Au lendemain de la chute brutale du président Laurent Gbagbo, qui a eu lieu le lundi 11 avril dernier, ils sont nombreux, les Ivoiriens, proches de l`ancien régime, qui ont trouvé refuge au Ghana pour éviter d`être la cible d`éléments armés. Parmi ceux-ci, figurent, en majorité, des personnalités politiques mais aussi militaires, ainsi que des miliciens dévoués à la cause de l`ex-président Laurent Gbagbo. Pour des raisons de sécurité, ces derniers mènent une vie discrète, loin des regards, sur leur nouvelle terre d`accueil. C`est le cas de cet ancien combattant pro-Gbagbo, rencontré en terre ghanéenne, qui a accepté, après insistance, de s`ouvrir à nous sous le couvert de l`anonymat. Cet entretien au pied levé, il nous l`a accordé dans la petite ville de ``Half Assinie`` au hasard dans un bistro où il a attiré notre attention alors qu`il conversait en français, dans ce territoire anglophone, avec un interlocuteur. Méfiant à notre égard (il a même menacé de nous livrer à la police ghanéenne), il a fini par se résigner à nous parler, non sans s`être laissé convaincre qu`il ne court aucun danger, étant donné qu`il était entré légalement sur le territoire du Ghana. Entretien...
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs?
Pour des raisons évidentes de sécurité, je ne vous autorise pas à publier mon identité à vos lecteurs. Mais sachez que j`appartiens à une force d`élite qui a combattu pour le maintien de Laurent Gbagbo au pouvoir.
Quelle est exactement cette force d`élite?
On est connu sous le sigle de ``BS``, c`est-à-dire Brigade Spéciale.
Qui sont ceux qui composent cette force?
On y trouve un peu de tout. Des militaires comme des personnes formées sur le tas. On a été mis à la disposition des services de renseignements généraux pour des tâches bien précises.
Que faites-vous en territoire ghanéen?
Posez la question à Sarkozy.
Pourquoi à lui?
Parce qu`il a chassé Gbagbo du pouvoir.
Mais Gbagbo a perdu les élections...
Epargnez-moi ce débat.
Où étiez-vous au moment de la reddition de Laurent Gbagbo?
Deux jours avant, le Woody nous a réunis et nous a demandé de rentrer chez nous. C`est ce que nous avons fait.
Mais il y a eu des combats jusqu`au dernier jour de sa capture...
C`est ce qu`ils veulent faire croire. Sinon leur intention, c`était de tuer Gbagbo.
Mais pourquoi ne l`ont-ils pas fait?
Justement parce que tout était filmé. Les caméras des grandes chaînes de télévision étaient derrière les militaires français. Donc cette présence de journalistes a beaucoup gêné.
Qu`est-ce qui explique votre débâcle lors des combats contre les forces républicaines?
Je pense que vous me donnez l`occasion de dénoncer nos chefs militaires. En réalité, c`est l`argent qui a désorganisé l`armée. Imaginez qu`en pleine guerre, nos chefs étaient préoccupés à éventrer les coffres-forts de ministères et des banques plutôt qu`à organiser la défense des institutions de la République dont le Palais présidentiel. Je suis véritablement révolté de leur comportement. Ils ont trompé Gbagbo pour s`enrichir.
Comment êtes-vous arrivés au Ghana et que comptez-vous faire?
J`ai marché avec mon garde du corps de Port-Bouët jusqu`à Adiaké en suivant le bord de la mer. Arrivé là, nous avons emprunté une pinasse pour débarquer à ``Jo Warf`` et marché jusqu`à ``Half Assiny``. Pour le moment, je me repose et j`attends de mettre de l`ordre dans mes idées avant de décider.
De quoi vivez-vous?
Des amis m`ont fait venir de l`argent de l`étranger. Et comme les banques sont ouvertes à Abidjan, mes frères d`armes restés sur place peuvent me faire des mandats. J`ai assez d`argent enfoui à différents endroits de la commune du Plateau. C`est notre butin de guerre. Et je peux vivre de ça sur dix ans au moins.
Il se dit que vous préparez quelque chose à partir du Ghana...
(Rire) Le Ghana a un service de renseignement très efficace. Ce pays ne peut autoriser cela.
Etes-vous en rapport avec d`autres militaires?
Certains sont en Angola, d`autres en Guinée Equatoriale. Je compte me rendre dans l`un de ces deux pays. Ce sera plus sécurisant.
Mais le Premier ministre Guillaume Soro vous appelle à rejoindre les rangs des Forces républicaines de Côte d`Ivoire...
Les autres peuvent partir. Mais nous sommes un certain nombre qui ne sommes pas dans les fichiers de l`armée régulière.
Vous êtes donc des mercenaires ou des miliciens?
On travaillait pour la République. Moi, j`ai fait l`université. En 2005, on m`a formé pour appartenir à une force d`élite. Et on était respecté. Vous avez vu comment on a inquiété les Français et les hommes de Soro? Nous sommes des guerriers.
Que pensez-vous de la réconciliation prônée par le président Ouattara?
C`est une bonne chose. Et je pense qu`on n`a pas de raison de nous entretuer. Je vous fais une confidence : nous, on avait des ``deals`` avec nos ennemis venus de Bouaké. Souvent, quand on arrachait des véhicules pendant les affrontements, on les remettait aux Forces nouvelles. Ceux-ci allaient les revendre au Burkina et on se partageait l`argent. En tout cas, je veux tourner la page et refaire ma vie. Il faut fermer cette parenthèse qui n`honore pas les Ivoiriens.
Entretien réalisé par Bertrand GUEU
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs?
Pour des raisons évidentes de sécurité, je ne vous autorise pas à publier mon identité à vos lecteurs. Mais sachez que j`appartiens à une force d`élite qui a combattu pour le maintien de Laurent Gbagbo au pouvoir.
Quelle est exactement cette force d`élite?
On est connu sous le sigle de ``BS``, c`est-à-dire Brigade Spéciale.
Qui sont ceux qui composent cette force?
On y trouve un peu de tout. Des militaires comme des personnes formées sur le tas. On a été mis à la disposition des services de renseignements généraux pour des tâches bien précises.
Que faites-vous en territoire ghanéen?
Posez la question à Sarkozy.
Pourquoi à lui?
Parce qu`il a chassé Gbagbo du pouvoir.
Mais Gbagbo a perdu les élections...
Epargnez-moi ce débat.
Où étiez-vous au moment de la reddition de Laurent Gbagbo?
Deux jours avant, le Woody nous a réunis et nous a demandé de rentrer chez nous. C`est ce que nous avons fait.
Mais il y a eu des combats jusqu`au dernier jour de sa capture...
C`est ce qu`ils veulent faire croire. Sinon leur intention, c`était de tuer Gbagbo.
Mais pourquoi ne l`ont-ils pas fait?
Justement parce que tout était filmé. Les caméras des grandes chaînes de télévision étaient derrière les militaires français. Donc cette présence de journalistes a beaucoup gêné.
Qu`est-ce qui explique votre débâcle lors des combats contre les forces républicaines?
Je pense que vous me donnez l`occasion de dénoncer nos chefs militaires. En réalité, c`est l`argent qui a désorganisé l`armée. Imaginez qu`en pleine guerre, nos chefs étaient préoccupés à éventrer les coffres-forts de ministères et des banques plutôt qu`à organiser la défense des institutions de la République dont le Palais présidentiel. Je suis véritablement révolté de leur comportement. Ils ont trompé Gbagbo pour s`enrichir.
Comment êtes-vous arrivés au Ghana et que comptez-vous faire?
J`ai marché avec mon garde du corps de Port-Bouët jusqu`à Adiaké en suivant le bord de la mer. Arrivé là, nous avons emprunté une pinasse pour débarquer à ``Jo Warf`` et marché jusqu`à ``Half Assiny``. Pour le moment, je me repose et j`attends de mettre de l`ordre dans mes idées avant de décider.
De quoi vivez-vous?
Des amis m`ont fait venir de l`argent de l`étranger. Et comme les banques sont ouvertes à Abidjan, mes frères d`armes restés sur place peuvent me faire des mandats. J`ai assez d`argent enfoui à différents endroits de la commune du Plateau. C`est notre butin de guerre. Et je peux vivre de ça sur dix ans au moins.
Il se dit que vous préparez quelque chose à partir du Ghana...
(Rire) Le Ghana a un service de renseignement très efficace. Ce pays ne peut autoriser cela.
Etes-vous en rapport avec d`autres militaires?
Certains sont en Angola, d`autres en Guinée Equatoriale. Je compte me rendre dans l`un de ces deux pays. Ce sera plus sécurisant.
Mais le Premier ministre Guillaume Soro vous appelle à rejoindre les rangs des Forces républicaines de Côte d`Ivoire...
Les autres peuvent partir. Mais nous sommes un certain nombre qui ne sommes pas dans les fichiers de l`armée régulière.
Vous êtes donc des mercenaires ou des miliciens?
On travaillait pour la République. Moi, j`ai fait l`université. En 2005, on m`a formé pour appartenir à une force d`élite. Et on était respecté. Vous avez vu comment on a inquiété les Français et les hommes de Soro? Nous sommes des guerriers.
Que pensez-vous de la réconciliation prônée par le président Ouattara?
C`est une bonne chose. Et je pense qu`on n`a pas de raison de nous entretuer. Je vous fais une confidence : nous, on avait des ``deals`` avec nos ennemis venus de Bouaké. Souvent, quand on arrachait des véhicules pendant les affrontements, on les remettait aux Forces nouvelles. Ceux-ci allaient les revendre au Burkina et on se partageait l`argent. En tout cas, je veux tourner la page et refaire ma vie. Il faut fermer cette parenthèse qui n`honore pas les Ivoiriens.
Entretien réalisé par Bertrand GUEU