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Art et Culture Publié le mardi 21 juin 2011 | Fraternité Matin

Éducation nationale : comment sauver l’école ivoirienne ? Il n’y a pas de développement sans une bonne formation

© Fraternité Matin
Timide rentrée des classes à Abidjan après la crise et les combats
Les écoles d`Abidjan, fermées depuis plusieurs semaines à cause de la crise post-électorale et des combats qui ont conduit à la chute de l`ex-président Laurent Gbagbo, ont commencé à rouvrir mardi, mais de nombreux élèves et enseignants manquent encore à l`appel
Notre école se porte mal et même très mal. Le paradoxe de l’état de cet outil de développement est que ce sont ses gardiens qui en sont les fossoyeurs. Oui, les enseignants, gardiens du temple, sont ceux-là même qui l’ont détruit à coups d’incompétence, par manque de projet réel, souvent par pure méchanceté ou par manque de vision. Ils ont conscience de cela car leur choix est d’expatrier leurs enfants en refusant de les soumettre aux remèdes qu’eux-mêmes administrent à notre société. Pourtant, beaucoup des anciens cadres de notre pays ont bénéficié de bonnes formations avec souvent la possibilité de poursuivre leurs études dans des pays étrangers.

On comptait sur eux pour nous donner leur expertise et aider à notre développement à travers l’amélioration de notre société et de son système, éducatif. Ils sont, hélas, pour la plupart,
devenus les Crapauds Brousse dont parle Tierno Monémembo. L’état de notre école est à l’image de notre société: divisée, lourde, inefficace,
surchargée, confuse, mal orientée et j’en passe. Nous sommes loin des années des écoles prestigieuses de Yamoussoukro, d’Abidjan.

Comment parvenir à sauver notre école?

Il faut d’abord éviter d’avoir cette obsession ivoirienne de vouloir à tous les coups sauver une année scolaire ou universitaire à travers une formation accélérée,
précipitée, bâclée, inadéquate avec des acteurs aussi défaillants que ceux qu’ils prétendent former. C’est comme s’entêter à effectuer un long
voyage avec une voiture qui a des pneus et un moteur défaillants. C’est un risque inutile qu’il ne faut pas faire prendre
à notre pays. Nous devons, en toute objectivité, remonter le cours de notre histoire, celui de
notre école, et identifier toutes les sources de problèmes et les résoudre dans le temps, quitte à avoir une année blanche. Il ne saurait y avoir de développement sans une bonne formation.

Des cadres mal formés conduisent notre pays dans le précipice
de l’incompétence, de la corruption, de la facilité et détruisent
les outils réels de développement.

Il faut commencer par des états généraux de notre école. Des travaux qui devront impliquer tous ses acteurs et dont les conclusions devront passer à l’Assemblée nationale et un
budget spécial alloué pour la réalisation de toutes ses conclusions.

Nous avons le devoir de soigner notre école si nous aspirons au développement. Nos armes de destruction massive,
nos détournements, le mépris de notre classe politique, en tout cas pour beaucoup d’entre eux, sont autant d’éléments qui nous prennent en otage. Ceux qui disent
savoir ne savent rien, et ceux qui savent ne font rien.

Peut-on vraiment parler de progrès depuis la mort d’Houphouët-Boigny au niveau de notre école?

S’il y a aussi une question à élucider,
ce sera indubitablement
celle du manque de volonté politique.
L’école a été un honteux
instrument de division et de
création de milices au compte
du pouvoir. Cela n’est pas seulement
le fait du Fpi et de la Fesci;
la vision simpliste et unique du
Meeci à l’époque était aussi,
dans une certaine mesure, une
volonté de la classe politique de
s’approprier ce secteur.
D’ailleurs, les mariages de ses
responsables étaient souvent
parrainés par le parti au pouvoir.
Seulement, à cette époque, on
était loin d’en faire des milices
armées d’une brutalité unique
dans l’histoire de notre pays. On
en revient ainsi à la question de
la Fesci.
Elle doit disparaître, purement et
simplement. Elle n’est pas un
syndicat, c’est une mafia. Une
organisation qui admet réquisitionner
les chambres d’étudiants,
prélever des taxes sur les
jadis commerces environnants,
organiser le racket à travers l’intimidation
et la tuerie systématique
de ceux qui refusent de se
soumettre à leurs lois n’est rien
d’autre qu’une mafia et elle doit
connaître toute la force de la loi
si nous aspirons vraiment à
créer une société juste et équitable,
un pays de droit. La Fesci
est un mal de notre école et je
ne crois pas en sa réorientation.
Elle doit faire les frais de son
inconséquence, ses responsables
aussi. Pourquoi ne pas
d’ailleurs aussi songer à la création
d’une police universitaire
pour garantir la sécurité?
En outre, il convient d’instaurer
des mises à niveau de tous les
enseignants de notre pays, au
plus tous les 3 ans. Il serait également
indiqué de faire le point
des diplômes attribués ces 10
dernières années et aboutir à
une saisie informatique des
notes, bulletins, parcours scolaires,
des résultats vérifiables par
simple connexion sur Internet. Il
faut un audit dans ce secteur et
une vérification des diplômes et
des entrées dans toutes les
grandes écoles. Comment peuton
avoir des “enseignants” avec
des diplômes achetés en charge
de la formation ou en charge de
notre école? Comment peut-on
prétendre enseigner sans en
avoir la compétence? Les fautes
primaires d’orthographe et de
grammaire dans nos journaux et
souvent même dans les annonces
à la télévision sont autant de
signes inquiétants d’une formation
défaillante. Des indiscrétions
font même état d’enseignants
recrutés sur une base
ethnique ou en fonction du
degré de leur militantisme et qui
ont été admis à être directeurs
sans avoir le niveau requis,
grâce à Charles Blé Goudé.
Pour ma part, je pense qu’il faut
aussi travailler sur notre programme
scolaire et universitaire,
créer de nouvelles filières et
adapter les formations et programmes
à notre pays, ses
ambitions et ses valeurs. Nous
devons aussi revenir aux uniformes
obligatoires pour éviter de
créer cet anonymat qui est souvent
source de beaucoup d’écarts
de comportements et d’abus.
Il serait aussi judicieux de
revoir les effectifs du corps
enseignant et aussi des élèves
et étudiants et en fixer des normes
nationales. Notre pays doit
revenir à des critères d’attribution
liés au niveau social des
bourses et résidences universitaires
ou internats connus de
tous et acceptables par tous.
Pour cela, il faut aussi réaménager
toutes les résidences et établissements
et les rendre viables.
Notre pays doit travailler à
la création d’une véritable bibliothèque
universitaire et d’une
salle informatique avec des centaines
d’ordinateurs pour permettre
à chaque étudiant, peu
importe son niveau social, de
travailler sur des outils informatiques.
Un programme de vulgarisation
de ces outils doit voir le
jour au niveau des écoles primaires
jusqu’à l’université.
Attendre 30 ans pour effleurer
un clavier d’ordinateur est très
inquiétant.
Notre désir de développement doit être perçu à travers notre école et les formations proposées.
L’école obligatoire jusqu’à un certain âge est une nécessité absolue en notre sens et revaloriser notre école passera forcément par la création d’une société de mérite, une société juste et transparente avec des critères définis. Notre pays doit aussi faire appel à toutes les compétences et même demander à nos frères et soeurs qui enseignent dans des universités et écoles étrangères, souvent occidentales, de revenir aider à la construction de leur pays. Le problème de notre école, au demeurant, est le problème de toute notre société.
Pour notre part, conscients que chaque Ivoirien devra faire le sacrifice ultime pour sauver le pays, son avenir et sa réputation à travers tous les efforts collectifs ou individuels, nous ferons toujours des propositions constructives.
Il est aussi grand temps de penser à la formation et à l’éducation des femmes dans notre société.
La Côte d’Ivoire attend.

par ISSIAKA KONATÉ
Londres Royaume-Uni
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