PARIS, La France, qui se défend d'être intervenue
directement pour faire capituler le président ivoirien sortant Laurent Gbagbo,
doit à nouveau gérer son éternelle image de gendarme de l'Afrique avec
laquelle le président Nicolas Sarkozy avait pourtant promis de rompre.
La presse estimait mardi que les conditions de la chute de Laurent Gbagbo
affaiblissent Alassane Ouattara, président internationalement reconnu mais qui
doit finalement son accession au pouvoir à l'intervention militaire de
l'ex-puissance coloniale.
"Même encadrée par une résolution de l'ONU et soutenue par les pays de la
région, cette mission de la France s'apparente aux interventions d'antan et
risque d'être vue comme telle par les jeunes Africains", estimait ainsi
Libération.
Cinquante ans après les indépendances africaines, Paris s'est à nouveau
retrouvé en première ligne sur un continent auquel Nicolas Sarkozy avait
pourtant promis une relation "rénovée", la fin des anciens passe-droits et un
désengagement militaire.
Pour le député socialiste François Loncle, "l'intervention militaire
française constitue un nouvel épisode caricatural de la Françafrique", ce
système mêlant cooptation des dirigeants des ex-colonies, réseaux occultes et
chasses gardées commerciales ayant perduré pendant la guerre froide.
Mardi, le gouvernement a à nouveau affirmé la légalité de son intervention,
à la demande de l'ONU, mais aussi sa légitimité, en appui aux processus
démocratiques africains.
La chute de Laurent Gbagbo est une "bonne nouvelle" pour les Ivoiriens,
mais aussi "pour la démocratie" dans la dizaine de pays africains qui vont
connaître des élections dans les mois à venir (notamment le Nigeria, la RD
Congo, le Liberia), a déclaré le chef de la diplomatie Alain Juppé.
"Nous avons envoyé, avec l'ONU, un message symbolique extrêmement fort à
tous les dictateurs. Nous leur avons indiqué que la légalité, la démocratie
devaient être respectées et qu'il y avait des risques pour ceux qui ne le
faisaient pas", a renchéri le Premier ministre François Fillon.
Cette position est "totalement hypocrite" pour Odile Biyidi-Awala,
présidente de l'ONG Survie, qui milite depuis des années pour "en finir avec
la Françafrique".
"La France continue à soutenir des dictatures au Gabon, au Togo, où on a vu
des successions dynastiques entachées de fraudes, et vient de valider
l'élection au Tchad, où sévit un dictateur responsable de la disparition
d'opposants", a-t-elle dénoncé.
Au Cameroun, pays tenu depuis près de 30 ans d'une main de fer par Paul
Biya, "il y a eu des manifestations réprimées dans le sang en 2008 sans que la
France ne dise rien, et pire, Paris a continué à lui livrer des hélicoptères",
a-t-elle affirmé.
Arguments balayés dans les ministères français, où l'on martèle la ligne
officielle: "ni ingérence ni indifférence".
"En Côte d'Ivoire, explique un haut responsable, la seule ligne rouge était
le respect des résultats électoraux. Il était hors de question d'appliquer une
solution à la kényane (où la contestation électorale a conduit à un partage du
pouvoir, ndlr) étant donné que Ouattara était reconnu président par l'ONU".
"Nous sommes intervenus que parce que Gbagbo a sorti l'armement lourd et
menacé des civils. Mais ce genre d'opérations devrait revenir à l'Union
africaine, le jour où elle aura une force capable de le faire", a poursuivi ce
responsable sous couvert d'anonymat, affirmant que l'objectif de Paris, qui
renégocie tous les anciens accords de défense, était de désengager "au
maximum" ses soldats du théâtre africain.
Mais pour plusieurs spécialistes de l'Afrique francophone, Paris peine à
sortir de cette relation particulière avec son ancien pré carré. "Tant que la
France aura des soldats déployés sur le sol africain, l'ambiguité demeurera",
estime notamment Antoine Glaser, auteur de "Sarko en Afrique".
directement pour faire capituler le président ivoirien sortant Laurent Gbagbo,
doit à nouveau gérer son éternelle image de gendarme de l'Afrique avec
laquelle le président Nicolas Sarkozy avait pourtant promis de rompre.
La presse estimait mardi que les conditions de la chute de Laurent Gbagbo
affaiblissent Alassane Ouattara, président internationalement reconnu mais qui
doit finalement son accession au pouvoir à l'intervention militaire de
l'ex-puissance coloniale.
"Même encadrée par une résolution de l'ONU et soutenue par les pays de la
région, cette mission de la France s'apparente aux interventions d'antan et
risque d'être vue comme telle par les jeunes Africains", estimait ainsi
Libération.
Cinquante ans après les indépendances africaines, Paris s'est à nouveau
retrouvé en première ligne sur un continent auquel Nicolas Sarkozy avait
pourtant promis une relation "rénovée", la fin des anciens passe-droits et un
désengagement militaire.
Pour le député socialiste François Loncle, "l'intervention militaire
française constitue un nouvel épisode caricatural de la Françafrique", ce
système mêlant cooptation des dirigeants des ex-colonies, réseaux occultes et
chasses gardées commerciales ayant perduré pendant la guerre froide.
Mardi, le gouvernement a à nouveau affirmé la légalité de son intervention,
à la demande de l'ONU, mais aussi sa légitimité, en appui aux processus
démocratiques africains.
La chute de Laurent Gbagbo est une "bonne nouvelle" pour les Ivoiriens,
mais aussi "pour la démocratie" dans la dizaine de pays africains qui vont
connaître des élections dans les mois à venir (notamment le Nigeria, la RD
Congo, le Liberia), a déclaré le chef de la diplomatie Alain Juppé.
"Nous avons envoyé, avec l'ONU, un message symbolique extrêmement fort à
tous les dictateurs. Nous leur avons indiqué que la légalité, la démocratie
devaient être respectées et qu'il y avait des risques pour ceux qui ne le
faisaient pas", a renchéri le Premier ministre François Fillon.
Cette position est "totalement hypocrite" pour Odile Biyidi-Awala,
présidente de l'ONG Survie, qui milite depuis des années pour "en finir avec
la Françafrique".
"La France continue à soutenir des dictatures au Gabon, au Togo, où on a vu
des successions dynastiques entachées de fraudes, et vient de valider
l'élection au Tchad, où sévit un dictateur responsable de la disparition
d'opposants", a-t-elle dénoncé.
Au Cameroun, pays tenu depuis près de 30 ans d'une main de fer par Paul
Biya, "il y a eu des manifestations réprimées dans le sang en 2008 sans que la
France ne dise rien, et pire, Paris a continué à lui livrer des hélicoptères",
a-t-elle affirmé.
Arguments balayés dans les ministères français, où l'on martèle la ligne
officielle: "ni ingérence ni indifférence".
"En Côte d'Ivoire, explique un haut responsable, la seule ligne rouge était
le respect des résultats électoraux. Il était hors de question d'appliquer une
solution à la kényane (où la contestation électorale a conduit à un partage du
pouvoir, ndlr) étant donné que Ouattara était reconnu président par l'ONU".
"Nous sommes intervenus que parce que Gbagbo a sorti l'armement lourd et
menacé des civils. Mais ce genre d'opérations devrait revenir à l'Union
africaine, le jour où elle aura une force capable de le faire", a poursuivi ce
responsable sous couvert d'anonymat, affirmant que l'objectif de Paris, qui
renégocie tous les anciens accords de défense, était de désengager "au
maximum" ses soldats du théâtre africain.
Mais pour plusieurs spécialistes de l'Afrique francophone, Paris peine à
sortir de cette relation particulière avec son ancien pré carré. "Tant que la
France aura des soldats déployés sur le sol africain, l'ambiguité demeurera",
estime notamment Antoine Glaser, auteur de "Sarko en Afrique".