Jean Kacou Diagou, Président du conseil d`administration de la BIAO (Banque internationale pour l`Afrique de l`ouest) était hier au micro de Radio France internationale. Il en a profité pour se prononcer sur la nationalisation des banques et asséner ses vérités au clan Gbagbo.
RFI : Il y a deux semaines vous avez décidé de fermer la BIAO à Abidjan. Aujourd`hui, le régime de Laurent Gbagbo envisage de nationaliser votre banque. Comment réagissez-vous?
Jean Kacou Diagou : Pour moi c`est une surprise parce que je ne vois pas l`intérêt de nationaliser cette banque qui est une banque ivoirienne. Les capitaux des actionnaires sont à 100% ivoiriens et nationaliser la BIAO, pourquoi? Parce qu`elle a fermé? Si cela était le cas, dans ce cas il faudrait aussi nationaliser toutes les entreprises de Côte d`Ivoire qui ont fermé. Je ne parle pas seulement des banques. Mais, de toutes les entreprises de Côte d`Ivoire qui ont dû fermer, parce que ne pouvant pas fonctionner normalement dans un cadre régulier de fonctionnement d`une entreprise.
RFI : Pourquoi avez-vous décidé de fermer?
JKD : Nous avons fermé tout simplement parce que la Banque centrale des Etats de l`Afrique de l`Ouest (BCEAO) a fermé ses agences nationales en Côte d`Ivoire. Donc, les banques ne peuvent plus se refinancer puisque les dépôts que nous recevons de nos clients nous les transférons à la BCEAO. Et quand nous avons besoin d`argent pour nos clients, nous allons le prendre à la Banque centrale. Aujourd`hui, cette activité n`est plus possible. Nous ne pouvons pas non plus faire de transactions financières. Parce que nous ne pouvons plus faire de transfert d`argent vers l`extérieur ni recevoir de l`argent de l`extérieur. Les cartes bancaires ne fonctionnent plus alors que nous étions en train de réfléchir aux moyens de continuer les activités de la BIAO, nous avons reçu dans nos locaux, à la direction des services informatiques, quatre hommes en armes qui ont exigé avec leurs armes le listing des clients de la BIAO avec le solde de leurs comptes. C`était le 21 février dernier. Evidemment, nous avons résisté, nous avons refusé et à la suite de cela nous avons considéré que nous risquons de ne plus pouvoir respecter les secrets bancaires. Ce que nous n`avons pas voulu.
RFI : Et pourquoi ces hommes armés ont-ils voulu avoir accès aux listings de vos clients, leurs noms, leurs numéros de comptes, le solde de leurs compte ?
JKD : C`est la question que nous nous posons jusqu`à présent. Nous craignons que ce listing et les soldes des comptes de clients se retrouvent dans la nature, voire dans les journaux.
RFI : Votre banque n`est pas la première qui pourrait être réquisitionnée. Avant, vous il y a eu la Sgbci et la Bicici. Le 2 mars dernier la Bicici a dû ouvrir ses portes. Est-ce que vous vous attendez à une telle mesure pour la Biao?
JKD : Si cela se faisait, je pense qu`il sera très difficile de faire fonctionner les comptes de nos clients à la Biao, pour ne pas dire pratiquement impossible.
RFI : Si demain votre banque est ouverte de force, est-ce que vos clients pourront récupérer l`argent qu`ils ont déposé dans votre banque?
JKD : A priori non, parce qu`aucun employé de la Biao ne peut venir mouvementer les comptes de nos clients. Leurs comptes sont en sécurité.
RFI : C`est-à-dire qu`ils sont dans les coffres ?
JKD : Ils sont en partie dans les coffres, mais en grande partie à la Banque centrale à la Bceao.
RFI : Mais concrètement est-ce que les autorités pourront avoir accès à l`argent liquide qui est dans vos coffres?
JKD : En principe non, parce que nous ne leur donnerons pas les combinaisons. L`argent est bien gardé dans des coffres pratiquement inviolables.
RFI : Depuis le 2 mars, les clients de la Bicici qui retournent à leur banque peuvent toucher jusqu`à 200 000 FCFA par personne. Si les coffres de la Bicici sont aussi bien gardés que les vôtres, où les autorités trouvent-elles cet argent?
JKD : Je me pose aussi la question, parce que je ne crois pas que ce soit l`argent de la Bicici.
RFI : Mais concrètement, est-ce que les fonctionnaires Ivoiriens qui ont un compte dans votre banque peuvent-ils l`encaisser par virement bancaire?
JKD : Aujourd`hui non. Il n`y a pas de possibilité de compensation, donc de virement bancaire. Notre système informatique est fermé. Il n`est pas possible de payer les salaires sur les comptes de la Biao.
RFI : Pour contourner cet obstacle, le régime de Laurent Gbagbo paie les fonctionnaires en liquide ou sur des comptes ouverts dans des banques nationales. Qu`est-ce que vous en pensez?
JKD : Je n`en pense rien. Je suis curieux de savoir la pérennité de cette opération.
RFI : La Biao est une filiale du Groupe Nsia, l`un des plus grand Groupe d`Afrique de l`Ouest et d`Afrique Centrale dans le domaine des Assurances. Est-ce que le Groupe est menacé aujourd`hui dans son existence?
JKD : Le Groupe n`est pas menacé en tant que tel dans son existence parce que le pool assurance continue ses activités en dehors de la Côte d`Ivoire. C`est d`ailleurs la raison pour laquelle je suis absent de Côte d`Ivoire pour amener les filiales assurances qui fonctionnent normalement dans les autres pays, à dépasser leurs objectifs pour compenser en partie les moins-values que nous aurons à avoir sur nos activités en Côte d`Ivoire.
RFI : Jean Kacou Diagou n`est pas seulement un banquier et un assureur. Vous êtes aussi le patron de la Cgeci (Confédération générale des entreprises de Côte d`Ivoire). Les chefs d`entreprise de votre pays sont-ils en mesure de continuer à payer leurs impôts aujourd`hui ou pas?
JKD : Les chefs d`entreprises ont d`énormes difficultés, surtout de trésorerie parce que les banques sont fermées et les entreprises de Côte d`Ivoire ont reçu des consignes. Si elles devaient payer leurs impôts, il faudrait le payer entre les mains du trésorier payeur général et par chèque. Aujourd`hui c`est très difficile.
RFI : A long terme, pour que le régime de Laurent Gbagbo puisse payer les fonctionnaires, il faut non seulement des entrées d`impôts mais des entrées en devises. Actuellement où en sont les exportations de café-cacao?
JKD : Ce que je sais, en ce qui concerne les groupements affiliés à la CGECI, les exportations de café-cacao sont interrompues.
RFI : A cause de quoi?
JKD : Du fait des transactions impossibles avec l`extérieur. Les banques sont fermées. Je pense qu`ils ont voulu aussi respecter les règles de la communauté internationale.
RFI : Vous pensez aux exportateurs comme Cargill et ADM?
JKD : Cargill, ADM, tous les grands exportateurs qui sont présents en Côte d`Ivoire ont tous arrêté leurs exportations.
RFI : Par peur des sanctions internationales?
JKD : Je ne pourrais vous le dire.
Propos retranscrits par Jean Eric ADINGRA
RFI : Il y a deux semaines vous avez décidé de fermer la BIAO à Abidjan. Aujourd`hui, le régime de Laurent Gbagbo envisage de nationaliser votre banque. Comment réagissez-vous?
Jean Kacou Diagou : Pour moi c`est une surprise parce que je ne vois pas l`intérêt de nationaliser cette banque qui est une banque ivoirienne. Les capitaux des actionnaires sont à 100% ivoiriens et nationaliser la BIAO, pourquoi? Parce qu`elle a fermé? Si cela était le cas, dans ce cas il faudrait aussi nationaliser toutes les entreprises de Côte d`Ivoire qui ont fermé. Je ne parle pas seulement des banques. Mais, de toutes les entreprises de Côte d`Ivoire qui ont dû fermer, parce que ne pouvant pas fonctionner normalement dans un cadre régulier de fonctionnement d`une entreprise.
RFI : Pourquoi avez-vous décidé de fermer?
JKD : Nous avons fermé tout simplement parce que la Banque centrale des Etats de l`Afrique de l`Ouest (BCEAO) a fermé ses agences nationales en Côte d`Ivoire. Donc, les banques ne peuvent plus se refinancer puisque les dépôts que nous recevons de nos clients nous les transférons à la BCEAO. Et quand nous avons besoin d`argent pour nos clients, nous allons le prendre à la Banque centrale. Aujourd`hui, cette activité n`est plus possible. Nous ne pouvons pas non plus faire de transactions financières. Parce que nous ne pouvons plus faire de transfert d`argent vers l`extérieur ni recevoir de l`argent de l`extérieur. Les cartes bancaires ne fonctionnent plus alors que nous étions en train de réfléchir aux moyens de continuer les activités de la BIAO, nous avons reçu dans nos locaux, à la direction des services informatiques, quatre hommes en armes qui ont exigé avec leurs armes le listing des clients de la BIAO avec le solde de leurs comptes. C`était le 21 février dernier. Evidemment, nous avons résisté, nous avons refusé et à la suite de cela nous avons considéré que nous risquons de ne plus pouvoir respecter les secrets bancaires. Ce que nous n`avons pas voulu.
RFI : Et pourquoi ces hommes armés ont-ils voulu avoir accès aux listings de vos clients, leurs noms, leurs numéros de comptes, le solde de leurs compte ?
JKD : C`est la question que nous nous posons jusqu`à présent. Nous craignons que ce listing et les soldes des comptes de clients se retrouvent dans la nature, voire dans les journaux.
RFI : Votre banque n`est pas la première qui pourrait être réquisitionnée. Avant, vous il y a eu la Sgbci et la Bicici. Le 2 mars dernier la Bicici a dû ouvrir ses portes. Est-ce que vous vous attendez à une telle mesure pour la Biao?
JKD : Si cela se faisait, je pense qu`il sera très difficile de faire fonctionner les comptes de nos clients à la Biao, pour ne pas dire pratiquement impossible.
RFI : Si demain votre banque est ouverte de force, est-ce que vos clients pourront récupérer l`argent qu`ils ont déposé dans votre banque?
JKD : A priori non, parce qu`aucun employé de la Biao ne peut venir mouvementer les comptes de nos clients. Leurs comptes sont en sécurité.
RFI : C`est-à-dire qu`ils sont dans les coffres ?
JKD : Ils sont en partie dans les coffres, mais en grande partie à la Banque centrale à la Bceao.
RFI : Mais concrètement est-ce que les autorités pourront avoir accès à l`argent liquide qui est dans vos coffres?
JKD : En principe non, parce que nous ne leur donnerons pas les combinaisons. L`argent est bien gardé dans des coffres pratiquement inviolables.
RFI : Depuis le 2 mars, les clients de la Bicici qui retournent à leur banque peuvent toucher jusqu`à 200 000 FCFA par personne. Si les coffres de la Bicici sont aussi bien gardés que les vôtres, où les autorités trouvent-elles cet argent?
JKD : Je me pose aussi la question, parce que je ne crois pas que ce soit l`argent de la Bicici.
RFI : Mais concrètement, est-ce que les fonctionnaires Ivoiriens qui ont un compte dans votre banque peuvent-ils l`encaisser par virement bancaire?
JKD : Aujourd`hui non. Il n`y a pas de possibilité de compensation, donc de virement bancaire. Notre système informatique est fermé. Il n`est pas possible de payer les salaires sur les comptes de la Biao.
RFI : Pour contourner cet obstacle, le régime de Laurent Gbagbo paie les fonctionnaires en liquide ou sur des comptes ouverts dans des banques nationales. Qu`est-ce que vous en pensez?
JKD : Je n`en pense rien. Je suis curieux de savoir la pérennité de cette opération.
RFI : La Biao est une filiale du Groupe Nsia, l`un des plus grand Groupe d`Afrique de l`Ouest et d`Afrique Centrale dans le domaine des Assurances. Est-ce que le Groupe est menacé aujourd`hui dans son existence?
JKD : Le Groupe n`est pas menacé en tant que tel dans son existence parce que le pool assurance continue ses activités en dehors de la Côte d`Ivoire. C`est d`ailleurs la raison pour laquelle je suis absent de Côte d`Ivoire pour amener les filiales assurances qui fonctionnent normalement dans les autres pays, à dépasser leurs objectifs pour compenser en partie les moins-values que nous aurons à avoir sur nos activités en Côte d`Ivoire.
RFI : Jean Kacou Diagou n`est pas seulement un banquier et un assureur. Vous êtes aussi le patron de la Cgeci (Confédération générale des entreprises de Côte d`Ivoire). Les chefs d`entreprise de votre pays sont-ils en mesure de continuer à payer leurs impôts aujourd`hui ou pas?
JKD : Les chefs d`entreprises ont d`énormes difficultés, surtout de trésorerie parce que les banques sont fermées et les entreprises de Côte d`Ivoire ont reçu des consignes. Si elles devaient payer leurs impôts, il faudrait le payer entre les mains du trésorier payeur général et par chèque. Aujourd`hui c`est très difficile.
RFI : A long terme, pour que le régime de Laurent Gbagbo puisse payer les fonctionnaires, il faut non seulement des entrées d`impôts mais des entrées en devises. Actuellement où en sont les exportations de café-cacao?
JKD : Ce que je sais, en ce qui concerne les groupements affiliés à la CGECI, les exportations de café-cacao sont interrompues.
RFI : A cause de quoi?
JKD : Du fait des transactions impossibles avec l`extérieur. Les banques sont fermées. Je pense qu`ils ont voulu aussi respecter les règles de la communauté internationale.
RFI : Vous pensez aux exportateurs comme Cargill et ADM?
JKD : Cargill, ADM, tous les grands exportateurs qui sont présents en Côte d`Ivoire ont tous arrêté leurs exportations.
RFI : Par peur des sanctions internationales?
JKD : Je ne pourrais vous le dire.
Propos retranscrits par Jean Eric ADINGRA