L'Association des producteurs de bétail de Côte d’Ivoire (Aprobétail) se veut un organe fédérateur, professionnel, consultatif et promotionnel des intérêts des éleveurs de bovins, ovins et caprins. Son président Ismaël Bamba se dévoile.
Les milieux de la viande sont déchirés par quelques mouvements d’humeur entre les bouchers-détaillants et les grossistes sur la question du prix. Les petits bouchers estiment que les prix pratiqués à l’abattoir sont exorbitants et que leurs marges sont réduites. Quelle réponse pourriez-vous donner à ce genre de crise, en tant que producteur de bétail ?
Il faut appréhender le problème dans sa globalité. La filière bétail-viande est, depuis une dizaine d’années, dans une phase de dégradation permanente. L’Etat s’est retiré. De multiples acteurs apparaissent et fixent des prix sans de véritable schéma, alors que la filière a besoin d’être organisé. Je veux dire qu’à l’abattoir, il y a de nombreux intermédiaires. Les principaux importateurs de la matière première ne gagnent pas ce qu’ils ont investi dans un certain nombre d’arrivages. Tout le monde sait que dans ce domaine, les investissements sont relativement lourds. Nous pensons qu’il faut que les importateurs se mettent d’accord et en arrivent à réduire les intermédiaires de sorte que le producteur puisse être correctement payé et de manière conséquente, et que le consommateur puisse payer la viande au meilleur prix.
Si on démantèle les intermédiaires, est-ce que cela ne va pas poser un problème social vu qu’ils sont nombreux et ont des familles à gérer ?
On ne peut pas résoudre un problème social en laissant s’installer l’anarchie. Tout le monde peut gagner s’il y a une bonne organisation. Aujourd’hui, il n’y a pas de visibilité. On ne peut pas progresser dans un tel désordre. Voilà pourquoi le nouvel abattoir industriel qui va être construit à Anyama sera le bienvenu. L’objectif, en réalité, est de réduire le coût au consommateur et d’améliorer les revenus du producteur.
Si ce schéma est mis en place, à combien pourrait revenir le kilogramme de viande de bœuf ?
Pour définir le prix du kilogramme de bœuf, il faut tenir compte de plusieurs éléments. Le coût actuel d’un bœuf est aux alentours de 150.000 Fcfa. Si les prestations d’abattages sont canalisées, logiquement les prix seront en-deçà des prix actuels. Aujourd’hui, il y a un prélèvement au niveau du convoyage qui n’apporte aucune valeur ajoutée à la filière. Si on quitte cet environnement en éliminant les goulots inutiles, le kilogramme de viande de bœuf peut descendre en dessous de 1.200 Fcfa. Mais, j’avoue qu’on est loin de là.
Vous avez créé l’Association des producteurs de bétail de Côte d’Ivoire. Dans la grisaille, que peut apporter cette faîtière pour la modernisation du secteur ?
La filière bétail-viande en Côte d’Ivoire connaît de nombreux soubresauts. On a finalement le sentiment que l’élevage n’existe pas chez nous. Quand on parle de viande, pratiquement tout le monde pense au convoyage du bétail en provenance du Sahel. Et pourtant, l’Etat a investi énormément dans la filière ivoirienne. Dans les années 1975-80, il a investi d’énormes sommes d’argent dans le bétail afin de disposer des plus grands ranchs d’Afrique. Des techniciens de hauts niveaux ont été formés. Malheureusement, depuis plus de 15 ans, cette politique a été abandonnée et l’Etat n’investit plus dans le domaine. Mais les investissements précedents ont entraîné un engouement au niveau des opérateurs ivoiriens. Ce qui fait qu’il y a toujours une poignée d’éleveurs surtout dans le Nord et au Centre. Nous, nous sommes une association de producteurs ivoiriens. Et, nous comptons faire entendre notre voix car la Côte d’Ivoire a du potentiel.
Vous voulez devenir partenaire de l’Etat de Côte d’Ivoire. Est-ce au détriment de l’importation ou pour une synergie d’actions ?
Ce n’est pas au détriment de l’importation. L’abattoir d’Abidjan est approvisionné à près de 90% par le bétail sahélien. Le bétail ivoirien est à l’intérieur. Il y a des menaces à venir car le bétail sahélien est sollicité par de nombreux pays notamment ceux du Maghreb et le Nigéria. En plus, ce bétail sahélien est dans un socle difficile à cause de la forte chaleur. Ce qui fait qu’il décroît. Dans cette logique, il est évident que les importations vers la Côte d’Ivoire vont baisser. Et, le déficit sera plus chronique. Nous estimons qu’il faut développer le bétail ivoirien pour prévenir cette situation.
Le pays n’étant pas de tradition d’élevage, le problème de pâturage va certainement se poser. Des conflits perlés éclatent partout entre éleveurs et agriculteurs. Comment comptez-vous aborder ce casse-tête chinois ?
Je ne suis pas d’accord quand vous dites que la Côte d’Ivoire n’est pas de tradition d’élevage. Dans le passé, le Bafing, par exemple, regorgeait de nombreux éleveurs. Malheureusement, il y a eu une épidémie de charbon qui a éliminé le bétail. Mais il subsiste. C’est vrai que les Sahéliens font beaucoup plus parce que la zone est vaste et désertique. Et la question des pâturages ne se pose pas. Cependant, la cohabitation avec les paysans est un problème partout. Elle doit être facilitée par des règles.
Comment vous appréhendez le projet de construction d’un abattoir à Anyama ?
L’Association nationale des producteurs de bétail de Côte d’Ivoire a pour objectif de s’impliquer dans la politique de mise à niveau des infrastructures. L’abattoir d’Abidjan est un outil important. Le mode d’organisation actuel nous dessert. Quand nous y envoyons notre bétail, nous ne contrôlons pas la commercialisation. Nous serons très heureux qu’il soit mis fin à ce type de commercialisation. Les producteurs ont un droit de regard sur cet outil. Nous devons avoir une participation dans le capital et, nous devons intervenir dans la régulation et l’organisation de l’abattoir. Autant dire que le contrôle de l’abattoir fait partie de nos missions. Nous en avons d’ailleurs fait un objectif majeur.
Interview réalisée par Lanciné Bakayoko
Les milieux de la viande sont déchirés par quelques mouvements d’humeur entre les bouchers-détaillants et les grossistes sur la question du prix. Les petits bouchers estiment que les prix pratiqués à l’abattoir sont exorbitants et que leurs marges sont réduites. Quelle réponse pourriez-vous donner à ce genre de crise, en tant que producteur de bétail ?
Il faut appréhender le problème dans sa globalité. La filière bétail-viande est, depuis une dizaine d’années, dans une phase de dégradation permanente. L’Etat s’est retiré. De multiples acteurs apparaissent et fixent des prix sans de véritable schéma, alors que la filière a besoin d’être organisé. Je veux dire qu’à l’abattoir, il y a de nombreux intermédiaires. Les principaux importateurs de la matière première ne gagnent pas ce qu’ils ont investi dans un certain nombre d’arrivages. Tout le monde sait que dans ce domaine, les investissements sont relativement lourds. Nous pensons qu’il faut que les importateurs se mettent d’accord et en arrivent à réduire les intermédiaires de sorte que le producteur puisse être correctement payé et de manière conséquente, et que le consommateur puisse payer la viande au meilleur prix.
Si on démantèle les intermédiaires, est-ce que cela ne va pas poser un problème social vu qu’ils sont nombreux et ont des familles à gérer ?
On ne peut pas résoudre un problème social en laissant s’installer l’anarchie. Tout le monde peut gagner s’il y a une bonne organisation. Aujourd’hui, il n’y a pas de visibilité. On ne peut pas progresser dans un tel désordre. Voilà pourquoi le nouvel abattoir industriel qui va être construit à Anyama sera le bienvenu. L’objectif, en réalité, est de réduire le coût au consommateur et d’améliorer les revenus du producteur.
Si ce schéma est mis en place, à combien pourrait revenir le kilogramme de viande de bœuf ?
Pour définir le prix du kilogramme de bœuf, il faut tenir compte de plusieurs éléments. Le coût actuel d’un bœuf est aux alentours de 150.000 Fcfa. Si les prestations d’abattages sont canalisées, logiquement les prix seront en-deçà des prix actuels. Aujourd’hui, il y a un prélèvement au niveau du convoyage qui n’apporte aucune valeur ajoutée à la filière. Si on quitte cet environnement en éliminant les goulots inutiles, le kilogramme de viande de bœuf peut descendre en dessous de 1.200 Fcfa. Mais, j’avoue qu’on est loin de là.
Vous avez créé l’Association des producteurs de bétail de Côte d’Ivoire. Dans la grisaille, que peut apporter cette faîtière pour la modernisation du secteur ?
La filière bétail-viande en Côte d’Ivoire connaît de nombreux soubresauts. On a finalement le sentiment que l’élevage n’existe pas chez nous. Quand on parle de viande, pratiquement tout le monde pense au convoyage du bétail en provenance du Sahel. Et pourtant, l’Etat a investi énormément dans la filière ivoirienne. Dans les années 1975-80, il a investi d’énormes sommes d’argent dans le bétail afin de disposer des plus grands ranchs d’Afrique. Des techniciens de hauts niveaux ont été formés. Malheureusement, depuis plus de 15 ans, cette politique a été abandonnée et l’Etat n’investit plus dans le domaine. Mais les investissements précedents ont entraîné un engouement au niveau des opérateurs ivoiriens. Ce qui fait qu’il y a toujours une poignée d’éleveurs surtout dans le Nord et au Centre. Nous, nous sommes une association de producteurs ivoiriens. Et, nous comptons faire entendre notre voix car la Côte d’Ivoire a du potentiel.
Vous voulez devenir partenaire de l’Etat de Côte d’Ivoire. Est-ce au détriment de l’importation ou pour une synergie d’actions ?
Ce n’est pas au détriment de l’importation. L’abattoir d’Abidjan est approvisionné à près de 90% par le bétail sahélien. Le bétail ivoirien est à l’intérieur. Il y a des menaces à venir car le bétail sahélien est sollicité par de nombreux pays notamment ceux du Maghreb et le Nigéria. En plus, ce bétail sahélien est dans un socle difficile à cause de la forte chaleur. Ce qui fait qu’il décroît. Dans cette logique, il est évident que les importations vers la Côte d’Ivoire vont baisser. Et, le déficit sera plus chronique. Nous estimons qu’il faut développer le bétail ivoirien pour prévenir cette situation.
Le pays n’étant pas de tradition d’élevage, le problème de pâturage va certainement se poser. Des conflits perlés éclatent partout entre éleveurs et agriculteurs. Comment comptez-vous aborder ce casse-tête chinois ?
Je ne suis pas d’accord quand vous dites que la Côte d’Ivoire n’est pas de tradition d’élevage. Dans le passé, le Bafing, par exemple, regorgeait de nombreux éleveurs. Malheureusement, il y a eu une épidémie de charbon qui a éliminé le bétail. Mais il subsiste. C’est vrai que les Sahéliens font beaucoup plus parce que la zone est vaste et désertique. Et la question des pâturages ne se pose pas. Cependant, la cohabitation avec les paysans est un problème partout. Elle doit être facilitée par des règles.
Comment vous appréhendez le projet de construction d’un abattoir à Anyama ?
L’Association nationale des producteurs de bétail de Côte d’Ivoire a pour objectif de s’impliquer dans la politique de mise à niveau des infrastructures. L’abattoir d’Abidjan est un outil important. Le mode d’organisation actuel nous dessert. Quand nous y envoyons notre bétail, nous ne contrôlons pas la commercialisation. Nous serons très heureux qu’il soit mis fin à ce type de commercialisation. Les producteurs ont un droit de regard sur cet outil. Nous devons avoir une participation dans le capital et, nous devons intervenir dans la régulation et l’organisation de l’abattoir. Autant dire que le contrôle de l’abattoir fait partie de nos missions. Nous en avons d’ailleurs fait un objectif majeur.
Interview réalisée par Lanciné Bakayoko