Le vendredi 17 décembre, les fidèles de la mosquée Sylla du quartier Odoss de Grand-Bassam ont été gazés à l’heure de la prière hebdomadaire. Plus d’une semaine après, l’imam principal, Traoré Alassane, revient sur les détails de l’incident et parle des dispositions prises par sa communauté pour prévenir toute nouvelle attaque.
l Il y a une semaine jour pour jour, à l’heure de la prière du vendredi, une grenade lacrymogène a été lancée devant votre mosquée. Que s’est-il réellement passé ce jour-là?
Ce vendredi-là, alors que toute la communauté musulmane s’était réunie pour faire la prière, un incident s’est réellement produit. La mosquée était vraiment pleine. Il y avait des fidèles dehors sous la bâche. Autour de 13 heures, j’étais en plein sermon au sein de la mosquée quand j’ai entendu un bruit. J’ai vu des fidèles se lever. A quelques mètres de la mosquée, j’ai aperçu des agents des forces de l’ordre. Les fidèles ont paniqué. Et, ce fut la débandade. Je suis resté concentré et j’ai continué mon sermon pour ne pas affoler le reste des fidèles. J’ai débuté véritablement la prière à 13h11mn. Nous l’avons achevée à 13h17mn. Une fois la prière terminée, nous avons cherché à savoir ce qui s’était passé. Les forces de l’ordre avaient lancé une bombe lacrymogène. Le gaz s’est répandu dans la mosquée. Je précise que la grenade avait été lancée aux alentours de la mosquée, au moment où je faisais le sermon.
l Qu’avez-vous fait pour apaiser vos fidèles en colère ?
Je leur ai dit de ne pas céder à la provocation. Mais les fidèles étaient déjà trop en colère. Quand le calme est revenu momentanément, je me suis rendu à la cérémonie d’accueil d’un pèlerin que je devais présider juste après la prière de 13 heures. Et, c’est en ce moment que j’ai reçu un appel du député-maire Jean-Michel Moulod me demandant de revenir à la mosquée. Le maire était sur les lieux avec le commissaire et un de ses éléments. La population a pris à partie le commissaire. Le 4x4 de commandement a été brûlé par les jeunes. Il a fallu la promptitude du maire pour exfiltrer le commissaire de la foule. Le maire et le commissaire se sont rendus au commissariat. Pendant ce temps, un autre groupe de jeunes manifestants a fait mouvement vers le commissariat, où ils s’apprêtaient à y mettre le feu. Le maire m’a rappelé pour connaître ma position. J’étais à la mosquée ‘’Sylla’’. Et je m’adressais aux jeunes. Le maire m’a appelé à nouveau, me demandant de faire mouvement au commissariat pour calmer les jeunes parce que la tension était de plus en plus forte. Le maire était accompagné du préfet du département Bernard Douabou Gninia. J’ai demandé qu’on ne tire pas sur la foule, ni en l’air pour disperser les manifestants. Car, la moindre erreur pourrait entraîner le chaos. C’est en ce moment que les forces de l‘ordre locales ont fait appel à des renforts venus d’Abidjan. J’ai pris la direction du commissariat, il était 14h30. Une fois au niveau de la station Texaco, j’ai entendu des tirs à balles réelles. Et je voyais des jets de pierres. J’ai même vu le petit Issiaka tomber. Et les populations m’ont déconseillé d’avancer. J’ai dû revenir sur mes pas. Je suis donc retourné chez moi, c’était autour de 15 heures. Nous avons essayé d’appeler les chefs de quartiers pour voir comment calmer la population excédée. Et, la situation ne pouvait que dégénérer. Les jeunes ont mis le feu au domicile du commissaire au château.
l Y a-t-il eu des blessés lors de l’incident de la mosquée?
Heureusement, il n’y a pas eu de blessés. Il y a eu plus de peur que de mal. Les fidèles ont néanmoins respiré le gaz lacrymogène.
l Etiez-vous préparés à une telle situation ?
Je dirai plus ou moins. Les fidèles étaient préparés un peu à cela. Puisque nous sommes dans un contexte de crise, tout peut arriver. Après l’incident, nous avons essayé de calmer les populations. Les gens ont voulu transporter la crise politique sur le terrain religieux. C’est-à-dire créer une crise entre musulmans et chrétiens. J’ai dit tout simplement que la crise est purement politique. Elle n’a rien à voir avec la religion.
l Comment priez- vous désormais dans votre mosquée ?
Nous sommes sur nos gardes, même si nous venons prier les mains nues. Mais notre sécurité avant tout c’est Dieu. Il y a une crise de confiance qui s’est installée. A la mosquée, nous n’avons pris aucune disposition de sécurité. Nous nous confions à Dieu J’ai rencontré des imams pour que dans nos mosquées, un accent soit mis sur le rôle de la jeunesse. Il faut les sensibiliser à la paix. Malgré l’accalmie dans la ville, l’on constate que les manifestants du Rhdp craignent aujourd’hui pour leur vie. Certains ont même quitté la ville.
l Pourquoi ?
Cette situation est due à la délation. Il y a des personnes qui dénoncent leurs voisins. Ce qui n’est pas bien. Vendredi dernier, quand la Crs (Compagnie républicaine de sécurité) est venue en renfort dans la ville, il y avait des gens qui indiquaient les domiciles des autres. Sinon, comment comprendre que la Crs, venue d’Abidjan, arrive à cibler des maisons. Des habitants ont été battus. Des femmes bastonnées. J’ai même attiré l’attention des autorités politiques et administratives de la ville sur ce problème qui gangrène Grand-Bassam.
Emmanuelle Kanga à Grand-Bassam
l Il y a une semaine jour pour jour, à l’heure de la prière du vendredi, une grenade lacrymogène a été lancée devant votre mosquée. Que s’est-il réellement passé ce jour-là?
Ce vendredi-là, alors que toute la communauté musulmane s’était réunie pour faire la prière, un incident s’est réellement produit. La mosquée était vraiment pleine. Il y avait des fidèles dehors sous la bâche. Autour de 13 heures, j’étais en plein sermon au sein de la mosquée quand j’ai entendu un bruit. J’ai vu des fidèles se lever. A quelques mètres de la mosquée, j’ai aperçu des agents des forces de l’ordre. Les fidèles ont paniqué. Et, ce fut la débandade. Je suis resté concentré et j’ai continué mon sermon pour ne pas affoler le reste des fidèles. J’ai débuté véritablement la prière à 13h11mn. Nous l’avons achevée à 13h17mn. Une fois la prière terminée, nous avons cherché à savoir ce qui s’était passé. Les forces de l’ordre avaient lancé une bombe lacrymogène. Le gaz s’est répandu dans la mosquée. Je précise que la grenade avait été lancée aux alentours de la mosquée, au moment où je faisais le sermon.
l Qu’avez-vous fait pour apaiser vos fidèles en colère ?
Je leur ai dit de ne pas céder à la provocation. Mais les fidèles étaient déjà trop en colère. Quand le calme est revenu momentanément, je me suis rendu à la cérémonie d’accueil d’un pèlerin que je devais présider juste après la prière de 13 heures. Et, c’est en ce moment que j’ai reçu un appel du député-maire Jean-Michel Moulod me demandant de revenir à la mosquée. Le maire était sur les lieux avec le commissaire et un de ses éléments. La population a pris à partie le commissaire. Le 4x4 de commandement a été brûlé par les jeunes. Il a fallu la promptitude du maire pour exfiltrer le commissaire de la foule. Le maire et le commissaire se sont rendus au commissariat. Pendant ce temps, un autre groupe de jeunes manifestants a fait mouvement vers le commissariat, où ils s’apprêtaient à y mettre le feu. Le maire m’a rappelé pour connaître ma position. J’étais à la mosquée ‘’Sylla’’. Et je m’adressais aux jeunes. Le maire m’a appelé à nouveau, me demandant de faire mouvement au commissariat pour calmer les jeunes parce que la tension était de plus en plus forte. Le maire était accompagné du préfet du département Bernard Douabou Gninia. J’ai demandé qu’on ne tire pas sur la foule, ni en l’air pour disperser les manifestants. Car, la moindre erreur pourrait entraîner le chaos. C’est en ce moment que les forces de l‘ordre locales ont fait appel à des renforts venus d’Abidjan. J’ai pris la direction du commissariat, il était 14h30. Une fois au niveau de la station Texaco, j’ai entendu des tirs à balles réelles. Et je voyais des jets de pierres. J’ai même vu le petit Issiaka tomber. Et les populations m’ont déconseillé d’avancer. J’ai dû revenir sur mes pas. Je suis donc retourné chez moi, c’était autour de 15 heures. Nous avons essayé d’appeler les chefs de quartiers pour voir comment calmer la population excédée. Et, la situation ne pouvait que dégénérer. Les jeunes ont mis le feu au domicile du commissaire au château.
l Y a-t-il eu des blessés lors de l’incident de la mosquée?
Heureusement, il n’y a pas eu de blessés. Il y a eu plus de peur que de mal. Les fidèles ont néanmoins respiré le gaz lacrymogène.
l Etiez-vous préparés à une telle situation ?
Je dirai plus ou moins. Les fidèles étaient préparés un peu à cela. Puisque nous sommes dans un contexte de crise, tout peut arriver. Après l’incident, nous avons essayé de calmer les populations. Les gens ont voulu transporter la crise politique sur le terrain religieux. C’est-à-dire créer une crise entre musulmans et chrétiens. J’ai dit tout simplement que la crise est purement politique. Elle n’a rien à voir avec la religion.
l Comment priez- vous désormais dans votre mosquée ?
Nous sommes sur nos gardes, même si nous venons prier les mains nues. Mais notre sécurité avant tout c’est Dieu. Il y a une crise de confiance qui s’est installée. A la mosquée, nous n’avons pris aucune disposition de sécurité. Nous nous confions à Dieu J’ai rencontré des imams pour que dans nos mosquées, un accent soit mis sur le rôle de la jeunesse. Il faut les sensibiliser à la paix. Malgré l’accalmie dans la ville, l’on constate que les manifestants du Rhdp craignent aujourd’hui pour leur vie. Certains ont même quitté la ville.
l Pourquoi ?
Cette situation est due à la délation. Il y a des personnes qui dénoncent leurs voisins. Ce qui n’est pas bien. Vendredi dernier, quand la Crs (Compagnie républicaine de sécurité) est venue en renfort dans la ville, il y avait des gens qui indiquaient les domiciles des autres. Sinon, comment comprendre que la Crs, venue d’Abidjan, arrive à cibler des maisons. Des habitants ont été battus. Des femmes bastonnées. J’ai même attiré l’attention des autorités politiques et administratives de la ville sur ce problème qui gangrène Grand-Bassam.
Emmanuelle Kanga à Grand-Bassam