La scène politique africaine est dominée depuis fin novembre par la crise postélectorale ivoirienne et plus récemment par celles qui secouent le monde arabo-musulman. Témoins de ces événements, les élites ivoiriennes et les universitaires en particulier ont la responsabilité de poser les jalons d’une réflexion afin d’éclairer, lorsque viendra le moment, les générations futures pour qu’elles tirent les leçons de cette crise ivoirienne inédite en vue de construire leur avenir. Les questions clés pertinentes de cet avenir sont si nombreuses et les liaisons entre les facteurs qui gouvernent l’évolution du bourbier sociopolitique ivoirien si enchevêtrées et si complexes qu’il est difficile, avec les incertitudes critiques qui s’accumulent chaque jour, de prévoir, même à très court terme, où va la Côte d’Ivoire. Seule certitude, les refondateurs nous tirent vers le bas pour avoir promu la culture de la violence, fait triompher la médiocrité, et assassiné l’école. Ils ont fait perdre à notre pays son audience internationale. Le refus, par Gbagbo, de reconnaître sa défaite, à radicalisé la crise qui est devenue systémique avec l’amplification des violation des droits humains, les nouveaux charniers, les tueries massives des citoyens de l’opposition et leurs disparitions, le refuge des Ivoiriens dans les pays frontaliers, le braquage et l’illiquidité de nos banques, la fermeture des entreprises, le ralentissement de l’activité économique et des ports, l’accroissement du chômage et de la pauvreté, le désarroi des Ivoiriens.
Nous sommes à la veille de la mission de cinq chefs d’Etats de l’Union Africaine dans la paisible république d’antan, sous Félix Houphouët-Boigny. Nos honorables missionnaires, ont-ils vraiment compris l’ampleur du malaise du malade qu’ils viennent secourir ? Le peuple ivoirien dans sa grande majorité se connaît et connaît sa maladie. C’est pourquoi il n’a pas mordu à la propagande et à l’hameçon tribalo-populiste et xénophobe et a préféré le candidat du RHDP. Il est informé que le Conseil de sécurité de l’Union Africaine en sa 259ème session a affirmé et réaffirmé à Addis-Abéba que Ouattara est le président démocratiquement élu lors du scrutin du 28 novembre 2010.
Le débat est donc clos en principe sur cette dimension de notre crise postélectorale, à moins que l’UA ne se dédise. Le but de la mission des chefs d’Etats est ainsi de préparer les conditions de l’installation pacifique de Ouattara au sommet de l’Etat pour exercer le pouvoir que les Ivoiriens lui ont confié démocratiquement et souverainement. La majorité du peuple a cependant des soucis à faire partager à nos illustres visiteurs. Les Ivoiriens s’indigent du curieux et rétrograde principe de gouvernance politique de leurs « refondateurs » ; ils abhorrent le discours de ceux qui ne sentent responsables de rien dans nos malheurs et se cachent derrière la constitution, la nationalité, les prétendus complots de la France, de la communauté internationale et les étrangers qui seraient à l’origine de nos malheurs. Ce sont leurs marchepieds pour contester l’incontestable victoire de Ouattara et du RHDP. Il y a enfin le souci d’extirper la dimension ivoirienne de l’obsession du trône propre à nos républiques nègres d’Afrique.
UN CURIEUX ET RETROGRADE PRINCIPE DE GOUVERNANCE DEMOCRATIQUE
De la Côte d’Ivoire, le camp de l’ex président persiste à vouloir convaincre le monde entier, témoin d’une élection qu’il a suivie et supportée de bout en bout, politiquement, techniquement, financièrement et moralement, que tout a été bâclé au second tour après le premier salué par tous les observateurs et par lui-même pour sa rigueur, sa transparence, et la discipline des Ivoiriens.
Mais tout aurait été, subitement, truqué à la faveur d’une vaste tricherie orchestrée par l’opposition au second tour. Nous croyons quant à nous que des réalités méconnues ou volontairement occultées du terrain ivoirien apportent des éclairages utiles sur l’incontestable victoire de Ouattara. Malheureusement, l’obsession pour le trône, un phénomène récurrent dans nos républiques nègres postcoloniales, pousse à soutenir l’indéfendable là où la vérité du terrain aurait dû réconcilier les Ivoiriens. La tradition démocratique dans ces républiques nègres, quelques pays exceptés, veut que dès lors qu’un citoyen est élu président, cette fonction confère d’emblée à son pouvoir un caractère quasi divin d’indéracinabilité et d’invincibilité. La république devient sa propriété et les citoyens ses sujets. La démocratie doit être dès lors pratiquée et vécue en fonction de ce principe négro-africain d’invincibilité et d’indéracinabilité d’un président. C’est une dimension majeure du malaise ivoirien.
L’INCONTESTABLE VICTOIRE DE OUATTARA ET DU RHDP
La grande majorité des Ivoiriens sait que mille recomptages et reprises des élections dans les régions où le président sorti ne pèse pas un duvet ne changeront jamais les résultats en sa faveur. Un travail colossal a été abattu avec rigueur et patience par notre Commission Electorale Indépendante (CEI) avec la coopération internationale et des moyens très importants que celle-ci a mis à notre disposition, en outrepassant notre « souveraineté » pour faire éclater la vérité des urnes dans la plus grande transparence. Le temps et la rigueur mis pour parachever la préparation la plus longue et la plus couteuse au monde d’une élection commandaient que nous réagissions avec rigueur, honneur et reconnaissance, pour saluer le verdict sorti des urnes. Dans cet esprit, les résultats des deux scrutins ont été exploités, projetés sur le terrain, analysés et confrontés aux réalités de notre milieu.
L’environnement spécifique des élections en Côte d’Ivoire
Nous passons outre l’environnement international et l’environnement ouest africain qui ont pesé incontestablement sur nos élections dans le sens de la clarté et de la transparence. Nous passons également outre les élucubrations politico-juridiques sur l’interprétation de la victoire des l’un ou de l’autre candidat. Les enjeux sont nationaux. Le comportement des Ivoiriens qui se sont exprimés dans les urnes est seul à même d’aider à déterminer objectivement qui a remporté la victoire
Si quelqu’un vous dit que Bédié a gagné les élections dans le Fromager et toute la région où une tradition violente d’empêchement de vote a été érigée en norme depuis les élections de 1995 par le FPI pour gagner la victoire dans la plus grande impunité, dites-lui qu’il se trompe. Ici, le règne de la force et de la terreur fait pencher la balance en faveur du candidat originaire du terroir à la présidence. Si quelqu’un vous dit également que Ouattara a perdu les élections devant l’un quelconque de ses adversaires dans les régions des savanes, du Denguélé, du Worodougou et le Bafing, dites lui également, très poliment qu’il se trompe. Mais nous ne connaissons pas ici de tradition d’empêchement de vote. C’est le fils de la région qui s’est s’impose lui aussi comme dans le Centre Ouest. Ces observations restent également valables dans la vaste région du Centre Bandama (Vallée du Bandama, Nzi Comoé, Lacs) très largement favorable aux héritiers de Félix Houphouët-Boigny. Chaque candidat a donc un espace politique qu’il domine. C’est une loi non écrite, et c’est bien dommage pour notre démocratie ; mais pour le moment, ce sont les grands groupes culturels qui cumulent le maximum de voix dans leurs bastions traditionnels qui emportent une élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Combien de temps cela durera-t-il encore?
Heureusement pour nous, de nouveaux schémas sont entrain de se dessiner progressivement dans la dynamique de la société ivoirienne en déconstruction et en recomposition. Abidjan la cosmopolite, premier pôle démo-économique de notre pays et raccourci démographique de la CEDEAO réserve des surprises entre une élection présidentielle, une élection de députés et une élection municipale ou de district. Par ailleurs, dans certaines parties des bastions traditionnels du PDCI, du RDR et du FPI, subsistent tout de même des zones fragilisées par l’évolution socio-économique et les brassages de populations (cas des Moyen et Sud Comoé et des pays lagunaires et même du Fromager). Dans les bastions du PDCI, les formations politiques nées des fractures successives de ce parti sexagénaire suscitent des percées significatives des adversaires malgré la résistance héroïque de ce parti depuis qu’il a perdu le pouvoir. Le vaste front pionnier du Bas Sassandra en milieu krou est lui aussi un espace très disputé politiquement depuis le début du multipartisme, mais il reste encore favorable aux héritiers de Houphouët. Ce sont là des réalités occultées par les experts européens dans leurs bases de sondage parce qu’ils voient dans les électeurs ivoiriens des individus à travers la logique impersonnelle et froide du raisonnement cartésien. Cette méprise a fait rêver Gbagbo et son LMP avec les sondages de SOFRES qui se sont noyés dans la lagune Ebrié. Ouattara a étalé Gbagbo contrairement à leurs calculs scientifiques. Nous voulons dire au total que la dynamiques des environnements interne et intermédiaire des grandes aires ethnoculturelles du pays n’ont pas encore livré leurs secrets : elles n’ont pas fait l’objet d’observations systématiques en sciences politiques, si bien que l’interprétation des résultats de nos élections relèvent le plus souvent de la passion que de la raison, en minimisant le poids encore décisif de la résistance des forces traditionnelles dans l’élection d’un président ivoirien.
Réalités et vérité des scrutins
Experts locaux, nous avons pris nous aussi le temps d’examiner, sous tous les angles, les résultats des scrutins du 31 octobre et du 28 novembre 2010 à la lumière des contraintes qui précèdent. Et nous concluons que l’UA a mille fois raison de ne pas perdre son temps sur la recherche de la vérité en ce qui concerne le gagnant des élections du 28 novembre 2010. Les Ivoiriens connaissent cette vérité : la victoire de Ouattara partagée par la communauté internationale, observatrice impartiale et unanime sur le résultat proclamé par la CEI. Pour quelles raisons des observateurs aussi rigoureux que ceux de la fondation Carter des USA, de l’Union Européenne, de l’UA et de la CEDEAO préféreraient-ils unanimement Ouattara à Gbagbo ? Et pourquoi auraient-ils préféré Ouattara et Gbagbo à Bédié dont les réclamations n’ont même pas été examinées par la cour constitutionnelle. Seul le groupe LMP, contre tous, tente un forcing pour s’opposer à la vérité des urnes. Pourtant, dans l’état actuel de la dynamique économique politique et socioculturelle de la Côte d’Ivoire, Gbagbo n’avait aucune chance de l’emporter devant une coalition composée par Bédié, Ouattara, Mabri et Anaky. Sauf en rêve. Au-delà des chiffres une cartographie des différents scrutins réfléchit de puissants messages conformes à la vérité du terrain.
Autre fait notable, nombreux sont les intellectuels africains qui sont rivés à une idée reçue non fondée. Les Ivoiriens seraient profondément divisés entre nordistes et sudistes sur la question de la gestion du pouvoir. Or la Côte d’Ivoire a évolué malgré les puissants freins des structures mentales traditionnelles. La victoire de Ouattara infirme cette l’idée reçue. Nordistes et les sudistes ne vivent pas à couteaux tirés en Côte d’Ivoire. Autrement, ce serait l’hécatombe dans les Dioulabougou de nos villes depuis le début de la crise en 1999. La part des sudistes dans la victoire de Ouattara est du reste de loin plus importante que celle des nordistes. Voilà une nouvelle donne très importante dans l’évolution récente de la Côte d’Ivoire. Il est ainsi heureux, si nous voulons aller vers la réconciliation et l’intégration nationale et la paix, que le Centre qui a déjà eu deux présidents, l’Ouest qui a eu également son président, le Centre Ouest avec son président actuel qui ne veut pas sortir pacifiquement, admettent qu’en dernière analyse, un Nordiste musulman, grâce à l’appui d‘une large proportion de Sudistes chrétiens, devrait lui aussi nous gouverner pour que les citoyens de cette vaste région se sentent, comme nous, enracinés psychologiquement dans notre république malade. Souvenons-nous des conséquences dramatiques du refus du verdit des urnes en 2000 après l’exclusion des candidats du PDCI et du RDR.
Une victoire indiscutable qui tue une idée reçue et le mythe Gbagbo
Les batailles ont été très âpres. Le scrutin du 31octobre opposait des formations politiques ou des candidats individuels à une majorité présidentielle (LMP) fictive. Le second tour opposait deux blocs de partis politiques (RHDP et LMP), deux organisations et deux visions diamétralement opposées de la Démocratie, de la gestion du pouvoir et des relations internationales. La bataille de la région des Lagunes qui regroupe le tiers des électeurs du pays, autour d’Abidjan, dans l’espace politique le plus multiethnique, le plus cosmopolite, le plus moderne, et le plus disputé du pays était au centre des enjeux des élections présidentielles. Les deux protagonistes se sont séparés sur ce champ de bataille avec respectivement 48,10% pour le bloc Ouattara-RHDP et 51,9% pour le bloc Gbagbo-LMP. Avec ce partage presqu’équilibré des voix, les carottes étaient cuites pour Gbagbo. Il suffisait pour le RHDP de l’emporter largement au moins dans deux de ses bastions traditionnels pour sortir victorieux de la bataille finale. C’est le défi que Ouattara et le RHDP ont relevé dans la région du Grand Centre, deuxième pôle démographique du pays avec 79,10% des suffrages contre 19,1% pour Gbagbo, et dans toute la région des savanes, d’Odienné à Bouna et de Séguéla à Bondoukou. Le score de Ouattara a été de 92% en moyenne dans son bastion du nord (Denguélé, Savanes, Worodougou, Bafing), une ancienne chasse gardée du PDCI conquise par le RDR après la fracture du PDCI. Il importe des souligner en outre que toute la région des savanes, d’ouest en Est, c'est-à-dire sur plus de la moitié du territoire au nord du parallèle Bondoukou-Séguéla totalisait moins de 20% des Ivoiriens au recensement de 1998, soit moins que la seule agglomération Abidjanaise. Le Nord n’a apporté, au vu de ces disparités criardes dans la distribution des électeurs ivoiriens, qu’un appoint à la victoire de Ouattara et du RHDP. Cette victoire s’est dessinée principalement à Abidjan, au centre et dans le Sud-Ouest . Ouattara est très présent par contre dans les régions que Gbagbo et le bloc LMP considèrent comme leur fief.
Dans la région forestière du sud où il a cumulé l’essentiel de ses voix, Gbagbo n’est nulle part maître absolu du terrain. En dehors de la région de l’Agnéby où il a réalisé un score de 80%, il est presque partout talonné par Ouattara. Le comportement des électeurs a été pratiquement le même pour les militants proches du RHDP aux deux scrutins avec des scores très élevés de Ouattara dans les bastions PDCI-RDR. La « majorité » présidentielle n’a pas contesté les scores de Ouattara au nord au premier tour. Or ce sont ces mêmes scores qui ont été reconduits et améliorés avec une légère hausse au second tour du fait des appuis des trois autres partis du RHDP. Les reports ont joué de 70 à 80 % après l’appel de Bédié aux militants du RPDP pour soutenir Ouattara. D’où vient alors cette idée de tricheries massives qui ont bouleversé les résultats dans des régions où Gbagbo et son LMP ne pèsent pas un duvet ? Dans son édition n°3224 du jeudi 18 novembre 2010, une dans Le Patriote avait averti : il est impossible, pour Gbagbo, de relever le défi de battre Bédié, Ouattara, Mabri et Anaky regroupés et soudés dans la conjoncture sociopolitique actuelle le la Côte d’Ivoire. Et cela s’est vérifié. Le scrutin du 28 novembre n’a fait que confirmer une vérité : le RHDP est le groupement politique largement dominant sur les scènes politiques nationale et régionale. Ouattara est plus populaire que Gbagbo. « C’est ça qui est la vérité » pour paraphraser le Woody. Il n’y a aucune honte en démocratie qu’il en soit ainsi. En dernière analyse, toutes les régions ont accepté le « candidat de l’étranger » et dans leur grande majorité, les Ivoiriens l’ont préféré à la « copie originale ». L’engagement pris par le RHDP de regrouper ses forces au second tour des élections a ainsi porté ses fruits et un coup fatal à Gbagbo et ses supporters qui croyaient que cet engagement ne teindrait pas. Par ailleurs, l’hypothèse selon laquelle l’opposition Gbagbo-Ouattara serait largement favorable à Gbagbo ne s’est pas vérifiée. Malheureusement, notre grand démocrate devant l’éternel refuse de se soumettre démocratiquement au verdict du peuple. Le nœud de la crise post électorale se trouve ici et nulle part ailleurs. Le bloc LMP doit reconnaître avec réalisme, humilité et grandeur que Ouattara est, incontestablement, le Président aimé voulu et choisi par la majorité des Ivoiriens.
OBSESSION DU TRONE ET HOLD-UP ELECTORAL
La fictive majorité présidentielle était consciente, depuis la fin de son mandat en 2005, qu’elle ne pouvait pas gagner des élections transparentes. Elle a anticipé alors avant le scrutin qu’elle redoutait et qu’elle a fait repousser à six reprises, pour amener les Ivoiriens à admettre qu’elle n’était pas prête à accepter des résultats qui lui seraient de toute façon défavorable avec tous les gâchis qu’elle a causés dans la république. On n’en veut pour preuve que ces propos régulièrement tenus par ces drôles de démocrates, qui se passent de tout commentaire. « On gagne ou on gagne ! ». A quelques jours du second tour des présidentielles, à Dabou, Agboville et Adzopé Gbagbo proclame : « Je n’accepterai jamais qu’un héritier de Houphouët occupe le fauteuil présidentiel ». Aux forces de défense et de sécurité il tend la perche : « Si je tombe, vous tombez » ou encore « Si je perds, vous perdez » (vos prébendes) aux dignitaires et suiveurs du régime déchu. Faut-il s’étonner dès lors de la transe qui s’est emparée de nos refondateurs à la publication des résultats par la Commission électorale indépendante ? Mais n’oublions pas aussi ces déclarations terrifiantes : « Mille morts à gauche, mille morts à droite, moi j’avance » ; ou encore « Si Gbagbo n’est pas élu, nous aurons dix ans de guerre civile». Et enfin « J’y suis, j’y reste » dans Jeune Afrique à une semaine du premier tour des élections. Pour combien de temps et à quel titre ? C’est clair, la stratégie de la terreur pour confisquer le pouvoir a été préméditée bien avant la tenue des élections et sa mise en œuvre planifiée pour que « l’on gagne ou l’on gagne ». Les Ivoiriens ne sont ni amnésiques, ni idiots. Ils comprennent pourquoi les militants du RHDP ont commencé à tomber, à mourir massivement, et à disparaître bien avant la proclamation des résultats du second tour des présidentielles. Cette attitude est une première dans l’histoire de la construction de notre démocratie. Etait-il alors nécessaire d’organiser une élection ?
L’obsession pour s’agripper au trône est un indicateur honteux de faiblesse et de recul de la culture démocratique en Côte d’Ivoire dans un régime curieusement dirigé par des universitaires. L’origine du blocage actuel du système politique ivoirien ne fait aucun doute. Gbagbo et les refondateurs sont le problème de la Côte d’Ivoire.
On comprend dès lors la manipulation du Conseil Constitutionnel pour inverser les résultats du second en poussant le ridicule jusqu'à ignorer royalement l’article 64 du code électoral et à invalider les résultats de nombreux départements où le mentor du FPI ne pèse pas un duvet, afin d’imposer un candidat. Tous ces comportements participent de la logique de la non acceptation à tout prix du résultat des urnes qui transparaît dans les refrains et slogans de campagne de l’ancien camp présidentiel. Nos refondateurs croient-ils que les dix années de confiscation des média d’Etat « avec la RTI devenue LMP-tv, réplique ignoble de Radio Télévision Libre des Mille Collines, experte dans l’art de répandre les propagandes haineuses contre les opposants et la communauté internationale » et la répression sauvage de la presse de l’opposition ou de la presse étrangère ont rendu les Ivoiriens aveugles, sourds et aphones ? Ils nous renvoient au résistant à la « Milosevic, le dictateur yougoslave puis serbe battu à plates coutures par Vojislav Kostunica, candidat de l’opposition » qui avait choisi de s’accrocher au pouvoir ». Adossé à sa garde prétorienne, le mentor de nos refondateurs a oublié sa promesse de nous « gouverner autrement » et démocratiquement. Il est devenu un obsédé du trône avec sa princesse abouré. Face à cette dictature rampante, la victoire de Ouattara et la coalition du RHDP sonnent comme un vent de changement dont le puissant souffle vient du peuple qui a signé la victoire du candidat du RHDP.
LA VICTOIRE DU RHDP COMME SYMBOLE, VECTEUR DE RECONCILIATION ET D’INTEGRATION NATIONALE
On se rend compte aujourd’hui de l’intérêt stratégique de la naissance au RHDP à Paris. Il aurait fallu inventer une autre organisation politique pour que l’opposition ivoirienne vienne à bout du pouvoir de Gbagbo si le RHDP n’avait pas existé. Sa cohésion et sa démarche sont à méditer dans les autres pays africains où les présidents indéracinables continuent de faire la loi. Le RHDP émerge comme un groupement de partis politiques propulsé par le peuple pour réconcilier la Côte d’Ivoire fracturée. Il ressoude à nouveau Nordistes et Sudistes dans une nouvelle alliance salutaire et sacrée après le mouvement amorcé par Houphouët. La victoire du RHDP sonne l’heure de la remise de l’ouvrage de Houphouët sur le métier.
Par ces sales temps pour les dictateurs et les indéracinables présidents africains que leurs peuples dégagent, nos frères LMP, s’ils aiment vraiment ce pays, gagneraient à respecter la volonté des urnes et du peuple qui transcendent le verdict d’un conseil constitutionnel combattant qui lit le droit à l’envers. Les passions et les nouvelles déchirures créées par cette grave entorse à la démocratie sont pour le moment encore trop fortes, oppressives et paralysantes pour nous aider à nous comporter en êtres raisonnables. Mais l’accélération du changement, et l’interconnexion croissante des économies et des sociétés dans l’environnement turbulent de la mondialisation vaincra la résistance des mentalités dans notre cheminement vers une nouvelle société démocratique. Le RHDP est, pour le moment, chez nous, la Force politique, une Vision et un Espoir reconnus par notre peuple qui le met en mission pour la reconstruction d’un nouvel avenir commun.
Pr KOBY Assa Théophile de FUTURIV et FUAP,
section universitaire du PDCI
assa_koby@yahoo.fr
Nous sommes à la veille de la mission de cinq chefs d’Etats de l’Union Africaine dans la paisible république d’antan, sous Félix Houphouët-Boigny. Nos honorables missionnaires, ont-ils vraiment compris l’ampleur du malaise du malade qu’ils viennent secourir ? Le peuple ivoirien dans sa grande majorité se connaît et connaît sa maladie. C’est pourquoi il n’a pas mordu à la propagande et à l’hameçon tribalo-populiste et xénophobe et a préféré le candidat du RHDP. Il est informé que le Conseil de sécurité de l’Union Africaine en sa 259ème session a affirmé et réaffirmé à Addis-Abéba que Ouattara est le président démocratiquement élu lors du scrutin du 28 novembre 2010.
Le débat est donc clos en principe sur cette dimension de notre crise postélectorale, à moins que l’UA ne se dédise. Le but de la mission des chefs d’Etats est ainsi de préparer les conditions de l’installation pacifique de Ouattara au sommet de l’Etat pour exercer le pouvoir que les Ivoiriens lui ont confié démocratiquement et souverainement. La majorité du peuple a cependant des soucis à faire partager à nos illustres visiteurs. Les Ivoiriens s’indigent du curieux et rétrograde principe de gouvernance politique de leurs « refondateurs » ; ils abhorrent le discours de ceux qui ne sentent responsables de rien dans nos malheurs et se cachent derrière la constitution, la nationalité, les prétendus complots de la France, de la communauté internationale et les étrangers qui seraient à l’origine de nos malheurs. Ce sont leurs marchepieds pour contester l’incontestable victoire de Ouattara et du RHDP. Il y a enfin le souci d’extirper la dimension ivoirienne de l’obsession du trône propre à nos républiques nègres d’Afrique.
UN CURIEUX ET RETROGRADE PRINCIPE DE GOUVERNANCE DEMOCRATIQUE
De la Côte d’Ivoire, le camp de l’ex président persiste à vouloir convaincre le monde entier, témoin d’une élection qu’il a suivie et supportée de bout en bout, politiquement, techniquement, financièrement et moralement, que tout a été bâclé au second tour après le premier salué par tous les observateurs et par lui-même pour sa rigueur, sa transparence, et la discipline des Ivoiriens.
Mais tout aurait été, subitement, truqué à la faveur d’une vaste tricherie orchestrée par l’opposition au second tour. Nous croyons quant à nous que des réalités méconnues ou volontairement occultées du terrain ivoirien apportent des éclairages utiles sur l’incontestable victoire de Ouattara. Malheureusement, l’obsession pour le trône, un phénomène récurrent dans nos républiques nègres postcoloniales, pousse à soutenir l’indéfendable là où la vérité du terrain aurait dû réconcilier les Ivoiriens. La tradition démocratique dans ces républiques nègres, quelques pays exceptés, veut que dès lors qu’un citoyen est élu président, cette fonction confère d’emblée à son pouvoir un caractère quasi divin d’indéracinabilité et d’invincibilité. La république devient sa propriété et les citoyens ses sujets. La démocratie doit être dès lors pratiquée et vécue en fonction de ce principe négro-africain d’invincibilité et d’indéracinabilité d’un président. C’est une dimension majeure du malaise ivoirien.
L’INCONTESTABLE VICTOIRE DE OUATTARA ET DU RHDP
La grande majorité des Ivoiriens sait que mille recomptages et reprises des élections dans les régions où le président sorti ne pèse pas un duvet ne changeront jamais les résultats en sa faveur. Un travail colossal a été abattu avec rigueur et patience par notre Commission Electorale Indépendante (CEI) avec la coopération internationale et des moyens très importants que celle-ci a mis à notre disposition, en outrepassant notre « souveraineté » pour faire éclater la vérité des urnes dans la plus grande transparence. Le temps et la rigueur mis pour parachever la préparation la plus longue et la plus couteuse au monde d’une élection commandaient que nous réagissions avec rigueur, honneur et reconnaissance, pour saluer le verdict sorti des urnes. Dans cet esprit, les résultats des deux scrutins ont été exploités, projetés sur le terrain, analysés et confrontés aux réalités de notre milieu.
L’environnement spécifique des élections en Côte d’Ivoire
Nous passons outre l’environnement international et l’environnement ouest africain qui ont pesé incontestablement sur nos élections dans le sens de la clarté et de la transparence. Nous passons également outre les élucubrations politico-juridiques sur l’interprétation de la victoire des l’un ou de l’autre candidat. Les enjeux sont nationaux. Le comportement des Ivoiriens qui se sont exprimés dans les urnes est seul à même d’aider à déterminer objectivement qui a remporté la victoire
Si quelqu’un vous dit que Bédié a gagné les élections dans le Fromager et toute la région où une tradition violente d’empêchement de vote a été érigée en norme depuis les élections de 1995 par le FPI pour gagner la victoire dans la plus grande impunité, dites-lui qu’il se trompe. Ici, le règne de la force et de la terreur fait pencher la balance en faveur du candidat originaire du terroir à la présidence. Si quelqu’un vous dit également que Ouattara a perdu les élections devant l’un quelconque de ses adversaires dans les régions des savanes, du Denguélé, du Worodougou et le Bafing, dites lui également, très poliment qu’il se trompe. Mais nous ne connaissons pas ici de tradition d’empêchement de vote. C’est le fils de la région qui s’est s’impose lui aussi comme dans le Centre Ouest. Ces observations restent également valables dans la vaste région du Centre Bandama (Vallée du Bandama, Nzi Comoé, Lacs) très largement favorable aux héritiers de Félix Houphouët-Boigny. Chaque candidat a donc un espace politique qu’il domine. C’est une loi non écrite, et c’est bien dommage pour notre démocratie ; mais pour le moment, ce sont les grands groupes culturels qui cumulent le maximum de voix dans leurs bastions traditionnels qui emportent une élection présidentielle en Côte d’Ivoire. Combien de temps cela durera-t-il encore?
Heureusement pour nous, de nouveaux schémas sont entrain de se dessiner progressivement dans la dynamique de la société ivoirienne en déconstruction et en recomposition. Abidjan la cosmopolite, premier pôle démo-économique de notre pays et raccourci démographique de la CEDEAO réserve des surprises entre une élection présidentielle, une élection de députés et une élection municipale ou de district. Par ailleurs, dans certaines parties des bastions traditionnels du PDCI, du RDR et du FPI, subsistent tout de même des zones fragilisées par l’évolution socio-économique et les brassages de populations (cas des Moyen et Sud Comoé et des pays lagunaires et même du Fromager). Dans les bastions du PDCI, les formations politiques nées des fractures successives de ce parti sexagénaire suscitent des percées significatives des adversaires malgré la résistance héroïque de ce parti depuis qu’il a perdu le pouvoir. Le vaste front pionnier du Bas Sassandra en milieu krou est lui aussi un espace très disputé politiquement depuis le début du multipartisme, mais il reste encore favorable aux héritiers de Houphouët. Ce sont là des réalités occultées par les experts européens dans leurs bases de sondage parce qu’ils voient dans les électeurs ivoiriens des individus à travers la logique impersonnelle et froide du raisonnement cartésien. Cette méprise a fait rêver Gbagbo et son LMP avec les sondages de SOFRES qui se sont noyés dans la lagune Ebrié. Ouattara a étalé Gbagbo contrairement à leurs calculs scientifiques. Nous voulons dire au total que la dynamiques des environnements interne et intermédiaire des grandes aires ethnoculturelles du pays n’ont pas encore livré leurs secrets : elles n’ont pas fait l’objet d’observations systématiques en sciences politiques, si bien que l’interprétation des résultats de nos élections relèvent le plus souvent de la passion que de la raison, en minimisant le poids encore décisif de la résistance des forces traditionnelles dans l’élection d’un président ivoirien.
Réalités et vérité des scrutins
Experts locaux, nous avons pris nous aussi le temps d’examiner, sous tous les angles, les résultats des scrutins du 31 octobre et du 28 novembre 2010 à la lumière des contraintes qui précèdent. Et nous concluons que l’UA a mille fois raison de ne pas perdre son temps sur la recherche de la vérité en ce qui concerne le gagnant des élections du 28 novembre 2010. Les Ivoiriens connaissent cette vérité : la victoire de Ouattara partagée par la communauté internationale, observatrice impartiale et unanime sur le résultat proclamé par la CEI. Pour quelles raisons des observateurs aussi rigoureux que ceux de la fondation Carter des USA, de l’Union Européenne, de l’UA et de la CEDEAO préféreraient-ils unanimement Ouattara à Gbagbo ? Et pourquoi auraient-ils préféré Ouattara et Gbagbo à Bédié dont les réclamations n’ont même pas été examinées par la cour constitutionnelle. Seul le groupe LMP, contre tous, tente un forcing pour s’opposer à la vérité des urnes. Pourtant, dans l’état actuel de la dynamique économique politique et socioculturelle de la Côte d’Ivoire, Gbagbo n’avait aucune chance de l’emporter devant une coalition composée par Bédié, Ouattara, Mabri et Anaky. Sauf en rêve. Au-delà des chiffres une cartographie des différents scrutins réfléchit de puissants messages conformes à la vérité du terrain.
Autre fait notable, nombreux sont les intellectuels africains qui sont rivés à une idée reçue non fondée. Les Ivoiriens seraient profondément divisés entre nordistes et sudistes sur la question de la gestion du pouvoir. Or la Côte d’Ivoire a évolué malgré les puissants freins des structures mentales traditionnelles. La victoire de Ouattara infirme cette l’idée reçue. Nordistes et les sudistes ne vivent pas à couteaux tirés en Côte d’Ivoire. Autrement, ce serait l’hécatombe dans les Dioulabougou de nos villes depuis le début de la crise en 1999. La part des sudistes dans la victoire de Ouattara est du reste de loin plus importante que celle des nordistes. Voilà une nouvelle donne très importante dans l’évolution récente de la Côte d’Ivoire. Il est ainsi heureux, si nous voulons aller vers la réconciliation et l’intégration nationale et la paix, que le Centre qui a déjà eu deux présidents, l’Ouest qui a eu également son président, le Centre Ouest avec son président actuel qui ne veut pas sortir pacifiquement, admettent qu’en dernière analyse, un Nordiste musulman, grâce à l’appui d‘une large proportion de Sudistes chrétiens, devrait lui aussi nous gouverner pour que les citoyens de cette vaste région se sentent, comme nous, enracinés psychologiquement dans notre république malade. Souvenons-nous des conséquences dramatiques du refus du verdit des urnes en 2000 après l’exclusion des candidats du PDCI et du RDR.
Une victoire indiscutable qui tue une idée reçue et le mythe Gbagbo
Les batailles ont été très âpres. Le scrutin du 31octobre opposait des formations politiques ou des candidats individuels à une majorité présidentielle (LMP) fictive. Le second tour opposait deux blocs de partis politiques (RHDP et LMP), deux organisations et deux visions diamétralement opposées de la Démocratie, de la gestion du pouvoir et des relations internationales. La bataille de la région des Lagunes qui regroupe le tiers des électeurs du pays, autour d’Abidjan, dans l’espace politique le plus multiethnique, le plus cosmopolite, le plus moderne, et le plus disputé du pays était au centre des enjeux des élections présidentielles. Les deux protagonistes se sont séparés sur ce champ de bataille avec respectivement 48,10% pour le bloc Ouattara-RHDP et 51,9% pour le bloc Gbagbo-LMP. Avec ce partage presqu’équilibré des voix, les carottes étaient cuites pour Gbagbo. Il suffisait pour le RHDP de l’emporter largement au moins dans deux de ses bastions traditionnels pour sortir victorieux de la bataille finale. C’est le défi que Ouattara et le RHDP ont relevé dans la région du Grand Centre, deuxième pôle démographique du pays avec 79,10% des suffrages contre 19,1% pour Gbagbo, et dans toute la région des savanes, d’Odienné à Bouna et de Séguéla à Bondoukou. Le score de Ouattara a été de 92% en moyenne dans son bastion du nord (Denguélé, Savanes, Worodougou, Bafing), une ancienne chasse gardée du PDCI conquise par le RDR après la fracture du PDCI. Il importe des souligner en outre que toute la région des savanes, d’ouest en Est, c'est-à-dire sur plus de la moitié du territoire au nord du parallèle Bondoukou-Séguéla totalisait moins de 20% des Ivoiriens au recensement de 1998, soit moins que la seule agglomération Abidjanaise. Le Nord n’a apporté, au vu de ces disparités criardes dans la distribution des électeurs ivoiriens, qu’un appoint à la victoire de Ouattara et du RHDP. Cette victoire s’est dessinée principalement à Abidjan, au centre et dans le Sud-Ouest . Ouattara est très présent par contre dans les régions que Gbagbo et le bloc LMP considèrent comme leur fief.
Dans la région forestière du sud où il a cumulé l’essentiel de ses voix, Gbagbo n’est nulle part maître absolu du terrain. En dehors de la région de l’Agnéby où il a réalisé un score de 80%, il est presque partout talonné par Ouattara. Le comportement des électeurs a été pratiquement le même pour les militants proches du RHDP aux deux scrutins avec des scores très élevés de Ouattara dans les bastions PDCI-RDR. La « majorité » présidentielle n’a pas contesté les scores de Ouattara au nord au premier tour. Or ce sont ces mêmes scores qui ont été reconduits et améliorés avec une légère hausse au second tour du fait des appuis des trois autres partis du RHDP. Les reports ont joué de 70 à 80 % après l’appel de Bédié aux militants du RPDP pour soutenir Ouattara. D’où vient alors cette idée de tricheries massives qui ont bouleversé les résultats dans des régions où Gbagbo et son LMP ne pèsent pas un duvet ? Dans son édition n°3224 du jeudi 18 novembre 2010, une dans Le Patriote avait averti : il est impossible, pour Gbagbo, de relever le défi de battre Bédié, Ouattara, Mabri et Anaky regroupés et soudés dans la conjoncture sociopolitique actuelle le la Côte d’Ivoire. Et cela s’est vérifié. Le scrutin du 28 novembre n’a fait que confirmer une vérité : le RHDP est le groupement politique largement dominant sur les scènes politiques nationale et régionale. Ouattara est plus populaire que Gbagbo. « C’est ça qui est la vérité » pour paraphraser le Woody. Il n’y a aucune honte en démocratie qu’il en soit ainsi. En dernière analyse, toutes les régions ont accepté le « candidat de l’étranger » et dans leur grande majorité, les Ivoiriens l’ont préféré à la « copie originale ». L’engagement pris par le RHDP de regrouper ses forces au second tour des élections a ainsi porté ses fruits et un coup fatal à Gbagbo et ses supporters qui croyaient que cet engagement ne teindrait pas. Par ailleurs, l’hypothèse selon laquelle l’opposition Gbagbo-Ouattara serait largement favorable à Gbagbo ne s’est pas vérifiée. Malheureusement, notre grand démocrate devant l’éternel refuse de se soumettre démocratiquement au verdict du peuple. Le nœud de la crise post électorale se trouve ici et nulle part ailleurs. Le bloc LMP doit reconnaître avec réalisme, humilité et grandeur que Ouattara est, incontestablement, le Président aimé voulu et choisi par la majorité des Ivoiriens.
OBSESSION DU TRONE ET HOLD-UP ELECTORAL
La fictive majorité présidentielle était consciente, depuis la fin de son mandat en 2005, qu’elle ne pouvait pas gagner des élections transparentes. Elle a anticipé alors avant le scrutin qu’elle redoutait et qu’elle a fait repousser à six reprises, pour amener les Ivoiriens à admettre qu’elle n’était pas prête à accepter des résultats qui lui seraient de toute façon défavorable avec tous les gâchis qu’elle a causés dans la république. On n’en veut pour preuve que ces propos régulièrement tenus par ces drôles de démocrates, qui se passent de tout commentaire. « On gagne ou on gagne ! ». A quelques jours du second tour des présidentielles, à Dabou, Agboville et Adzopé Gbagbo proclame : « Je n’accepterai jamais qu’un héritier de Houphouët occupe le fauteuil présidentiel ». Aux forces de défense et de sécurité il tend la perche : « Si je tombe, vous tombez » ou encore « Si je perds, vous perdez » (vos prébendes) aux dignitaires et suiveurs du régime déchu. Faut-il s’étonner dès lors de la transe qui s’est emparée de nos refondateurs à la publication des résultats par la Commission électorale indépendante ? Mais n’oublions pas aussi ces déclarations terrifiantes : « Mille morts à gauche, mille morts à droite, moi j’avance » ; ou encore « Si Gbagbo n’est pas élu, nous aurons dix ans de guerre civile». Et enfin « J’y suis, j’y reste » dans Jeune Afrique à une semaine du premier tour des élections. Pour combien de temps et à quel titre ? C’est clair, la stratégie de la terreur pour confisquer le pouvoir a été préméditée bien avant la tenue des élections et sa mise en œuvre planifiée pour que « l’on gagne ou l’on gagne ». Les Ivoiriens ne sont ni amnésiques, ni idiots. Ils comprennent pourquoi les militants du RHDP ont commencé à tomber, à mourir massivement, et à disparaître bien avant la proclamation des résultats du second tour des présidentielles. Cette attitude est une première dans l’histoire de la construction de notre démocratie. Etait-il alors nécessaire d’organiser une élection ?
L’obsession pour s’agripper au trône est un indicateur honteux de faiblesse et de recul de la culture démocratique en Côte d’Ivoire dans un régime curieusement dirigé par des universitaires. L’origine du blocage actuel du système politique ivoirien ne fait aucun doute. Gbagbo et les refondateurs sont le problème de la Côte d’Ivoire.
On comprend dès lors la manipulation du Conseil Constitutionnel pour inverser les résultats du second en poussant le ridicule jusqu'à ignorer royalement l’article 64 du code électoral et à invalider les résultats de nombreux départements où le mentor du FPI ne pèse pas un duvet, afin d’imposer un candidat. Tous ces comportements participent de la logique de la non acceptation à tout prix du résultat des urnes qui transparaît dans les refrains et slogans de campagne de l’ancien camp présidentiel. Nos refondateurs croient-ils que les dix années de confiscation des média d’Etat « avec la RTI devenue LMP-tv, réplique ignoble de Radio Télévision Libre des Mille Collines, experte dans l’art de répandre les propagandes haineuses contre les opposants et la communauté internationale » et la répression sauvage de la presse de l’opposition ou de la presse étrangère ont rendu les Ivoiriens aveugles, sourds et aphones ? Ils nous renvoient au résistant à la « Milosevic, le dictateur yougoslave puis serbe battu à plates coutures par Vojislav Kostunica, candidat de l’opposition » qui avait choisi de s’accrocher au pouvoir ». Adossé à sa garde prétorienne, le mentor de nos refondateurs a oublié sa promesse de nous « gouverner autrement » et démocratiquement. Il est devenu un obsédé du trône avec sa princesse abouré. Face à cette dictature rampante, la victoire de Ouattara et la coalition du RHDP sonnent comme un vent de changement dont le puissant souffle vient du peuple qui a signé la victoire du candidat du RHDP.
LA VICTOIRE DU RHDP COMME SYMBOLE, VECTEUR DE RECONCILIATION ET D’INTEGRATION NATIONALE
On se rend compte aujourd’hui de l’intérêt stratégique de la naissance au RHDP à Paris. Il aurait fallu inventer une autre organisation politique pour que l’opposition ivoirienne vienne à bout du pouvoir de Gbagbo si le RHDP n’avait pas existé. Sa cohésion et sa démarche sont à méditer dans les autres pays africains où les présidents indéracinables continuent de faire la loi. Le RHDP émerge comme un groupement de partis politiques propulsé par le peuple pour réconcilier la Côte d’Ivoire fracturée. Il ressoude à nouveau Nordistes et Sudistes dans une nouvelle alliance salutaire et sacrée après le mouvement amorcé par Houphouët. La victoire du RHDP sonne l’heure de la remise de l’ouvrage de Houphouët sur le métier.
Par ces sales temps pour les dictateurs et les indéracinables présidents africains que leurs peuples dégagent, nos frères LMP, s’ils aiment vraiment ce pays, gagneraient à respecter la volonté des urnes et du peuple qui transcendent le verdict d’un conseil constitutionnel combattant qui lit le droit à l’envers. Les passions et les nouvelles déchirures créées par cette grave entorse à la démocratie sont pour le moment encore trop fortes, oppressives et paralysantes pour nous aider à nous comporter en êtres raisonnables. Mais l’accélération du changement, et l’interconnexion croissante des économies et des sociétés dans l’environnement turbulent de la mondialisation vaincra la résistance des mentalités dans notre cheminement vers une nouvelle société démocratique. Le RHDP est, pour le moment, chez nous, la Force politique, une Vision et un Espoir reconnus par notre peuple qui le met en mission pour la reconstruction d’un nouvel avenir commun.
Pr KOBY Assa Théophile de FUTURIV et FUAP,
section universitaire du PDCI
assa_koby@yahoo.fr