Assemblées annuelles de la BAD. Donc pour nous, il ne s’agit pas d’aller contre la BAD. Parce que nous savons les enjeux. Nous avons dit au ministre de l’Intérieur, d’imaginer un instant un schéma surréaliste où lors des Assemblées annuelles de la BAD, tous les Ivoiriens sont contents. Ou alors ils font semblant de l’être ou on leur impose de l’être. Et les délégations ont le séjour le plus beau. Et à partir du 1er juin, c’est le chaos ici en Côte d’Ivoire. Qu’est-ce qu’on aura gagné? Devons-nous pratiquer la politique de l’autruche juste pour que les Assemblées annuelles de la BAD se déroulent? Ou alors, créer les conditions pour que la BAD puisse avoir un climat serein pour s’installer en Côte d’Ivoire? Pour nous, ce que nous faisons, c’est pour que la BAD se réinstalle définitivement en Côte d’Ivoire. Et c’est pourquoi, nous voulons un pouvoir légal et légitime et des Ivoiriens fiers de leur pouvoir. Nous voulons que le RHDP arrive au pouvoir parce qu’avec lui, l’économie va repartir. Que ferait la BAD dans un pays où l’économie est en pleine décrépitude? Que ferait-elle dans un pays où il n’y a pas d’autorité? Vous savez que le FPI a lancé le mot d’ordre de désobéissance administrative et dans tous les services, il n’y a aucun respect de la hiérarchie. Nous avons une «non-gouvernance» en Côte d’Ivoire. Mais ce n’est pas la première fois que de grandes manifestations vont se tenir dans ce pays et que l’opposition va marcher. Pour que la BAD soit installée ici définitivement, le pouvoir se doit d’encadrer la marche. Si on l’encadre et qu’il n’y a pas d’infiltrations comme à la marche sur la RTI, vous verrez que la BAD sera encore plus rassurée. Mais, si on prend un décret d’interdiction, si on crée une situation de tension autour de la marche, la BAD sera beaucoup plus inquiète, parce qu’on aura fait du faux.

KKB: Je voudrais apporter un additif et faire quelques témoignages. Vous savez que l’histoire est un témoignage. Et la vérité est belle, lorsque qu’elle est nue. Yayoro a déjà suffisamment élucidé la question sur la BAD. Mais celui-là même qui demande le report de la marche parce qu’Abidjan va abriter les Assemblées annuelles de la BAD, dans un passé récent, on a vu ce qu’il a fait. Le Pape Jean Paul II venait ici en Côte d’Ivoire à la demande du Président Félix Houphouët-Boigny pour inaugurer la Basilique que Gbagbo brandit aujourd’hui avec beaucoup de fierté à la face du monde, lui qui bâtit Yamoussoukro avec l’argent du pétrole. Le Président avait voulu que tous les Ivoiriens, à cette époque, se mettent ensemble pour accueillir le Pape Jean Paul II dans la pure tradition ivoirienne: c’est-à-dire dans la ferveur. Laurent Gbagbo et certainement le ministre Tagro qui n’est pas arrivé hier au FPI, ont dit niet à Houphouët, celui à qui il dit qu’il ressemble aujourd’hui. Ils ont marché pour protester contre l’arrivée du Pape. Ils ont traité Houphouët de voleur et le Pape Jean Paul II, de receleur. Ensuite en 1998, Duncan était Premier ministre. Investir en Côte d’Ivoire (ICI) tenait son Assemblée à l’hôtel Ivoire pour parler des opportunités d’investir dans le pays. C’étaient les mêmes circonstances. Le gouvernement, à l’époque, avait souhaité qu’on ne créée pas la chienlit. Gbagbo s’est entêté. Il a marché. Aujourd’hui, la BAD arrive, voilà le prétexte tout trouvé. Mais nous voulons que la BAD arrive en Côte d’Ivoire définitivement. Or pour qu’il en soit ainsi, il n’y a qu’une seule condition à remplir: la paix. La paix dans la durée. Or la paix en Côte d’Ivoire doit découler des élections, comme nous le savons tous. Donc la priorité pour nous, c’est la tenue des élections. Nous voulons la date des élections. En allant signer l’accord de Ouagadougou, on a dit qu’il allait être appliqué parce que c’est un accord signé par les Ivoiriens eux-mêmes, c’est-à-dire les ex-belligérants. On nous avait promis 10 mois pour son application. Nous sommes à plus de 40 mois. Sans qu’on ne voie le point du tunnel. Et vous croyez que cela va continuer ainsi? Nous voulons la date des élections, la liste électorale définitive, que le débat sur la liste électorale blanche soit clos. Est-ce que ce n’est pas si clair? En quelle langue on doit dire tout cela?

Yao Kouadio Séraphin: Je voudrais dire que la BAD est une institution crédible. Et elle avait cru que les institutions ivoiriennes étaient crédibles. En fixant la date de ses Assemblées annuelles à Abidjan, les 27, 28 et 29 mai 2010, elle croyait qu’il y aurait des élections en Côte d’Ivoire. Et donc, c’est par rapport aux promesses faites par l’Etat de Côte d’Ivoire que la BAD a choisi cette date. Et donc pour nous, le gouvernement devait tirer des leçons de ce qu’ils ont échoué à organiser les élections. C’est donc une belle occasion pour nous de montrer que le peuple de Côte d’Ivoire est décidé à prendre son destin en main. Et le 15 mai, nous allons marcher et le ciel ne tombera pas sur la Côte d’Ivoire. Nous allons marcher parce que, lorsque nous avons rencontré le ministre Tagro, il nous a fait une proposition indécente. Parce qu’il met dans la même balance les élections et les Assemblées annuelles de la BAD. Ce qui veut dire que le combat que nous avons mené jusqu’à ce qu’on arrive à ce niveau-là, n’est pas considéré. Parce que pour lui, il s’agit de faire plaisir à la BAD. Et qu’après le départ de la BAD, nous pouvons marcher quand nous voudrions, comment nous voudrions et où nous voudrions. Ce qui veut dire que nous n’aurons pour profession que les marches. Nous disons non et non. Nous allons marcher, parce qu’au même moment où on nous demande de reporter notre marche du 15 mai, le FPI a décidé de faire son défilé tout en sachant que la BAD doit venir. Nous dénonçons cette politique de deux poids, deux mesures. Nous aussi, le 15 mai, nous allons faire notre défilé. Et tout ce que nous demandons, c’est que nos militants soient mobilisés pour que la marche du 15 mai soit une fête totale.

Charles Sanga:
Vous aviez promis au cours de votre entretien au ministre de l’Intérieur, de rencontrer vos bases avant de prendre toute décision. Vous soutenez le maintien de la marche. Est-ce la décision de vos bases?

Karamoko Yayoro: Effectivement, nous venons d’une tournéeNous sommes porteurs de message résultant d’une Assemblée générale. Mais nous allons les rencontrer pour leur dire qu’il n’est pas question de reporter la marche du 15. Nous allons, la semaine prochaine, rencontrer notre Direction, le directoire du RHDP, et à partir de là, la décision définitive sera donnée. Mais, au niveau des jeunes, il faut retenir que la marche est maintenue. Parce qu’elle ne peut qu’être maintenue et tout le monde le sait. Même au niveau du FPI. Et la base est d’accord avec nous. Vous n’entendrez pas un autre son de cloche. Dans tous les grands pays du monde, il y a des manifestations alors que de grands sommets et d’importantes réunions et assemblées se tiennent. Mais chacun joue son rôle. Ceux qui ne sont pas contents, marchent et la polie les encadre. J’ai appris que des gens sont en train de s’agiter, que les milices s’entraînent. Ce n’est pas cela notre problème. Nous sommes allés voir la Police, l’Armée, la Gendarmerie. On ne croit pas que quelqu’un viendra perturber nos militants. On ne le souhaite pas. On ne le veut pas. Parce qu’il faut que dans ce pays, les gens sachent que ce ne sont pas eux la force publique. Il y a des personnes qui sont payées pour cela. Mais dès qu’on parle de faire une manifestation, il se trouve des gens qui veulent faire barrage à cela. Tant que nous n’allons pas nous battre pour que ce que genre de réflexe s’arrête, il n’y aura jamais la démocratie dans le pays. Et nous avons le devoir de nous battre pour que cela s’arrête. De même quand le FPI marche à Yopougon, il n’est pas perturbé, de même quand nous marchons, nous souhaitons qu’on ne nous perturbe pas. Sinon nous pouvions perturber leur défilé à Yopougon. Parce que, contrairement à ce qu’ils croient, Yopougon n’est pas leur base. On l’a démontré, au RDR, lors du meeting des jeunes avec le Docteur Alassane Dramane Ouattara à FICGAYO. Et je parie que, lorsque les quatre présidents seront à Yopougon, deux jours avant, la commune sera bloquée pour un meeting qui va se tenir en un jour. Il n’y a pas à s’inquiéter. Dites au FPI de ne pas avoir peur. Ce n’est pas la première fois que ça se passe. Ce ne sera pas la dernière fois.

K. Marras D.
(L’Expression):
Ma préoccupation est relative à la destination de la marche, qui est la Place de la République. Or cette place est non loin du Palais présidentiel. Ne craignez-vous pas de débordement à ce niveau?

Stéphane Beyniouah
(Le jour plus):
Vous avez eu, le jeudi dernier, une rencontre avec le Directeur général de la Police nationale. Peut-on savoir la substance de ce que vous vous êtes dit? Parce que nous comprenons difficilement que le ministre de l’Intérieur en charge de la Sécurité s’oppose à la tenue de la marche et que vous décidiez de vous tourner vers le DG de la Police pour mettre en place certaines dispositions sécuritaires. N’est-ce pas là une mise en scène?

Moussa Komara
(Presse en ligne):
Ma question concerne la sécurité. Apparemment, vous êtes prêts à braver tous les obstacles pour la tenue de cette marche. Nous savons tous qu’il y a eu beaucoup de morts au cours des précédentes manifestations du RHDP ou de chacun des partis politiques membres de cette alliance. Quelles sont les garanties sécuritaires que vous prendrez pour cette marche?

Karamoko Yayoro: Je voudrais d’abord dire nous irons manifester jusqu’à la place de la République et il n’y aura rien. Ce n’est pas la première fois qu’on marche en Côte d’Ivoire pour aller à la place de la République. Avec le FPI nous avons marché bien de fois pour aller à cette place. Non! Et arrêtons de se faire peur. Nous sommes quand même des Ivoiriens. Nous l’avons dit à l’armée et à la police. La Côte d’Ivoire, c’est notre seul pays. Nous ne pouvons rien lui faire. Pourquoi veut-on que nous, nous ayons intérêt à voir disparaître notre pays et que eux, ils aient plus d’intérêt à le protéger ? Non! Tous, nous aimons la Côte d’Ivoire et nous la protégeons. Prenez Laurent Gbagbo, de 1990 jusqu’à ce qu’il accède au pouvoir. On disait qu’il dirige un parti violent. Aujourd’hui, c’est ce parti qui fait la propagande de la paix. Non! Je pense qu’il faut recentrer le débat en Côte d’Ivoire. La question est toute simple. Est-il normal que nous marchions le 15 mai pour réclamer les élections? C’est cela la question. On nous a dit que l’élection présidentielle se tiendra en fin avril-début mai. Nous, nous attendons jusqu’au 15 mai avant de marcher. Sommes-nous fondés de le faire? Avons-nous raison? Ce sont là les questions. Si après cela, il y a autre chose, ce sont eux qui l’auront voulu. Celui qui ne sait pas gouverner doit dégager. Pour le moment, ce que nous pouvons dire, c’est qu’il s’agit de la dernière marche d’avertissement. Après, je suis sûr que nous n’allons plus lancer de mot d’ordre parce que le peuple ivoirien ne répondra plus de rien. Le peuple a faim. Récemment à la Sorbonne ( espace de propagande pro-Gbgabo dans la commune du Plateau, ndlr), il y a quelqu’un qui se plaignait parce que son fils est mort au CHU à cause du délestage. Quand on coupe l’électricité ou qu’on augmente le prix du sac de riz, ce n’est pas seulement pour le militant du RHDP ou pour le militant du FPI. Quand la facture de courant monte de façon vertigineuse, ce n’est pas pour une partie de la population. C’est pour tout le monde. C’est pourquoi, nous voulons qu’on recentre le débat et que les gens sachent que la marche n’est pas faite pour qu’il y ait débordement.
KKB: Nous avions adressé une demande d’audience au DG de la Police, il y a de cela quelques mois. Mais, il n’avait pas eu le temps de nous recevoir. Ce n’est donc que le jeudi dernier que son calendrier lui a permis de nous rencontrer. Et au moment où nous le rencontrions, il y a, à l’ordre du jour, la marche. Evidemment, nous en avons parlé. Il a estimé que dès lors que nous avons rencontré son patron qui est le ministre de l’Intérieur, il n’y avait plus de débat entre nous. Mais, comme l’a dit Yayoro, nous entendons entretenir des relations de confiance, de responsabilité et de respect mutuel entre nos Forces de l’ordre et nous. Parce que, nous n’avons qu’une seule Armée, une seule Police et une seule Gendarmerie. Et, je me plais aussi à leur dire chaque fois, que les armes qu’ils détiennent, sont le fruit des sacrifices des citoyens ivoiriens. C’est donc l’argent du contribuable qui achète les armes pour protéger la société.
Leur mission n’est pas de tirer sur des citoyens qui manifestent. Aucune loi n’empêche les marches en Côte d’Ivoire. Il faut juste une information pour que la marche soit encadrée par les Forces de l’ordre. Nous pouvons donc faire notre marche. A ce niveau, la démocratie est en jeu. Faisons en sorte que par la conjugaison de notre savoir-faire, nous démontrions à la face du monde que les Ivoiriens ont atteint un niveau de maturité, que nous pouvons nous prendre en charge. Nous, nous ne sommes pas contre les policiers. Et de toutes les façons, pourquoi veut-on que nous soyons contre les policiers? Quelles sont aujourd’hui les raisons pour lesquelles on tue nos policiers, nos gendarmes et nos militaires? Aucune raison ne peut justifier le fait que ceux-là meurent pour leur pays. On ne peut pas continuer à créer les conditions pour que nos braves soldats meurent. Le combat que nous menons est pour libérer tous les citoyens. Y compris, nos policiers, nos gendarmes et nos militaires. Notre police, notre gendarmerie et notre armée ont aussi droit à un minimum de vie et de respect. On ne peut pas l’utiliser de cette façon-là. C’est ce que nous refusons. On ne peut pas les livrer à un tel sort en se contentant de dire qu’ils ont choisi le métier de soldat. Non! Eux aussi ont le droit de mener une vie décente. Ils ne doivent être appelés à aller au front que pour des problèmes majeurs et sérieux. Nous sommes donc allés voir le DG de la police pour lui dire que nous marchons. Dans le passé, avant que le FPI n’arrive au pouvoir, on ne dénombrait jamais de mort parmi les marcheurs. Ce sont bien au contraire, des policiers qui s’en sortaient parfois avec des blessures. Est-ce que je dois dire que maintenant c’est parce Mangou est devenu chef d’Etat major que chaque fois qu’il y a marche, ce sont des morts qu’on compte? Pourtant Mangou nous a dit qu’il a 38 ans de carrière militaire. Diantre, pourquoi quand il avait seulement 15 ans de carrière, alors qu’il n’avait pas encore atteint la maturité professionnelle, il ne tuait pas? Et que c’est maintenant à 38 ans de carrière que chaque fois qu’il y a une manifestation, on doit tuer. Pourquoi depuis qu’il est devenu président, Gbagbo qui fête la liberté, fait tuer des Ivoiriens? Pourquoi a-t-on tué le journaliste Jean-Hélène? Et pourquoi Guy-André Kieffer disparaît? Pourquoi il n’y a jamais de suite aux enquêtes sur les crimes? Et pourquoi pendant qu’on fête la liberté, on empêche les marches? Pourquoi chaque fois nous devons mourir, alors que le droit à la vie est le premier droit du citoyen ? C’est ce droit que nous voulons garantir. Que nul ne meurt pour ses opinions politiques. Que chacun de nous meurt de sa belle mort. Pourquoi en Afrique et singulièrement en Côte d’Ivoire, la politique doit rimer avec la mort?
Pourquoi lorsque l’on décide de faire la politique, c’est risquer sa vie? On fait la politique pour la vie. Et c’est ce droit à la vie que tout pouvoir doit garantir. Gbagbo doit garantir nos vies. Lui qui a tant marché dans ce pays. Lui qui est allé jusqu’à baptiser ses propres ‘’enfants’’ de «ministres de la rue» et ceux-ci en sont fiers. Mais c’est bien parce qu’ils marchent sans trouver la mort. Gbagbo, tu es devenu président pardon, accepte donc que d’autres enfants de la Côte d’Ivoire marchent sans qu’ils ne soient inquiétés, sans qu’ils ne meurent.

Kouadio Yao Séraphin: Quelles garanties sécuritaires nous allons donner aux militants pour cette marche? Je voudrais dire que la première garantie, c’est d’abord la mobilisation des militants. Vous avez vu la marche du 26 janvier. Nous avons décidé de faire une marche pacifique. Vous avez vu aussi, sur les antennes de la télévision, les menaces de la Police avant la marche sur la RTI: «Si on voit une seule arme, ne serait-ce que blanche sur un manifestant, la marche sera considérée comme armée, donc illégale». Et le 26 janvier, cette même police envoie des gens armées pour infiltrer notre marche. Cela s’appelle tout simplement de la provocation. Mais la vigilance de nos militants a permis de démasquer ces hommes armés. Par notre vigilance, nous avons donc réussi à désamorcer cette bombe. Et ce sera la même chose le 15 mai prochain. Nos militants vont mettre en place un système de sécurité, de telle sorte que personne n’aura le courage de venir exécuter quelque chose d’anormal. Si quelqu’un vient à la marche, c’est qu’il vient pour réclamer les mêmes choses que nous. Cette marche va donc se faire et elle sera faite de façon pacifique. Nous savons que les Ivoiriens souffrent. Les populations qui vont donc sortir ne se laisseront intimider par quoique ce soit. Que cela soit clair. Les Ivoiriens sont fatigués. Ils vont donc marcher pour exprimer leur indignation.

Charles Sanga:
Le président KKB a annoncé récemment à Korhogo que les présidents Bédié, Ouattara, Mabri et Anaky seront de la marche. Confirme-t-il cette information?
Ensuite, nous avons vu ce qui s’est passé en mars 2004. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, ne pensez-vous pas que les gens sortiront encore pour se faire tuer?

Brahima Doumbia
(RTI, 1ère chaîne):
Ma question s’adresse au président KKB. Faisons un peu de fiction. Si un décret est pris entre-temps par le chef de l’Etat pour interdire la marche. Qu’allez-vous faire?

Jean-Claude Coulibaly
(Le Patriote):
Vous avez dit que l’objectif principal de votre marche est d’arracher les élections à Laurent Gbagbo. Quand on sait qu’à ce niveau, l’homme a fait tant de promesses, ne pensez-vous pas qu’il peut encore vous donner une date des élections rien que pour vous faire languir. Si c’était le cas, quelle serait votre réaction?
KB: Ecoutez, la seule date que nous retiendrons c’est celle qui sera fixée lorsque chaque Ivoirien aura sa carte d’identité et sa carte d’électeur entre ses mains. C’est-à-dire, le jour où Gbagbo aura donné ces pièces-là à chaque Ivoirien. Là, nous pourrons croire que nous sommes au bout du tunnel. Donc, personne ne peut nous distraire avec une date du jour au lendemain. Les dates, nous en avons eues tellement. Nous disons donc qu’il y a des éléments précis auxquels nous devons nous atteler. Quand il doit pleuvoir, l’on doit au moins sentir le tonnerre. Quand le ciel s’assombrit, on comprend que cela annonce la pluie. Alors, qu’est-ce qui va annoncer les élections en Côte d’Ivoire? C’est bien la distribution des cartes d’identité et des cartes d’électeurs. Une fois que nous les avons, nous pourrons maintenant apprécier. On ne peut donc pas venir nous prendre pour des gamins, en nous demandant d’arrêter notre marche parce que l’élection présidentielle est fixée à telle date. Nous disons non! On nous a dit qu’elle aura lieu en 2010. Mais nous avons presque fait la moitié de l’année et il n’y a pas d’élections. Nous entamons bientôt l’autre moitié et il n’y a toujours pas de perspective. Je vous invite donc à tirer la conclusion avec moi que si rien n’est fait, on n’ira pas aux élections. Parce que ce n’est pas dans l’intention de Gbagbo de nous amener à des élections. C’est pourquoi MM. Bédié, Ouattara, Mabri et Anaky vont être au devant de la marche du 15 mai. Je le confirme encore une fois. Ils seront là, parce que c’est pour eux que nous le faisons.

Karamoko Yayoro: Moi je ne crois pas que Gbagbo puisse prendre un décret interdisant la marche. Il a toujours clamé qu’il a lutté pendant 30 ans pour les libertés. Et je crois que là-dessus, il a même écrit un livre intitulé: «Agir pour les libertés». Quelqu’un qui agit pour les libertés ne peut pas, en principe, être le bourreau des libertés. Pour nous, il ne peut donc pas y avoir de décret interdisant notre marche. On nous a demandé si les événements de mars 2004 ne vont pas se répéter. Je ne le pense pas. Le contexte a changé. Et nous avons entrepris les démarches pour que l’impunité s’arrête en Côte d’Ivoire. Si l’injustice crée le désordre, l’impunité est mère de toutes les dérives. Il n’y aura donc plus d’impunité. C’est pourquoi, nous disons à tous ceux qui s’adonnent encore à ce petit jeu, qu’ils vont payer un jour. D’abord, la justice des hommes va s’occuper d’eux. Ensuite avec la justice de Dieu. On verra bien le jour du jugement dernier. Mais en attendant, comme je le disais, la justice des hommes va s’occuper d’eux. Pour ce qui est passé, nous avons déjà porté plainte à la Cour pénale internationale. Alors, puisqu’ils sont actuellement dans l’arrogance et l’insolence du pouvoir, ils se prennent pour des intouchables. Mais il faut qu’ils sachent qu’ils sont des hommes et que leur position sociale est momentanée. Et que tôt ou tard, ils vont répondre de leurs actes. C’est à ce seul prix que nous pourrons arracher et consolider la démocratie en Côte d’ivoire. Nous-mêmes RHDP, il faut que nous nous disions que si demain nous arrivons au pouvoir et que nous faisons les mêmes choses, nous serons aussi face à la justice nationale et internationale. C’est pour cela que nous demandons à notre justice de se libérer. Elle ne doit pas être en marge à la marche mondiale, qui est celle du renforcement des droits du citoyen. Le FPI est en train de fêter la fête de la liberté, que j’appelle la fête de libertinage. Quelqu’un qui dit qu’il fête la liberté ne peut donc pas agir contre les libertés. C’est pourquoi nous disons qu’au lieu de faire des éditions spéciales à la télévision pour un seul individu, nous leur demandons d’organiser des débats. Quand on va mener ces débats, les gens se rendront compte du fait que le FPI est pourri et qu’en réalité, le ver a déjà fini de le détruire. Il reste juste que le ver pointe le nez et on verra que ce fruit qui est si beau n’a plus de substance. Qu’il ne reste plus qu’un coup de vent pour qu’il tombe. Et nous devons tout faire pour que la parenthèse honteuse du FPI s’arrête et que ce parti et son leader Laurent Gbagbo quittent le pouvoir. Les sondages avec SOFRES qu’ils brandissent sont faits ici, à la Sorbonne au Plateau. J’ai longtemps réfléchi en me demandant où est-ce qu’ils faisaient leurs sondages. Finalement j’ai découvert qu’ils les faisaient à la Sorbonne. Parce qu’il n’y a que dans ce lieu qu’ils peuvent gagner. Sinon ailleurs, même dans les villages, ils ne peuvent pas gagner. Cela est impossible. Gbagbo a donc compris que la Sorbonne, avec la complicité de SOFRES, l’a blagué.

Diomandé Mamadou: Au cas où Laurent Gbagbo voudrait interdire la marche, nous lui disons ceci: nul ne pourra annuler cette marche. Nul ne pourra nous imposer un quelconque report de cette marche. Au cas où Gbagbo décidait de l’interdire, ceux à qui il demandera de nous réprimer sauront que c’est pour eux que nous nous battons. Quand les prix des denrées augmentent sur le marché, c’est pour tout le monde. Il n’y a pas de prix FPI ou prix RHDP. Au jour d’aujourd’hui, les mêmes policiers ou gendarmes qui sont là n’ont pas de pièces d’identité. Nous nous battons donc pour qu’ils aient leurs pièces d’identité. En venant donc nous réprimer, ils se poseront certainement une question: «ceux-là travaillent pour qui?» Et là, nous leur disons que nous travaillons pour le peuple ivoirien. Ils vont donc réfléchir plusieurs fois. Avant de se retourner vers Laurent Gbagbo pour lui dire: «C’est toi le problème, exécutes ce qu’ils demandent. Si tu ne peux pas, alors va-t-en».

Karamoko Yayoro: Pour la date, si Laurent Gbagbo donne demain une date, nous marchons le 15 mai pour lui dire merci. Et pourquoi pas, l’inviter à notre marche pour qu’on fasse la fête ensemble.

Charles Sanga :
La commission électorale indépendante est composée en majorité par des ex-militants du RHDP. C’est cette commission qui fixe la date des élections. Ne croyez-vous pas que c’est l’opposition elle-même qui bloque le processus ?

Karamoko Yayoro : Je crois qu’on a suffisamment vu la Commission électorale indépendante. Une fois nos militants arrivent à ce niveau, on les met à la disposition de tout le pays. Ils ont été certes mandatés par des partis politiques, mais retenez qu’ils sont au service de la Côte d’Ivoire. Et notre Commission malheureusement n’est pas suffisamment indépendante, parce qu’avant de faire quelque chose il faut d’abord demander l’avis de Gbagbo. Lors de la dernière rencontre à Bobo-Dioulasso, Gbagbo a dit qu’il allait relancer le processus. Ensuite quand il est revenu du Sénégal il a encore dit qu’il va relancer le processus. Donc, en réalité c’est lui qui pilote tout, c’est lui qui bloque tout. Il s’arrange pour créer le blocage. Mais nous allons rencontrer les responsables de la CEI pour leur demander beaucoup plus de responsabilité. Ils doivent savoir qu’il y a des forces politiques qui les soutiennent. Parce que nous les soutenons,
ils se doivent alors de rentrer positivement dans l’histoire de la Côte d’Ivoire. Il faut qu’ils prennent leur responsabilité. Là où ils sont, nous ne les considérons pas comme des militants du RHDP. Nous les voyons comme des Ivoiriens au service de la Côte d’Ivoire. Et tout le monde se doit de les aider pour la réussite de leur mission. Nous ne voyons pas la situation dans l’angle de l’opposition qui bloque, mais plutôt une Institution bloquée par Laurent Gbagbo qui ne veut pas voir les élections.

KKB : Je vais me sentir très à l’aise sur cette question parce que le président de la CEI était anciennement militant du PDCI RDA, parce que dès lors qu’on est à la tête d’une Commission électorale indépendante, on ne peut plus se réclamer d’un parti politique. Nous avons mis Bakayoko à la disposition du peuple de Côte d’Ivoire. Donc il va lui-même être soumis au jugement du peuple de Côte d’Ivoire. Ce n’est plus le PDCI qui va le juger. Je le dis sans ambages, sa crédibilité est en jeu. Nous lui avons fait confiance au sein du PDCI RDA en le proposant d’abord comme ministre des affaires étrangères, ensuite il est arrivé à ce niveau là. Je suis d’accord que président Yayoro dise que c’est Gbagbo qui boque. Mais CEI a un pouvoir que lui confère la Constitution Ivoirienne. Si M. Youssouf Bakayoko est venu à la tête de CEI pour se saborder, pour se mettre à la disposition de Laurent Gbagbo, nous le disons haut et fort, il paiera ça devant le peuple de Côte d’Ivoire. Nous ne comprenons pas le silence dans lequel il se mue. Finalement vous-vous rendez compte que si Gbagbo s’est débarrassé de Mambé, c’est parce qu’il était gênant. Oui Mambé était devenu gênant parce qu’il n’entrait pas dans les scénarii de Laurent Gbagbo. Un président d’une Commission électorale indépendante n’est pas là pour faire plaisir à un camp. Nous disons que les élections doivent nous réconcilier, donc ni le PDCI, ni le RDR n’attendent de coup de pousse d’un président de la CEI. Elle est là pour collecter les résultats des élections des Ivoiriens nous dire qui a gagné. Ce que nous demandons, c’est que la CEI nous amène aux élections. Est-elle capable d’afficher son indépendance pour rassurer les Ivoiriens ? Voilà l’équation. Donc, nous savons que Gbagbo bloque, mais
la CEI fait quoi pour dégager sa responsabilité. Si elle se rend complice par son silence, alors elle sera responsable de ce qui arrivera. Si la nouvelle équipe est incapable alors qu’elle nous le dise. C’est pour tout ça que nous marchons.

Kouadio Yao Séraphin : je voudrais saisir cette occasion pour rendre hommage à Mambé parce que l’histoire nous montre que Mambé est un homme responsable, un homme de droiture et de devoir. Il a pratiquement accompli près de 95% des tâches de la CEI, et c’est parce que nous devrions arriver au point final qui est la constitution de la liste électorale qu’ils ont usé de moyens controversés pour le faire partir. Nous avons estimé qu’au moment où une nouvelle Commission devrait être mise en place, ce serait l’occasion d’achever rapidement les cinq autres pourcent du travail à faire. Malheureusement que constatons-nous ? Depuis près de trois mois, ce sont des visites de courtoisie, c’est la recherche de bénédictions des parents. Ce n’est de ça qu’il est question. On vous a fait président de la CEI pour organiser les élections. Le meilleur pour les parents c’est quand ils seront fiers qu’un de leur fils aura réussi à organiser les élections. La confiance ne s’achète pas au marché. Elle naît des actes que nous posons au quotidien. Et c’est ce qu’on demande à Youssouf Bakayoko de faire. Il faut qu’il agisse rapidement pendant qu’il est encore temps, il faut que les Ivoiriens sachent que ce n’est pas la CEI qui dort, mais que c’est Laurent Gbagbo qui bloque. Mais tant que la CEI demeurera dans ce silence coupable, nous les mettons dans le même bateau. Bakayoko doit montrer qu’il est le président de la Commission électorale Indépendante. Il faut qu’il prenne des décisions courageuses pour relancer le contentieux.
Il doit le faire ! La marche du 15 mai c’est pour tout ça.

Stéphane Beyniouah
(Le Jour Plus):
Nous sommes souvent étonné de voir certains militants du RHDP dire de la CEI avec l’ossature que nous connaissons, qu’elle n’est pas une structure indépendante. Et justement pour désavouer ses propos, le chef de l’Etat en visite récemment à Jacqueville, a dit qu’il n’a pas compétence ou du moins qu’il ne lui revient pas de fixer la date des élections ? La structure compétente est la CEI, il attend que cette structure fixe la date et tous les états-majors se mettent en action. La CEI n’a pas réagi pour dire aux Ivoiriens qu’elle n’est pas indépendante ? Alors, est-ce que vous ne faites pas fausse route en initiant une marche pour réclamer du chef de l’Etat une date des élections ? Ne pensez-vous que c’est la CEI qu’il faut réveiller de son sommeil?

Marie- Chantale Obindé
(Fraternité Matin)
Qu’attendez-vous concrètement de M. Youssouf Bakayoko ?

Karamoko Yayoro : tout ça, c’est le jeu politicien. Que Laurent Gbagbo vous dise que ce n’est à lui de fixer la date des élections, ça c’est un jeu politicien. Est-ce que c’était à lui de dissoudre la CEI ? Où est-ce écrit dans la Constitution ? le problème en Côte d’Ivoire, c’est qu’on façon de nous ramener à l’idée de tribu. C’est-à-dire, à l’âge de la pierre taillée. Au temps de Rahan, où le feu commençait à paraître. Avec eux, on est dans la protohistoire, on n’est pas à la préhistoire. La protohistoire, c’est ce qui s’est passé avant la préhistoire. Avec une telle vision pour des gens qui se disent socialistes, progressistes, il faut vraiment s’interroger. En réalité, le code de la nationalité stipule, qu’est Ivoirien, celui qui a au moins l’un de ses deux parents Ivoiriens, celui qui a été naturalisé. On obtient la nationalité ivoirienne par le mariage, automatiquement pour la femme et 5 ans plus tard, pour l’homme s’il veut l’acquérir. On a aussi la nationalité par adoption. Pourtant, si les refondateurs voient un petit chinois nommé Karamoko, ils crient au scandale. Si moi, je décide d’adopter un petit chinois, où est donc leur problème ?
Diomadé Mamadou : Le frère a posé la question de savoir si nous avons eu gain de cause après notre marche sur la RTI. Je peux répondre par l’affirmative. Cela dépendra de quel côté se situe notre interlocuteur et ce qu’il recherche. Le 26 janvier dernier, les jeunes du RHDP ont décidé de faire une marche sur le RTI pour dénoncer sa caporalisation. Nous sommes allés rencontrer le directeur général, Brou Amessan. Le président Yayoro a signifié au DG qu’il doit démissionner. C’est quelque chose d’important. Parce que le FPI était habitué à un système où il était impossible de dire la vérité. Le RHDP, ce jour là, a dit la vérité à l’un de leur collaborateur, qui est Brou Amessan. On n’a pas eu le résultat escompté, parce qu’il avait dit qu’il devait avoir des rencontres avec les responsables du CNCA. Cette marche, a eu le mérite de tuer en nous la peur. C’est un acquis. C’était la première fois depuis un moment que les jeunes du RHDP organisent une marche, sans se faire tuer. C’est un repère pour dire que nous, nous savons faire des marches sans rien casser. Après cette marche, le Chef de l’Etat a pris un décret pour que les responsables de la RTI fassent le point de la redevance RTI. Ce qui ne s’était jamais fait. Notre marche est en train de porter des fruits. Comme ce sont des gens qui ne changent jamais leur manière de s’asseoir, allons-y doucement avec cette affaire de la RTI.

Kouadio Yao Séraphin : L’objectif majeur de notre marche sur la RTI était un symbole. Un symbole pour tuer la peur qui s’est installée chez nos militants depuis les évènements de 2004, au cours desquels le pouvoir FPI avait assassiné des centaines de jeunes. Depuis cette date-là, il était difficile de sortir. Nous avons utilisé le prétexte de la RTI pour voir véritablement l’état d’esprit de nos camarades militants. Parce que nous avions été tous troublés, paniqués, terrifiés par tout ce qui s’est passé en mars 2004. Pour nous, la marche du 26 janvier a été une victoire parce que les militants se sont mobilisés et ont fait nombreux le déplacement. Avant cette marche, chaque fois qu’on décidait de manifester, on nous brandissait des décrets d’interdiction. Nous avons aussi voulu voir si ces décrets-là étaient encore en vigueur. Nous avons, par notre détermination, montré que désormais, on peut marcher à Abidjan et puis il n’y a rien. C’est cela notre victoire. C’est cette victoire que nous allons célébrer le 15 mai. C’est ainsi que nous serons là, les autres jours après le 15, parce que, hier, aucun décret n’interdisait les marches, à partir de ce moment-là, nous pouvons marcher pour atteindre nos objectifs. S’agissant de la question de l’APO, je voudrais dire, que l’APO est le seul accord qui a eu une longue durée de vie parmi tous les accords qui ont été signés, parce que Marcoussis n’a pas fait deux semaines. On est allé à Accra 1 et 2 et à Pretoria ensuite. En termes de durée, c’est l’accord qui a le plus tenu longtemps. Alors qu’à sa signature, ils avaient dit que l’élection serait organisée dans 10 mois. On peut dès lors, conclure que l’APO n’a pas marché. Trente huit mois, après c’est toujours le statu quo. On peut dire que l’accord a échoué. Si vous voyez maintenant que ce qu’ils n’ont pas pu obtenir sur la terre ferme, c’est sur l’eau qu’ils veulent l’obtenir, c’est dire que ça ne marche plus. Il faut qu’on ait le courage de dire que l’APO a échoué et qu’on cherche un autre cadre pour sortir la Côte d’Ivoire de cette crise. Parce que Gbagbo, craignant le rapport des missionnaires de l’ONU, a décidé de distraire rapidement les Ivoiriens pour montrer que Soro et lui sont en de très bons termes. Après cette promenade, le Chef de l’Etat a dit qu’il allait faire avancer le processus. Aujourd’hui des semaines après, c’est le même stade : rien n’a évolué. Aujourd’hui pour nous, l’accord est devenu caduc. Il faut créer les conditions pour aller à l’élection. C’est ce qui est important pour nous. Il faut qu’on ait le courage de le dire. Quand on signe un accord, on respecte avec honnêteté les termes de cet accord. On a qualifié l’APO, d’accord direct qui est une expérience extraordinaire que l’on devrait enseigner dans les universités européennes. On devait même prononcer des conférences aux Etats-Unis, parce que l’APO était un exemple de règlement de conflit. Est-ce qu’aujourd’hui, on peut dire que cet exemple-là a apporté quelque chose ? L’objectif étant l’organisation de l’élection en 10 mois. Véritablement, il faut que les Ivoiriens comprennent que Gbagbo est en train de nous distraire avec son APO, en attendant peut être le dernier accord, celui de Ouragahio qui va certainement nous conduire à l’élection présidentielle. Il faut vraiment que les jeunes, les Ivoiriens prennent leur destin en main. Accord ou pas accord, il faut créer les conditions pour avoir l’élection présidentielle d’ici la fin de ce mois.

K. Marras D.
( l’Expression) :
Jusqu’où êtes-vous prêts à partir avec cet accord d’autant plus que lors de vos missions, vous avez réclamé un nouveau cadre institutionnel ?

Karamoko Yayoro : on a dit fin mai. Fin mai, nouveau cadre institutionnel sans Laurent Gbagbo. Il peut être en Côte d’Ivoire mais il n’est plus le Chef de l’Etat. Maintenant, s’il choisit d’aller en exil, cela dépendra de lui. Ce ne sera pas la dernière.

Marie- Chantale Obindé
(Fraternité Matin)
En même temps que Yayoro demande l’application de l’accord de Ouaga, Yao Séraphin semble dire autre chose, puisqu’il estime que l’APO est caduc, est-ce à dire que vous n’êtes pas sur la même longueur d’onde ?
Au niveau de la RTI, y a-t-il eu un changement notable après votre marche ?

Karamoko Yayoro : je crois que par rapport à l’APO, on a la même position, seulement ce qu’il a dit est que l’APO a échoué. Mais comme c’est le seul accord que nous avons, on fait avec. On vous dit d’aller à Adjamé, vous n’avez qu’une seule voiture qui fait la ligne, même si elle ne roule pas rapidement, vous êtes obligés de faire avec. En attendant d’avoir une nouvelle voiture plus puissante et plus rapide, vous faites avec celle qui existe. Si le RHDP dit qu’à partir du 31 mai, on change de cadre institutionnel, là en ce moment, vous verrez. En attendant que l’APO ne meure totalement, il faut qu’ils l’appliquent.

KKB : Je crois qu’au niveau de la RTI, il faut bien faire la part des choses. En organisant la marche, nous visions deux objectifs. Mais l’objectif le plus important c’est ce que mes amis ont expliqué. En mars 2004, nous avons été massacrés en série. Vous le savez. Il ya eu d’autres tueries. Cette façon de semer la terreur avait fini par jeter la peur dans l’esprit de nos militants. Or, si nous continuions dans cette voie avec un peuple apeuré qui ne peut plus s’affranchir, on ne peut plus mener de combat. Il fallait donc tout de suite aguerrir et réveiller nos militants. Nos amis vous ont dit que la marche avait pour principal objectif la remobilisation des militants, tuer en eux la peur. De ce point de vue, nous avons réussi. C’est même pour cela qu’aujourd’hui, ils sont plus motivés que nous. Ils sont même prêts à en découdre avant le 15. Et vous allez voir que le nombre de marcheurs va aller de plus en plus croissant parce qu’on a vaincu la peur. Pour ce qui est du changement de la RTI, oui, la RTI a changé, mais en pire. Et vous le voyez vous-mêmes. Ce n’est pas pour autant qu’il faut baisser les bras. C’est un combat de longue haleine. Même Brou Amessan, je lui dis que tous les agents de la RTI, quand ils rentrent chez eux les soirs, ils sont branchés sur les chaînes étrangères. Pourquoi tous les Ivoiriens y compris nous tous qui sommes ici, donnons-nous dos à notre télévision nationale. Si nous en sommes fiers, pourquoi lui donnons-nous dos ? Rien que cela suffit, pour une remise en cause de la RTI. Vous le savez, la RTI, notre télévision nationale, quand vous l’ouvrez le matin à 8h, c’est l’image de Laurent Gbagbo d’abord, 9 h, son épouse, Mme Gbagbo, 10 h, son gendre Stéphane Kipré qui a épousé sa fille, à 11h, Charles Blé Goudé, après on passe à la musique, on danse du Gbégbé jusqu’à 13 h et on reprend le train-train quotidien. Voilà notre télévision ivoirienne. C’est pour cela, que nous tous, préférons regarder les chaînes étrangères. Est-ce que cela doit continuer ainsi ? C’est même l’une des raisons pour laquelle nous marchons le 15. Chacun y va avec ses arguments. Etes-vous d’accord vous, qu’en pleine capitale, Abidjan, ici en Côte d’Ivoire, à Cocody Angré, on vienne garer des camions citernes invitant nos mamans à venir remplir les seaux ? Avez-vous imaginez une seule fois qu’on soit assis ici sans électricité ? Jusqu’à quel degré voulez-vous qu’on atteigne notre âme pour qu’on comprenne que nous sommes en train de mourir à petit feu ? Ma petite sœur doit accoucher à Yopougon et on m’appelle à 1h du matin pour dire qu’il n’y a pas d’électricité, il faut la conduire dans un centre de santé où il y a de l’électricité parce qu’elle a trop saigné. Ça c’est à Yopougon, dans la capitale de la Côte d’Ivoire. Et à Korhogo alors, où j’étais il y a quelques jours ? On ne s’en rend pas compte quand on est dans le verbiage. A Korhogo quand on doit opérer des gens, on n’est pas sûr que le groupe électrogène puisse tenir, on reporte l’intervention. Et les malades en meurent, tous les jours, toutes les minutes, toutes les secondes. La RTI n’a pas changé hélas. De ce point de vue là, elle a changé en pire. Nous continuerons de marcher jusqu’à ce qu’elle change, qu’elle comprenne qu’elle doit changer. Jusqu’à ce qu’on ramène tous les Ivoiriens sur leur chère télévision. S’ils ne le comprennent pas, on va passer à un autre niveau pour ce qui est de la redevance. Nous allons voir la CIE. Si la RTI est si fière et sûre d’elle, qu’elle vienne demander aux Ivoiriens d’aller payer directement la redevance à ses guichets. Qu’on arrête de nous couper à la source et on va voir combien d’Ivoiriens, y compris ceux qui y travaillent, vont le faire. Quand nous étions à la RTI ce 26 janvier, j’ai suivi une scène dans le bureau de Brou Amessan, qui se passait entre deux journalistes, dont l’un était opprimé et qui disait : « ça suffit ! Il faut qu’on parle maintenant. C’est pour libérer tout ce monde, nous libérer tous que nous menons ce combat. La RTI n’est pas prête à changer. Je crois que la question ivoirienne doit être réglée de façon globale. Le jour où on changera le FPI et Gbagbo Laurent, tout va suivre. C’est pourquoi, notre priorité, c’est d’aller marcher. Et vous allez voir quand le FPI partira, quand Laurent Gbagbo sera parti, tout sera réglé. Nous sommes entre nous, amis. On se connait ici en Côte d’Ivoire. Je n’ai jamais été un garçon violent, mais désormais, j’ai décidé d’être l’eau. Je prends la forme du récipient qui me contient. Il faut que cela soit clair. Si j’ai affaire à un ministre voyou, parce qu’il est seulement en costume, je serai voyou devant ce ministre. C’est là le sens de la responsabilité. Alors, le ministre Tagro arrive à notre rendez-vous avec 37mn de retard, après nous avoir fait attendre. Il a arrive donc, on lui fait la remarque. Et il répond : « Et alors ? » Le ministre de l’Intérieur - le ministère de l’Intérieur est un ministère de souveraineté - dans un Etat sérieux, qui nous répond : « Vous allez faire quoi ? Je vous ai fait attendre et vous allez faire quoi ? » Voyez déjà l’état d’esprit d’un ministre de la République. Si son interlocuteur ne se maîtrise pas, cela peut conduire à un pugilat. On comprend dès lors pourquoi il y a eu la rébellion dans ce pays. Est-ce un ministre qui parle ainsi ? Et je lui réponds pour dire que moi, des ministres j’en ai vus. Les premiers ministres, j’en ai vus. J’ai déjeuné avec Alassane Ouattara, le premier des Premiers ministres sous Houphouët. Je lui dis qu’il se trompe d’époque. Il me dit que nous avons fui dans ce pays. Oui, nous on a fui pour que vous ayez la vie sauve. Je vous ai dit que le premier droit de tous citoyens, c’est le droit à la vie. Vous qui n’avez pas fui, avant dans ce bureau il y avait Emile Boga Doudou. Où est-il aujourd’hui ? Comment est-il mort ? Vous avez dit ici que tant que vous êtes au pouvoir, Soro Guillaume ne sera jamais ministre dans ce pays. Lui qui ne demandait qu’à être ministre de la Défense, est aujourd’hui Premier ministre. Et vous l’appelez patron, en quoi êtes-vous garçon ? Lida, nous a dit ici qu’il a mis Gbagbo Laurent dans le coffre de son véhicule. N’est-ce pas la fuite ? N’a-t-il pas fui d’Abidjan pour aller en exil ? Des fuyards qui veulent donner des leçons de bravoure dans ce pays. Qui a dit que la politique était les muscles ? Si ce sont ceux qui ont les ceintures de karaté qui doivent parler dans ce pays, que feront les autres et singulièrement les femmes ? Voilà pourquoi nous sommes là où nous sommes aujourd’hui. J’ai dit un jour à nos amis du RDR avec qui nous avons un passé récent, un passé que nous assumons, alors que j’étais à leur siège pour leur dixième anniversaire, Ils avaient aligné leurs militants pour des témoignages. Il y avait les témoignages de 94 à 2000 et ceux de 2000 à 2010. J’ai fait un constat et je leur ai dit que tous ceux de la première vague étaient des Ivoiriens en bon état, les autres étaient handicapés. C’est dire que de 94 à 2000, le pouvoir était civilisé. On réprimait les gens avec les moyens conventionnels, ce qui n’est pas le cas des autres. S’il y a eu la paix en 40 ans, c’est parce qu’il y a eu un pouvoir civilisé. Houphouët Boigny n’a pas tué Laurent Gbagbo. Pourtant, l’occasion n’a pas manqué. Où sont ces milliers de personnes tuées aujourd’hui ? Gueï est mort, par qui ? Le problème de la Côte d’Ivoire n’a pour autant pas été réglé. La solution à nos problèmes ne réside pas dans les menaces et les tueries. Si les menaces et les tueries devaient régler les problèmes, on n’en serait pas là aujourd’hui. On a trop tué dans ce pays. Personne ne peut nous effrayer. Ils ont la chance d’avoir affaire à des personnalités comme Henri Konan Bédié, pondéré par nature. Nous autres, sommes de la même génération, personne ne peut effrayer son prochain. Un ministre qui me sert cela, je lui renvoie l’ascenseur. Il me prend les cols, j’en fais autant. Je suis l’eau, je prends la forme du récipient qui me contient. De toutes les façons, d’ici peu, il ne sera plus notre interlocuteur. Si Gbagbo veut parler avec nous, il nous trouvera un autre interlocuteur et on parlera. Comment pouvez- vous servir ainsi, au sommet d’un Etat comme la Côte d’Ivoire ? Excusez-moi, j’en ai fini.

Charles Sanga :
Quel commentaire faites-vous de la récente grève des sans-grades dans le secteur du transport ?

Karamoko Yayoro : Les transporteurs sont à féliciter. Le RHDP leur a apporté notre soutien politique. La première leçon qu’on tire de cette grève, c’est que lorsque le peuple est excédé, il n’attend pas le sommet. Il se prend en charge. En effet, ce sont les sans-grades comme vous le dites, c’est-à-dire les chargeurs, les chauffeurs, etc qui ont décidé de prendre leur responsabilité. Ils étaient prêts à aller jusqu’au bout. Malheureusement ce sont les patrons qui sont allés négocier en catimini. La Côte d’Ivoire a des gisements de pétrole. Même si la SIR ne raffine pas tout notre pétrole, mais après raffinage à l’extérieur, on peut vendre moins cher, du moins à un prix abordable pour le consommateur. Pour nous, la façon de faire du régime en place s’apparente à l’économie de traite. C’est comme on rassemble le café, le cacao, l’hévéa, la banane qu’on vend à l’extérieur à vil prix. Et on achète là-bas des choses très chères. Par exemple une petite boite de Nescafé à 1000 FCFA, alors que le sac de café coûte 100 F. Il en est de même pour un gros sac d’anacarde qu’on vend à 50 F alors un petit parfum ou produit éclaircissant coûte 5000 F. Voilà le problème. Les refondateurs ont dit qu’ils allaient gouverner autrement. Autrement veut dire quoi ? Il faut qu’on arrête. Les problèmes de délestage, de pénurie d’eau, de flambée de prix, KKB l’a dit, c’est un problème global auquel il faut apporter une solution globale. Quand on va dégager le système, vous aller voir que tout va changer. En 90, on n’avait pas d’expérience, donc on a cru à quelqu’un qui savait parler. Maintenant, nous voulons croire en des gens qui savent gérer. Un pays, ce n’est pas la parole, ce n’est pas non plus le volume de muscle. Un pays c’est plutôt la conscience intellectuelle, c’est comment traduire la pensée en projet réel. Tu demandes à Gbagbo, il dit : ça fait quoi ? C’est ce que Tagro nous a dit. « Je suis en retard, vous aller faire quoi ? ». La courtoisie aurait voulu qu’il nous dît : « jeunes frères, excusez-moi pour le retard ! ». Je lui ai dit que prochainement quand nous allons venir, on voudrait voir en face le ministre de la République. Et vous verrez des citoyens polis qui vont vous parler de leurs problèmes. Un pays n’a pas de route, c’est le système. Troisième pont annoncé et jamais réalisé, c’est le système. C’est de l’arnaque politique. On prélève des taux sur le carburant pour le pont. Ce fonds devrait être logé quelque part. Quand à propos du délestage Blé Goudé dit que les turbines sont tombées en panne, parce que les gens sont quitté au Nord pour venir à Abidjan, c’est faux. La machine a une capacité de production déterminée. Il y a un maximum, un minimum. Les gens n’ont pas construit leur maison sur les lamelles des turbines pour les empêcher de tourner. Une machine a une durée de vie. Les refondateurs n’ont pas compris ce que c’est que gérer un pays, ce qu’est un Etat. Pour me résumer, je dirai que nous remercions les transporteurs. Nous allons les rencontrer pour leur parler de notre marche. On ira rencontrer toutes les forces sociales pour leur parler de notre marche. Nous sommes en train de prendre langue avec certains partis politiques pour dire que c’est la marche des Ivoiriens qui veulent un changement positif. C’est la marche de tous ceux qui veulent que les problèmes des Ivoiriens prennent fin. Ce combat, ce sont les Ivoiriens eux-mêmes qui vont le mener, pas l’ONU, pas la France. C’est nous-mêmes qui allons écrire notre histoire. Tant que nous ne prendrons pas nos responsabilités, personne ne le fera à notre place. Levons-nous pour chasser ce régime vampire, sangsue, assassin et instaurons la démocratie et l’égalité pour tous afin de doter la Côte d’Ivoire de dirigeants légitimes pour un développement harmonieux et faire d’elle un pays viable.


Yao Kouadio Séraphin : Les transporteurs n’étaient pas d’accord avec l’augmentation du prix du carburant. Ils se sont manifestés pendant quatre à cinq jours, ils ont eu gain de cause. C’est dire que si les Ivoiriens veulent aller aux élections, ils l’obtiendront en se mobilisant massivement le 15 mai à travers une grande marche. Je suis convaincu que si cinq cents milles personnes descendent dans la rue pour réclamer les élections, dans les semaines qui suivent, nous irons aux élections. C’est une grande leçon que les transporteurs viennent de nous donner. Ils nous ont fait comprendre que seuls paient la détermination, l’engagement dans la discipline. Concernant les problèmes cités plus haut que le régime FPI tente de banaliser, il faut dire que gouverner c’est prévoir. Ils ont pensé qu’on pouvait continuer dix ans, vingt ans, si on ne fait pas d’investissement. Il suffit qu’on dise qu’on est refondateur pour que son village soit électrifié sans tenir compte de l’outil de production. Si c’était prévu pour dix milles personnes et vous en donnez à vingt mille, c’est évident qu’il va y avoir des problèmes. Quand on n’a pas appris à gérer, on ne peut pas comprendre cela. Après, on cherche des bouc- émissaires. Je suis sûr que demain, ils diront que c’est la France qui a fait qu’il y a délestage en Côte d’Ivoire. J’ai eu honte que notre président de la République, le camarade Laurent Gbagbo, après une visite en Guinée Equatoriale, ait pu dire que c’est maintenant qu’il sait ce qu’on peut faire avec l’argent du pétrole. C’est grave. Un président ne sait pas qu’on peut développer son pays avec l’argent du pétrole ! C’est une honte pour la Côte d’Ivoire. On se demande c’est quel président nous nous sommes donné. Oui, c’est quel président, la Côte d’Ivoire a-t-elle mérité ? Ils (les refondateurs) ont dit que quand ils seront au pouvoir, les paysans seront heureux. Ceux qui ont détourné l’argent des paysans sont à la MACA. Depuis plus de deux ans, on ne peut pas les juger. Les familles de ces détenus doivent venir à la marche pour que ce pouvoir parte et que justice soit faite. S’ils ont des complices, on doit le savoir. En tout état de cause, nous savons qu’il y a des gents qui prennent leur déjeuner à la MACA. Ils ont des intérêts là-bas. Pour mettre fin à tout ça, il faut que le 15 mai, le peuple prenne son destin en main en sortant massivement pour la marche. Il y a l’insécurité. On a dit tout à l’heure que cinq élèves sont morts en deux mois. Et le gouvernement ne dit rien. Est-ce un régime qui aime le sang comme sacrifice pour que son règne continue ? Dans un pays normal, le ministre de l’Education doit venir éclairer les Ivoirines.


Charles Sanga :
Ne bluffez-vous pas, en parlant de cette marche du 15 mai?

Karamoko Yayoro : Jusqu’à présent, nous n’avons pas bluffé. Quand nous avons dit que nous allions marcher le 26 janvier, il s’est trouvé des gens pour dire que c’était du bluff. Mais, nous avons marché. Les gens étaient heureux de nous voir à l’intérieur de la RTI. Nous ne bluffons parce que nous avons décidé de prendre nos responsabilités face à l’Histoire. Toutefois, il faut rappeler que nous sommes des jeunesses de partis politiques. A ce titre, nous avons une autonomie contrôlée. On a dit à nos leaders qu’à un moment donné, on va pratiquer ce que moi j’appelle la désobéissance parentale ou filiale positive. Cela veut dire qu’à un moment, ton père te dit qu’il ne faut pas cela ou ceci. Mais, toi, tu es convaincu que c’est bien pour la famille. Tu le fais. Après, on dira que le jeune a eu raison très tôt. Nous allons rencontrer la semaine prochaine (cette semaine, ndlr) le directoire du RHDP. Notre position est déjà connue. Que la marche du 15 mai ait lieu. Ce n’est pas une marche symbolique. La Côte d’Ivoire doit être libérée. Ce qu’on peut retenir, c’est qu’à partir du 15 mai, nous allons continuer à marcher. Comme les refondateurs eux-mêmes ont dit, qu’à partir de juin, nous pourrons marcher, faire toutes sortes d’acrobaties. Tant qu’on n’a pas les élections, on continuera de marcher, marcher, marcher. C’est la seule arme qui nous reste. Gbagbo se dit fils d’élections. Mais, aujourd’hui, le fils est en train de renier ses parents. Le fils a peur de ses parents. Cela nous étonne. Nous allons nous battre pour arracher les élections au fils des élections. Ce que je peux dire, c’est que notre marche n’est pas du bluff. On ne peut pas s’engager jusqu’à ce niveau et se convaincre que nous sommes en train de faire du bluff. C’est du sérieux. Il faut nous croire.



Conclusion

Karamoko Yayoro : « Je voudrais une fois de plus remercier la direction du journal Le Patriote. Transmettez toute notre reconnaissance à votre rédaction, à l’équipe technique. Merci également à toute la presse qui était là. Je pense que nous avons échangé en frères. Il y a eu des moments, où face à certains sujets, et vu aussi la fougue, c’est cela la jeunesse, nous nous sommes laissés emporter. Mais nous n’avons jamais dérapé. Nous avons dit les choses telles qu’elles sont. Nous n’avons jamais insulté. C’est cette politique que nous voulons faire. On doit dire des vérités crues, mais on ne doit jamais insulter. C’est ce que nous voulons. Nous sommes restés au niveau de la paix, on n’est pas descendus. Nous souhaitons donc que ce genre de rencontres se multiplie. Je voudrais sincèrement vous rendre grâce et vous remercier. Le FPI actuellement où nous parlons est à Yopougon, pour fêter la liberté. Nous les invitons à ne pas fêter la liberté, mais plutôt à réfléchir sur la reconquête de la liberté et au recentrage de la liberté. Parce qu’on n’est pas libre. Eux-mêmes ne sont pas libres. Ils ont pu le voir. Il n’y a pas eu ce déferlement qu’ils attendaient. Ils ne sont pas libres et il paraît que l’électricité les a lâchés ( ndlr, jeudi soir). C’est un signe du bilan de leur gestion, parce que s’ils avaient bien géré le pays, l’électricité n’aurait pas pu les lâcher. S’ils avaient bien géré, leurs militants n’allaient pas les lâcher. C’est pourquoi, j’ai lancé tout à l’heure un appel à la partie saine du FPI. Il y en a encore. Il y a des militants sains, des gens qui sont découragés et qui ont dit, ‘’moi je ne veux plus parler de politique’’. Mais non, parle de politique parce que la politique, ce n’est pas faire de la politique politicienne. C’est d’abord la vie de tous les jours. Donc, nous les invitons à venir à cette marche. Si Laurent retrouve ses esprits le 15 mai, nous voulons le voir avec sa serviette au cou devant la marche, parce que c’est pour les élections et les libertés. Je voudrais vous remercier et vous dire que le 15, pour nous, est une date importante. Lundi prochain (ndlr, hier), nous rencontrons le ministre de l’Intérieur Désiré Tagro, pour lui dire ce que nos bases nous ont dit. Et le mercredi, nous rencontrerons notre direction pour affiner tout ce que nous sommes en train de faire. Mais sachez une chose : c’est un processus qui est en marche et qui ne doit s’achever qu’avec les élections et un pouvoir légitime en place. A la BAD, nous disons à tous les commissaires des Assemblées annuelles, bonne arrivée. Nous allons vous accueillir. Permettez que nous fassions notre marche. Encouragez cette marche du 15, vous verrez que par rapport à votre installation définitive, il y aura des marches certes mais que vous pourriez aller au travail. Parce que s’il n’y a pas de marches et que vous tenez vos Assemblées annuelles, quand vous allez revenir et qu’il y aura des marches, vous n’allez pas vous déplacer tels des escargots ou des tortues, avec des sièges sur le dos. Nous voulons donc faire cette marche par rapport à toutes ces données. Chers amis, à la prochaine et longue vie au Patriote. Bonne continuation pour la « Tribune du Patriote. »

Propos recueillis par

Y. Sangaré
Yves-M. Abiet
Kamagaté Ibrahima
Samou Diawara
Keita Moussa
Lath Thierry
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