La Tunisie a connu une révolution. Une vraie évolution, au lendemain de vingt-trois années d’une dictature au visage inhumain et d’un pouvoir sans partage, d’essence familiale et partisane, incarnée par l’ancien tenant des lieux, le Général Zine el-Abidine Ben Ali, qui a déposé le 6 novembre 1987, le fondateur du parti Néo-Destour, Habib Bourguiba. Dans une sorte de « dictature du silence », Ben Ali qui s’est débarrassé de sa vareuse de militaire, a marqué son peuple du fer rouge de la pensée unique, avec une liberté d’expression uniquement de façade et un pouvoir économique totalement aux mains de sa famille, de sa belle-famille et de ses partisans. Lasses de supporter les humeurs et les souffrances d’un homme se croyant investi d’un rôle messianique, avec un pouvoir personnel et personnalisé, les populations, conduites par les jeunes, ont exprimé, dans les rues, leur ras-le-bol. Au terme de plusieurs jours de refus de la dictature, la « révolution du jasmin », avec ses manifestations de rue, a fini par avoir raison du Raïs, « élu » et « réélu » à plusieurs reprises, à plus de 90% des voix. Sa police et ses miliciens ont beau supprimer des vies humaines, ils ne sont pas parvenus à maintenir son pouvoir corrompu, affairiste et accapareur. Après son curieux « je vous ai compris », aux allures de celui prononcé, le 4 juin 1958, à Alger par le Général Charles de Gaulle, Ben Ali, avec la lâcheté qui caractérisent les despotes, s’est enfui vers l’Arabie Saoudite. Or donc, l’homme qui n’a pas hésité à tirer des balles assassines sur ses compatriotes, a peur de la mort !
A dire vrai, ce qui vient de se passer en Tunisie, véhicule de grands enseignements. En premier lieu, la vanité des règnes de sang et leur impuissance devant la volonté populaire. Ils auront beau instaurer un régime de terreur, ils finissent par perdre la face devant le peuple, à qui revient, toujours, le dernier mot, le chant de la liberté et de l’indépendance.
En second lieu, la révolution tunisienne confirme, à bien des égards, qu’on ne peut pas faire le bonheur d’un peuple à sa place et que lui seul a la capacité de changer le cours de son destin, de mettre en branle ses aspirations démocratiques. A n’en point douter, c’est incontestablement un message sans ambigüité et sans équivoque que le peuple tunisien administre à tous les Africains, du Maghreb à l’Afrique Noire, en passant par le Centre, l’Ouest et l’Est, terreaux fertiles pour toutes sortes d’autocraties.
Le cas de la Côte d’Ivoire ne fait pas exception. Notre pays, a été soumis, pendant dix ans, aux appétits voraces d’un clan politique, d’un leader qui s’est bâti des fortunes colossales. Gbagbo, ses deux épouses, ses deux belles-familles, ses proches et la cohorte d’hommes d’affaires véreux qui prospèrent, sous son aile protectrice, au détriment du Trésor public, ont installé le pays dans une sorte de jungle. Pendant les dix dernières années, le Côte d’Ivoire a stagné, sinon reculé. Les voyants sont au rouge, les infrastructures se sont dégradées comme jamais. La corruption et le règne du favoritisme sont devenus la règle, l’honnêteté, l’exception. Le mérite a foutu le camp, quand les concours d’entrée à la Police, à la Gendarmerie et dans les grandes Ecoles de formation, l’argent parle à la place du stylo. La Côte d’Ivoire d’aujourd’hui reste jalouse de son passé, le regard toujours dans le rétroviseur, comme pour regretter les années Houphouët-Boigny. C’est pour mettre fin à cette expression angoissée des drames et tourments quotidiens, que les Ivoiriens se sont déplacés, massivement, aux urnes pour confier les rênes du pays, au RHDP, force porteuse de changement et d’espoir.
En proie, depuis plus d’un mois aux tentations dictatoriales d’un homme seul, mauvais perdant, en la personne de Laurent Gbagbo, ce pays voit se perpétuer une dictature sans foi, pour laquelle la vie humaine n’a aucun sens. Après avoir instauré un état de terreur (plus de 3500 personnes ont été tuées depuis octobre 2000) pour asseoir un pouvoir acquis par un coup d’Etat militaro-civil, le chef de file de la refondation refuse d’admettre sa défaite électorale devant le Président démocratiquement élu, Alassane Ouattara. En dépit de toutes les médiations engagées pour qu’il rende le tablier et quitte le Palais présidentiel, Gbagbo fait la sourde oreille et entend se maintenir aux affaires, contre la volonté exprimée par les Ivoiriens. Toutes les tentatives de la communauté internationale pour obtenir un départ pacifique, ont buté sur son entêtement à conserver un pouvoir dont il n’est plus le dépositaire. Faut-il le laisser, ainsi, défier le monde entier et garder les rênes du pays ? C’est en cela que ce qui vient de se dérouler en Tunisie, nous interpelle.
Aussi longtemps qu’il demeurera le détenteur exclusif du Pouvoir, le peuple souverain ne doit nullement se laisser abuser de la sorte. Prestement, il doit quitter les voies de la compromission, de la peur, de l’indolence et du nombrilisme, pour faire respecter son choix clairement exprimé le 28 novembre dernier, au risque d’être comptable de la mise à mal de la démocratie. Ainsi donc, ce qui se passe au pays d’Habib Bourguiba, avec la déconvenue fracassante du dictateur Ben Ali, nous met véritablement en situation. Accepter la démocratie en défendant nos voix jusqu’au bout, ou entrer, volontairement et de manière suicidaire, dans la soumission qu’impose Laurent Gbagbo.
Aussi corrompus qu’ils soient, aussi compromis et engagés qu’ils soient dans leur volonté de protéger les dictateurs, les généraux d’une armée et leurs subalternes finissent, toujours, par se ranger en retournant, pour ainsi dire, leurs fusils contre leurs commanditaires. A condition que le peuple, de par sa mobilisation, le veuille et démontre sa détermination. Ne sont-ce pas les forces de l’ordre tunisiennes qui ont tué plus de 67 manifestants et qui se sont retournées, quelques heures après, pour encourager les manifestations de rue ? Ici, ou ailleurs, les dictatures ont la même fin. S’il est une vérité universelle, qu’au delà de leur intransigeance et grande méchanceté, les tyrans sautent à bord du premier avion dès que le danger devient menaçant, il est aussi vrai que les canons ne peuvent jamais faire reculer un peuple résolu. Saddam Hussein (Irak), Mohamed Bacar (Comores), Mobutu (ex-Zaïre), Duvalier (Haïti) n’ont pu gouverner contre le gré de leur peuple.
La Tunisie, si loin mais tellement proche, nous donne des raisons d’espérer de la fin toute prochaine de la parenthèse Gbagbo. L’ancien chef de l’Etat est donc condamné à partir. Le reste n’est qu’une question de temps, «l’autre nom de Dieu», comme aime-t-il à le répéter. Prions, pour la Côte d’Ivoire
PAR CHARLES SANGA
A dire vrai, ce qui vient de se passer en Tunisie, véhicule de grands enseignements. En premier lieu, la vanité des règnes de sang et leur impuissance devant la volonté populaire. Ils auront beau instaurer un régime de terreur, ils finissent par perdre la face devant le peuple, à qui revient, toujours, le dernier mot, le chant de la liberté et de l’indépendance.
En second lieu, la révolution tunisienne confirme, à bien des égards, qu’on ne peut pas faire le bonheur d’un peuple à sa place et que lui seul a la capacité de changer le cours de son destin, de mettre en branle ses aspirations démocratiques. A n’en point douter, c’est incontestablement un message sans ambigüité et sans équivoque que le peuple tunisien administre à tous les Africains, du Maghreb à l’Afrique Noire, en passant par le Centre, l’Ouest et l’Est, terreaux fertiles pour toutes sortes d’autocraties.
Le cas de la Côte d’Ivoire ne fait pas exception. Notre pays, a été soumis, pendant dix ans, aux appétits voraces d’un clan politique, d’un leader qui s’est bâti des fortunes colossales. Gbagbo, ses deux épouses, ses deux belles-familles, ses proches et la cohorte d’hommes d’affaires véreux qui prospèrent, sous son aile protectrice, au détriment du Trésor public, ont installé le pays dans une sorte de jungle. Pendant les dix dernières années, le Côte d’Ivoire a stagné, sinon reculé. Les voyants sont au rouge, les infrastructures se sont dégradées comme jamais. La corruption et le règne du favoritisme sont devenus la règle, l’honnêteté, l’exception. Le mérite a foutu le camp, quand les concours d’entrée à la Police, à la Gendarmerie et dans les grandes Ecoles de formation, l’argent parle à la place du stylo. La Côte d’Ivoire d’aujourd’hui reste jalouse de son passé, le regard toujours dans le rétroviseur, comme pour regretter les années Houphouët-Boigny. C’est pour mettre fin à cette expression angoissée des drames et tourments quotidiens, que les Ivoiriens se sont déplacés, massivement, aux urnes pour confier les rênes du pays, au RHDP, force porteuse de changement et d’espoir.
En proie, depuis plus d’un mois aux tentations dictatoriales d’un homme seul, mauvais perdant, en la personne de Laurent Gbagbo, ce pays voit se perpétuer une dictature sans foi, pour laquelle la vie humaine n’a aucun sens. Après avoir instauré un état de terreur (plus de 3500 personnes ont été tuées depuis octobre 2000) pour asseoir un pouvoir acquis par un coup d’Etat militaro-civil, le chef de file de la refondation refuse d’admettre sa défaite électorale devant le Président démocratiquement élu, Alassane Ouattara. En dépit de toutes les médiations engagées pour qu’il rende le tablier et quitte le Palais présidentiel, Gbagbo fait la sourde oreille et entend se maintenir aux affaires, contre la volonté exprimée par les Ivoiriens. Toutes les tentatives de la communauté internationale pour obtenir un départ pacifique, ont buté sur son entêtement à conserver un pouvoir dont il n’est plus le dépositaire. Faut-il le laisser, ainsi, défier le monde entier et garder les rênes du pays ? C’est en cela que ce qui vient de se dérouler en Tunisie, nous interpelle.
Aussi longtemps qu’il demeurera le détenteur exclusif du Pouvoir, le peuple souverain ne doit nullement se laisser abuser de la sorte. Prestement, il doit quitter les voies de la compromission, de la peur, de l’indolence et du nombrilisme, pour faire respecter son choix clairement exprimé le 28 novembre dernier, au risque d’être comptable de la mise à mal de la démocratie. Ainsi donc, ce qui se passe au pays d’Habib Bourguiba, avec la déconvenue fracassante du dictateur Ben Ali, nous met véritablement en situation. Accepter la démocratie en défendant nos voix jusqu’au bout, ou entrer, volontairement et de manière suicidaire, dans la soumission qu’impose Laurent Gbagbo.
Aussi corrompus qu’ils soient, aussi compromis et engagés qu’ils soient dans leur volonté de protéger les dictateurs, les généraux d’une armée et leurs subalternes finissent, toujours, par se ranger en retournant, pour ainsi dire, leurs fusils contre leurs commanditaires. A condition que le peuple, de par sa mobilisation, le veuille et démontre sa détermination. Ne sont-ce pas les forces de l’ordre tunisiennes qui ont tué plus de 67 manifestants et qui se sont retournées, quelques heures après, pour encourager les manifestations de rue ? Ici, ou ailleurs, les dictatures ont la même fin. S’il est une vérité universelle, qu’au delà de leur intransigeance et grande méchanceté, les tyrans sautent à bord du premier avion dès que le danger devient menaçant, il est aussi vrai que les canons ne peuvent jamais faire reculer un peuple résolu. Saddam Hussein (Irak), Mohamed Bacar (Comores), Mobutu (ex-Zaïre), Duvalier (Haïti) n’ont pu gouverner contre le gré de leur peuple.
La Tunisie, si loin mais tellement proche, nous donne des raisons d’espérer de la fin toute prochaine de la parenthèse Gbagbo. L’ancien chef de l’Etat est donc condamné à partir. Le reste n’est qu’une question de temps, «l’autre nom de Dieu», comme aime-t-il à le répéter. Prions, pour la Côte d’Ivoire
PAR CHARLES SANGA