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Afrique Publié le vendredi 25 juin 2010 | Le Nouveau Réveil

REPORTAGE / Guinée Conakry / Election présidentielle ce dimanche 27 juin / Aziz Diop (Secrétaire exécutif du Conseil national des organisations de la société civile guinéenne, CNOSCG) : “Plus de 500 observateurs internationaux vont couvrir cette élection historique en Guinée”

Aziz Diop, la quarantaine, est le patron de la société civile guinéenne. Avec le Conseil national des organisations de la société civile guinéenne (CNOSCG) dont il est le secrétaire exécutif, il est présent sur le front social, depuis plus de dix ans " pour obtenir plus de démocratie ", précise-t-il. A moins de quatre jours de l'élection présidentielle, dans son pays, son temps est plus que compté. " Le moment est historique, tout comme l'enjeu est de taille ", souligne-t-il, entouré de collaborateurs à la mine aussi grave que la sienne. Ce jeudi 23 juin 2010, il a juste une demi-heure, " pas plus ", pour s'entretenir avec nous, à la nouvelle maison de la presse de Conakry, dans le quartier de Coléah, dans la banlieue de la capitale.


Quelle est la contribution de la société civile dans le processus électoral qui va aboutir, dimanche, à l'élection présidentielle ?
Depuis dix mois, nous avons déployé 964 observateurs sur le terrain, pour suivre l'évolution du processus électoral, de l'affichage de la liste électorale au déroulement de la campagne en passant par la distribution des cartes d'électeurs. Dimanche, nous serons dans les bureaux de vote et dans les centres de dépouillement, pour suivre la dernière ligne droite du processus électoral. Nous avons tant lutté pour en arriver là que nous ne nous pardonnerions pas d'avoir laissé un petit détail venu détruire le travail discipliné et difficile de toute une nation.

Globalement, que notent vos observateurs sur le déroulement de la campagne électorale, sur le terrain ?
Je puis vous dire que pour une fois, la Guinée étonne le monde entier. Il y a eu un respect mutuel évident entre tous les candidats. La campagne électorale se déroule dans de très bonnes conditions et la société civile que nous représentons est satisfaite. Cependant, nous avons eu à déplorer des incidents très souvent liés à des cas d'accidents graves voire mortels. Il y a eu quelques violences verbales, mais aucun cas de bagarres rangées ne nous a été signalé ni rapporté. J'en tire un réel motif de satisfaction et de fierté.

Rien donc ne vous fait peur pour le scrutin de dimanche ?
Nous nous battons depuis dix ans, sur le terrain, pour que la démocratie soit une réalité dans notre pays, surtout pour que les élections organisées dans ce pays soient crédibles. Au regard des informations que nous avons, à l'instant où je vous parle, je puis vous assurer que cette élection se déroule dans de très bonnes conditions et je pense que ces conditions demeureront jusqu'au scrutin. C'est un vote historique pour nous Guinéens qui avons là une occasion unique de faire revenir notre pays dans le concert des nations. Nous en sommes tous conscients. Les Guinéens, j'en suis convaincu, vont voter dans un climat de paix et de quiétude sociale. Quant à la société civile, elle va continuer de jouer son rôle d'éveil et de vigilance pour garantir le vote du citoyen. Cela se fera en synergie avec les 500 et plus observateurs internationaux, qui viennent couvrir cette élection. Le chiffre est astronomique mais c'est le prix à payer aujourd'hui, pour que la Guinée soit un modèle de réussite démocratique et une référence en matière d'organisation d'élections libres et crédibles.

Les précédents scrutins ont été émaillés de violences souvent meurtrières. Aujourd'hui, aucun incident majeur, sinon des écueils que vous jugez mineurs. Comment expliquez-vous cela ?
Depuis 1958, date de l'accession de notre pays à l'indépendance, notre pays n'a pas connu d'élections libres, ouvertes et démocratiques. Les élections étaient émaillées de fraudes. Dans l'administration, il y avait des cadres réputés spécialistes de " technologie électorale " et de détournements de vote en faveur du régime en place. C'était l'administration, contrôlée par le pouvoir, qui organisait les élections. La violence est liée à l'injustice. Pendant que des citoyens prônaient le changement et le manifestaient dans le choix de leurs candidats lors des consultations électorales, des autorités politiques et des fonctionnaires de l'administration posaient des actes allant dans un sens qui amenait à douter de la sincérité du scrutin. Dans le même temps, le statu quo instauré par ces détournements de vote, n'arrivait pas à se plier aux exigences de la bonne gouvernance et cela agaçait certains citoyens, qui le manifestaient souvent bruyamment. La répression aussi s'est faite souvent brutalement. Aujourd'hui, le climat est apaisé et les choses sont différentes. Le fait que ce soit la Ceni (Commission électorale nationale indépendante, NDLR), un organe indépendant, qui soit chargée d'organiser de bout en bout, le processus électoral et que le MATAP (ministère de l'Administration du territoire et des affaires politiques, qui organisait par le passé les élections, NDLR) ne fasse que superviser le processus, a contribué à instaurer un climat de sérénité et à susciter la confiance des acteurs impliqués dans le processus électoral. Au demeurant, le respect mutuel que les supporteurs des candidats, sur le terrain, se manifestent, est la conséquence de la maturité politique des leaders. Il faut aussi dire que ces derniers ont appris à se connaître, à se côtoyer et à travailler ensemble, au sein du Forum des forces vives (coalition de partis politiques et d'organisations de la société civile qui a notamment organisé le meeting du 28 septembre 2008 réprimé par les militaires et qui a causé la mort de plus de 150 opposants, NDLR).

Quelle a été la contribution du régime militaire au pouvoir dans l'avènement de ce climat de sérénité ?
La contribution des autorités est surtout liée au fait qu'aucun membre du CNDD (Conseil national pour la démocratie et le développement, junte militaire au pouvoir depuis le 23 décembre 2008, suite au décès la veille, du général président Lansana Conté, NDLR) n'est candidat. Au niveau du président par intérim, le général Sékouba Konaté, des membres de son cabinet, du premier ministre et du gouvernement, du Conseil national de transition, aucun n'est candidat. Cela a contribué à l'apaisement du climat social. Par ailleurs, les autorités préfectorales ou les chefs de quartiers, contrairement à ce qui se passait par le passé, accompagnent le processus et ne sont plus des acteurs directs du processus. Aucun Guinéen, militaire ou civil, n'a aujourd'hui intérêt à ce que le pays bascule dans la violence.

Quelle est la probabilité d'une reprise en main de la gestion du pouvoir par les militaires ?
Dans les conditions actuelles, aucune. Au contraire, je pense que les militaires, une fois pour toutes, ont la ferme volonté de rentrer dans les casernes. Du moins, c'est ce que souhaitent ardemment les membres de notre organisation. En effet, plus rien ne justifierait le retour des militaires sur la scène politique. C'est pourquoi, tous les citoyens posent des actes allant dans le sens de l'apaisement. Si le scrutin bascule dans la violence, ce sera un prétexte pour les militaires de revenir dans l'arène. Et ce serait l'effondrement d'efforts inlassables et d'acquis incalculables. Personne, je pense, ne veut qu'on revienne en arrière.

La Côte d'Ivoire court après une élection présidentielle qui devrait théoriquement se tenir avant octobre prochain, après plusieurs reports. Quels conseils donneriez-vous aux acteurs du processus électoral ivoirien ?
Tout dépend de la volonté politique, mais également du niveau d'éducation et de détermination des citoyens. Si les citoyens d'un pays veulent aller aux élections, il y a des canaux parfaitement démocratiques que nous connaissons tous, telles les pressions des organisations de la société civile, qui sont à leur disposition et dont ils peuvent faire usage. Toutefois, je crois savoir que les contextes dans chaque pays sont différents, de sorte que je ne dispose pas de conseils clé en main. Pour ce qui nous concerne, en Guinée, je puis vous dire que nous avons souffert depuis 1958. Le Guinéen de 1958 est différent de celui de 1984 (date qui marque la prise du pouvoir d'Etat par les militaires, suite au décès du président Sékou Touré, NDLR). Et aujourd'hui, avec la mondialisation, le citoyen guinéen de 2010 est devenu plus exigeant et veut des résultats tangibles de gouvernance allant dans le sens de la démocratie et de l'amélioration de ses conditions de vie.
Interview réalisée par André Silver Konan
kandresilver@yahoo.fr
Envoyé spécial à Conakry
Ph: ASK
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