On ne parle pas d’eux comme des malades du sida ou des victimes des autres pandémies. Ils ne sont pas pour autant les moins souffrants. Privés de leurs membres, les personnes handicapées par le diabète ont même droit, parfois, à plus de réconfort. Une Ong a créé un centre de réadaptation au Chu, pour eux, et pour tous les handicapés physiques.
Partie dans la difficulté, accueillie par l’amertume. Lorsque Silué Marie quitte son domicile, ce 25 mai, elle possède à peine la somme nécessaire pour son déplacement au Centre hospitalier universitaire(Chu) de Yopougon. Amputée des deux jambes depuis 4 ans, suite à une complication du diabète, cette dame d’environ 50 ans, ne peut plus emprunter n’importe quel véhicule de transport en commun. Il lui faut un taxi-compteur. Elle habite Cocody, II Plateaux, mais ne fait pas partie des nantis de ce quartier qui peuvent, les yeux fermés, débourser les 10.000 Fcfa que coûte le voyage. 5.000 F l’aller, et le même montant pour le retour, après négociation. Rendue invalide par son mal, Marie ne pratique plus son commerce qui l’aurait aidé à faire face à cette dépense, avec moins de peine. Chaque semaine, elle compte sur des âmes généreuses pour honorer ses rendez-vous, au centre de réadaptation physique.
Quand une douleur en crée une autre
Il se trouve dans l’angle droit du Chu, à votre droite, en allant vers le service des urgences. Composé d’une administration et d’un atelier de fabrication de prothèses, cette structure fonctionne depuis avril 2000, sous l’initiative de ‘’Vivre debout’’, Ong spécialisée dans l’aide aux personnes handicapées. Grâce à des appuis financiers extérieurs, le centre assure une réadaptation moins coûteuse aux personnes victimes d’handicaps physiques, accidentels, congénitaux ou causés par des maladies comme le diabète ou la poliomyélite. Le caractère social de ses tarifs ne suffit pas cependant à soulager Silué Marie. Grâce à ses maigres épargnes, la mère de famille, livrée à elle-même, a réussi, ce mardi, à honorer son rendez-vous hebdomadaire. Mais, dès qu’elle descend du taxi, une autre douleur l’attend sous la bâche des patients. Celle d’apprendre qu’elle ne pourra pas disposer maintenant de ses nouvelles jambes. Des jambes artificielles qu’elle recherche depuis de longues semaines, pour retrouver un minimum de confort, et une consolation. Les deux appareils ont été fabriqués à 280.000 Fcfa. La brave femme a déjà versé 150.000 F. Dommage, l’acompte n’a pas encore atteint le seuil auquel l’hôpital aurait pu la laisser repartir avec ses ‘’pieds’’. Où trouver les 130.000 F restant ? Vous n’aurez que partiellement résolu son problème en lui offrant uniquement cette somme. En effet, Marie a un autre problème plus crucial. Il lui faut urgemment faire des examens médicaux à plus de 200.000 F pour ne pas mourir, du jour au lendemain, d’un arrêt cardiaque. (Lire l’intégralité de son témoignage). Il est presque 10h. Les taxis continuent de se suivre devant la tente placée devant l’entrée principale du centre. Ils transportent des handicapés, pour la plupart amputés à cause du diabète. Chacun est accompagné d’un ou de deux proches. Certains viennent avec leurs épouses. D’autres avec leurs enfants. D’autres encore avec un ami ou des voisins. A chaque arrivée, l’accueil est chaleureux. Des salutations, et parfois des chahuts. A force d’attendre ensemble, toutes les semaines, sous cette bâche, les patients ont fini par se connaître, et créer une famille. C’est aussi l’un des rares moments de leur vie, où ils peuvent se retrouver à 20, voire 30 personnes frappées par le même sort. Cela les aide à oublier leur malheur. Et même à jouer entre eux. Dans le groupe, Marie est réputée être la plus prolixe. Alors, au moment de rendre des témoignages, tous, en chœur, lui demandent d’être la première à s’exprimer. « C’est Marie qui aime beaucoup parler, commencez par elle », lance le groupe dans un brouhaha amusant. Malgré ses pensées, Marie est effectivement volubile. Faut-il pour cela se précipiter vers elle, en dépassant le calme Koutou Ehouma, qui est plus proche ? Ce serait prendre le risque de frustrer davantage ce paysan privé de sa plantation depuis plus d’un an, et peut-être, pour le reste de sa vie.
Attention aux petites plaies
Une petite plaie qu’il a eue à l’orteil en avril s’est aggravée pour lui coûter sa jambe droite. Encore le diabète. Après son amputation, au Centre hospitalier régional (Chr) d’Abengourou, il est venu à Abidjan pour se mettre une jambe artificielle. L’adaptation de la prothèse prend du temps. L’installation finie, le malade doit faire plusieurs jours de rééducation, et revenir à plusieurs reprises pour des contrôles. Jusque là, chaque fois que M. Ehouma est revenu au Chu, c’est avec de nouvelles plaies provoquées par l’appareil.
Ce centre a l’habitude de recevoir des accidentés. Mais curieusement, aujourd’hui, il n’y en a presque pas. La quasi-totalité des handicapés présents sont des victimes du diabète. Ce qui témoignage du nombre de plus en plus croissant de personnes handicapées par cette maladie. C’est d’ailleurs pour cette raison que tous les patients sont prêts à parler publiquement de leurs maux. Chez eux, le souci de prévenir de nouveaux cas d’invalidité, a pris le-dessus sur la gêne de faire connaître leur infirmité. Y a-t-il meilleure leçon d’altruisme ?
Cissé Sindou
Partie dans la difficulté, accueillie par l’amertume. Lorsque Silué Marie quitte son domicile, ce 25 mai, elle possède à peine la somme nécessaire pour son déplacement au Centre hospitalier universitaire(Chu) de Yopougon. Amputée des deux jambes depuis 4 ans, suite à une complication du diabète, cette dame d’environ 50 ans, ne peut plus emprunter n’importe quel véhicule de transport en commun. Il lui faut un taxi-compteur. Elle habite Cocody, II Plateaux, mais ne fait pas partie des nantis de ce quartier qui peuvent, les yeux fermés, débourser les 10.000 Fcfa que coûte le voyage. 5.000 F l’aller, et le même montant pour le retour, après négociation. Rendue invalide par son mal, Marie ne pratique plus son commerce qui l’aurait aidé à faire face à cette dépense, avec moins de peine. Chaque semaine, elle compte sur des âmes généreuses pour honorer ses rendez-vous, au centre de réadaptation physique.
Quand une douleur en crée une autre
Il se trouve dans l’angle droit du Chu, à votre droite, en allant vers le service des urgences. Composé d’une administration et d’un atelier de fabrication de prothèses, cette structure fonctionne depuis avril 2000, sous l’initiative de ‘’Vivre debout’’, Ong spécialisée dans l’aide aux personnes handicapées. Grâce à des appuis financiers extérieurs, le centre assure une réadaptation moins coûteuse aux personnes victimes d’handicaps physiques, accidentels, congénitaux ou causés par des maladies comme le diabète ou la poliomyélite. Le caractère social de ses tarifs ne suffit pas cependant à soulager Silué Marie. Grâce à ses maigres épargnes, la mère de famille, livrée à elle-même, a réussi, ce mardi, à honorer son rendez-vous hebdomadaire. Mais, dès qu’elle descend du taxi, une autre douleur l’attend sous la bâche des patients. Celle d’apprendre qu’elle ne pourra pas disposer maintenant de ses nouvelles jambes. Des jambes artificielles qu’elle recherche depuis de longues semaines, pour retrouver un minimum de confort, et une consolation. Les deux appareils ont été fabriqués à 280.000 Fcfa. La brave femme a déjà versé 150.000 F. Dommage, l’acompte n’a pas encore atteint le seuil auquel l’hôpital aurait pu la laisser repartir avec ses ‘’pieds’’. Où trouver les 130.000 F restant ? Vous n’aurez que partiellement résolu son problème en lui offrant uniquement cette somme. En effet, Marie a un autre problème plus crucial. Il lui faut urgemment faire des examens médicaux à plus de 200.000 F pour ne pas mourir, du jour au lendemain, d’un arrêt cardiaque. (Lire l’intégralité de son témoignage). Il est presque 10h. Les taxis continuent de se suivre devant la tente placée devant l’entrée principale du centre. Ils transportent des handicapés, pour la plupart amputés à cause du diabète. Chacun est accompagné d’un ou de deux proches. Certains viennent avec leurs épouses. D’autres avec leurs enfants. D’autres encore avec un ami ou des voisins. A chaque arrivée, l’accueil est chaleureux. Des salutations, et parfois des chahuts. A force d’attendre ensemble, toutes les semaines, sous cette bâche, les patients ont fini par se connaître, et créer une famille. C’est aussi l’un des rares moments de leur vie, où ils peuvent se retrouver à 20, voire 30 personnes frappées par le même sort. Cela les aide à oublier leur malheur. Et même à jouer entre eux. Dans le groupe, Marie est réputée être la plus prolixe. Alors, au moment de rendre des témoignages, tous, en chœur, lui demandent d’être la première à s’exprimer. « C’est Marie qui aime beaucoup parler, commencez par elle », lance le groupe dans un brouhaha amusant. Malgré ses pensées, Marie est effectivement volubile. Faut-il pour cela se précipiter vers elle, en dépassant le calme Koutou Ehouma, qui est plus proche ? Ce serait prendre le risque de frustrer davantage ce paysan privé de sa plantation depuis plus d’un an, et peut-être, pour le reste de sa vie.
Attention aux petites plaies
Une petite plaie qu’il a eue à l’orteil en avril s’est aggravée pour lui coûter sa jambe droite. Encore le diabète. Après son amputation, au Centre hospitalier régional (Chr) d’Abengourou, il est venu à Abidjan pour se mettre une jambe artificielle. L’adaptation de la prothèse prend du temps. L’installation finie, le malade doit faire plusieurs jours de rééducation, et revenir à plusieurs reprises pour des contrôles. Jusque là, chaque fois que M. Ehouma est revenu au Chu, c’est avec de nouvelles plaies provoquées par l’appareil.
Ce centre a l’habitude de recevoir des accidentés. Mais curieusement, aujourd’hui, il n’y en a presque pas. La quasi-totalité des handicapés présents sont des victimes du diabète. Ce qui témoignage du nombre de plus en plus croissant de personnes handicapées par cette maladie. C’est d’ailleurs pour cette raison que tous les patients sont prêts à parler publiquement de leurs maux. Chez eux, le souci de prévenir de nouveaux cas d’invalidité, a pris le-dessus sur la gêne de faire connaître leur infirmité. Y a-t-il meilleure leçon d’altruisme ?
Cissé Sindou