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Politique Publié le mardi 23 novembre 2010 | Nord-Sud

Dérapages dans la campagne : Qui veut encore la guerre ?

© Nord-Sud Par DR
Laurent GBAGBO et Alassane OUATTARA au 2ème tour de l`election présidentielle 2010 en Cote d`Ivoire
En lieu et place de la confrontation des programmes de gouvernement, les candidats en lice pour le second tour de la présidentielle et leurs états-majors ont choisi de se livrer bataille autour de la crise survenue le 19 septembre 2002.

La guerre a le dos large. Cette réalité se vérifie davantage durant les deux phases de la campagne pour le scrutin présidentiel. Pis, les facteurs qui sont à la base de la fracture sociale sont manipulés, à souhait, par les deux camps qui s’affrontent pour le second tour de l’élection présidentielle. « Ils ne veulent pas qu’on parle de l’agression contre la Côte d’Ivoire. Il y a des gens qui sont en campagne et qui ne veulent pas qu’on en parle. Or, on doit en parler. Il y a l’autre qui dit : je ne saurais accepter d’être le parrain de la rébellion. Mais qui t’a demandé quelque chose ? C’est comme au village. Quand quelqu’un meurt et on veut trouver le coupable, des gens se lèvent pour dire ; ce n’est pas moi qui l’ai tué, hein ! Quand c’est comme ça, on les attrape et on les amène au gôpô. Ces deux-là, il faut les amener au gôpô (…) Si vous vous justifiez, c’est qu’il y a quelque chose », avait déjà commencé par attaquer le candidat de la majorité présidentielle, lors de la campagne, pour le 1er tour de la présidentielle. C’était précisément le 19 octobre dernier, au Stade Auguste Denis de San-Pedro. Se posant, comme depuis toujours, en défenseur de la patrie, le président-candidat, pensait sans doute neutraliser ses deux plus sérieux adversaires, en s’inscrivant dans la logique de dénonciation des coups de force survenus dans le pays depuis son accession au pouvoir. Ce discours aux relents populistes ayant séduit plus d’un dans leurs rangs, les lieutenants de Laurent Gbagbo l’ont repris à leur compte, pour lui donner un écho plus large. De leur côté, les opposants au régime de Laurent Gbagbo, singulièrement ceux rassemblés sous la bannière du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) ont trouvé la voie de réplique nécessaire : « c’est parce que le Fpi (Front populaire ivoirien) a été incapable de gérer le pays qu’il a été attaqué. La guerre, c’est l’incompétence d’un système ». Un slogan-riposte agrémenté, selon les circonstances, d’exemples biens choisis.

La crise de septembre 2002 exploitée à des fins politiciennes
«Pendant qu’on dit qu’il y a la guerre, regardez comment les immeubles poussent partout à Abidjan », dénonçait, hier, Amadou Gon Coulibaly, directeur de campagne du candidat Alassane Ouattara. De son côté, Laurent Gbagbo qui croit surfer sur une vague victorieuse, du fait de ce discours cru, a décidé de le corser, pour le second tour. Laissant de côté, Henri Konan Bédié, il accuse, dans un ton virulent sans précédent, Alassane Ouattara d’être le fomentateur de tous les coups survenus dans le pays depuis décembre 1999. A ces attaques, le leader du Rdr a décidé de riposter, en accusant son adversaire d’avoir entretenu les ingrédients qui sont à la base de la crise. C’est donc dans cette atmosphère ambiante, plutôt malsaine, que sont exhumées les causes qui ont conduit le pays dans l’abîme. Car, c’est dans une atmosphère pareille qu’est d’abord survenu le coup de force de décembre 1999, contre Henri Konan Bédié. Alors les Ivoiriens croyaient les démons de la division, derrière eux, le débat ivoiritaire s’est exacerbé, avec l’élimination d’Henri Konan Bédié et d’Alassane Ouattara de la course à la présidentielle. Aujourd’hui, après avoir touché le fond de l’abîme, les Ivoiriens se sont pris à rêver à un retour définitif à la paix. Peine perdue. Obnubilé par le confort de la fonction présidentielle, leurs acteurs politiques ont entrepris de retenter les expériences malheureuses du passé, tout en tirant les parties confortables du drap de leur côté. La Côte d’Ivoire est loin d’être sortie de l’auberge. Et, ce n’est pas être mauvaise langue que de le dire « Il faut que les gens évitent de donner l’impression qu’ils ont la mémoire courte. Nous avons eu beaucoup d’avancées démocratiques à partir de la crise du 19 septembre 2002. Point n’est donc besoin de vouer les Forces nouvelles aux gémonies, pour accéder au palais présidentiel », souligne un haut responsable de l’ex-rébellion qui cite en exemple les Etats-Unis et l’Europe qui ont su rebondir après les crises qu’ils ont connues. « Il appartient donc aux Ivoiriens de ne pas pleurnicher sur leur sort, en tirant le meilleur parti de toutes les crises traversées jusqu’ici », ajoute notre interlocuteur.

Marc Dossa
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