Les opérateurs économiques des pays de l’Hinterland (Mali, Burkina Faso et Niger) qui commercent avec Abidjan menacent d’aller vers d’autres cieux. A cause dus nombreuses tracasseries routières et autres rackets opérés par les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (Frci) sur le long du corridor nord du pays.
Le Port autonome d’Abidjan (Paa) va-t-il atteindre la barre des 25 millions de tonnes de marchandises comme l’année dernière ? La question mérite d’être posée vu les nombreuses tracasseries et autres rackets opérés dans la partie centre et nord du pays. Le nouveau Président de la communauté portuaire d’Abidjan, Hien Sié ne se fait pas prier pour décrier la situation des opérateurs économiques des pays de l’Hinterland. Qui subissent depuis quelques mois cette situation humiliante et indéniable. Hormis les premiers convois de coton en provenance du Mali, les opérateurs économiques des pays de l’Hinterland payent des amendes sur la route du nord. Excédé, le nouveau Président de la communauté portuaire d’Abidjan, Hien Sié a plaidé pour que cessent ces escroqueries sur ces honnêtes opérateurs économiques qui font toujours confiance à la Côte d’Ivoire. Lors de cette audience que lui a accordé le Chef du gouvernement, Guillaume Soro, par ailleurs ministre de la Défense et ancien patron des Forces nouvelles, Hien Sié a supplié celui-ci à faire en sorte pour que les éléments en armes cessent « leur basse besogne » qui ne permette pas aux opérateurs économiques des pays de l’Hinterland, notamment du Burkina Faso, du Mali et du Niger à exercer convenablement. Avant lui, Marcel Gossio qui occupait ce poste avait interpellé le chef d’état-major des armées Philippe Mangou sur cette pratique qui est devenue au fil du temps un phénomène. « Le racket des hommes en armes sur le corridor nord du pays ne permet pas aux opérateurs économiques des pays de l’Hinterland de venir en Côte d’Ivoire. De Tiebissou jusqu’aux frontières, ils payent des taxes avant de franchir le seuil de leur pays. Conséquences : ces derniers ont décidé de contourner le port autonome d’Abidjan, leur port naturel pour aller ailleurs ».
De Tiebissou aux frontières, les opérateurs rackettés
Ces cris étaient de Marcel Gossio, alors directeur général du port autonome d’Abidjan. C’était l’année dernière, lors de la visite qu’effectuait, le chef d’état-major des armées de Côte d’Ivoire, Philippe Mangou sur la plateforme portuaire. L’autorité portuaire dénonçait ainsi les nombreuses tracasseries des éléments des Forces nouvelles sur le long du corridor nord. Il suppliait par la même occasion, le chef d’état-major des armées pour que celui-ci demande au Premier ministre Guillaume Soro, alors secrétaire général des Forces nouvelles de faire pression sur ses éléments pour permettre à ces opérateurs Maliens, Burkinabés et autres Nigériens de circuler librement. Ce plaidoyer n’avait jamais été entendu jusqu’à ce que le Président de la République, Laurent Gbagbo soit éjecté du pouvoir le 11 avril dernier par la France avec l’appui de ces soldats des ex-Forces nouvelles basés dans le nord de la Côte d’Ivoire. En effet, depuis la prise du pouvoir par Alassane Dramane Ouattara sur l’ensemble du territoire nationale et principalement dans la partie nord et centre du pays, les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (Frci), ont doublé, voire triplé les barrages pour disent-ils se payer sur le terrain après leur « mission » de faire partir Laurent Gbagbo. En effet, depuis cette date, il ne se passe un seul instant où, ces opérateurs économiques qui descendent au Port autonome d’Abidjan ne subissent les courroux de ces hommes sous la menace de leurs armes. « Le racket est devenu pire qu’avant », indique un opérateur de la filière bétail. Il fait savoir que par le passé, les Commandants de zones leur demande de verser la somme de 300 000 Fcfa pour pourvoir passer le long du corridor nord jusqu’à, soit à Zegoua, la première ville malienne ou à Larelaba, première ville du Burkina Faso. Maintenant, lance-t-il, on nous exige de payer soixante dix mille ou même cent mille francs à chaque barrage. « C’est trop », se plaint-il. Avant d’ajouter que, cette situation les peine et leur donne une envie d’abandonner le port d’Abidjan qui est leur port naturel. « Si cette situation perdure, nous seront obligés de trouver d’autres destinations propices dans la sous-région comme nous avons eu à le faire il y a de cela quelques années », dit-il l’air anxieux. A la Gestoci, à Vridi, lieu de chargement des produits pétroliers en direction des pays de l’hinterland, c’est la même plainte. « Nous sommes fatigués. On mène une vie difficile sur le long du corridor nord. Des faux frais nous sont imposés par les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire. Nous sommes obligés de faire avec. Mais, pour combien de temps ?» s’interroge Ibrahim Sow, un conducteur de camion citerne qui fait la ligne Abidjan-Zegoua, première ville malienne. Il explique que d’Abidjan à Zegoua, les ex-Forces nouvelles leur exigent plus de 700 000 Fcfa. Comme lui, son collègue Samassi ne comprend pas cette situation. « C’est dur. Nous sommes fatigués de ces taxes. Qui, malheureusement, ne servent pas à la réparation du tronçon qui est complètement dégradé », lance-t-il. Avant d’interpeller les nouveaux dirigeants du pays sur cette situation qui ne fait que donner une mauvaise image à leur mandat. Pour lui, seul le chef du gouvernement et le chef de l’Etat peuvent arrêter leur calvaire. Car, ils connaissent parfaitement ceux qui agissent ainsi. « Si cette situation perdure, nous seront obligés de trouver d’autres destinations propices dans la sous-région comme nous avons eu à faire il y a de cela quelques années », dit-il l’air anxieux. En effet, après l’attaque armée du 19 septembre 2002 par les rebelles venus du nord de la Côte d’Ivoire, les opérateurs économiques des pays de l’Hinterland, compte tenu de la grande insécurité qui régnait sur le long du corridor nord du pays et du racket fait par les Forces nouvelles ont abandonné le Port autonome d’Abidjan, considéré comme leur port naturel vers des ports propices tels que Lomé, Tema ou Cotonou, malgré les coûts excessifs. Il a fallu une offensive commerciale des anciens dirigeants du Port autonome d’Abidjan pour que ces derniers reprennent la route. Pour Samassi, les nouvelles autorités du pays se doivent trouver les voies et moyens pour rassurer les opérateurs économiques qu’ils sont. Sinon, ils partiront.
Le redéploiement de l’administration et l’unicité des caisses, la solution
Pour lui, seuls le redéploiement de l’administration public et l’unicité des caisses de l’Etat peuvent réduire leur souffrance. En effet, depuis la rébellion armée en 2002, les services de l’Etat n’existent pas dans ces différentes zones. Une aubaine pour les ex-Forces nouvelles de se faire les poches. Une structure dite « Centrale » a été créée par les dirigeants de la rébellion armée. Dosso Moussa, ministre de l’Industrie et du Développement du secteur privé est chargé de collecter ces fonds. Malheureusement, ces fonds ne vont pas dans les caisses de l’Etat. Le redéploiement de l’administration et l’unicité des caisses de l’Etat font partie de l’Accord politique de Ouagadougou (Apo), de 2007. Un semblant de redéploiement des services publics a eu lieu dans la partie Centre-nord ouest (Cno), occupée par les ex-Forces nouvelles. Malheureusement, ce redéploiement n’était qu’une vue d’esprit. Car, ce sont les Commandants de ces différentes zones qui avaient les manettes de l’économie dans leur zone de compétence. Le commerce illicite du diamant, du bois, de l’or, de la noix de cajou, du cacao et du café vers les pays de l’Hinterland, ainsi que les taxes sur les opérateurs économiques étaient leur affaire. Les différents rapports de l’Organisation non gouvernementale américaine, Human Rights Watch ainsi que de l’Organisation des nations unies (Onu) indiquent que ces Chefs de guerre ainsi que leurs « parrains » ont bâti leurs fortunes dans ces trafics illicites. Malheureusement, cette situation ne semble pas être la préoccupation majeure des nouvelles autorités de Côte d’Ivoire. Car, depuis leur prise de fonction, ce volet n’est pas encore évoquée au cours des conseils de gouvernement et de ministres. Et pourtant, c’est la seule voie pour l’Etat de Côte d’Ivoire de freiner le racket, le trafic illicite du diamant, de l’or, du cacao café, etc. Mais, surtout pour avoir une économie nationale forte et gagner la confiance non seulement des opérateurs économiques de l’Hinterland qui continuent d’emprunter la route du nord, mais du monde entier. Qui attendent, un signal fort des nouvelles autorités pour faire de gros investissements. En attendant, les hommes en treillis se payent sur la route du nord.
Joseph Atoumgbré
attjoseph@yahoo.fr
Le Port autonome d’Abidjan (Paa) va-t-il atteindre la barre des 25 millions de tonnes de marchandises comme l’année dernière ? La question mérite d’être posée vu les nombreuses tracasseries et autres rackets opérés dans la partie centre et nord du pays. Le nouveau Président de la communauté portuaire d’Abidjan, Hien Sié ne se fait pas prier pour décrier la situation des opérateurs économiques des pays de l’Hinterland. Qui subissent depuis quelques mois cette situation humiliante et indéniable. Hormis les premiers convois de coton en provenance du Mali, les opérateurs économiques des pays de l’Hinterland payent des amendes sur la route du nord. Excédé, le nouveau Président de la communauté portuaire d’Abidjan, Hien Sié a plaidé pour que cessent ces escroqueries sur ces honnêtes opérateurs économiques qui font toujours confiance à la Côte d’Ivoire. Lors de cette audience que lui a accordé le Chef du gouvernement, Guillaume Soro, par ailleurs ministre de la Défense et ancien patron des Forces nouvelles, Hien Sié a supplié celui-ci à faire en sorte pour que les éléments en armes cessent « leur basse besogne » qui ne permette pas aux opérateurs économiques des pays de l’Hinterland, notamment du Burkina Faso, du Mali et du Niger à exercer convenablement. Avant lui, Marcel Gossio qui occupait ce poste avait interpellé le chef d’état-major des armées Philippe Mangou sur cette pratique qui est devenue au fil du temps un phénomène. « Le racket des hommes en armes sur le corridor nord du pays ne permet pas aux opérateurs économiques des pays de l’Hinterland de venir en Côte d’Ivoire. De Tiebissou jusqu’aux frontières, ils payent des taxes avant de franchir le seuil de leur pays. Conséquences : ces derniers ont décidé de contourner le port autonome d’Abidjan, leur port naturel pour aller ailleurs ».
De Tiebissou aux frontières, les opérateurs rackettés
Ces cris étaient de Marcel Gossio, alors directeur général du port autonome d’Abidjan. C’était l’année dernière, lors de la visite qu’effectuait, le chef d’état-major des armées de Côte d’Ivoire, Philippe Mangou sur la plateforme portuaire. L’autorité portuaire dénonçait ainsi les nombreuses tracasseries des éléments des Forces nouvelles sur le long du corridor nord. Il suppliait par la même occasion, le chef d’état-major des armées pour que celui-ci demande au Premier ministre Guillaume Soro, alors secrétaire général des Forces nouvelles de faire pression sur ses éléments pour permettre à ces opérateurs Maliens, Burkinabés et autres Nigériens de circuler librement. Ce plaidoyer n’avait jamais été entendu jusqu’à ce que le Président de la République, Laurent Gbagbo soit éjecté du pouvoir le 11 avril dernier par la France avec l’appui de ces soldats des ex-Forces nouvelles basés dans le nord de la Côte d’Ivoire. En effet, depuis la prise du pouvoir par Alassane Dramane Ouattara sur l’ensemble du territoire nationale et principalement dans la partie nord et centre du pays, les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (Frci), ont doublé, voire triplé les barrages pour disent-ils se payer sur le terrain après leur « mission » de faire partir Laurent Gbagbo. En effet, depuis cette date, il ne se passe un seul instant où, ces opérateurs économiques qui descendent au Port autonome d’Abidjan ne subissent les courroux de ces hommes sous la menace de leurs armes. « Le racket est devenu pire qu’avant », indique un opérateur de la filière bétail. Il fait savoir que par le passé, les Commandants de zones leur demande de verser la somme de 300 000 Fcfa pour pourvoir passer le long du corridor nord jusqu’à, soit à Zegoua, la première ville malienne ou à Larelaba, première ville du Burkina Faso. Maintenant, lance-t-il, on nous exige de payer soixante dix mille ou même cent mille francs à chaque barrage. « C’est trop », se plaint-il. Avant d’ajouter que, cette situation les peine et leur donne une envie d’abandonner le port d’Abidjan qui est leur port naturel. « Si cette situation perdure, nous seront obligés de trouver d’autres destinations propices dans la sous-région comme nous avons eu à le faire il y a de cela quelques années », dit-il l’air anxieux. A la Gestoci, à Vridi, lieu de chargement des produits pétroliers en direction des pays de l’hinterland, c’est la même plainte. « Nous sommes fatigués. On mène une vie difficile sur le long du corridor nord. Des faux frais nous sont imposés par les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire. Nous sommes obligés de faire avec. Mais, pour combien de temps ?» s’interroge Ibrahim Sow, un conducteur de camion citerne qui fait la ligne Abidjan-Zegoua, première ville malienne. Il explique que d’Abidjan à Zegoua, les ex-Forces nouvelles leur exigent plus de 700 000 Fcfa. Comme lui, son collègue Samassi ne comprend pas cette situation. « C’est dur. Nous sommes fatigués de ces taxes. Qui, malheureusement, ne servent pas à la réparation du tronçon qui est complètement dégradé », lance-t-il. Avant d’interpeller les nouveaux dirigeants du pays sur cette situation qui ne fait que donner une mauvaise image à leur mandat. Pour lui, seul le chef du gouvernement et le chef de l’Etat peuvent arrêter leur calvaire. Car, ils connaissent parfaitement ceux qui agissent ainsi. « Si cette situation perdure, nous seront obligés de trouver d’autres destinations propices dans la sous-région comme nous avons eu à faire il y a de cela quelques années », dit-il l’air anxieux. En effet, après l’attaque armée du 19 septembre 2002 par les rebelles venus du nord de la Côte d’Ivoire, les opérateurs économiques des pays de l’Hinterland, compte tenu de la grande insécurité qui régnait sur le long du corridor nord du pays et du racket fait par les Forces nouvelles ont abandonné le Port autonome d’Abidjan, considéré comme leur port naturel vers des ports propices tels que Lomé, Tema ou Cotonou, malgré les coûts excessifs. Il a fallu une offensive commerciale des anciens dirigeants du Port autonome d’Abidjan pour que ces derniers reprennent la route. Pour Samassi, les nouvelles autorités du pays se doivent trouver les voies et moyens pour rassurer les opérateurs économiques qu’ils sont. Sinon, ils partiront.
Le redéploiement de l’administration et l’unicité des caisses, la solution
Pour lui, seuls le redéploiement de l’administration public et l’unicité des caisses de l’Etat peuvent réduire leur souffrance. En effet, depuis la rébellion armée en 2002, les services de l’Etat n’existent pas dans ces différentes zones. Une aubaine pour les ex-Forces nouvelles de se faire les poches. Une structure dite « Centrale » a été créée par les dirigeants de la rébellion armée. Dosso Moussa, ministre de l’Industrie et du Développement du secteur privé est chargé de collecter ces fonds. Malheureusement, ces fonds ne vont pas dans les caisses de l’Etat. Le redéploiement de l’administration et l’unicité des caisses de l’Etat font partie de l’Accord politique de Ouagadougou (Apo), de 2007. Un semblant de redéploiement des services publics a eu lieu dans la partie Centre-nord ouest (Cno), occupée par les ex-Forces nouvelles. Malheureusement, ce redéploiement n’était qu’une vue d’esprit. Car, ce sont les Commandants de ces différentes zones qui avaient les manettes de l’économie dans leur zone de compétence. Le commerce illicite du diamant, du bois, de l’or, de la noix de cajou, du cacao et du café vers les pays de l’Hinterland, ainsi que les taxes sur les opérateurs économiques étaient leur affaire. Les différents rapports de l’Organisation non gouvernementale américaine, Human Rights Watch ainsi que de l’Organisation des nations unies (Onu) indiquent que ces Chefs de guerre ainsi que leurs « parrains » ont bâti leurs fortunes dans ces trafics illicites. Malheureusement, cette situation ne semble pas être la préoccupation majeure des nouvelles autorités de Côte d’Ivoire. Car, depuis leur prise de fonction, ce volet n’est pas encore évoquée au cours des conseils de gouvernement et de ministres. Et pourtant, c’est la seule voie pour l’Etat de Côte d’Ivoire de freiner le racket, le trafic illicite du diamant, de l’or, du cacao café, etc. Mais, surtout pour avoir une économie nationale forte et gagner la confiance non seulement des opérateurs économiques de l’Hinterland qui continuent d’emprunter la route du nord, mais du monde entier. Qui attendent, un signal fort des nouvelles autorités pour faire de gros investissements. En attendant, les hommes en treillis se payent sur la route du nord.
Joseph Atoumgbré
attjoseph@yahoo.fr