Fondateur de la chaîne AFRICABLE dont le président est à Bamako, Soumaïla Sidibé est un homme du milieu rompu aux techniques de la communication et de l’information. Dans cet entretien qu’il a accordé à l’I.A qui l’a rencontré lors de la réunion des Chefs d’Etats et de gouvernement de l’UEMOA, Soumaïla Sidibé s’ouvre sans faux-fuyants.
Comment est née l’idée d’AFRICABLE ?
C’est très simple. Quand on a un bouquet de chaînes qu’on distribue, on investit des centaines de millions. Donc le produit que nous vendions, on n’avait aucune chaîne qui nous appartienne. On travaillait à développer des chaînes pour les gens. Même si on gagnait de l’argent, un jour s’ils n’étaient pas contents, ils coupent le bouquet. C’est dans ce cadre que l’idée m’est venue en 1998 avec les câbles-opérateurs des autres pays pour créer une chaîne qui devait servir dans notre réseau. D’où AFRICABLE la première version qui a existé une année en France parce qu’on n’avait pas d’autorisation au Mali à l’époque. Vu les coûts en France, on a arrêté pour retourner au Mali.
En Afrique où les télévisions privées ont du mal à émerger à cause de la rareté de la publicité et de la concurrence déloyale, quel est l’histoire de votre success story ?
D’abord nous considérons notre chaîne comme une entreprise. Comme toute entreprise, il y a des gens qui empruntent des millions à la banque pour créer des compagnies de transport, des hôtels ou des usines. Nous avons quant à nous investi dans une chaîne de télé qui s’appelle AFRICABLE qui est gérée comme une entreprise. On se trouve des moyens de faire des économies pour que la chaîne soit viable en minimisant les coûts. Nous ne considérons pas une chaîne comme quelque chose d’extraordinaire. C’est aussi comme l’on gère un hôtel ou une compagnie de taxis.
Envisagez-vous d’installer des antennes ou des correspondants à travers les capitales africaines ?
AFRICABLE n’est pas une chaîne locale. C’est une chaîne panafricaine. Nous pensons que nous sommes la seule chaîne basée dans un pays et qui a des autorisations de diffusion en clair dans d’autres pays. On en a treize. A Dakar on a un bureau de douze personnes. Nous avons aussi des bureaux à Ouaga, à Bamako, à Niamey, à Cotonou. Nous sommes en train d’installer notre bureau de Libreville. Abidjan est déjà ouvert. Nous y avons un chef qui a tous ses équipements. A Paris, nous venons d’avoir un correspondant. Notre stratégie est basée sur la conquête du monde.
Quelles sont les réalités auxquelles vous êtes confronté dans l’exercice de vos fonctions?
Ce sont les réalités de toute entreprise. Les problèmes de ressources humaines, de financement, d’environnement. L’environnement de l’entreprise en Afrique est très difficile. Je discutais avec un ami directeur d’une chaîne publique de télévision subventionnée par l’Etat et je lui ai demandé si un spot publicitaire coûte 300 mille FCFA, quelle est la réalité économique puisque vous êtes subventionnés. Tout ça rentre dans le cadre de l’exercice difficile de notre métier de gestionnaire d’une chaîne de télévision privée qui est un métier tout nouveau en Afrique. Il va falloir pousser les autorités à légiférer et à organiser le secteur et qu’on arrête la concurrence déloyale. Nous sommes pourvoyeurs d’emplois, nous payons des impôts. Mais pour arrêter cette concurrence il y a un préalable. C’est de décider comme cela se passe en Europe qu’il y a des redevances télévisuelles à verser aux télévisions nationales pour qu’elles se retirent du marché de la publicité privée et qu’elles se consacrent seulement à la publicité institutionnelle. C’est la seule solution et on va y arriver.
Quel est votre message aux jeunes africains qui souhaiteraient se lancer dans l’entrepreneuriat ?
Il y a un préalable. C’est de savoir ce qu’on veut, où on veut aller et qui on est. On ne peut pas, aujourd’hui, cinquante ans après les indépendances dire que notre échec est la faute de quelqu’un. Le Japon a subsisté à la bombe atomique, la Chine a subi la pire des colonisations sous la domination japonaise, la France a été occupée, l’Allemagne détruite. Les Etats-Unis qui sont la première puissance mondiale ont été colonisés. Nous devons, nous jeunes, nous situer dans notre environnement. Surtout, refuser d’être des assistés. Cela veut dire que nous devons refuser de transférer nos problèmes sur les autres. Les propos du genre, l’Etat ne fait rien pour moi. Mais combien y a-t-il de jeunes africains qui sont allés à l’école et qui ont obtenu des diplômes ? Pas plus de 20 % à ma connaissance. Et la grande majorité qui n’est pas allée à l’école du tout ! Les problèmes sont immenses. Donc est ce que ceux qui ont été scolarisés et qui veulent entreprendre ne doivent pas se considérer comme des privilégiés et qu’ils doivent trouver eux-mêmes des solutions à leurs problèmes ? Quand on organisait la caravane de l’intégration dans le cadre du cinquantenaire, on n’est pas allé demander à l’Etat malien ce que devrait être notre quote-part. Trouvons donc des solutions et proposons des choses qui peuvent intéresser les gens pour voir si ça marche. Dans tous les cas ça marche. Comptons donc sur nous-mêmes. On ne peut pas se construire un mur tant qu’on n’a pas essayé. Il est très facile de critiquer les autres. Mais le mur qu’on ne peut pas sauter c’est le mur qu’on s’est construit. Je dis souvent à mes collaborateurs que tant que ce n’est pas non, c’est oui. On voulait le président de l’UEMOA et il suffisait qu’on l’invite. S’il disait non c’est non. Mais il ne l’a pas dit et il était sur notre plateau. Il faut se débarrasser des préjugés. Personne n’a le monopole de quoi que ce soit. Nous sommes allés dans les mêmes écoles que les autres. La connaissance et la science sont universelles. Nous on ne mystifie pas la télé. C’est une entreprise comme les autres et nous travaillons sans complexe. Quand on commençait ici à AFRICABLE, on n’avait ni véhicule ni caméra et on louait des taxis pour nos reportages. Si sept ans après on fait une caravane d’intégration avec vingt cinq véhicules qui nous appartiennent et soixante quinze caravaniers avec qui nous faisons 25.000 km, on dit que c’est Dieu qui est fort !
Entretien réalisé par Dosso Villard
Comment est née l’idée d’AFRICABLE ?
C’est très simple. Quand on a un bouquet de chaînes qu’on distribue, on investit des centaines de millions. Donc le produit que nous vendions, on n’avait aucune chaîne qui nous appartienne. On travaillait à développer des chaînes pour les gens. Même si on gagnait de l’argent, un jour s’ils n’étaient pas contents, ils coupent le bouquet. C’est dans ce cadre que l’idée m’est venue en 1998 avec les câbles-opérateurs des autres pays pour créer une chaîne qui devait servir dans notre réseau. D’où AFRICABLE la première version qui a existé une année en France parce qu’on n’avait pas d’autorisation au Mali à l’époque. Vu les coûts en France, on a arrêté pour retourner au Mali.
En Afrique où les télévisions privées ont du mal à émerger à cause de la rareté de la publicité et de la concurrence déloyale, quel est l’histoire de votre success story ?
D’abord nous considérons notre chaîne comme une entreprise. Comme toute entreprise, il y a des gens qui empruntent des millions à la banque pour créer des compagnies de transport, des hôtels ou des usines. Nous avons quant à nous investi dans une chaîne de télé qui s’appelle AFRICABLE qui est gérée comme une entreprise. On se trouve des moyens de faire des économies pour que la chaîne soit viable en minimisant les coûts. Nous ne considérons pas une chaîne comme quelque chose d’extraordinaire. C’est aussi comme l’on gère un hôtel ou une compagnie de taxis.
Envisagez-vous d’installer des antennes ou des correspondants à travers les capitales africaines ?
AFRICABLE n’est pas une chaîne locale. C’est une chaîne panafricaine. Nous pensons que nous sommes la seule chaîne basée dans un pays et qui a des autorisations de diffusion en clair dans d’autres pays. On en a treize. A Dakar on a un bureau de douze personnes. Nous avons aussi des bureaux à Ouaga, à Bamako, à Niamey, à Cotonou. Nous sommes en train d’installer notre bureau de Libreville. Abidjan est déjà ouvert. Nous y avons un chef qui a tous ses équipements. A Paris, nous venons d’avoir un correspondant. Notre stratégie est basée sur la conquête du monde.
Quelles sont les réalités auxquelles vous êtes confronté dans l’exercice de vos fonctions?
Ce sont les réalités de toute entreprise. Les problèmes de ressources humaines, de financement, d’environnement. L’environnement de l’entreprise en Afrique est très difficile. Je discutais avec un ami directeur d’une chaîne publique de télévision subventionnée par l’Etat et je lui ai demandé si un spot publicitaire coûte 300 mille FCFA, quelle est la réalité économique puisque vous êtes subventionnés. Tout ça rentre dans le cadre de l’exercice difficile de notre métier de gestionnaire d’une chaîne de télévision privée qui est un métier tout nouveau en Afrique. Il va falloir pousser les autorités à légiférer et à organiser le secteur et qu’on arrête la concurrence déloyale. Nous sommes pourvoyeurs d’emplois, nous payons des impôts. Mais pour arrêter cette concurrence il y a un préalable. C’est de décider comme cela se passe en Europe qu’il y a des redevances télévisuelles à verser aux télévisions nationales pour qu’elles se retirent du marché de la publicité privée et qu’elles se consacrent seulement à la publicité institutionnelle. C’est la seule solution et on va y arriver.
Quel est votre message aux jeunes africains qui souhaiteraient se lancer dans l’entrepreneuriat ?
Il y a un préalable. C’est de savoir ce qu’on veut, où on veut aller et qui on est. On ne peut pas, aujourd’hui, cinquante ans après les indépendances dire que notre échec est la faute de quelqu’un. Le Japon a subsisté à la bombe atomique, la Chine a subi la pire des colonisations sous la domination japonaise, la France a été occupée, l’Allemagne détruite. Les Etats-Unis qui sont la première puissance mondiale ont été colonisés. Nous devons, nous jeunes, nous situer dans notre environnement. Surtout, refuser d’être des assistés. Cela veut dire que nous devons refuser de transférer nos problèmes sur les autres. Les propos du genre, l’Etat ne fait rien pour moi. Mais combien y a-t-il de jeunes africains qui sont allés à l’école et qui ont obtenu des diplômes ? Pas plus de 20 % à ma connaissance. Et la grande majorité qui n’est pas allée à l’école du tout ! Les problèmes sont immenses. Donc est ce que ceux qui ont été scolarisés et qui veulent entreprendre ne doivent pas se considérer comme des privilégiés et qu’ils doivent trouver eux-mêmes des solutions à leurs problèmes ? Quand on organisait la caravane de l’intégration dans le cadre du cinquantenaire, on n’est pas allé demander à l’Etat malien ce que devrait être notre quote-part. Trouvons donc des solutions et proposons des choses qui peuvent intéresser les gens pour voir si ça marche. Dans tous les cas ça marche. Comptons donc sur nous-mêmes. On ne peut pas se construire un mur tant qu’on n’a pas essayé. Il est très facile de critiquer les autres. Mais le mur qu’on ne peut pas sauter c’est le mur qu’on s’est construit. Je dis souvent à mes collaborateurs que tant que ce n’est pas non, c’est oui. On voulait le président de l’UEMOA et il suffisait qu’on l’invite. S’il disait non c’est non. Mais il ne l’a pas dit et il était sur notre plateau. Il faut se débarrasser des préjugés. Personne n’a le monopole de quoi que ce soit. Nous sommes allés dans les mêmes écoles que les autres. La connaissance et la science sont universelles. Nous on ne mystifie pas la télé. C’est une entreprise comme les autres et nous travaillons sans complexe. Quand on commençait ici à AFRICABLE, on n’avait ni véhicule ni caméra et on louait des taxis pour nos reportages. Si sept ans après on fait une caravane d’intégration avec vingt cinq véhicules qui nous appartiennent et soixante quinze caravaniers avec qui nous faisons 25.000 km, on dit que c’est Dieu qui est fort !
Entretien réalisé par Dosso Villard