Depuis la proclamation des résultats des élections présidentielles 2010 qu’il a perdues, Laurent Gbagbo fait encore des siennes pour vouloir continuer de gouverner, contre vents et marées, la Côte d’Ivoire. Se débattant dans tous les sens, lui et son gouvernement composés d’inconditionnels à la limite fanatisés, viennent de passer le rubicon en menaçant de représailles les communautés ouest-africaines. Ce qui se murmurait jusqu’ici en des termes voilés, vient d’être explicité par le porte-parole Ahoua Don Mello au fur et à mesure que se précisait une intervention militaire de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à travers l’ECOMOG. Le mauvais perdant accroché au pouvoir vient donc de trouver en la population des originaires des pays membres de la CEDEAO un bouclier humain pour exercer un chantage, politiquement et diplomatiquement gênant. Acculé pour sa forfaiture par la communauté nationale et internationale, Laurent Gbagbo ressemble aujourd’hui à un boxeur groggy dans les cordes. Il balance les poings à l’aveuglette dans tous les sens au risque de mettre K.O. l’arbitre accouru pour le sauver en éloignant son adversaire, ou même son entraîneur trop rapproché du ring pour jeter l’éponge et arrêter le massacre. Oui, Laurent Gbagbo est K.O. debout au point de perdre tout sens de la mesure. Il n’a plus de tabou et cette menace contre les communautés étrangères résident en Côte d’Ivoire le montre dans toute sa laideur morale : ingrat, lâche et sans discernement politique. Après l’opération de « à chaque Ivoirien, son Français »en 2006, allons-nous assister en cette fin de règne à l’expédition de « à chaque Ivoirien, son Ouest-africain ».
Pourtant, contrairement à l’un de ses préceptes restés célèbres, il devrait regarder dans le rétroviseur et éviter de faire la preuve de l’ingratitude, de la lâcheté et de la cécité politique qui manqueront pas de rejaillir sur l’image et l’honneur de la Côte d’Ivoire, s’il se trouvait aimer encore ce pays. Ingratitude à l’égard des partenaires de la CEDEAO. En effet, alors que des personnalités ivoiriennes jouissant d’une autorité morale (hommes politiques de notoriété reconnue, guides religieux éclairés et modérés, dépositaires imposants des traditions africaine et ténors indépendants d’esprit de la société civile) auraient pu être sollicités pour ramener les protagonistes à la raison, Laurent Gbagbo a préféré entrainer la classe politique ivoirienne à sillonner les capitales ouest-africaines. Si Dakar a réussi à faire arrêter les hostilités sur le théâtre des opérations en moins d’une semaine après leur éclatement, c’est Lomé qui abritera les premiers pourparlers. Accra par deux fois se prêtera pour la finalisation des textes majeurs sous la forme d’accords. Ouagadougou, sollicitée pendant ces dernières années pour faciliter le dialogue entre les deux protagonistes de la crise politico-militaire accompagnés des leaders des partis significatifs, était devenue la capitale politique de la Côte d’Ivoire au regard des textes y signés, paradoxalement à la convenance d’un Gbagbo « qui mange et boit souveraineté matin, midi et soir ». Même sans y avoir été visitées, Conakry, Cotonou et Abuja se sont impliquées dans la recherche de la paix. Ainsi nous avons parcouru les capitales des pays de la sous-région pour requérir la médiation ou la facilitation de leurs présidents respectifs. On peut noter par ailleurs que des pays comme le Liberia, le Burkina Faso, le Mali et la Guinée Conakry ont reçu – chose impensable il y a quarante ans – les premiers réfugiés de l’histoire du pays, sans que celui qui dit avoir fait sienne la sentence de son idole Soundjata, «saya kafissa ni maloyayé» voulant dire que la mort vaut mieux que la honte, n’ait eu à aucun moment mal à son nationalisme. Le deuxième caractère que prend la menace sur les communautés étrangères est aussi de la lâcheté. Si l’ECOMOG venait à attaquer Laurent Gbagbo et les quelques soldats qu’il s’est aliénés à coup de grades comme il ne s’est pas gêné de le leur jeter à la face, ce serait le fait de l’armée émanant d’une organisation régionale et non les troupes d’un pays en tant que tel. La confrontation qui serait alors d’armée à armée, ne devrait donc pas donner lieu à des représailles contre les compatriotes innocents des soldats composant cette force, à moins de choisir la solution la plus facile, mais assurément la plus lâche. Dans ce cas, on aura conclu que le verbe haut d’antan du régime de Gbagbo de cracher le feu sur tout armée imprudente qui se hasarderait à attaquer la Côte d’Ivoire n’était que du bluff, de la pure fanfaronnade. Enfin, tout acte d’agression des étrangers révélerait encore plus la cécité politique de Laurent Gbagbo et de son équipe qui, de toute l’histoire de la Côte d’Ivoire, comporte certainement le plus grand nombre d’universitaires au mètre carré qui aura connu la mythique salle du Conseil des ministres. Ces derniers, pour avoir fait pour la plupart leurs études hors du pays, ont sans doute connu la situation d’immigrés, quoi que de statut spécial étudiants, donc des privilégiés. Personne mieux qu’eux ne peut saisir la délicatesse de l’immigration dans un pays et la prudence avec laquelle on la traite quand on exerce de hautes responsabilités nationales. En effet de nos jours, l’immigration est un sujet sensible au point que les étrangers dans tous les pays du monde font l’objet d’une attention particulière au plan multilatéral (Organisation internationale du travail, OIT ; Organisation des Nation Unies, Organisation internationale pour les migrations, OIM), au plan continental africain (Union africaine, UA), et au plan régional (Conseil de l’Entente, Union économique et monétaire ouest-africaine, UEMOA ; Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest, CEDEAO). Des conventions, accords et protocoles dont la Côte d’Ivoire est signataire de certains, leur garantissent une protection juridique. Dans tous les cas, la tendance générale est à la garantie de droits de ces immigrés qui dans la quasi-totalité des cas, sont des travailleurs et non des soldats infiltrés dans les pays d’accueil. Ces derniers ne sauraient donc s’attaquer à eux sans courir le risque de se voir classé dans la catégories des républiques bananières ou des Etats voyous attirant ainsi sur les têtes de leurs dirigeants les foudres des tribunaux internationaux, et même nationaux une fois le pouvoir perdu. A ce propos, Laurent Gbagbo et ses affidés pour le moment aveuglés devaient retenir la belle leçon que la France nous a faite en 2004. Qu’ont fait Jacques Chirac et ses compatriotes lorsque nos jeunes chauffés à blanc par des cocardiers des tropiques et nourris au concept fumeux et fumant de patriote se sont attaqués aux Français ?
Personnellement, Je ne me souviens d’aucune menace ni représailles sur la communauté ivoirienne résident en France. Faut-il apprendre à celui qui aux dernières élections présidentielles s’est officiellement présenté comme un historien que le leadership régional a un prix ? Sans verser ni dans le laxisme, ni dans le cynisme, ni dans la démagogie, tout gouvernement doit garantie la paix et la justice à ceux à qui il a bien voulu faire profiter de son hospitalité et non en faire des otages ou des boucliers humains. Le leadership, qu’il soit mondial, continental ou régional, s’est, de tout temps et en tout lieu, accommodé d’une certaine idée de générosité et de discernement. Laurent Gbagbo qui a toujours eu un sens particulier de la ‘‘realpolitik’’ peut toujours balayer du revers de la main les obligations morales évoquées pour un pays d’immigration. Dans ce cas il lui faudra ouvrir grandement les yeux pour constater qu’un nombre de plus en plus croissant de ses compatriotes se trouve dans des situations similaires : immigrées en Occident et en Afrique de l’Ouest. Si là encore il se montre insensible et indifférent à cette réalité, il ne restera plus aux Ivoiriens qu’à comprendre qu’il s’impose à eux tous les sacrifices nécessaires pour que ce partant qui refuse de partir, parte sans couler de sang. Sinon après les avoir profondément divisés, il va leur attirer toutes les inimitiés de la sous-région, avec toutes les conséquences au double plan politique et diplomatique. Les Ivoiriens doivent se convaincre une fois pour toute qu’avec Laurent Gbagbo, leur pays ne retrouvera jamais son prestige et son rayonnement régional d’antan, tant il a montré son incapacité à maintenir des relations intelligentes d’Etat à Etat et qu’il veut accentuer par la menace de représailles contre les ressortissants des pays de la CEDEAO en cas d’attaque de l’ECOMOG.
Salomon Silué
Enseignant-Abidjan
laplume_ivoire@yahoo.fr
Pourtant, contrairement à l’un de ses préceptes restés célèbres, il devrait regarder dans le rétroviseur et éviter de faire la preuve de l’ingratitude, de la lâcheté et de la cécité politique qui manqueront pas de rejaillir sur l’image et l’honneur de la Côte d’Ivoire, s’il se trouvait aimer encore ce pays. Ingratitude à l’égard des partenaires de la CEDEAO. En effet, alors que des personnalités ivoiriennes jouissant d’une autorité morale (hommes politiques de notoriété reconnue, guides religieux éclairés et modérés, dépositaires imposants des traditions africaine et ténors indépendants d’esprit de la société civile) auraient pu être sollicités pour ramener les protagonistes à la raison, Laurent Gbagbo a préféré entrainer la classe politique ivoirienne à sillonner les capitales ouest-africaines. Si Dakar a réussi à faire arrêter les hostilités sur le théâtre des opérations en moins d’une semaine après leur éclatement, c’est Lomé qui abritera les premiers pourparlers. Accra par deux fois se prêtera pour la finalisation des textes majeurs sous la forme d’accords. Ouagadougou, sollicitée pendant ces dernières années pour faciliter le dialogue entre les deux protagonistes de la crise politico-militaire accompagnés des leaders des partis significatifs, était devenue la capitale politique de la Côte d’Ivoire au regard des textes y signés, paradoxalement à la convenance d’un Gbagbo « qui mange et boit souveraineté matin, midi et soir ». Même sans y avoir été visitées, Conakry, Cotonou et Abuja se sont impliquées dans la recherche de la paix. Ainsi nous avons parcouru les capitales des pays de la sous-région pour requérir la médiation ou la facilitation de leurs présidents respectifs. On peut noter par ailleurs que des pays comme le Liberia, le Burkina Faso, le Mali et la Guinée Conakry ont reçu – chose impensable il y a quarante ans – les premiers réfugiés de l’histoire du pays, sans que celui qui dit avoir fait sienne la sentence de son idole Soundjata, «saya kafissa ni maloyayé» voulant dire que la mort vaut mieux que la honte, n’ait eu à aucun moment mal à son nationalisme. Le deuxième caractère que prend la menace sur les communautés étrangères est aussi de la lâcheté. Si l’ECOMOG venait à attaquer Laurent Gbagbo et les quelques soldats qu’il s’est aliénés à coup de grades comme il ne s’est pas gêné de le leur jeter à la face, ce serait le fait de l’armée émanant d’une organisation régionale et non les troupes d’un pays en tant que tel. La confrontation qui serait alors d’armée à armée, ne devrait donc pas donner lieu à des représailles contre les compatriotes innocents des soldats composant cette force, à moins de choisir la solution la plus facile, mais assurément la plus lâche. Dans ce cas, on aura conclu que le verbe haut d’antan du régime de Gbagbo de cracher le feu sur tout armée imprudente qui se hasarderait à attaquer la Côte d’Ivoire n’était que du bluff, de la pure fanfaronnade. Enfin, tout acte d’agression des étrangers révélerait encore plus la cécité politique de Laurent Gbagbo et de son équipe qui, de toute l’histoire de la Côte d’Ivoire, comporte certainement le plus grand nombre d’universitaires au mètre carré qui aura connu la mythique salle du Conseil des ministres. Ces derniers, pour avoir fait pour la plupart leurs études hors du pays, ont sans doute connu la situation d’immigrés, quoi que de statut spécial étudiants, donc des privilégiés. Personne mieux qu’eux ne peut saisir la délicatesse de l’immigration dans un pays et la prudence avec laquelle on la traite quand on exerce de hautes responsabilités nationales. En effet de nos jours, l’immigration est un sujet sensible au point que les étrangers dans tous les pays du monde font l’objet d’une attention particulière au plan multilatéral (Organisation internationale du travail, OIT ; Organisation des Nation Unies, Organisation internationale pour les migrations, OIM), au plan continental africain (Union africaine, UA), et au plan régional (Conseil de l’Entente, Union économique et monétaire ouest-africaine, UEMOA ; Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest, CEDEAO). Des conventions, accords et protocoles dont la Côte d’Ivoire est signataire de certains, leur garantissent une protection juridique. Dans tous les cas, la tendance générale est à la garantie de droits de ces immigrés qui dans la quasi-totalité des cas, sont des travailleurs et non des soldats infiltrés dans les pays d’accueil. Ces derniers ne sauraient donc s’attaquer à eux sans courir le risque de se voir classé dans la catégories des républiques bananières ou des Etats voyous attirant ainsi sur les têtes de leurs dirigeants les foudres des tribunaux internationaux, et même nationaux une fois le pouvoir perdu. A ce propos, Laurent Gbagbo et ses affidés pour le moment aveuglés devaient retenir la belle leçon que la France nous a faite en 2004. Qu’ont fait Jacques Chirac et ses compatriotes lorsque nos jeunes chauffés à blanc par des cocardiers des tropiques et nourris au concept fumeux et fumant de patriote se sont attaqués aux Français ?
Personnellement, Je ne me souviens d’aucune menace ni représailles sur la communauté ivoirienne résident en France. Faut-il apprendre à celui qui aux dernières élections présidentielles s’est officiellement présenté comme un historien que le leadership régional a un prix ? Sans verser ni dans le laxisme, ni dans le cynisme, ni dans la démagogie, tout gouvernement doit garantie la paix et la justice à ceux à qui il a bien voulu faire profiter de son hospitalité et non en faire des otages ou des boucliers humains. Le leadership, qu’il soit mondial, continental ou régional, s’est, de tout temps et en tout lieu, accommodé d’une certaine idée de générosité et de discernement. Laurent Gbagbo qui a toujours eu un sens particulier de la ‘‘realpolitik’’ peut toujours balayer du revers de la main les obligations morales évoquées pour un pays d’immigration. Dans ce cas il lui faudra ouvrir grandement les yeux pour constater qu’un nombre de plus en plus croissant de ses compatriotes se trouve dans des situations similaires : immigrées en Occident et en Afrique de l’Ouest. Si là encore il se montre insensible et indifférent à cette réalité, il ne restera plus aux Ivoiriens qu’à comprendre qu’il s’impose à eux tous les sacrifices nécessaires pour que ce partant qui refuse de partir, parte sans couler de sang. Sinon après les avoir profondément divisés, il va leur attirer toutes les inimitiés de la sous-région, avec toutes les conséquences au double plan politique et diplomatique. Les Ivoiriens doivent se convaincre une fois pour toute qu’avec Laurent Gbagbo, leur pays ne retrouvera jamais son prestige et son rayonnement régional d’antan, tant il a montré son incapacité à maintenir des relations intelligentes d’Etat à Etat et qu’il veut accentuer par la menace de représailles contre les ressortissants des pays de la CEDEAO en cas d’attaque de l’ECOMOG.
Salomon Silué
Enseignant-Abidjan
laplume_ivoire@yahoo.fr