Par essence, la Commission électorale indépendante (CEI) est une structure autonome. Elle devra donc revendiquer et assumer pleinement son indépendance. Mais, après de nombreuses crises et des tergiversations de toutes sortes, elle a fini par organiser l’élection présidentielle. Un scrutin dont les résultats sont en partie contestés par le candidat du Pdci-Rda, Henri Konan Bédié. Plus, l’Institution de Youssouf Bakayoko est même accuser de complicité de fraude en accord avec l’un des candidats. Pour se défendre, l’un de ses vice-présidents, sur les antennes de la télévision nationale, a cru bien argumenter en soutenant que leur satisfaction vient de ce que les plaintes sont issues de toutes les parties en présence. Comme si la mission de la CEI consistait à organiser une élection à l’issue de laquelle tous les candidats devraient se plaindre, signe de son impartialité. Maintenant que la page du premier tour semble tournée pour laisser place au second round, la CEI est plus que jamais placée devant ses responsabilités. C’est-à-dire parvenir à départager les deux candidats dans la transparence en s’en tenant strictement au verdict des urnes et en faisant fi de toutes formes d’ingérence. Car à ce stade du processus de sortie de crise, chaque Institution doit jouer sa partition sans s’immiscer dans les affaires des autres. Et il s’agit surtout d’éviter des sons discordants comme cela a été le cas avec le Conseil constitutionnel. Son président Paul Yao N’Dré au lieu de se contenter de valider et annoncer les résultats définitifs s’est cru obligé de fixer la date du second tour de la présidentielle. Malheureusement, pour lui, le 21 novembre qu’il a choisi dans la précipitation semble battu en brèche par la CEI qui invoque des problèmes techniques pour proposer le 28 novembre. Cette discordance entre l’Institution chargée d’organiser les élections et le Conseil constitutionnel supposé jouer un rôle d’arbitre est la preuve palpable que Youssouf Bakayoko a encore du pain sur la planche pour décider en toute souveraineté. Avec le vote du 28 novembre, considéré à tort ou à raison comme un scrutin à risque, la CEI tient le sort de toute la Côte d’Ivoire dans ses mains. Son président et les membres ont le choix. Entrer dans l’histoire comme des héros ayant contribué à ramener le pays sur les rails de la démocratie et du développement ou quitter tristement la scène pour être rangés pour toujours aux oubliettes. L’histoire récente de la Côte d’Ivoire a d’ailleurs donné un modèle en la personne de Honoré Guié, président de la Commission nationale électorale (CNE) en 2000. Cet homme connu pour son impartialité ne s’est pas laissé intimider par le chef de la junte militaire au pouvoir qui souhaitait voir les suffrages exprimés modifiés en sa faveur. Aujourd’hui, avec l’appui de la communauté internationale et tous les moyens techniques sophistiqués à sa disposition, Youssouf Bakayoko a toutes les chances de faire mieux que Honoré Guié. Une chose est certaine, tous les regards sont tournés vers lui.
Marcel Benié
Marcel Benié