La capture de Laurent Gbagbo, le 11 avril 2011, a ouvert (au sens propre du terme) la voie pour l’exercice plein du pouvoir d'Etat à Alassane Ouattara, comme président de la République de Côte d'Ivoire. Mais que d'embuches ont germé, çà et là, à peine a-t-il commencé sa mission!
Un début de règne difficile pour Alassane Ouattara, c'est le moins qu'on puisse dire. En effet, le chef de l'Etat doit faire face, dans le même temps, à plusieurs questions qui constituent à elles seules des priorités. On cite entre autres, la sécurité des biens et des personnes qui passe par l'encasernement des forces armées, la question des droits de l'Homme dont la violation fait couler beaucoup d'encre et de salive, comme la fronde qui enfle au sein du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Les Forces républicaines de Côte d'Ivoire (Frci) sont un casse-tête chinois pour Ouattara, faisaient déjà remarquer, fin avril début mai, des diplomates accrédités en Côte d'Ivoire. Et ces observateurs de la vie politique ivoirienne avaient tapé droit dans le mille. En effet, il ne se passe pas de jour, sans que l'on ne dénonce, à Abidjan comme à l'intérieur du pays, des exactions de cette force armée. Des comportements qui suscitent la psychose au sein des populations et provoquent la réticence des investisseurs notamment. Aussi Alassane Ouattara a-t-il pris à bras le corps la question de la sécurité des biens et des personnes et a donné des instructions à son Premier ministre afin que cette crise soit jugulée. Lequel, avec les membres de son gouvernement, sont à la tâche pour traquer jusque dans leurs derniers retranchements les mauvaises graines. Un pari (herculéen) pour lequel Guillaume Soro a mis à contribution le ministre de l'Intérieur et les grands commandements des Frci. Il est certes encore tôt pour évaluer l'efficacité de ces actions mais la détermination d'Alassane Ouattara et de ces hommes est un bon signe. Par ailleurs, le projet d'une armée unifiée tarde à démarrer. Tant l'homogénéité des forces militaires ivoiriennes pour créer l'armée nouvelle est comparable à celle de l'huile et de l'eau. En tout cas, « la tâche ne sera pas aisée », est convaincu le général de corps d'armée, Philippe Mangou, actuel chef d'état-major des armées. Il a fait cette confession, le 9 juin 2011, à l'état-major des Armées au Plateau, à l'occasion de la visite de prise de contact du ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la défense, Paul Koffi Koffi. « Le Premier Ministre, Ministre de la Défense, conscient de l’immensité de la tâche de reconstruction de notre armée, rassure les Ivoiriens et la communauté internationale qu’il offrira à la Côte d’Ivoire une armée digne d’un Etat démocratique et qui rassure. Les tâches préliminaires de cette grande œuvre ne doivent donc pas être conduites dans la précipitation. Bien au contraire. Toutes ces actions, en particulier, les nominations aux hautes fonctions feront l’objet de réflexion profonde qui accouchera d’une véritable armée nationale dirigée par des Chefs républicains », a laissé entendre, pour sa part, le capitaine Léon Kouakou, porte-parole de Guillaume Soro, dans un communiqué lu le 9 juin 2011.
.Sur plusieurs fronts
Dans le même temps, le chef de l'Etat qui veut offrir à la Côte d'Ivoire une armée digne est confronté aux rapports accablants des organisations internationales des droits de l'Homme qui lui tirent dessus à boulets rouges. « Le manque de discipline et la violence de la part de l'armée nouvellement établie, les Frci, qui est composée de différents groupes sans claire structure de commandement, sont (...) une source de sérieuse préoccupation », a déclaré Navi Pillay, haut commissaire aux droits de l'Homme des Nations unies dans un communiqué rendu public le 15 juin 2011. Toujours selon lui, « des témoignages accusent ces soldats d'implication dans des violations des droits de l'Homme à Abidjan comme dans le reste du pays, incluant des exécutions sommaires, des arrestations arbitraires, des actes de torture, des viols, des pillages et de l'extorsion ». Human Rights Watch (Hrw) a enfoncé le clou en suspectant le pouvoir d'exercer une justice partiale. « Le clivage se creuse entre le discours du gouvernement Ouattara selon lequel personne n'est au-dessus des lois, et la réalité d'une justice qui semble être partiale et marcher au ralenti (…) Aucun des membres des Forces républicaines (pro-Ouattara, ndlr) n’a été arrêté ou placé en garde à vue pour crimes graves commis pendant la période post-électorale (alors que des dizaines de présumés auteurs ou responsables d'exactions au sein du camp Gbagbo )sont en garde à vue depuis plus de deux mois, mais les procureurs n'ont toujours pas porté d'accusations formelles », a accusé Corinne Dufka, chercheuse au sein de cette organisation. Pour Hrw, si la Côte d’Ivoire tient à rompre avec son passé, comme le président Ouattara l'a promis, une justice impartiale doit impérativement être rendue aux milliers de victimes. En plus de cette question épineuse que le chef de l'Etat traite avec beaucoup de minuties, est apparue une fronde au sein de la maison des houphouëtistes dont la non maîtrise pourrait jeter un grain de sable dans la machine de la relance économique et sociale de la Côte d'Ivoire. Outre les mécontentements exprimés des cadres du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (Pdci), le bureau politique du Mouvement des forces d'avenir (Mfa de Innocent Anaky Kobena) a sorti ses griffes. Dans une déclaration publiée le 15 juin, le Mfa a dénoncé des comportements qui violent leur accord initial. « Veut-on encore ou pas du Rhdp ? Estime t-on qu’une fois le régime de Laurent Gbagbo déchu, cette alliance n’a plus de raison d’être ? Est-ce à la chute de Laurent Gbagbo que se résumait l’esprit Rhdp? Quid de l’idéal "Houphouetien" de paix, d’union, de travail, et de développement ? Quid du rêve constant de faire de la Côte d’Ivoire une nation pilote et leader ? Quand et comment le Rhdp a-t-il été créé, et à quoi répondait-il ? Est-ce déjà la fin du formidable nouveau souffle politique que constituait le Rhdp, et qui devait porter la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens vers de grands horizons pour au moins trente ans ? », s'est-il interrogé. Alassane Ouattara qui est au fait des réalités du terrain a pris langue avec son « aîné » Konan Bédié. Sûr qu'au cours des échanges, jeudi dernier, ces poids lourds du Rhdp se sont penchés sur cette préoccupation susceptible d'entamer la cohésion de cette coalition de partis politiques.
Jonas BAIKEH
Un début de règne difficile pour Alassane Ouattara, c'est le moins qu'on puisse dire. En effet, le chef de l'Etat doit faire face, dans le même temps, à plusieurs questions qui constituent à elles seules des priorités. On cite entre autres, la sécurité des biens et des personnes qui passe par l'encasernement des forces armées, la question des droits de l'Homme dont la violation fait couler beaucoup d'encre et de salive, comme la fronde qui enfle au sein du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). Les Forces républicaines de Côte d'Ivoire (Frci) sont un casse-tête chinois pour Ouattara, faisaient déjà remarquer, fin avril début mai, des diplomates accrédités en Côte d'Ivoire. Et ces observateurs de la vie politique ivoirienne avaient tapé droit dans le mille. En effet, il ne se passe pas de jour, sans que l'on ne dénonce, à Abidjan comme à l'intérieur du pays, des exactions de cette force armée. Des comportements qui suscitent la psychose au sein des populations et provoquent la réticence des investisseurs notamment. Aussi Alassane Ouattara a-t-il pris à bras le corps la question de la sécurité des biens et des personnes et a donné des instructions à son Premier ministre afin que cette crise soit jugulée. Lequel, avec les membres de son gouvernement, sont à la tâche pour traquer jusque dans leurs derniers retranchements les mauvaises graines. Un pari (herculéen) pour lequel Guillaume Soro a mis à contribution le ministre de l'Intérieur et les grands commandements des Frci. Il est certes encore tôt pour évaluer l'efficacité de ces actions mais la détermination d'Alassane Ouattara et de ces hommes est un bon signe. Par ailleurs, le projet d'une armée unifiée tarde à démarrer. Tant l'homogénéité des forces militaires ivoiriennes pour créer l'armée nouvelle est comparable à celle de l'huile et de l'eau. En tout cas, « la tâche ne sera pas aisée », est convaincu le général de corps d'armée, Philippe Mangou, actuel chef d'état-major des armées. Il a fait cette confession, le 9 juin 2011, à l'état-major des Armées au Plateau, à l'occasion de la visite de prise de contact du ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de la défense, Paul Koffi Koffi. « Le Premier Ministre, Ministre de la Défense, conscient de l’immensité de la tâche de reconstruction de notre armée, rassure les Ivoiriens et la communauté internationale qu’il offrira à la Côte d’Ivoire une armée digne d’un Etat démocratique et qui rassure. Les tâches préliminaires de cette grande œuvre ne doivent donc pas être conduites dans la précipitation. Bien au contraire. Toutes ces actions, en particulier, les nominations aux hautes fonctions feront l’objet de réflexion profonde qui accouchera d’une véritable armée nationale dirigée par des Chefs républicains », a laissé entendre, pour sa part, le capitaine Léon Kouakou, porte-parole de Guillaume Soro, dans un communiqué lu le 9 juin 2011.
.Sur plusieurs fronts
Dans le même temps, le chef de l'Etat qui veut offrir à la Côte d'Ivoire une armée digne est confronté aux rapports accablants des organisations internationales des droits de l'Homme qui lui tirent dessus à boulets rouges. « Le manque de discipline et la violence de la part de l'armée nouvellement établie, les Frci, qui est composée de différents groupes sans claire structure de commandement, sont (...) une source de sérieuse préoccupation », a déclaré Navi Pillay, haut commissaire aux droits de l'Homme des Nations unies dans un communiqué rendu public le 15 juin 2011. Toujours selon lui, « des témoignages accusent ces soldats d'implication dans des violations des droits de l'Homme à Abidjan comme dans le reste du pays, incluant des exécutions sommaires, des arrestations arbitraires, des actes de torture, des viols, des pillages et de l'extorsion ». Human Rights Watch (Hrw) a enfoncé le clou en suspectant le pouvoir d'exercer une justice partiale. « Le clivage se creuse entre le discours du gouvernement Ouattara selon lequel personne n'est au-dessus des lois, et la réalité d'une justice qui semble être partiale et marcher au ralenti (…) Aucun des membres des Forces républicaines (pro-Ouattara, ndlr) n’a été arrêté ou placé en garde à vue pour crimes graves commis pendant la période post-électorale (alors que des dizaines de présumés auteurs ou responsables d'exactions au sein du camp Gbagbo )sont en garde à vue depuis plus de deux mois, mais les procureurs n'ont toujours pas porté d'accusations formelles », a accusé Corinne Dufka, chercheuse au sein de cette organisation. Pour Hrw, si la Côte d’Ivoire tient à rompre avec son passé, comme le président Ouattara l'a promis, une justice impartiale doit impérativement être rendue aux milliers de victimes. En plus de cette question épineuse que le chef de l'Etat traite avec beaucoup de minuties, est apparue une fronde au sein de la maison des houphouëtistes dont la non maîtrise pourrait jeter un grain de sable dans la machine de la relance économique et sociale de la Côte d'Ivoire. Outre les mécontentements exprimés des cadres du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (Pdci), le bureau politique du Mouvement des forces d'avenir (Mfa de Innocent Anaky Kobena) a sorti ses griffes. Dans une déclaration publiée le 15 juin, le Mfa a dénoncé des comportements qui violent leur accord initial. « Veut-on encore ou pas du Rhdp ? Estime t-on qu’une fois le régime de Laurent Gbagbo déchu, cette alliance n’a plus de raison d’être ? Est-ce à la chute de Laurent Gbagbo que se résumait l’esprit Rhdp? Quid de l’idéal "Houphouetien" de paix, d’union, de travail, et de développement ? Quid du rêve constant de faire de la Côte d’Ivoire une nation pilote et leader ? Quand et comment le Rhdp a-t-il été créé, et à quoi répondait-il ? Est-ce déjà la fin du formidable nouveau souffle politique que constituait le Rhdp, et qui devait porter la Côte d’Ivoire et les Ivoiriens vers de grands horizons pour au moins trente ans ? », s'est-il interrogé. Alassane Ouattara qui est au fait des réalités du terrain a pris langue avec son « aîné » Konan Bédié. Sûr qu'au cours des échanges, jeudi dernier, ces poids lourds du Rhdp se sont penchés sur cette préoccupation susceptible d'entamer la cohésion de cette coalition de partis politiques.
Jonas BAIKEH