La Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan (Maca) comme son nom l'indique, est un lieu de détention pour tous ceux qui sont hors loi. Aujourd'hui ce lieu qui dit-on était réservé aux malfrats et autres délits graves est transformé à un endroit des affaires et de business. Vente de drogues, commerce de fusils, une maison de passe et bien d'autres choses se font à la Maca sans crainte ni inquiétude. Un tour rapide au coeur de cette Maison d'arrêt et de correction d'Abidjan les 21 et 22 août dernier nous a permis de voir comment les affaires et le business se font à la Maca. En effet, selon une source rencontrée sur les lieux pour qu'un prisonnier ou un garde pénitentiaire soit traité convenablement par les premiers responsables de cette structure, il faut être fort et aimer le business. Selon d'autres sources à la Maca, des personnes à l'extérieur en complicité avec certains surveillants et un responsable de la Maca font entrer des drogues vendues aux prisonniers. " Ici, les choses se font à partir de 23h et les jours de communiqué : mardi, jeudi et samedi. Aujourd'hui samedi, c'est le jour de communiqué. Faites semblant de vous arrêter à la grande porte ou au poste de contrôle .Certaines personnes seront contrôlées à fond. Et par contre d'autres rentrerons en compagnie d'un des responsables ou d'un chef des gardes pénitentiaires sans qu'il ne soit fouillé. Ce qui se passe à la Maca est grave. Même certains prisonniers dorment chez eux et ils viennent très tôt le matin pour rejoindre leur cellule. Si un surveillant fait son travail sans tricherie, il termine mal. Le cas de nos deux collègues qui sont incarcérés depuis près de huit mois sans verdict, est un exemple concret. Nous vous demandons de rester avec nous jusqu'à 23h, vous verrez la vérité en face. Nos responsables viendront demander des comptes à leurs complices surveillants. Ceux-là, ils les appellent les vrais gars " nous a confié l'un des surveillants. A 10h 30, nous voici dans le bâtiment C. Là-bas c'est un autre monde où tout se passe sans crainte. Certains détenus fument la drogue en plein air sans crainte. " Vieux père, la loi n'existe pas ici.Les fumoirs se sont transportés dans ce bâtiment. Nous faisons ce que nous voulons. La drogue est légalisée à la Maca. Regardez tout juste à coté de vous, c’est l'une des chambres de passe de la Maca. C'est moi Lass qui gère ça et le matin, je rend compte à un responsable d'ici. Ne me demande pas son nom .Même celui qui est venu avec toi le connaît bien. Moi je n'ai plus besoin de sortir d'ici. Je gagne bien ma vie. Mais, ce qui est grave, 25 personnes pour un sac de riz pour deux semaines. Et pourtant, on nous dit que les sacs de riz viennent en quantité. Même les kilogrammes de viandes destinés aux prisonniers sont détournés par les responsables de la Maca. La Maca est transformée en lieu d'affaires ", nous a expliqué le jeune Y. Lass. Dans le bâtiment des femmes non loin du C, quelques femmes rencontrées, se plaignent de leur mauvais traitement par les responsables de la Maca. " Pour se nourrir à la Maca, il faut entrer dans le circuit des affaires ou accepter toutes sortes de propositions. Dieu merci, vous au moins vous avez eu la chance de venir voir la réalité des faits. On oblige certaines de nos sœurs à se donner aux autres prisonniers qui ont un peu d'argent et ils partagent cet argent avec elles. Ou encore tu deviens la copine d'un surveillant ou d'un responsable de la Maca. Même dans notre cellule, certaines femmes vendent de la drogue et tout ce qui est interdit de vente dehors pourtant c'est à cause de cela qu'on nous met en prison et on retrouve les mêmes choses ici. Ayez le courage de faire le tour des bâtiments et vous verrez le marché noir créé par ceux qui se disent responsables de ces lieux. Mais Dieu voit tout ", a déploré dame K. incarcérée depuis 2007.Mademoiselle F. K, une des pensionnaires de la cellule des femmes d'ajouter qu'elle a été enceintée par un sergent chef des gardes pénitentiaires qui lui avait proposé la gérance d'un magasin de riz à la Maca. " Moi j'ai vu que cela était dangereux pour moi. Etre en prison et devenir une femme d'affaires, cela était un risque pour moi. J'ai dit à mon frère qui vient me rendre visite tous les mardi, jeudi et samedi de dire cela à un journaliste pour qu'il publie cette information .Concernant d'autres informations, allez y voir d'autres femmes ", a-t-elle expliqué. A 23H 40, une bâchée de la marque Izusu sans immatriculation s'arrête tout juste à l'entrée de la grande porte de la Maca. Après quelques minutes le chauffeur demande à un surveillant où se trouve les sacs de riz qu'ils sont venus chercher. Dans le noir une voix répond au chauffeur " tu es pressé pourquoi ? Personne ne peut te chasser d'ici. C'est nous qui sommes habilités à te créer des problèmes ". Selon notre guide qui s'est transformé en chargeur, ce sont plus de quatre tonnes de riz qui ont été chargés dans cette bâchée appartenant à un responsable de la Maca cité par Lago Charles Rosaire dans son affaire d'évasion planifiée le 15 juillet 2009 à la Maca. En vérité la Maca qui hier était considérée comme un lieu de correction est transformée en un endroit des affaires. Cette situation honteuse interpelle les autorités de ce pays.
Société Publié le jeudi 16 septembre 2010 | Le Nouveau Navire
