De retour d’une mission en Europe, le président du Directoire du RHDP était l’invité du journal de 20h de TCI (Télévision de Côte d’Ivoire), le mercredi 23 mars dernier. Le Pr. Alphonse Djédjé Mady a profité de la tribune pour passer en revue l’actualité nationale est alimentée par le refus du Président sortant, Laurent Gbagbo de céder le pouvoir à Alassane Ouattara, vainqueur de la présidentielle du 28 novembre.
TCI : Vous avez marché, vous avez initié des journées villes mortes. Vous avez même lancé l’opération «La révolution Orange». Mais le constat est que l’ancien président est toujours au Palais présidentiel. Qu’est-ce que vous comptez faire pour l’en déloger ?
Alphonse Djédjé Mady : Le RHDP, effectivement, a été confronté à sa logique. Le RHDP dans sa définition est un Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix. Nous avons préparé des élections. Nous n’avons pas préparé une guerre. Nous avons laissé la parole au peuple souverain de Côte d’Ivoire qui s’est prononcé. Le RHDP et ses responsables ont, donc, invité les militants à utiliser tous les moyens démocratiques pour arriver à faire comprendre à M. Gbagbo et à son équipe qu’ils ont perdu les élections et qu’ils doivent rendre le pouvoir. Nous avons choisi toutes les méthodes républicaines, démocratiques de manifestation pour le lui faire comprendre. Et je pense que sur cette voie, le RHDP a été suivi par la communauté internationale. Depuis la sous-région jusqu’en Afrique, en Europe et dans le monde entier. Donc, nous pensons que les efforts que nous avons déployés ont porté leurs fruits. Aujourd’hui, c’est vrai, que nous n’avons pas encore atteint l’objectif visé à savoir le respect de la volonté que les Ivoiriens ont exprimé. Et que M. Laurent Gbagbo, ancien président de la République, reconnaisse sa défaite et se retire. Car, perdre les élections, ce n’est pas un déshonneur en démocratie. Accepter sa défaite, c’est se montrer même plus démocrate. Et M. Gbagbo, comme je l’ai écrit dans ma lettre depuis Paris, lui qui réclame la paternité du retour du multipartisme et de la démocratie en Côte d’Ivoire, nous aurait donné une leçon de démocratie en acceptant de se retirer du pouvoir à la suite de sa défaite. Nous sommes à la veille du dernier délai que l’Union africaine s’est donné. L’Union africaine s’était donnée quinze jours et demain (hier, ndlr) on aura les quinze jours. Et depuis aujourd’hui jusqu’à demain, il aura encore une autre session de la CEDEAO. Nous allons attendre et donner toutes les chances à la démocratie. Parce que nous allons prendre en charge l’avenir d’un pays. Ce qui préoccupe aujourd’hui, le président Alassane Ouattara et le RHDP, c’est comment réconcilier demain cette Côte d’Ivoire au niveau de tous ses enfants pour qu’ils puissent se mettre au travail et remonter le niveau de vie des Ivoiriens et redonner à la Côte d’Ivoire la place qui est la sienne. Je pense que c’est l’un des points, des mesures contraignantes que l’Union africaine a eu à dégager sur les cinq : à savoir, constituer un Gouvernement de réconciliation nationale. Pour nous, ce n’est pas une nouveauté. Ce n’est pas une contrainte particulière, parce que dans les programmes du RHDP pour gouvernement la Côte d’Ivoire, même si M. Gbagbo avait accepté dès le premier jour sa défaite, le président Ouattara s’était engagé à faire en sorte que toutes les forces vives, de quelques familles politiques qu’elles soient y compris la société civile, devraient apporter leur contribution pour qu’ensemble, on bâtisse notre pays. Parce que, c’est ensemble que nous devrions le faire. Créons les conditions pour que cet ensemble soit possible demain et faisons en sorte que, même s’il lui reste 10% de chance, même s’il lui reste 5% de chance, espérons que M. Gbagbo saisira ces 5% pour remettre à Alassane Dramane Ouattara les destinées de la Côte d’Ivoire et qu’il puisse mettre en pratique le programme qu’il s’est assigné.
TCI : D’ici là, le RHDP se met en pause.
ADM : On n’est pas en pause. On continue de travailler. Au début de votre journal, vous avez dit que même l’Angola a eu à dire qu’elle reconnaît le président Ouattara. Mais, c’est à la suite d’actions politiques que cela se fait. Dans ce domaine-là, tout ne peut pas être dit sur un plateau de télévision. Donc, sachez que nous ne nous reposons pas. Nous travaillons chaque jour que Dieu fait. En tout cas, le président de la République, Alassane Ouattara, est au travail avec son Gouvernement. Et le RHDP, au niveau de sa direction politique, apporte sa contribution. On ne peut pas dormir ni maintenant ni demain ni après-demain. Tout ne sera pas toujours dans la rue. Nous, on travaille.
TCI: Les chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO se sont réunis aujourd’hui (mercredi dernier, ndlr) sur la question de la Côte d’Ivoire. Cela après les injonctions de toutes les instances internationales qui ont demandé à l’ancien président sortant de se retirer et de permettre au président élu d’assumer la plénitude du pouvoir. Qu’est-ce que vous attendez de ce dernier rendez-vous de la CEDEAO ?
ADM : Tant qu’on vit, il y a de l’espoir. On espère que cette dernière mesure siéra au clan de M. Gbagbo et qu’ils comprendront qu’ils devront permettre à la Côte d’Ivoire de se réconcilier avec elle-même. En tout cas, il est prévu une rencontre des Présidents du RHDP à la suite de cette session de la CEDEAO pour aviser et dire ce que nous allons faire. Mais sachez que le président Ouattara, il n’y a pas longtemps, a créé la nouvelle armée qui devra veiller au retour de la paix dans le pays. Nous attendons les dernières mesures que la CEDEAO va prendre et nous aviserons, après la réunion des présidents du RHDP.
TCI: Pendant ce temps M. le ministre, on peut dire malheureusement, l’ancien président continue d’endeuiller des familles. Les derniers bilans de ce jour (mercredi dernier, ndlr) font état de plusieurs morts encore à Abobo. Votre réaction ?
ADM : Tout cela est à mettre sur le compte de la bêtise humaine. Dans quelque situation qu’on se place. A supposer que M. Gbagbo pense qu’il va rester au pouvoir. Pense-t-il qu’en décimant les populations ivoiriennes, il contribue à la rénovation de la Côte d’Ivoire ? Quelqu’un qui veut faire le bonheur d’un pays, peut-il se permettre, sans regrets, sans retenue, de massacrer sa population ? Voyant l’exode tant interne qu’externe de cette population, dans le temps nous voyons des gens fuir leur pays, on avait pensé que ça ne pouvait jamais arriver à la Côte d’Ivoire, malheureusement voilà ce qui nous arrive. Vous y avez fait allusion tout à l’heure. Ça ne peut qu’être désolant. Donc, pour nous qui, à travers l’élection d’Alassane Dramane Ouattara, auront le devoir de ramener tous ces Ivoiriens aux portes du bonheur et de l’espoir, la tâche risque de se compliquer davantage. Parce que, quoi qu’il en soit, quel que soit le prix à payer, le premier pouvoir que le président Ouattara aura, c’est de rassembler tous les Ivoiriens. Il a parlé de cette Commission «Vérité et réconciliation ». Elle aura pour but, dans la justice et dans la paix, de regrouper tous ces Ivoiriens-là. Nous en avons pleinement conscience. Nous ne pouvons que le regretter. Comme je l’ai dit tout à l’heure, par d’autres voies, on travaille. Que cela connaisse une fin rapide en mettant d’abord à contribution les forces ivoiriennes, quelles soient militaires ou quelles soient civiles.
J’ai entendu tout à l’heure l’ambassadeur Ally Coulibaly (ambassadeur de Côte d’Ivoire en France, ndlr) parler de deux poids deux mesures. C’est vrai. Mais je pense que le moment est venu à ce que nous rentrions en nous-mêmes pour savoir ce que nous pouvons faire pour aller vers la paix, pour aller vers la fin de cette crise. La communauté internationale peut nous aider. C’est pour cela que nous sommes en train de réfléchir pour savoir qu’est-ce qui dépend de nous ? Qu’est-ce que nous devrions faire ? Je pense que très prochainement, le président Ouattara y apportera une solution.
TCI : Face aux massacres quasi-quotidiens de vos militants par les forces pro-Gbagbo, une coalition politique est montée au créneau pour exiger la protection des populations civiles par l’ONUCI (Opérations des Nations unies en Côte d’Ivoire, ndlr). Qu’est-ce que vous attendez de cette institution ?
ADM : M. Choi faisant allusion de l’article 7 de la Charte des Nations unies, a dit, que ce point parlait de deux types d’interventions : le maintien de la paix et l’imposition de la paix. Dans leur mandat, il a été clairement exprimé qu’ils doivent assurer la protection des personnes et des biens, assurer la protection des civils. Il n’y a pas longtemps, ils avaient reçu du matériel de combat. Ils peuvent essayer au moins de maintenir la paix. Mais comme la paix n’existe plus, on se pose la question de savoir si on n’est pas arriver à la phase de l’imposition de la paix. La situation grave que vit la Côte d’Ivoire, personnellement, j’ai pris tendance à rentrer à l’intérieur de la Côte d’Ivoire, à l’intérieur des Ivoiriens eux-mêmes pour savoir qu’est-ce que nous faisons pour sortir de là. Les autres attendront des résolutions, attendront ce qu’ils peuvent attendre, attendront des modifications de mandat. Même quand des personnalités comme le ministre des Affaires Etrangères de la France (Alain Juppé, ndlr) dit que dans le mandat de l’ONUCI tout est contenu pour intervenir s’ils veulent intervenir. Quand vous appelez quelqu’un au secours, voyez d’abord vous-mêmes ce que vous pouvez faire pour vous tirer de l’embarras dans lequel vous vous trouvez. Et aujourd’hui, ma principale préoccupation, c’est de se tourner vers les Ivoiriens. Ce sont les Ivoiriens qui sont en train de mourir, c’est la Côte d’Ivoire qui est en train de plonger dans la misère. Qu’est-ce que nous sommes capables de faire ? Quel sursaut nous pouvons avoir pour arrêter cette saignée ? Donc, nous disons au niveau du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix, qu’est-ce que nous pouvons faire ? Les autres viendront peut-être, même s’ils ne venaient pas, qu’est-ce que nous pouvons faire ? A cela que nous réfléchissons. Après la CEDEAO qui va donner son dernier point de vue, j’espère bien son dernier point de vue, mais il faut que nous avisions, il faut que nous prenions nos responsabilités pour que notre pays regagne la paix.
TCI : M. le ministre, après avoir rejeté les décisions contraignantes décidées par l’union africaine, M. Gbagbo appelle au dialogue. De quoi parle-t-il ? De quel dialogue parle-t-il ?
ADM : La vie en société est toujours un mécanisme de dialogue permanent. Mais il y a une seule chose qu’il est difficile d’apporter sur le plateau de la discussion en ce qui concerne ce dialogue actuel. Il y a un élu de par le verdict des urnes de la population ivoirienne qui s’appelle Alassane Dramane Ouattara. Reconnaissons cette vérité des urnes. Qu’elle nous fasse mal où qu’elle nous ridiculise, nous devons la reconnaître et le monde entier le reconnaît à la suite des Ivoiriens. Ce point, à lui seul, n’est pas susceptible de faire l’objet d’une négociation. On va négocier pour dire quoi ? Qu’Alassane est président ou c’est M. Gbagbo qui est président ? Ou bien, comme il y a quatre ans ou quatre ans et demi qui restent, chacun fait un jour alternativement ? Il y a un point qui est indiscutable, qui ne peut pas faire partie du dialogue. Alassane Ouattara est élu. Alassane Ouattara est président. Alassane Ouattara doit associer maintenant tous les Ivoiriens, y compris M. Gbagbo pourquoi pas, pour rebâtir cette Côte d’Ivoire. Tout le reste maintenant peut se négocier sauf le fauteuil présidentiel. La décision n’appartient pas à un dialogue restreint. La décision appartient au vote des Ivoiriens. On peut dialoguer sur tous les autres points sauf sur la décision du peuple souverain de Côte d’Ivoire.
TCI : La Côte d’Ivoire connaît une situation humanitaire dramatique. Les Abidjanais quittent par milliers pour l’intérieur du pays. Sans oublier les autres problèmes. Quel est le message du RHDP à tous ces Ivoiriens en détresse ?
ADM : Le président Alassane Ouattara et le RHDP ne s’endorment pas. Qu’ils réfléchissent, qu’ils recherchent la solution adéquate qui doit ramener la paix au niveau de tous les Ivoiriens. Nous leur disons que les pertes des membres de nos différentes familles, les non Ivoiriens et le sang des Ivoiriens versé, des obus qu’on lance au marché pour tuer des femmes, dans des cours, des femmes qui sont froidement abattues, des Ivoiriens et des non Ivoiriens qui sont tués à tout moment, nous en sommes conscients. Nous sommes avec eux. Tout ne peut pas se dire sur un plateau de télévision. Mais nous ferons en sorte que cela connaisse un terme et le plus rapidement possible. Nous leur demandons de prendre courage. Bientôt ce sera la fin des souffrances. Tant qu’on vit, il y a de l’espoir. Il ne faut pas qu’ils désespèrent surtout. Le président Alassane Ouattara et le RHDP ont un programme pour eux. Ils ont des projets pour eux. Je souhaiterais que la Côte d’Ivoire soit mise à niveau et d’occuper son rôle de leader dans la sous-région, ce rôle historique, ce rôle que la nature lui a donné. Que la Côte d’Ivoire redevienne ce pays prospère que le président Félix Houphouët-Boigny a mis sur les rails. Que les Ivoiriens s’arment de courage et de patience. C’est dur et douloureux à la fois. Mais nous leur disons que demain n’est pas loin.
Propos retranscrits par Ouattara Gaoussou
TCI : Vous avez marché, vous avez initié des journées villes mortes. Vous avez même lancé l’opération «La révolution Orange». Mais le constat est que l’ancien président est toujours au Palais présidentiel. Qu’est-ce que vous comptez faire pour l’en déloger ?
Alphonse Djédjé Mady : Le RHDP, effectivement, a été confronté à sa logique. Le RHDP dans sa définition est un Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix. Nous avons préparé des élections. Nous n’avons pas préparé une guerre. Nous avons laissé la parole au peuple souverain de Côte d’Ivoire qui s’est prononcé. Le RHDP et ses responsables ont, donc, invité les militants à utiliser tous les moyens démocratiques pour arriver à faire comprendre à M. Gbagbo et à son équipe qu’ils ont perdu les élections et qu’ils doivent rendre le pouvoir. Nous avons choisi toutes les méthodes républicaines, démocratiques de manifestation pour le lui faire comprendre. Et je pense que sur cette voie, le RHDP a été suivi par la communauté internationale. Depuis la sous-région jusqu’en Afrique, en Europe et dans le monde entier. Donc, nous pensons que les efforts que nous avons déployés ont porté leurs fruits. Aujourd’hui, c’est vrai, que nous n’avons pas encore atteint l’objectif visé à savoir le respect de la volonté que les Ivoiriens ont exprimé. Et que M. Laurent Gbagbo, ancien président de la République, reconnaisse sa défaite et se retire. Car, perdre les élections, ce n’est pas un déshonneur en démocratie. Accepter sa défaite, c’est se montrer même plus démocrate. Et M. Gbagbo, comme je l’ai écrit dans ma lettre depuis Paris, lui qui réclame la paternité du retour du multipartisme et de la démocratie en Côte d’Ivoire, nous aurait donné une leçon de démocratie en acceptant de se retirer du pouvoir à la suite de sa défaite. Nous sommes à la veille du dernier délai que l’Union africaine s’est donné. L’Union africaine s’était donnée quinze jours et demain (hier, ndlr) on aura les quinze jours. Et depuis aujourd’hui jusqu’à demain, il aura encore une autre session de la CEDEAO. Nous allons attendre et donner toutes les chances à la démocratie. Parce que nous allons prendre en charge l’avenir d’un pays. Ce qui préoccupe aujourd’hui, le président Alassane Ouattara et le RHDP, c’est comment réconcilier demain cette Côte d’Ivoire au niveau de tous ses enfants pour qu’ils puissent se mettre au travail et remonter le niveau de vie des Ivoiriens et redonner à la Côte d’Ivoire la place qui est la sienne. Je pense que c’est l’un des points, des mesures contraignantes que l’Union africaine a eu à dégager sur les cinq : à savoir, constituer un Gouvernement de réconciliation nationale. Pour nous, ce n’est pas une nouveauté. Ce n’est pas une contrainte particulière, parce que dans les programmes du RHDP pour gouvernement la Côte d’Ivoire, même si M. Gbagbo avait accepté dès le premier jour sa défaite, le président Ouattara s’était engagé à faire en sorte que toutes les forces vives, de quelques familles politiques qu’elles soient y compris la société civile, devraient apporter leur contribution pour qu’ensemble, on bâtisse notre pays. Parce que, c’est ensemble que nous devrions le faire. Créons les conditions pour que cet ensemble soit possible demain et faisons en sorte que, même s’il lui reste 10% de chance, même s’il lui reste 5% de chance, espérons que M. Gbagbo saisira ces 5% pour remettre à Alassane Dramane Ouattara les destinées de la Côte d’Ivoire et qu’il puisse mettre en pratique le programme qu’il s’est assigné.
TCI : D’ici là, le RHDP se met en pause.
ADM : On n’est pas en pause. On continue de travailler. Au début de votre journal, vous avez dit que même l’Angola a eu à dire qu’elle reconnaît le président Ouattara. Mais, c’est à la suite d’actions politiques que cela se fait. Dans ce domaine-là, tout ne peut pas être dit sur un plateau de télévision. Donc, sachez que nous ne nous reposons pas. Nous travaillons chaque jour que Dieu fait. En tout cas, le président de la République, Alassane Ouattara, est au travail avec son Gouvernement. Et le RHDP, au niveau de sa direction politique, apporte sa contribution. On ne peut pas dormir ni maintenant ni demain ni après-demain. Tout ne sera pas toujours dans la rue. Nous, on travaille.
TCI: Les chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO se sont réunis aujourd’hui (mercredi dernier, ndlr) sur la question de la Côte d’Ivoire. Cela après les injonctions de toutes les instances internationales qui ont demandé à l’ancien président sortant de se retirer et de permettre au président élu d’assumer la plénitude du pouvoir. Qu’est-ce que vous attendez de ce dernier rendez-vous de la CEDEAO ?
ADM : Tant qu’on vit, il y a de l’espoir. On espère que cette dernière mesure siéra au clan de M. Gbagbo et qu’ils comprendront qu’ils devront permettre à la Côte d’Ivoire de se réconcilier avec elle-même. En tout cas, il est prévu une rencontre des Présidents du RHDP à la suite de cette session de la CEDEAO pour aviser et dire ce que nous allons faire. Mais sachez que le président Ouattara, il n’y a pas longtemps, a créé la nouvelle armée qui devra veiller au retour de la paix dans le pays. Nous attendons les dernières mesures que la CEDEAO va prendre et nous aviserons, après la réunion des présidents du RHDP.
TCI: Pendant ce temps M. le ministre, on peut dire malheureusement, l’ancien président continue d’endeuiller des familles. Les derniers bilans de ce jour (mercredi dernier, ndlr) font état de plusieurs morts encore à Abobo. Votre réaction ?
ADM : Tout cela est à mettre sur le compte de la bêtise humaine. Dans quelque situation qu’on se place. A supposer que M. Gbagbo pense qu’il va rester au pouvoir. Pense-t-il qu’en décimant les populations ivoiriennes, il contribue à la rénovation de la Côte d’Ivoire ? Quelqu’un qui veut faire le bonheur d’un pays, peut-il se permettre, sans regrets, sans retenue, de massacrer sa population ? Voyant l’exode tant interne qu’externe de cette population, dans le temps nous voyons des gens fuir leur pays, on avait pensé que ça ne pouvait jamais arriver à la Côte d’Ivoire, malheureusement voilà ce qui nous arrive. Vous y avez fait allusion tout à l’heure. Ça ne peut qu’être désolant. Donc, pour nous qui, à travers l’élection d’Alassane Dramane Ouattara, auront le devoir de ramener tous ces Ivoiriens aux portes du bonheur et de l’espoir, la tâche risque de se compliquer davantage. Parce que, quoi qu’il en soit, quel que soit le prix à payer, le premier pouvoir que le président Ouattara aura, c’est de rassembler tous les Ivoiriens. Il a parlé de cette Commission «Vérité et réconciliation ». Elle aura pour but, dans la justice et dans la paix, de regrouper tous ces Ivoiriens-là. Nous en avons pleinement conscience. Nous ne pouvons que le regretter. Comme je l’ai dit tout à l’heure, par d’autres voies, on travaille. Que cela connaisse une fin rapide en mettant d’abord à contribution les forces ivoiriennes, quelles soient militaires ou quelles soient civiles.
J’ai entendu tout à l’heure l’ambassadeur Ally Coulibaly (ambassadeur de Côte d’Ivoire en France, ndlr) parler de deux poids deux mesures. C’est vrai. Mais je pense que le moment est venu à ce que nous rentrions en nous-mêmes pour savoir ce que nous pouvons faire pour aller vers la paix, pour aller vers la fin de cette crise. La communauté internationale peut nous aider. C’est pour cela que nous sommes en train de réfléchir pour savoir qu’est-ce qui dépend de nous ? Qu’est-ce que nous devrions faire ? Je pense que très prochainement, le président Ouattara y apportera une solution.
TCI : Face aux massacres quasi-quotidiens de vos militants par les forces pro-Gbagbo, une coalition politique est montée au créneau pour exiger la protection des populations civiles par l’ONUCI (Opérations des Nations unies en Côte d’Ivoire, ndlr). Qu’est-ce que vous attendez de cette institution ?
ADM : M. Choi faisant allusion de l’article 7 de la Charte des Nations unies, a dit, que ce point parlait de deux types d’interventions : le maintien de la paix et l’imposition de la paix. Dans leur mandat, il a été clairement exprimé qu’ils doivent assurer la protection des personnes et des biens, assurer la protection des civils. Il n’y a pas longtemps, ils avaient reçu du matériel de combat. Ils peuvent essayer au moins de maintenir la paix. Mais comme la paix n’existe plus, on se pose la question de savoir si on n’est pas arriver à la phase de l’imposition de la paix. La situation grave que vit la Côte d’Ivoire, personnellement, j’ai pris tendance à rentrer à l’intérieur de la Côte d’Ivoire, à l’intérieur des Ivoiriens eux-mêmes pour savoir qu’est-ce que nous faisons pour sortir de là. Les autres attendront des résolutions, attendront ce qu’ils peuvent attendre, attendront des modifications de mandat. Même quand des personnalités comme le ministre des Affaires Etrangères de la France (Alain Juppé, ndlr) dit que dans le mandat de l’ONUCI tout est contenu pour intervenir s’ils veulent intervenir. Quand vous appelez quelqu’un au secours, voyez d’abord vous-mêmes ce que vous pouvez faire pour vous tirer de l’embarras dans lequel vous vous trouvez. Et aujourd’hui, ma principale préoccupation, c’est de se tourner vers les Ivoiriens. Ce sont les Ivoiriens qui sont en train de mourir, c’est la Côte d’Ivoire qui est en train de plonger dans la misère. Qu’est-ce que nous sommes capables de faire ? Quel sursaut nous pouvons avoir pour arrêter cette saignée ? Donc, nous disons au niveau du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix, qu’est-ce que nous pouvons faire ? Les autres viendront peut-être, même s’ils ne venaient pas, qu’est-ce que nous pouvons faire ? A cela que nous réfléchissons. Après la CEDEAO qui va donner son dernier point de vue, j’espère bien son dernier point de vue, mais il faut que nous avisions, il faut que nous prenions nos responsabilités pour que notre pays regagne la paix.
TCI : M. le ministre, après avoir rejeté les décisions contraignantes décidées par l’union africaine, M. Gbagbo appelle au dialogue. De quoi parle-t-il ? De quel dialogue parle-t-il ?
ADM : La vie en société est toujours un mécanisme de dialogue permanent. Mais il y a une seule chose qu’il est difficile d’apporter sur le plateau de la discussion en ce qui concerne ce dialogue actuel. Il y a un élu de par le verdict des urnes de la population ivoirienne qui s’appelle Alassane Dramane Ouattara. Reconnaissons cette vérité des urnes. Qu’elle nous fasse mal où qu’elle nous ridiculise, nous devons la reconnaître et le monde entier le reconnaît à la suite des Ivoiriens. Ce point, à lui seul, n’est pas susceptible de faire l’objet d’une négociation. On va négocier pour dire quoi ? Qu’Alassane est président ou c’est M. Gbagbo qui est président ? Ou bien, comme il y a quatre ans ou quatre ans et demi qui restent, chacun fait un jour alternativement ? Il y a un point qui est indiscutable, qui ne peut pas faire partie du dialogue. Alassane Ouattara est élu. Alassane Ouattara est président. Alassane Ouattara doit associer maintenant tous les Ivoiriens, y compris M. Gbagbo pourquoi pas, pour rebâtir cette Côte d’Ivoire. Tout le reste maintenant peut se négocier sauf le fauteuil présidentiel. La décision n’appartient pas à un dialogue restreint. La décision appartient au vote des Ivoiriens. On peut dialoguer sur tous les autres points sauf sur la décision du peuple souverain de Côte d’Ivoire.
TCI : La Côte d’Ivoire connaît une situation humanitaire dramatique. Les Abidjanais quittent par milliers pour l’intérieur du pays. Sans oublier les autres problèmes. Quel est le message du RHDP à tous ces Ivoiriens en détresse ?
ADM : Le président Alassane Ouattara et le RHDP ne s’endorment pas. Qu’ils réfléchissent, qu’ils recherchent la solution adéquate qui doit ramener la paix au niveau de tous les Ivoiriens. Nous leur disons que les pertes des membres de nos différentes familles, les non Ivoiriens et le sang des Ivoiriens versé, des obus qu’on lance au marché pour tuer des femmes, dans des cours, des femmes qui sont froidement abattues, des Ivoiriens et des non Ivoiriens qui sont tués à tout moment, nous en sommes conscients. Nous sommes avec eux. Tout ne peut pas se dire sur un plateau de télévision. Mais nous ferons en sorte que cela connaisse un terme et le plus rapidement possible. Nous leur demandons de prendre courage. Bientôt ce sera la fin des souffrances. Tant qu’on vit, il y a de l’espoir. Il ne faut pas qu’ils désespèrent surtout. Le président Alassane Ouattara et le RHDP ont un programme pour eux. Ils ont des projets pour eux. Je souhaiterais que la Côte d’Ivoire soit mise à niveau et d’occuper son rôle de leader dans la sous-région, ce rôle historique, ce rôle que la nature lui a donné. Que la Côte d’Ivoire redevienne ce pays prospère que le président Félix Houphouët-Boigny a mis sur les rails. Que les Ivoiriens s’arment de courage et de patience. C’est dur et douloureux à la fois. Mais nous leur disons que demain n’est pas loin.
Propos retranscrits par Ouattara Gaoussou