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Politique Publié le jeudi 17 juin 2010 | Le Patriote

Le parcours sinueux de Laurent Gbagbo : Socialiste dans l’opposition, bourgeois au pouvoir

© Le Patriote Par Emma
Elections présidentielles 2010 - Les experts autour du président Laurent Gbagbo et du premier ministre, Guillaume Soro
Vendredi 4 juin 2010. Abidjan, Palais Présidentiel. Réunion des acteurs administratifs et techniques du processus électoral ainsi que des Experts de l’ONU et de la Facilitation Burkinabé
Le Pr. Mamadou Koulibaly n’a rien inventé, au regard de sa sortie au vitriol contre sa formation politique au pouvoir depuis une décennie. Toutes les tares dénoncées par le président de l’Assemblée nationale ne sont pas nouvelles. Elles sautent aux yeux depuis que Laurent Gbagbo a pris les rênes du pouvoir, par «le soulèvement populaire» d’octobre 2000. Ceux qui ont entendu l’ancien opposant historique pendant sa lutte pour la conquête de la Magistrature Suprême, en sont à se demander encore si c’est la même personne qui dirige en ce moment la Côte d’Ivoire. Tant la transfiguration est déroutante. Même ses partisans qui espéraient son arrivée aux affaires, pour inaugurer un nouveau type de gouvernance comme l’homme ne cessait de le promettre à ses concitoyens, ont fini par intégrer la fameuse citation d’Anatole Mendès France: «les changements même les plus souhaités ont leur part de mélancolie». Celui que les Ivoiriens voyaient régulièrement, tenir meetings et battre le pavé, pour crier sa colère aux gouvernants d’antan, en proclamant une «alternative démocratique», avec l’avènement de la démocratie, de la liberté, de la lutte contre la corruption, l’impunité, a bien changé. Celui qui se vantait d’être «une poche de moralité», qui se proposait de «gouverner autrement et mieux la Côte d’Ivoire» s’est soudainement métamorphosé, s’il n’a pas carrément oublié ses discours d’antan. L’ancien opposant historique qui disait naguère n’avoir pas d’argent à nous donner, mis à part ses idées et propositions généreuse et qui s’est illustré en donnant dix mille francs CFA aux obsèques de Félix Houphouët Boigny, vit le temps des mutations depuis octobre 2000. Le socialiste de la dernière heure, présenté comme «le messie», «l’homme providentiel» par ses partisans, grand combattant de la misère, de la pauvreté et qui annonçait son accession au pouvoir comme la fin des injustices et le temps de la répartition des biens communs entre les différentes couches sociales, a vite fait de renoncer à son sacerdoce. Celui qui nous exhortait à faire un tour dans une banque de la Riviera Golf, pour nous assurer qu’il n’est pas un homme riche, a fini par jeter aux mouches et aux orties, ses professions et proclamations idéologiques. Depuis Octobre 2000, le socialiste est devenu un grand bourgeois. Laurent Gbagbo qui aimait à dire qu’il est «un enfant de pauvre», qui «commettait souvent des larcins quand il était petit» et qui rusait avec les vendeuses d’attiéké du marché de Gagnoa, pour manger sans dépenser un sou, a oublié et s’est oublié devant les délices et lambris dorés du pouvoir. Ceux de ses amis d’enfance et compagnons de lutte, qui «ont vu le roi nu», tombe à la renverse en le voyant à présent proclamer que «les temps ont changé». Les cheveux et barbes hirsutes, les boubous lessivés, usés par le temps et les lunettes démesurément grandes, ne sont plus de saison. La transition au pouvoir, si brutale, a considérablement changé notre ancien opposant. Il ne cache nullement d’ailleurs son nouveau statut de nanti : « avant, on n’avait rien. Maintenant, on a un peu ». Pour qui connaît les subtilités de ce discours bien ivoirien, le décryptage est aisé et traduit véritablement un trop plein de suffisance, de morgue et de raillerie vis-à-vis des anciens tenants du pouvoir. Pour sûr, depuis dix ans, Gbagbo et son système ont pris ancrage sur une donne sans ambiguïté: la culture de l’argent. Toute la thématique du discours de ce politicien atypique, qui narguait «les crapauds brousse» aux affaires par le passé, tourne autour du gain. Il faut s’enrichir «vite, vite, vite», avant que les choses ne prennent une autre tournure. Comme en pareille circonstance, la propension est grande pour ce type de «nouveau riche» de provoquer les anciens bienfaiteurs. Feu Omar Bongo Ondimba, qui s’est montré très généreux avec lui a été traité de « rigolo », quand Alassane Ouattara, le patron du RDR, qui n’a pas lésiné sur les moyens pour le mettre à l’abri du besoin, a eu droit à sa dose d’ingratitude: «tu n’as rien et tu n’es rien». Il a bien raison Laurent Gbagbo! Lui qui n’espérait pas une étoile, a eu droit à la lune. Pourquoi donc s’abstenir de manger du miel? Le camarade socialiste qui vitupérait contre les fonds de souveraineté pourtant modestes de Félix Houphouët Boigny et de Konan Bédié, s’est taillé un budget annuel de plus 75 milliards de nos francs. En plus de gagner mensuellement, un salaire de 9 millions. En terme de comparaison, Laurent Gbagbo, l’homme a la critique acerbe, a plus d’argent que le Président français, Nicolas Sarkozy et le président de la première puissance mondiale, Barack Obama des Etats-Unis d’Amérique. Depuis octobre 2000, le socialisme proclamé a vécu et est mort de sa belle mort. Exit les grands discours sur l’égalité, le mérite, la lutte contre la concussion des deniers publics. Le règne de Laurent Gbagbo a sonné la course à l’enrichissement rapide et illicite et le début de la curée de l’économie nationale. L’argent est devenu très sensément l’emblème et le trait distinctif de la refondation. Depuis dix ans, les scandales économiques foisonnent, avec comme signes visibles, les détournements dans la filière café cacao, le pétrole, les 100 milliards de Trafigura, octroyés pour dédommager les victimes des déchets toxiques, la montée en puissance du racket qui génère des dividendes pour des pontes du régime, les achats de places dans les écoles de police, de gendarmes et à l’ENA, pour ne citer que ces exemples bien d’actualité. C’est peu de dire que sous Gbagbo «le socialiste», la société ivoirienne est fortement gangrenée par la culture de l’argent. Il n’y a qu’à regarder dans l’entourage du grand chef pour s’en rendre compte. Un état de fait que dénonce régulièrement du reste, le Pr. Mamadou Koulibaly, qui ne reconnaît plus ses amis d’hier, vagues moralisateurs de la vie nationale. Avec à la tête un certain Laurent Gbagbo, socialiste uniquement du bout des lèvres et qui s’est révélé, une fois au pouvoir, comme un nouveau bourgeois qui se moque de la souffrance des Ivoiriens.

Bakary Nimaga
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