Résolution de la crise ivoirienne : L`Onu se discrédite en Côte d`Ivoire

Pour un désaveu, on n'en trouverait pas plus éloquent. Que le porte-parole du secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies (Onu), Ban Ki-moon, soit contrédit par le chef des opérations de maintien de la paix de l'Organisation internationale, Alain Leroy, traduit en effet une sorte d'incompréhension, sur la question ivoirienne, au sein de la maison de verre de New York. Le lundi 28 février dernier, via son porte-parole, Ban Ki-moon accusait le Bélarus d'avoir vendu du matériel militaire, trois hélicoptères MI-24, ces redoutables avions de guerre, au régime de Laurent Gbagbo, violant ainsi l'embargo sur l'importation des armes en Côte d'Ivoire. « Il s'agit d'une grave violation de l'embargo contre la Côte d'Ivoire qui est en vigueur depuis 2004. Le secrétaire général exige un respect complet de l'embargo et avertit le fournisseur de ce matériel militaire et M. Gbagbo que des mesures appropriées seront prises en réponse à cette violation », a confié à l'Afp, le porte-parole, dont l'identité reste encore inconnue. Le mercredi 02 mars, c'est le chef des forces de maintien de la paix de l'Onu, Alain Leroy, qui dément l'information. « Je dois admettre que le rapport de la mission était une erreur. Il n'y a pas eu d'avion qui a atterri. C'est donc l'Onuci qui a fourni une fausse information et bien sûr en tant que chef des forces de maintien de la paix, j'en prends la responsabilité ». Des propos clairs de M. Leroy, qui accuse directement la mission onusienne en Côte d'Ivoire d'avoir désinformé la maison mère. Sur cette même question d'acquisition d'armes par le régime Gbagbo en violation de l'embargo, le patron de l'Onuci, Young Jin Choi, a lui aussi sa version des faits. « Nous n'avons pas encore de confirmation » (de la livraison d'hélicoptères ndlr), avait-il dit face la presse à Dakar, au Sénégal, au terme de la 20è réunion des chefs de mission de maintien de la paix de l'Onu en Afrique de l'Ouest, confère Frat-Mat du mercredi 02 mars. Qui dit donc vrai ? Qui a fait le faux rapport dont parle Alain Leroy ? D'où le porte-parole de Ban Ki-moon tire-t-il son information relative à la livraison d'hélicoptères en Côte d'Ivoire ? Autant de questions qui aiguisent les curiosités et qui sont de nature à jeter le flou dans le travail de la représentation onusienne en Côte d'Ivoire. « Nous n'avons pas pris les précautions pour vérifier et nous n'avons pu accéder au site. Nous l'avons reconnu et fait ce qu'il fallait sur le plan diplomatique. Il faut tirer les leçons de ce qui s'est passé », a reconnu hier au cours d'une conférence de presse, le porte-parole de l'Onuci, Hamadoun Touré. En attendant de tirer les leçons, notons que cette bourde ajoute à la liste de faits reprochés à M. Choi et ses hommes, et qui ternissent leur qualité de force impartiale de maintien de la paix. Le camp Gbagbo, qui accuse Ban Ki-moon et ses troupes en Côte d'Ivoire de manoeuvrer pour le compte du camp Ouattara, a là un autre élément qui apporte de l'eau à son moulin. Outre ce désaveu, d'autres actes imputés à la force onusienne contribuent davantage à présenter cette force aux yeux d'une bonne partie de la population ivoirienne, non plus comme une force impartiale mais une force belligérante. Le lundi 28 février dernier, la presse ivoirienne a publié un document secret de la mission onusienne en Côte d'Ivoire, qui dévoilait un plan de manoeuvres militaires avec trois hélicoptères MI-24 sur le territoire ivoirien. Ajouté à cela tout l'arsenal militaire dont dispose déjà l'Onuci sur le terrain. Interrogé sur cette question d'acquisition de ces hélico de combats par les forces onusiennes, Hamadoun Touré a indiqué qu'ils serviront à la protection des civils, avec un but dissuasif. Qui connait bien les MI-24, dont la capacité de nuisance ne fait l'ombre d'aucun doute, s'accomoderait difficilement de l'idée de protection des civils. En tout cas, l'on se demande comment les forces onusiennes entendent protéger avec des avions de guerre, des populations qui se trouvent au sol. Ces MI-24 sont-ils vraiment nécessaires pour la protection des civils, alors que ces engins sont conçus pour faire la guerre ? Les images des affrontements du 16 décembre 2010 au Golf hôtel, QG du camp Ouattara, consécutifs à la marche de prise de la télévision nationale par le Rassemblement des houphouëtistes, ajoutent à la suspiçion qui plane sur la force onusienne. On y voit en effet des casques bleus prêter main forte aux éléments des Forces nouvelles dans leur offensive contre les Forces de défense et de sécurité qui font le blocus du Golf. Des images sur lesquelles l'Onuci est curieusement restée silencieuse. Autant de faits qui inclinent à douter de l'impartialité de Young Jin Choi et ses hommes dans la gestion de la crise ivoirienne. Disons-le tout net, la représentation onusienne, par ses agissements en Côte d'Ivoire, tend à se discréditer.

Hamadou ZIAO