Un prince déchu n’a qu’un rêve en tête : revenir au trône. En sirotant les délices de sa revanche il peut, en passant, faire rouler quelques têtes par terre. Ce rêve princier agite les esprits des refondateurs. Les ex-rois du pays. Ils n’acceptent pas, et ne veulent pas croire que c’est fini. Le temps de Gbagbo et Simone, ce temps de la Côte d’Ivoire au rabais, n’existe plus. Chaque jour, les hommes de l’ancien baron de Yopougon, celui qui régentait le pays en seigneur de la mauvaise cause, se lancent dans les spéculations. Nourris comme ils le sont à la source des prophètes et autres pasteurs à la foi guidée par les espèces sonnantes et trébuchantes, ils comptent les jours. Chaque 1er du mois est un rendez-vous sûr. Ce jour-là, le seigneur, (lequel d’ailleurs s’interrogerait quelqu’un de bien sensé ?) frappera. Puis, quand arrive le rendez-vous, il est reporté au sept. Ce sera par la suite au quinze, au vingt et un, au vingt-huit. Pour enfin arriver au 1er suivant. Le cycle continue. Sans relâche, la mécanique est en marche. Les uns confient, en plus « des hommes de Dieu », leur fardeau aux soldats de la mort. Les Abéhi et autres Konan Boniface. Les tueurs de femmes, d’enfants et de pauvres innocents. Ils espèrent les voir débarquer en Rambo défonçant tout sur leur passage. Et, au bout d’un parcours triomphant, remettre le Woody en selle. Beau rêve ! Cependant convaincus que le rêve seul ne suffit pas, les lieutenants de Gbagbo se ruent sur l’arme de tous les jours. Celle qui, dans l’opposition comme pendant le passage calamiteux au pouvoir, a servi : la rumeur. Elle est distillée à tous les coins. Par tous les moyens. Il faut affoler les citoyens. Il faut semer la psychose. Une foule déstabilisée devient une proie dont les acteurs de la scène peuvent retirer tout. Les Refondateurs sont dans le rêve et les petits calculs. Les Ivoiriens sont dans la reconstruction et voient grand.
D. Al Seni
D. Al Seni