L’ancien parti au pouvoir, après la défection de Koulibaly Mamadou, a décidé de contre-attaquer. Désormais, c’est l’ancien secrétaire général, Miaka Ouréto, qui préside aux destinées du parti fondé par Laurent Gbagbo. La dernière réunion du comité central de cette formation politique, en a décidé ainsi. Avec l’avènement du député de Buyo à la tête du Front populaire ivoirien, il faut souligner que c’est l’ère des éternels lieutenants qui a sonné. Miaka Oureto a été, durant une décennie, le secrétaire général de l’ancien parti au pouvoir. Mais combien d’Ivoiriens le savaient, en dehors des acteurs et observateurs avisés du microcosme politique ivoirien ? Pas beaucoup en tout cas. L’ancien patron du secrétariat du FPI, contrairement à ses pairs des grands partis ivoiriens comme le RDR et le PDCI-RDA, était barré par le successeur de Laurent Gbagbo et les vice-présidents que sont Aboudramane Sangaré, Simone Gbagbo et Koulibaly Mamadou. Au RDR, Henriette Dagri Diabaté était connue pour son action à la tête du parti domicilié à la rue Lepic. Au PDCI, Alphonse Djédjé se comporte en véritable cheville ouvrière du parti doyen. Mais Miaka Ouréto, au FPI, ne pouvait rêver d’une telle marge au sein du FPI. Tellement il était écrasé par les cadors du parti bleu à la rose. Aujourd’hui, avec les conséquences de la grave crise post-électorale provoquée par lui-même, celui qui faisait ses petits pas dans l’ombre du quatuor de choc de l’ancien parti au pouvoir est, malgré lui, propulsé au devant de la scène. Affi n’Guessan, le président du parti est à Bouna en détention préventive. Aboudramane Sangaré est à Katiola pour les mêmes raisons. Simone Gbagbo est à Odienné en attendant de répondre de ses actes. Mamadou Koulibaly, pour des raisons sur lesquelles il s’est longuement expliqué dans un courrier, a décidé de prendre ses distances vis-à-vis de ses anciens camarades. Depuis un certain moment, le président de l’Assemblée nationale n’était plus sur la même longueur d’onde que ses anciens compagnons. Mamadou Koulibaly s’est heurté à un véritable problème culturel. Pendant que l’ancien troisième vice-président du FPI voulait qu’on tourne rapidement la page Laurent et Simone Gbagbo, les autres membres du comité central estiment qu’il faut encore attendre. Mamadou Koulibaly, en bon Malinké, veut vite enterrer les « cadavres » et passer à autre chose. Mais, il oublie une chose. En Côte d’Ivoire, notamment dans certaines régions, les morts sont chers. On ne s’en sépare pas aussi facilement. Tant que les cadres et militants du FPI n’auront pas fait le deuil politique des Laurent, Simone et autres Affi, rien de sérieux et de durable ne pourra se faire au FPI. Miaka Ouréto qui vient d’hériter de ce qui reste du FPI, le sait. « Un intérimaire, c’est celui qui gère les affaires courantes », a averti Koné Katinan Justin, le nouveau porte-parole de Laurent Gbagbo. Le rôle de l’intérimaire consistera donc, pour le moment, à chauffer le banc en attendant le retour hypothétique des vrais gardiens du temple. Pour l’heure, ce qu’il faut retenir, c’est la montée en puissance des seconds couteaux au FPI. La revanche des hommes de l’ombre. La prise de pouvoir des hommes de terrain que sont les fédéraux. Longtemps écartés des cercles de décision pendant l’exercice du pouvoir. Mais pourront-ils réussir là où Laurent Gbagbo et ses sbires ont échoué ? Sauront-ils amener le FPI à faire son aggiornamento ? Rien n’est moins sûr. Car, derrière les discours conciliateurs de la nouvelle équipe, les faits et gestes montrent que le FPI n’a pas encore tiré les leçons de la grave crise qu’a connue la Côte d’Ivoire ces dernières années. Car, le départ de Mamadou Koulibaly laisse le champ libre aux faucons du parti. L’arrivée de Miaka Ouréto, perçu par l’opinion comme un modéré, n’est que du saupoudrage. Les vrais gardiens du temple, même en détention ou en exil, continuent de veiller au grain. En attendant…
Jean-Claude Coulibaly
Jean-Claude Coulibaly