Excellences Madame et Messieurs les Chefs d’Etat,
Excellences Mesdames et Messieurs les Chefs de Gouvernement ;
Monsieur le Président de la Commission de l’Union Africaine ;
Mesdames et Messieurs les Gouverneurs de la BAD ;
Mesdames et Messieurs les Ministres ;
Monsieur le Président du Groupe de la BAD ;
Messieurs les Anciens Présidents du Groupe de la BAD ;
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs ;
Mesdames et Messieurs les représentants des Institutions internationales ;
Messieurs les Représentants des Cultes ;
Messieurs les Chefs traditionnels ;
Mesdames et Messieurs ;
Distingués invités.
Je voudrais, avant tout, saluer et remercier tous les Chefs d’Etat et de gouvernement qui nous font l’amitié de venir à Abidjan, à l’occasion de ces Assises de la Banque Africaine de Développement. C’est une tradition africaine, une bonne tradition, qui veut que les amis et les voisins viennent et vous entourent lorsque vous recevez un hôte de marque.
Merci au Président Amadou Toumani TOURE du Mali, notre frère, notre voisin.
Merci au Président Faure GNASSINGBE, du Togo ; au Président Boni Yayi du Bénin qui sont arrivés ce matin même, pour être à nos côtés.
Le Mali, le Togo et le Benin sont membres du Conseil de l’Entente. Mais, au delà des liens d’amitié et de fraternité dont la Côte d’Ivoire s’honore avec chacun de vos pays, votre présence à cette cérémonie d’ouverture des Assemblées de la BAD témoigne, Messieurs les Présidents, de l’intérêt que tous nous portons aux questions de développement de notre continent.
Je voudrais saluer également le Président Jean PING, Président de la Commission de l’Union Africaine, qui nous fait l’amitié de venir à ces assisses de la BAD à Abidjan.
Merci de vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue à tous les participants aux travaux qui s’ouvrent aujourd’hui.
Chers amis de la Banque Africaine de Développement, soyez les bienvenus en Côte d’Ivoire. Nous sommes fiers de vous accueillir dans ce palais des Congrès de l’Hôtel Ivoire, que pour la plupart, vous connaissez, mais qui a fait sa toilette des grands jours pour vous accueillir. La Banque Africaine de Développement, ses dirigeants et ses cadres, ses employés et ses partenaires sont les bienvenus à Abidjan. Vous êtes chez vous. Bienvenues à la maison.
Au nom de la Côte d’Ivoire, de son Gouvernement et de toutes les Institutions de la République ; des opérateurs économiques du public et du privé ; des élus et de toutes les populations, j’adresse mes chaleureuses félicitations au Président Kaberuka et à toute la Direction de la Banque, à son personnel, à ses partenaires, pour les progrès importants accomplis ces dernières années.
La Banque Africaine de Développement a beaucoup gagné en respectabilité. Elle mobilise aujourd’hui davantage de ressources. Nous l’encourageons vivement à poursuivre dans cette voie. Nous l’encourageons à faire de plus en plus preuve d’imagination.
La BAD est en effet une Banque créée pour l’Afrique. Sa première raison d’être est le développement de l’Afrique. Mais, le continent, malgré quelques avancées indéniables, est toujours confronté au défi de la pauvreté, surtout en Afrique subsaharienne.
L’Afrique peine toujours à prendre un essor véritable pour le développement. Malgré la mondialisation, il y a toujours un écart entre les autres régions du monde et nous. Parfois, dans certains domaines, cet écart se creuse dangereusement.
Il faut inverser cette tendance. C’est la mission de notre génération. Le Groupe de la Banque Africaine de Développement peut faire beaucoup pour impulser, soutenir et accompagner les politiques et les actions de redressement de l’Afrique. La BAD peut aider les décideurs africains à trouver des réponses concrètes aux questions essentielles de notre développement.
Les pistes de réflexion ne manquent pas. La BAD participe déjà à la conception et à la mise en œuvre des programmes de sortie de crise des pays africains. Elle doit jouer son rôle, être à l’avant-garde, lorsqu’il s’agit de traiter les problèmes de développement de l’Afrique. Elle doit prendre l’initiative et assurer le leadership de la mobilisation des ressources pour régler des problèmes de développement pour lesquels, manifestement, aucun de nos Etats, pris individuellement, ne peut trouver de réponses nationales pertinentes.
Ces problèmes sont connus, mais ils méritent, aujourd’hui plus que jamais, que nous y consacrions toutes nos énergies. Il s’agit, principalement, des infrastructures de transport et de communication, de la production et de la distribution de l’énergie électrique.
Tous les experts sont unanimes : le manque d’infrastructures et de services sur le continent est aujourd’hui la principale contrainte qui plombe le développement de l’Afrique. Les voies de transport routier sont peu nombreuses et elles ne sont pas toujours bien entretenues. Le réseau ferroviaire est souvent obsolète et d’un autre âge. Quant au transport aérien interafricain, il est encore loin de répondre à nos attentes et de faire face aux exigences d’un secteur hautement concurrentiel.
Je rappelle, Monsieur le Président Kaberuka, que le soutien de la Côte d’Ivoire vous a été acquis quand vous avez fait du développement des infrastructures une des priorités de la BAD. Je voudrais saluer ici ce choix et les actions que vous avez engagées.
Concernant la production et la distribution de l’énergie électrique, il faut reconnaitre que l’Afrique vit un véritable paradoxe. Nous avons toutes les sources d’énergie électrique connues : des cours d’eau pour les barrages hydroélectriques, du charbon, du gaz, de l’uranium, le soleil, le vent et nous n’avons pas d’électricité. Selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), seulement 23% de la population de l’Afrique subsaharienne a accès au réseau électrique.
L’explication est que nos ressources ne sont pas suffisamment exploitées. Quand elles sont exploitées, et là où elles le sont, cela ne profite pas assez au développement du continent.
C’est dans ce contexte que la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a décidé de la création d’un « Fonds pour le Développement et le financement des secteurs des Transports et de l’Energie (FODETE – CEDEAO). La Côte d’Ivoire assure la coordination de ce projet qui bénéficie d’un appui financier et institutionnel de la BAD.
Notre objectif est d’arriver, à court et moyen termes, à garantir la fourniture d’électricité dans nos Etats pour le bien-être des populations, pour l’essor de nos économies et pour l’intégration sous-régionale. Nous comptons sur l’appui de la BAD.
A côté de ces deux premiers défis, il y a la question de la production et de la distribution de l’eau. L’eau est une denrée fragile dont la production, la conservation et la distribution deviennent de plus en plus chères. On estime que d’ici cinquante ans, l’eau potable sera aussi chère et rare que le sont aujourd’hui les produits pétroliers.
L’Afrique doit prendre conscience de ses handicaps dans ce secteur, comme dans bien d’autres secteurs, mais aussi de ses potentialités. Nous ne sommes pas les moins lotis par la nature. Il nous appartient de mettre nos ressources en valeur et la BAD peut nous y aider.
Mesdames et Messieurs, la liste de nos défis est longue. Ils vont de la formation des élites africaines, pour mettre leurs compétences au service du développement du continent, à la question des migrations extérieures qui donne le sentiment que l’Afrique est «une trappe de la pauvreté» que ses propres fils fuient. Mais, au-delà des drames de l’émigration clandestine, il y a une contribution des émigrés africains à l’économie de leurs pays d’origine. La BAD peut s’impliquer dans les réflexions autour de cette fameuse « épargne des migrants », pour l’orienter vers des investissements productifs.
Je pourrais également revenir sur les grands sujets qui constituent aujourd’hui les problèmes communs de l’humanité. Ils concernent les questions liées aux changements climatiques, à la déforestation, à l’érosion des côtes et, plus généralement, à l’environnement qui sont autant de problèmes désormais discutés à l’échelle mondiale.
Les pays africains sont souvent en première ligne sur ces questions, quand il s’agit par exemple de la forêt du bassin du Congo, de l’avancée du désert au Sahel, etc. Mais aucun de nos pays, pris individuellement, ne peut faire prévaloir son point de vue, s’il n’est pas soutenu par l’ensemble des autres pays. La BAD pourrait prendre le leadership pour l’Afrique et nous aider à nous organiser pour défendre nos intérêts dans les fora internationaux.
La lutte contre les pandémies est le dernier défi que je voudrais évoquer. Outre les grandes pandémies mondiales, comme le SIDA, qui mobilisent toute la communauté internationale, il y a des pandémies spécifiques à l’Afrique comme le paludisme qui continuent de faire des ravages au sein de nos populations. Ces «maladies africaines» comme on les appelle, doivent faire l’objet de recherches spécifiques d’envergure et soutenues. Le soutien de la recherche sur ces maladies pourrait être une mission prioritaire de la BAD.
Comme vous le voyez, Mesdames et Messieurs, nous attendons beaucoup de la Banque Africaine de Développement. Nous plaçons dans votre institution, dans notre institution, tous les espoirs suscités au sein de nos populations par les progrès scientifiques et économiques enregistrés dans le monde ces dernières années, mais qui restent encore hors de portée.
Nous voyons tous l’Europe et la Communauté financière internationale se mobiliser pour éviter à un seul pays, la Grèce, de sombrer et d’entraîner d’autres pays européens dans sa chute. En un temps record, 750 milliards de dollars ont été trouvés pour la Grèce (500 milliards par l’Europe et 250 milliards par le FMI).
On se rappelle encore comment, en 2008, les autorités américaines (un Président républicain, George Bush, puis un Président Démocrate, Barack Obama) ont mobilisé 800 milliards de dollars pour venir en aide au secteur financier américain alors en crise, afin d’éviter un crash financier mondial.
Dans ces deux cas, il ne s’agit pas d’opérations philanthropiques, mais d’actions visant à sauver un système financier intégré. Nous devons comprendre, a contrario, la timidité des engagements internationaux pour sauver les économies des Etats africains lorsqu’elles sont en crise. C’est le signe que le niveau d’intégration de nos économies au système financier international est encore trop faible pour menacer celui-ci en cas de crise.
Cette situation devrait interpeller tous les intellectuels africains : il est grand temps de s’attaquer aux problèmes structurels qui entravent le développent de notre continent.
La part des politiques dans cet engagement est grande. Il s’agit de créer partout sur le continent un environnement propice au progrès économique. Un environnement politique débarrassé du spectre des coups d’Etat et basé sur l’exercice démocratique du pouvoir.
Un environnement économique où la prospérité des entreprises est garantie par la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption et une saine concurrence entre les entreprises du secteur privé et du secteur public.
Mais par-dessus tout, des Etats viables et stables pouvant encadrer, arbitrer, s’il le faut, intervenir si nécessaire, pour la vie économique du pays. Les dernières crises économiques et financières observées dans le monde et les solutions adoptées pour les résoudre ont consacré le retour et l’importance de l’Etat dans le développement des pays et des économies.
En Amérique hier, en Europe aujourd’hui pour la Grèce, ce sont les Etats qui décident de ce qu’il faut faire pour juguler les crises financières.
Nous devons tout faire pour éviter ce qui peut fragiliser nos Etats. Car il n’y a pas d’économie viable là où il n’y a pas d’Etat. Il n’y a pas d’économie viable là où il n’y a pas un Etat capable de fixer et de faire respecter les règles de la vie en société et de la concurrence économique.
C’est ainsi que nous pourrons développer un secteur privé fort dans nos pays et attirer des investisseurs étrangers. Le rôle de l’Etat est de soutenir le développement d’un secteur privé capable d’investir dans tous les secteurs de la vie économique de nos pays, et non de concurrencer les entrepreneurs.
Vous aurez compris, Mesdames et Messieurs, combien, à mes yeux, la sauvegarde de l’Etat est un enjeu important de la sortie de crise en Côte d’Ivoire. Si nous avons pu faire le chemin qui nous mène aujourd’hui vers les élections, vers la fin de la crise, c’est parce que l’Etat ivoirien ne s’est pas effondré.
De nombreux pays africains ne se sont jamais remis des crises qui ont entraîné l’effondrement de l’Etat. Si nous nous battons pour sortir notre pays, la Côte d’Ivoire, de cette crise où elle n’aurait jamais dû tomber, c’est pour ne pas désespérer de l’Afrique.
La Banque Africaine de Développement aura toujours le soutien de la Côte d’Ivoire. Si l’augmentation du capital, qui est à l’ordre du jour de vos travaux est acquis, je puis promettre, d’ores et déjà, que la Côte d’Ivoire saura y tenir son rang.
Notre pays est un petit pays. Un pays sous développé. Mais, un pays riche de ses potentialités économiques, et surtout de l’engagement de tous ses habitants à œuvrer à son développement.
La crise ivoirienne a déjà pris fin. Faites nous confiance. Ce qui unit les fils et filles de ce pays est plus grand et sera toujours plus fort que ce qui pourrait les opposer. L’unanimité qui s’est dégagée, au sein de la classe politique ivoirienne, autour de la tenue des présentes assises de la BAD est à la fois un signal et un message. Je salue la présence dans cette salle de tous les partis politiques significatifs pour vous accueillir, pour accueillir la BAD.
C’est un signal que nous donnons au monde entier, pour montrer que cette crise n’était pas aussi profonde que l’on a pu le faire croire à l’extérieur. C’est un message que nous adressons, en particulier aux milieux d’affaires, pour dire que la Côte d’Ivoire n’a pas sombré, que ce pays est debout et garde intacts tous ses atouts économiques. Nous avons un pays à reconstruire et nous entendons le faire avec vous. Nous avons une économie à relever et c’est avec vous que nous comptons le faire.
Il y a sept ans, les autorités de la BAD prenaient la décision de délocaliser les activités de l’institution. Je ne voudrais pas revenir sur les raisons développées et entretenues pour justifier cette décision. Le temps n’est pas à la polémique. Le Temps est venu pour que la BAD de revenir à Abidjan.
La classe politique ivoirienne, dans toutes ses composantes, toutes les institutions de la République, ici représentées au grand complet, tous les opérateurs économiques, du privé comme du public, tous les travailleurs, les élus et la société civile en accord avec le peuple de Côte d’Ivoire, demandent solennellement par ma voix, à la Banque Africaine de Développement de revenir à la maison, de revenir en Côte d’Ivoire, à Abidjan, son siège.
Tout en souhaitant plein succès à vos travaux, je déclare ouvertes les Assemblées annuelles 2010 des Conseils des Gouverneurs du Groupe de la Banque Africaine de Développement.
Que Dieu bénisse l’Afrique,
Que Dieu bénisse la Banque Africaine de Développement
Que Dieu bénisse la Côte d’Ivoire !
Laurent Gbagbo
Président de la République de Côte d’Ivoire
Excellences Mesdames et Messieurs les Chefs de Gouvernement ;
Monsieur le Président de la Commission de l’Union Africaine ;
Mesdames et Messieurs les Gouverneurs de la BAD ;
Mesdames et Messieurs les Ministres ;
Monsieur le Président du Groupe de la BAD ;
Messieurs les Anciens Présidents du Groupe de la BAD ;
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs ;
Mesdames et Messieurs les représentants des Institutions internationales ;
Messieurs les Représentants des Cultes ;
Messieurs les Chefs traditionnels ;
Mesdames et Messieurs ;
Distingués invités.
Je voudrais, avant tout, saluer et remercier tous les Chefs d’Etat et de gouvernement qui nous font l’amitié de venir à Abidjan, à l’occasion de ces Assises de la Banque Africaine de Développement. C’est une tradition africaine, une bonne tradition, qui veut que les amis et les voisins viennent et vous entourent lorsque vous recevez un hôte de marque.
Merci au Président Amadou Toumani TOURE du Mali, notre frère, notre voisin.
Merci au Président Faure GNASSINGBE, du Togo ; au Président Boni Yayi du Bénin qui sont arrivés ce matin même, pour être à nos côtés.
Le Mali, le Togo et le Benin sont membres du Conseil de l’Entente. Mais, au delà des liens d’amitié et de fraternité dont la Côte d’Ivoire s’honore avec chacun de vos pays, votre présence à cette cérémonie d’ouverture des Assemblées de la BAD témoigne, Messieurs les Présidents, de l’intérêt que tous nous portons aux questions de développement de notre continent.
Je voudrais saluer également le Président Jean PING, Président de la Commission de l’Union Africaine, qui nous fait l’amitié de venir à ces assisses de la BAD à Abidjan.
Merci de vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue à tous les participants aux travaux qui s’ouvrent aujourd’hui.
Chers amis de la Banque Africaine de Développement, soyez les bienvenus en Côte d’Ivoire. Nous sommes fiers de vous accueillir dans ce palais des Congrès de l’Hôtel Ivoire, que pour la plupart, vous connaissez, mais qui a fait sa toilette des grands jours pour vous accueillir. La Banque Africaine de Développement, ses dirigeants et ses cadres, ses employés et ses partenaires sont les bienvenus à Abidjan. Vous êtes chez vous. Bienvenues à la maison.
Au nom de la Côte d’Ivoire, de son Gouvernement et de toutes les Institutions de la République ; des opérateurs économiques du public et du privé ; des élus et de toutes les populations, j’adresse mes chaleureuses félicitations au Président Kaberuka et à toute la Direction de la Banque, à son personnel, à ses partenaires, pour les progrès importants accomplis ces dernières années.
La Banque Africaine de Développement a beaucoup gagné en respectabilité. Elle mobilise aujourd’hui davantage de ressources. Nous l’encourageons vivement à poursuivre dans cette voie. Nous l’encourageons à faire de plus en plus preuve d’imagination.
La BAD est en effet une Banque créée pour l’Afrique. Sa première raison d’être est le développement de l’Afrique. Mais, le continent, malgré quelques avancées indéniables, est toujours confronté au défi de la pauvreté, surtout en Afrique subsaharienne.
L’Afrique peine toujours à prendre un essor véritable pour le développement. Malgré la mondialisation, il y a toujours un écart entre les autres régions du monde et nous. Parfois, dans certains domaines, cet écart se creuse dangereusement.
Il faut inverser cette tendance. C’est la mission de notre génération. Le Groupe de la Banque Africaine de Développement peut faire beaucoup pour impulser, soutenir et accompagner les politiques et les actions de redressement de l’Afrique. La BAD peut aider les décideurs africains à trouver des réponses concrètes aux questions essentielles de notre développement.
Les pistes de réflexion ne manquent pas. La BAD participe déjà à la conception et à la mise en œuvre des programmes de sortie de crise des pays africains. Elle doit jouer son rôle, être à l’avant-garde, lorsqu’il s’agit de traiter les problèmes de développement de l’Afrique. Elle doit prendre l’initiative et assurer le leadership de la mobilisation des ressources pour régler des problèmes de développement pour lesquels, manifestement, aucun de nos Etats, pris individuellement, ne peut trouver de réponses nationales pertinentes.
Ces problèmes sont connus, mais ils méritent, aujourd’hui plus que jamais, que nous y consacrions toutes nos énergies. Il s’agit, principalement, des infrastructures de transport et de communication, de la production et de la distribution de l’énergie électrique.
Tous les experts sont unanimes : le manque d’infrastructures et de services sur le continent est aujourd’hui la principale contrainte qui plombe le développement de l’Afrique. Les voies de transport routier sont peu nombreuses et elles ne sont pas toujours bien entretenues. Le réseau ferroviaire est souvent obsolète et d’un autre âge. Quant au transport aérien interafricain, il est encore loin de répondre à nos attentes et de faire face aux exigences d’un secteur hautement concurrentiel.
Je rappelle, Monsieur le Président Kaberuka, que le soutien de la Côte d’Ivoire vous a été acquis quand vous avez fait du développement des infrastructures une des priorités de la BAD. Je voudrais saluer ici ce choix et les actions que vous avez engagées.
Concernant la production et la distribution de l’énergie électrique, il faut reconnaitre que l’Afrique vit un véritable paradoxe. Nous avons toutes les sources d’énergie électrique connues : des cours d’eau pour les barrages hydroélectriques, du charbon, du gaz, de l’uranium, le soleil, le vent et nous n’avons pas d’électricité. Selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), seulement 23% de la population de l’Afrique subsaharienne a accès au réseau électrique.
L’explication est que nos ressources ne sont pas suffisamment exploitées. Quand elles sont exploitées, et là où elles le sont, cela ne profite pas assez au développement du continent.
C’est dans ce contexte que la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), a décidé de la création d’un « Fonds pour le Développement et le financement des secteurs des Transports et de l’Energie (FODETE – CEDEAO). La Côte d’Ivoire assure la coordination de ce projet qui bénéficie d’un appui financier et institutionnel de la BAD.
Notre objectif est d’arriver, à court et moyen termes, à garantir la fourniture d’électricité dans nos Etats pour le bien-être des populations, pour l’essor de nos économies et pour l’intégration sous-régionale. Nous comptons sur l’appui de la BAD.
A côté de ces deux premiers défis, il y a la question de la production et de la distribution de l’eau. L’eau est une denrée fragile dont la production, la conservation et la distribution deviennent de plus en plus chères. On estime que d’ici cinquante ans, l’eau potable sera aussi chère et rare que le sont aujourd’hui les produits pétroliers.
L’Afrique doit prendre conscience de ses handicaps dans ce secteur, comme dans bien d’autres secteurs, mais aussi de ses potentialités. Nous ne sommes pas les moins lotis par la nature. Il nous appartient de mettre nos ressources en valeur et la BAD peut nous y aider.
Mesdames et Messieurs, la liste de nos défis est longue. Ils vont de la formation des élites africaines, pour mettre leurs compétences au service du développement du continent, à la question des migrations extérieures qui donne le sentiment que l’Afrique est «une trappe de la pauvreté» que ses propres fils fuient. Mais, au-delà des drames de l’émigration clandestine, il y a une contribution des émigrés africains à l’économie de leurs pays d’origine. La BAD peut s’impliquer dans les réflexions autour de cette fameuse « épargne des migrants », pour l’orienter vers des investissements productifs.
Je pourrais également revenir sur les grands sujets qui constituent aujourd’hui les problèmes communs de l’humanité. Ils concernent les questions liées aux changements climatiques, à la déforestation, à l’érosion des côtes et, plus généralement, à l’environnement qui sont autant de problèmes désormais discutés à l’échelle mondiale.
Les pays africains sont souvent en première ligne sur ces questions, quand il s’agit par exemple de la forêt du bassin du Congo, de l’avancée du désert au Sahel, etc. Mais aucun de nos pays, pris individuellement, ne peut faire prévaloir son point de vue, s’il n’est pas soutenu par l’ensemble des autres pays. La BAD pourrait prendre le leadership pour l’Afrique et nous aider à nous organiser pour défendre nos intérêts dans les fora internationaux.
La lutte contre les pandémies est le dernier défi que je voudrais évoquer. Outre les grandes pandémies mondiales, comme le SIDA, qui mobilisent toute la communauté internationale, il y a des pandémies spécifiques à l’Afrique comme le paludisme qui continuent de faire des ravages au sein de nos populations. Ces «maladies africaines» comme on les appelle, doivent faire l’objet de recherches spécifiques d’envergure et soutenues. Le soutien de la recherche sur ces maladies pourrait être une mission prioritaire de la BAD.
Comme vous le voyez, Mesdames et Messieurs, nous attendons beaucoup de la Banque Africaine de Développement. Nous plaçons dans votre institution, dans notre institution, tous les espoirs suscités au sein de nos populations par les progrès scientifiques et économiques enregistrés dans le monde ces dernières années, mais qui restent encore hors de portée.
Nous voyons tous l’Europe et la Communauté financière internationale se mobiliser pour éviter à un seul pays, la Grèce, de sombrer et d’entraîner d’autres pays européens dans sa chute. En un temps record, 750 milliards de dollars ont été trouvés pour la Grèce (500 milliards par l’Europe et 250 milliards par le FMI).
On se rappelle encore comment, en 2008, les autorités américaines (un Président républicain, George Bush, puis un Président Démocrate, Barack Obama) ont mobilisé 800 milliards de dollars pour venir en aide au secteur financier américain alors en crise, afin d’éviter un crash financier mondial.
Dans ces deux cas, il ne s’agit pas d’opérations philanthropiques, mais d’actions visant à sauver un système financier intégré. Nous devons comprendre, a contrario, la timidité des engagements internationaux pour sauver les économies des Etats africains lorsqu’elles sont en crise. C’est le signe que le niveau d’intégration de nos économies au système financier international est encore trop faible pour menacer celui-ci en cas de crise.
Cette situation devrait interpeller tous les intellectuels africains : il est grand temps de s’attaquer aux problèmes structurels qui entravent le développent de notre continent.
La part des politiques dans cet engagement est grande. Il s’agit de créer partout sur le continent un environnement propice au progrès économique. Un environnement politique débarrassé du spectre des coups d’Etat et basé sur l’exercice démocratique du pouvoir.
Un environnement économique où la prospérité des entreprises est garantie par la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption et une saine concurrence entre les entreprises du secteur privé et du secteur public.
Mais par-dessus tout, des Etats viables et stables pouvant encadrer, arbitrer, s’il le faut, intervenir si nécessaire, pour la vie économique du pays. Les dernières crises économiques et financières observées dans le monde et les solutions adoptées pour les résoudre ont consacré le retour et l’importance de l’Etat dans le développement des pays et des économies.
En Amérique hier, en Europe aujourd’hui pour la Grèce, ce sont les Etats qui décident de ce qu’il faut faire pour juguler les crises financières.
Nous devons tout faire pour éviter ce qui peut fragiliser nos Etats. Car il n’y a pas d’économie viable là où il n’y a pas d’Etat. Il n’y a pas d’économie viable là où il n’y a pas un Etat capable de fixer et de faire respecter les règles de la vie en société et de la concurrence économique.
C’est ainsi que nous pourrons développer un secteur privé fort dans nos pays et attirer des investisseurs étrangers. Le rôle de l’Etat est de soutenir le développement d’un secteur privé capable d’investir dans tous les secteurs de la vie économique de nos pays, et non de concurrencer les entrepreneurs.
Vous aurez compris, Mesdames et Messieurs, combien, à mes yeux, la sauvegarde de l’Etat est un enjeu important de la sortie de crise en Côte d’Ivoire. Si nous avons pu faire le chemin qui nous mène aujourd’hui vers les élections, vers la fin de la crise, c’est parce que l’Etat ivoirien ne s’est pas effondré.
De nombreux pays africains ne se sont jamais remis des crises qui ont entraîné l’effondrement de l’Etat. Si nous nous battons pour sortir notre pays, la Côte d’Ivoire, de cette crise où elle n’aurait jamais dû tomber, c’est pour ne pas désespérer de l’Afrique.
La Banque Africaine de Développement aura toujours le soutien de la Côte d’Ivoire. Si l’augmentation du capital, qui est à l’ordre du jour de vos travaux est acquis, je puis promettre, d’ores et déjà, que la Côte d’Ivoire saura y tenir son rang.
Notre pays est un petit pays. Un pays sous développé. Mais, un pays riche de ses potentialités économiques, et surtout de l’engagement de tous ses habitants à œuvrer à son développement.
La crise ivoirienne a déjà pris fin. Faites nous confiance. Ce qui unit les fils et filles de ce pays est plus grand et sera toujours plus fort que ce qui pourrait les opposer. L’unanimité qui s’est dégagée, au sein de la classe politique ivoirienne, autour de la tenue des présentes assises de la BAD est à la fois un signal et un message. Je salue la présence dans cette salle de tous les partis politiques significatifs pour vous accueillir, pour accueillir la BAD.
C’est un signal que nous donnons au monde entier, pour montrer que cette crise n’était pas aussi profonde que l’on a pu le faire croire à l’extérieur. C’est un message que nous adressons, en particulier aux milieux d’affaires, pour dire que la Côte d’Ivoire n’a pas sombré, que ce pays est debout et garde intacts tous ses atouts économiques. Nous avons un pays à reconstruire et nous entendons le faire avec vous. Nous avons une économie à relever et c’est avec vous que nous comptons le faire.
Il y a sept ans, les autorités de la BAD prenaient la décision de délocaliser les activités de l’institution. Je ne voudrais pas revenir sur les raisons développées et entretenues pour justifier cette décision. Le temps n’est pas à la polémique. Le Temps est venu pour que la BAD de revenir à Abidjan.
La classe politique ivoirienne, dans toutes ses composantes, toutes les institutions de la République, ici représentées au grand complet, tous les opérateurs économiques, du privé comme du public, tous les travailleurs, les élus et la société civile en accord avec le peuple de Côte d’Ivoire, demandent solennellement par ma voix, à la Banque Africaine de Développement de revenir à la maison, de revenir en Côte d’Ivoire, à Abidjan, son siège.
Tout en souhaitant plein succès à vos travaux, je déclare ouvertes les Assemblées annuelles 2010 des Conseils des Gouverneurs du Groupe de la Banque Africaine de Développement.
Que Dieu bénisse l’Afrique,
Que Dieu bénisse la Banque Africaine de Développement
Que Dieu bénisse la Côte d’Ivoire !
Laurent Gbagbo
Président de la République de Côte d’Ivoire