Deuxième tour/Gbagbo-ADO : la belle finale

Le second tour de la présidentielle qui se profile à l’horizon est chargé de symboles. Et pour cause, il opposera deux anciens alliés dont un des protagonistes, Alassane Ouattara, ‘’combattra’’, par procuration, pour Henri Konan Bédié.

Chaude empoignade en perspective, pour le second tour de la présidentielle ivoirienne. Le duel mettra, en effet, aux prises, deux vieilles connaissances, Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara dont les relations ont évolué au rythme de ‘’je t’aime, moi non plus’’. Un vrai cataclysme donc, eu égard aux différents sondages commandités par le candidat de ‘’la majorité présidentielle’’, qui lui ont toujours trouvé pour adversaire, Henri Konan Bédié, président du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda). Le second tour de cette élection qui s’apparente à une belle finale est d’autant plus inédit que les deux concurrents du jour, ont été, entre 1995 et 1999, les principaux animateurs du Front républicain. Ensemble, ils ont farouchement combattu le pouvoir d’Henri Konan Bédié, jusqu’à sa chute le 24 décembre 1999. Leur lutte était, entre autres, guidée par des revendications liées à la candidature du leader du Rassemblement des républicains (Rdr) et la transparence des élections en Côte d’Ivoire. Avec le coup d’Etat qui a emporté le régime du Pdci-Rda, le Front républicain a volé en éclats. Mais, au-delà des retrouvailles Gbagbo-ADO, l’autre symbolique réside dans le fait que l’ancien Premier ministre qui est candidat, pour la première fois à un scrutin, va mener le combat de ses nouveaux alliés du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Une mission qui ne sera pas une partie de plaisir. Surtout qu’Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara avaient parié pour un second tour ‘’fraternel’’.

1er test grandeur-nature pour le Rhdp
L’ambition réaffirmée, le 19 octobre dernier à Yamoussoukro, par Henri Konan Bédié (Pdci), Alassane Ouattara (Rdr), Albert Toikeusse Mabri et Innocent Anaky Kobena (Mfa) restera-t-elle un simple vœu pieux ? C’est la question qui domine, en ce moment, de nombreux débats et autres causeries, dans les administrations et dans les espaces de libre expression. Ce qui suscite ces débats, c’est la réponse du président du Pdci, Henri Konan Bédié, à une question du panafricain, Jeune Afrique, du 18 octobre dernier. « Si Alassane Dramane Ouattara est élu, pourriez-vous être son Premier ministre ? », avait demandé le confrère, à l’ancien chef de l’Etat. Réponse sans ambages de l’allié d’Alassane Ouattara : « C’est exclu. J’ai occupé tous les postes. Ambassadeur, maire, député, président de l’Assemblée… C’est exclu ». Pour de nombreux observateurs, voire pour certains militants houphouétistes, la réponse sèche de N’Zuéba n’est pas un bon signe pour un éventuel report de voix, au deuxième tour de la présidentielle. Selon eux, cette réponse directe est la preuve qu’Henri Konan Bédié n’est pas prêt à renvoyer l’ascenseur au leader du Rdr qui s’était, lui, déclaré disposé à être le Premier ministre de son aîné, en cas de présence de celui-ci au deuxième tour. Ce qui inquiète davantage un responsable du Rdr dans le N’Zi-Comoé, joint, hier, c’est surtout le fait que le président du Pdci-Rda ne laisse aucune porte ouverte à la question de la probable désignation du Premier ministre d’ADO, dans les rangs des cadres de l’ancien parti au pouvoir. « Il y a trop d’hypocrisie dans le Rhdp », dénonce K. Germain, pessimiste. Une vue que ne partagent pas les partisans d’Henri Konan Bédié. Si l’on en croit ceux que nous avons également interrogés, hier, la réponse de leur leader n’est que l’expression de la réalité. « Comment un ancien président peut-il se rabaisser en devenant Premier ministre ? Il mérite mieux que ça, aujourd’hui », tentent-ils de persuader, non sans exhiber les acquis de la plate-forme des houphouétistes. « Avant même de se lancer, de plain-pied dans la campagne pour la présidentielle, nos quatre leaders sont allés réaffirmer leur volonté de transformer le Rhdp en un parti politique fort. Nous avons donc un accord qui tient encore la route. Et, c’est une avancée notable qu’aucun pessimisme ne peut briser », ajoutent-ils.

Marc Dossa