La moisson n'a pas tenu la promesse des fleurs. En effet, les dernières assemblées annuelles de la Bad (Banque africaine de développement) n'ont pas été à la hauteur des espoirs caressés par les autorités ivoiriennes. Au niveau organisationnel et médiatique, la Côte d'Ivoire a été félicitée. Selon les organisateurs, ces assemblées ont connu une affluence record avec près de 2.500 participants. Mais pour le peuple ivoirien, cette réunion était un prétexte pour les autorités ivoiriennes de faire un grand plaidoyer pour le retour de cette institution qui a plié bagage au lendemain de la crise ivoirienne de 2002 pour insécurité. Avec délocalisation en Tunisie en attendant que les conditions soient réunies pour revenir à Abidjan. A la cérémonie d'ouverture, c'est d'abord Paul-Antoine Bohoun Bouabré, président du Conseil des Gouverneurs de la Bad et ministre ivoirien de demander aux Gouverneurs de la Bad de peser de tout leur poids pour le retour de la BAD en Côte d'Ivoire. Car les Ivoiriens ne comprendraient pas qu'au terme de ces assemblées annuelles, l'institution ne revienne pas à Abidjan occuper son siège qui l'attend. Jean Ping, président de la commission de l'Union africaine s'est également mêlé de la partie en évoquent les sacrifices consentis par la Côte d'Ivoire et qui devrait logiquement aboutir au retour de la Banque. Idem pour le Chef de l'Etat ivoirien, le président Laurent Gbagbo. "Bad revient à la maison, à Abidjan, ton siège t'attend". Ces propos de Laurent Gbagbo avait pour but de demander à la Banque présidée par Donald Kaberuka de revenir en Côte d'Ivoire. Et le président Gbagbo de convaincre que "la crise en Côte d'Ivoire a pris fin et qu'elle n'a jamais été aussi profonde que l'on a voulu le faire croire". Mais à ces différents plaidoyers, la Bad est restée de marbre. Son premier responsable, Kaberuka a expliqué qu'il appartient aux Ivoiriens de régler le problème de la crise qui est loin d'être terminée même si des efforts ont été consentis par la Côte d'Ivoire. Lors de la conférence de presse de clôture, il a encore enfoncé le clou insistant sur l'importance des conditions sécuritaires devant favoriser le "come back" de la Banque. Ce que l'on peut donc retenir de ces assises, c'est que la montagne a accouché d'une souris en ce qui concerne le retour de la Bad en Côte d'Ivoire comme l'avait souhaité les autorités ivoiriennes. Une grande désillusion pour les Ivoiriens qui nourrissaient le secret espoir de frapper un grand coup. Mais il convient de rappeler, et c'est vraiment dommage, que c'est la Côte d'Ivoire elle-même qui s'est faite hara-kiri. En effet, il était important pour le pays d'organiser l'élection présidentielle, gage de sécurité tant recherchée par les institutions internationales. Le Japon, par le biais de son ambassadeur avait, il y a quelques mois, déploré la non tenue de l'élection présidentielle et le non respect de la parole donnée des autorités ivoiriennes. Alors que c'est la promesse ferme des Ivoiriens d'organiser cette élection en novembre 2009, qui avait amené la Banque, lors des assemblées annuelles de Dakar, au Sénégal, de confier l'organisation des assises en Côte d'Ivoire. Mais cela n'a pas été le cas. Les autorités ivoiriennes n'ont qu'à s'en prendre à elle-même. Elles sont fautives. L'on a cru, après l'échec du retour de la Bad, que nos autorités mettraient tout en œuvre pour aller aux élections, mais là encore, des doutes subsistent sur la tenue de l'élection présidentielle. En effet, à peine ces assemblées sont-elles terminées, que le président Laurent Gbagbo passe à l'offensive. Dans une interview sur Rfi (Radio France internationale) ce week-end, le camp présidentiel, par la voix de Laurent Gbagbo, explique que les conditions de la tenue de l'élection ne sont pas encore réunies. Arguant qu'il faille le redéploiement complet de l'administration (corps préfectoral, douanes, impôts) et bien d'autres aspects. Gbagbo veut donc démontrer que la crise n'est pas totalement finie alors qu'il avait soutenu le contraire devant les autorités de la Bad lors de l'ouverture des assemblées annuelles. Cependant, il faudrait par ailleurs retenir que ces assises ont permis le triplement du capital du Groupe (100 milliards de dollars), la réélection pour un second mandat de Kaberuka, l'augmentation des sièges du conseil d’administration qui passent de 18 à 20 et la tenue des prochaines assemblées annuelles de juin 2011 à Lisbonne, au Portugal.
Jean Eric Adingra
Jean Eric Adingra