Gagnoa : 10 ans de prison au seigneur de la drogue

Au quartier Zapata où il réside, il se fait appeler le seigneur de la drogue. A l'état civil, il se nomme Dago Bailly alias Kélé et a 27 ans. Il mérite bien le titre de seigneur de la vente de la drogue comme il s'est lui-même baptisé. La drogue dont il fait la commercialisation se classe parmi les plus fortes au monde. Il s'agit de l'héroïne et du crack. Autre raison qui fait de lui un seigneur, c'est que depuis 2007, il est activement recherché par la police des stupéfiants. C'est ce tristement célèbre seigneur qui va perdre sa couronne le 4 août dernier. Ce jour-là, Kélé donne rendez vous à Esso Ephrem Elisée, (un nom bien connu dans le milieu de la drogue) dans les rayons du corridor de la ville. Ce dernier était chargé d'accompagner le seigneur dans un village où Kélé devait traiter sa blessure au pied, suite à une chute à moto. Sachant qu'il est recherché, Kélé n'ose pas franchir le barrage, le contourner serait la solution. C'est ce que les deux hommes commençaient à faire lorsqu'ils sont interpellés par la police. Kélé est immédiatement reconnu comme celui qu'on recherchait depuis belle lurette. Lui et Ephrem sont mis à la disposition de la police anti- drogue qui, à son tour, les introduit à la maison d'arrêt. L'accès à cet établissement pour tout nouveau locataire est soumis à une fouille vestimentaire et corporelle. L'objectif visé est d'empêcher que le prévenu garde sur lui un quelconque objet compromettant. Le seigneur passe au scanner. Les gardes pénitentiaires ne trouvent rien d'anormal. Sinon une bande au pied pour couvrir sa blessure. Les gardes qui connaissent à fond le comportement des prévenus demandent au seigneur d'ôter sa bande. Grosse surprise. Un sachet de drogue est solidement plaqué contre la blessure à l'aide d'une bande. Quelle ingéniosité ? Il faut être un seigneur pour réaliser un tel exploit. De la maison d'arrêt, Kélé retourne à la direction des stupéfiants pour nécessité d'enquête. Il cite Azo Aziate Serge alias Ambeu, 27 ans et Dogbo Dja Hervé alias Vetcho comme étant ses complices. La police les interpelle avant de mener une perquisition à leurs domiciles respectifs sans résultats probants. Cependant, ils sont tous invités à répondre de leur acte devant le juge. Le seigneur tentait de ne pas se reconnaître dans la dénonciation de ses complices lorsque le juge cite un passage du procès verbal de la police. « Sur indication et dénonciation de Dago Bally, nous avons procédé à l'interpellation vers 4 heures du matin de Azo et Dogbo. Ces derniers étant des vendeurs d'héroïne et de crack à Gagnoa », a lu le juge. Le seigneur n'a plus rien ajouté, convaincu que son pouvoir est en train de lui filer entre les mains. Dans son réquisitoire, le parquet a démontré que Kélé est un individu doublement dangereux. D'abord, du point de vue de sa personnalité, il est cité dans 5 dossiers relatifs à la drogue. Ensuite, du point de vue du corps du délit, l'héroïne et le crack sont des substances hautement néfastes pour lesquelles le monde entier en a toléré la production à un nombre restreint de pays. Pour toutes ces raisons, le procureur a requis contre Kélé 10 ans de prison, 5 millions d'amende, 10 ans de privation de droit, 5 ans d'interdiction de paraître sur le territoire national autre que son lieu de naissance. Pour ce qui est des autres prévenus, il a été requis la relaxe parce que non coupables. Le juge est allé dans le même sens que le procureur. Faisant ainsi de Dago Bailly alias Kélé un seigneur déchu.

Alain Kpapo à Gagnoa