Laurent Gbagbo s'est entretenu avec les grandes figures financières de son régime. Objectif: s'armer pour durer. Laurent Gbagbo a discrètement reçu, en décembre, l'ensemble des responsables des régies financières de i'Etat et des sociétés publiques. Objectif de cette réunion visait à mobiliser suffisamment de liquidités pour acheter des équipements militaires et permettre à son régime de tenir. Alors que la communauté financière internationale - Fonds monétaire international (FMI) en tête - a coupé les robinets de l'aide, et que la Côte d'Ivoire a perdu le contrôle de ses comptes au sein de la Banque centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO), pourtant gouvernée par i'ivoirien Philippe Henry Dacoury-Tabley, Bété originaire de Gagnoa, la mobilisation des ressources sonnantes et trébuchantes est assurée par le ministre des finances de Gbagbo, son "petit frère" Désiré Dalla. Ex-directeur général du Port autonome de San-Pedro, premier port mondial pour l'exportation du cacao, celui-ci maîtrise à ce titre l'ensemble des flux financiers liés à l'économie cacaoyère. De son côté, Théophile Gogui, le directeur général de la Société de gestion du patrimoine immobilier de l'Etat (Sogepie), fait actuellement l'inventaire du riche patrimoine ivoirien à travers le monde. Des ventes de biens de l'Etat (immeubles, consulats...) sont envisagées pour alimenter la pompe à finances du régime, à savoir un compte offshore de la présidence domicilié au sein d'un grand groupe bancaire français. Chantal Bouedy, la patronne de la Société de gestion du patrimoine de l'électricité (Sogepe), qui contrôle les fonds du secteur de l'électricité et du gaz, affiche plus que jamais sa fidélité à Gbagbo, tout comme Fêh Kessé, le directeur général des impôts. Autre cacique du régime, Marcel Gossio, directeur du Port autonome d'Abidjan (PAA), finance les actions des partisans de Gbagbo dans l'Ouest du pays, ainsi que celles de l'agitateur Charles Blé Goudé, leader des Jeunes Patriotes. Le chef de l'Etat sortant peut également compter sur son beau-frère Kassoum Fadika, directeur général de la Société nationale des opérations pétrolières (Petroci). Ce dernier, très présent à Dubaï ces dernières semaines, a épousé ia soeur aînée de Nadiana Bamba, seconde épouse de Gbagbo. Autre acteur incontournable pour capter les ressources financières, Alphonse Mangly, le patron des douanes ivoiriennes, a demandé aux entreprises exportatrices de cacao de ne plus déposer leurs fonds à la BCEAO, mais à la Banque nationale d1nvestissement (BNI), établissement public passé sous le giron d'Hubert Oulaye, ancien ministre de la fonction publique et "faucon" du régime. Pour sa part, la directrice du Trésor public, Djédjé Mama, parente du leader du Front populaire ivoirien (FPI) insiste pour que les gros comptes (entreprises publiques) contournent la Banque centrale et alimentent les caisses du pouvoir. Enfin, Gbagbo fait reposer sa stratégie de survie sur la Versus Bank et la Banque pour le financement de l'agriculture (BFA). La première est dirigée par Jean Claude N'Da Ametchi, parent de Simone Gbagbo, tandis que la seconde est aux mains de Wenceslas Appiah, époux de Marthe Kacou, l'une des filles de la première dame. Alors que l'Etat ivoirien dispose de plus 130 milliards F CFA de trésorerie, Gbagbo peut aussi mobiliser quelque 50 milliards F CFA de son fonds de souveraineté, grâce auquel il peut tenir et "entretenir" ses partisans au cours des prochaines semaines. D'où le communiqué de Guillaume Soro, premier ministre d'Alassane Dramane Ouatlara, diffusé le 7 janvier, dans lequel il demande aux Nations unies de sanctionner piusieurs directeurs d'établissement bancaire.
(Source : LDC n°603)
(Source : LDC n°603)