Au moins trois personnes ont été tuées et sept autres blessées samedi à Abidjan en Côte d'Ivoire dans des tirs de la police contre la foule, à la veille du second tour de l'élection présidentielle, a fait savoir un responsable ivoirien. Le chef d'état-major de l'armée ivoirienne, le général Philippe Mangou, a lancé samedi à la télévision nationale un appel au calme. Il a confirmé qu'un couvre-feu nocturne serait en vigueur de samedi 22h00 GMT à dimanche 06h00 GMT, et qu'il serait prorogé de lundi à mercredi, de 19h00 GMT à 06h00 GMT. Le chef d'état-major a justifié cette mesure d'exception par les affrontements constatés cette semaine entre jeunes armés de bâtons, de machettes et parfois d'armes à feu dans plusieurs quartiers d'Abidjan et dans certaines autres parties du pays. L'opposition au président Gbagbo a dénoncé cette initiative du chef de l'Etat, officiellement destinée à tuer dans l'œuf toute velléité de violence, comme un stratagème pour manipuler les urnes. Mais, a affirmé le général Mangou, "le couvre-feu n'aura pas aucun impact sur la transparence du scrutin". Les ex-rebelles des Forces nouvelles, qui contrôlent la moitié nord du pays, ont fait savoir samedi soir qu'ils ne respecteraient pas le couvre-feu dans les territoires sous leur garde, et ils ont invité les Ivoiriens dans leur ensemble à faire de même. "Les FAFN (Forces armées des forces nouvelles) marquent leur désaccord quant à l'application de ce décret de couvre-feu et invitent les populations à vaguer à leurs occupations", a déclaré le porte-parole militaire des Forces nouvelles, Ouattara Seydou. L'opposition a elle aussi dit qu'elle ne respecterait pas le couvre-feu. "Le RHDP ne reconnaîtra pas le décret d'instauration du couvre-feu et déclare qu'il ne s'y conformera pas", a déclaré le président par intérim de cette coalition d'opposition, Philippe Legré, qui soutient Alassane Ouattara. DÉBAT TÉLÉVISÉ Le scrutin de dimanche sera un test décisif pour savoir si le pays peut tourner la page de plus d'une décennie de violences provoquées par un coup d'Etat, puis une rébellion qui a abouti à une partition de facto entre le Nord, acquis à Ouattara, et le Sud, fief de Gbagbo. Yves Doumbia, porte-parole du maire d'Abobo à Abidjan, a déclaré samedi soir qu'une foule, rassemblée dans cette partie de la capitale économique ivoirienne, était devenue incontrôlable et que la police avait eu recours à des gaz lacrymogènes et à des balles réelles, faisant trois morts et sept blessés. On ignore pourquoi une telle foule s'était rassemblée à Abobo, qui passe pour être un bastion des partisans d'Ouattara. Ces violences ne sont pas les premières de la semaine. Mangou a parlé d'au moins deux morts et de nombreux blessés, dont dix dans un état grave, lors d'affrontements la nuit précédente. Et deux autres personnes avaient été tuées dans des échauffourées jeudi, selon le ministère de l'Intérieur. "Il est de notre devoir de tirer la sonnette d'alarme et de prendre toutes les dispositions sécuritaires pour épargner les vies. Nous ne voulons plus de morts. Nous ne voulons plus de blessés", a déclaré Mangou samedi à la télévision. Comme le duel entre les deux hommes apparaît extrêmement serré, il est probable que son issue sera contestée par le perdant, suscitant la crainte d'une nouvelle flambée de violence, peut-être à très grande échelle tant la tension est palpable à la veille du scrutin. Les deux candidats se sont affrontés jeudi soir lors d'un débat télévisé policé, sans précédent dans l'ancienne colonie française. Mais la rhétorique agressive de la campagne et les heurts entre leurs partisans ont "plombé" le climat. "Comme vous le voyez, le déroulement du face-à-face à la télévision, qui a été apprécié par la totalité des Ivoiriens, n'a pas pu avoir un effet sur le comportement des militants. Tout au contraire, nous avons constaté une recrudescence de la violence", a noté Mangou.
Source: Reuters
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