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Politique Publié le mercredi 2 juin 2010 | Nord-Sud

Relations Franco-ivoiriennes : La politique de la chaise vide de Gbagbo peut-elle payer ?

© Nord-Sud Par Valery Hache
Coopération : 25è Sommet France-Afrique à Nice, France
Photo de groupe au sommet Afrique-France à Nice, le 31 mai 2010
Le dialogue de sourd continue entre Abidjan et Paris, sur un air de je t`aime, moi non plus. Derniers signes qui traduisent la tiédeur des relations entre la Côte d`Ivoire et son ancienne métropole, la décision prise depuis de longues dates par le chef de l`Etat ivoirien de ne pas répondre à l`invitation de son homologue français, Nicolas Sarkozy qui organisait du 31 mai au 1er juin, son premier sommet Afrique-France. Si on en croit les autorités françaises, notamment l`ancien ministre de la Culture, Jacques Toubon, chargé par Nicolas Sarkozy de coordonner le cinquantenaire des anciennes colonies d`Afrique, jusqu`à la finalisation de la liste des convives, Laurent Gbagbo n`avait pas daigné donner de suite à l`invitation à lui adressée. Finalement, le chef de l`exécutif ivoirien choisit de se faire représenter par le président du Conseil économique et social, Laurent Dona Fologo, avant de dire, dans un entretien accordé, dimanche dernier à Radio France Internationale (Rfi), pourquoi il boycotte la France. En gros, le chef de l`Etat ivoirien continue de ruminer sa colère contre l`ancienne métropole. Il en veut à la France d`avoir voulu le liquider. Il veut donc vider ce contentieux avant toute normalisation des relations entre les deux pays. « Je n`ai jamais fait un mystère à propos de l`implication de l`Etat français, à travers les personnes de Jacques Chirac et de Dominique De Villepin, dans la tentative de renversement de mon régime. Ce n`est pas aujourd`hui que je vais dire le contraire. Mais on ne s`est jamais assis avec l`Etat français pour discuter de toutes ces questions », argue-t-il avant de battre en brèche les thèses de ceux qui estiment que le rendez-vous de Nice qu`il a boycotté, aurait été la bonne occasion pour entamer le dialogue franc qu`il appelle de ses vœux avec Paris. « Je ne crois pas que ce soit une bonne solution d`aller au Sommet de Nice pour discuter d`un différend que j`estime fondamental. Il faut qu`on le discute d`abord. Et après, je pourrai faire un déplacement. Il n`y a pas de raison pour que j`aille en France tant qu`on n`a pas discuté du différend qui continue d`opposer l`Etat français à l`Etat de Côte d`Ivoire. Il n`y a donc pas de raison pour l`instant que j`aille en visite en France. J`attends que ceux qui doivent prendre les initiatives les prennent. Sinon, moi je suis chez moi », soutient, indéboulonnable, Laurent Gbagbo qui ne prendra pas part à la fête du 14 juillet prochain en France, aux côtés de ses pairs Africains. Selon certains milieux diplomatiques à Abidjan, c`est pour policer son discours que Laurent Gbagbo n`épingle que MM. Chirac et De Villepin. En réalité, il a également un contentieux important avec l`actuel locataire de l`Elysée qui l`aurait traité de « pas digne ». Mieux Nicolas Sarkozy aurait confié que le « nettoyage » du pouvoir d`Abidjan ne lui aurait jamais demandé un effort extraordinaire. En entretenant donc, plus ou moins volontairement, ce dialogue de sourd, le chef de l`Etat démontre qu`il n`entend pas faire de la normalisation des relations franco-ivoiriennes, une priorité avant la tenue des élections. Il veut être dans une posture qui lui permet de bien manœuvrer. Dans cette optique, il mise sur les élections qu`il espère vivement remporter (avant cela, la France pourrait vouloir dire son mot dans le processus). C`est sans doute ce qui justifie le fait qu`il ne soit plus « chaud » pour rediscuter l`accord de défense avec Paris, alors qu`il en avait fait un cheval de bataille aux lendemains de septembre 2002 et de novembre 2004. Côté Français, on ne veut pas brusquer les choses. On observe, surtout que les affaires continuent de se faire. Pour preuve, les Journées nationales des nouvelles technologies de l`information et de la communication (Jntic) qui ont débuté, hier, enregistrent la participation de nombreux entrepreneurs français.

Dans les milieux diplomatiques, même si on comprend la légitimité des récriminations de M. Gbagbo, on ne juge pas moins contre-productive la posture dans laquelle se place le numéro un ivoirien. « Les Etats n`ont pas d`amis, ils n`ont que des intérêts », rappelle notre source. De l`avis de nombreux participants au sommet de Nice, on pense même que ni le pays, c`est-à-dire la Côte d`Ivoire, ni Laurent Gbagbo lui-même ne sortiront gagnants de ce dialogue de sourds. Du côté des partisans de Laurent Gbagbo, on est convaincu que c`est plutôt la France qui regrettera si elle ne saisit pas la main tendue par le chef de l`Etat ivoirien. Quelle que soit la voie qui sera empruntée, les relations franco -ivoiriennes ne seront pas ce qu’elles ont été du temps de Félix Houphouet-Boigny.

Marc Dossa
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