Le guide suprême de la communauté musulmane Soufi de Côte d’Ivoire, Cheikh Soufi Konaté, multiplie les activités spirituelles sous le sceau de la réconciliation. Dans cet entretien, le guide Soufi livre le sens de cet activisme et appelle les musulmans, à quelques jours du Ramadan 2011, à libérer leurs cœurs de la haine et du mépris ainsi que leurs esprits de la vengeance pour les épreuves endurées pendant la crise postélectorale afin d’entrer dans les grâces de ce mois de dévotion au Seigneur.
A la suite du giga Maouloud 2011, que vous avez organisé récemment à Port-Bouët et dont les travaux ont planché sur la réconciliation, vous venez de placer le Ramadan 2011, sous le même thème. Pourquoi la réconciliation vous préoccupe-t-elle tant ?
Notre pays la Côte d’Ivoire vit une situation de déchirure de la cohésion sociale, depuis près d’une décennie voire plus. Ce contexte a débouché sur une crise postélectorale particulièrement violente et meurtrière. Aujourd’hui, il est question de rétablir la bonne entente entre les Ivoiriens, dans leur diversité. Si l’on emploie le mot rétablir, comme l’a dit, mon maître spirituel, le Cheikh Soufi Bilal, lors de sa conférence du Maouloud 2011, c’est qu’il y a eu une faille dans l’unité relationnelle, familiale, régionale ou nationale. Effectivement, il y a eu péril en Côte d’Ivoire par la faute des gens habités par les démons de l’intolérance. Aujourd’hui, il est question de sortir de la crise. Et nous sommes en phase avec ce processus, parce que la paix a une place de choix dans notre communauté. Je peux même dire sans exagérer, qu’elle est au cœur de notre philosophie spirituelle. Le slogan de la communauté Soufi, c’est la paix, le pardon, la tolérance. Sur nos drapeaux, il est écrit : « cramponnez-vous au câble d’Allah et ne soyez point divisés ». Avant la crise postélectorale, nous avons fait une caravane à l’intérieur du pays. Et la cohésion sociale était au centre de nos préoccupations. Comment cohabiter avec son frère dans sa différence ? Ce fut une interrogation que nous avons débattue. Il est dès lors, normal qu’après la crise, nous reprenions cette caravane sous le même thème d’actualité pour amener les cœurs et les esprits au pardon, au vivre ensemble. Tout bon chef religieux doit se dévouer pour la réconciliation. Quand on est avec Dieu, on rechigne à faire du mal à son prochain. On veut son bien et non, son malheur. On accepte l’autre comme soi. On ne lui souhaite que le bien. Et on s’interdit de nuire ou d’entraver à son bonheur. C’est lorsqu’on s’éloigne de Dieu, qu’on est animé par la haine, la méchanceté, le mépris de l’autre. On ne vit plus la fraternité humaine mais plutôt l’adversité. S’il n’y a pas de pardon entre nous, si on ne s’accepte pas dans nos différences qui relèvent de la volonté de Dieu, qui nous a fait naître de différentes communautés, nous allons nous fermer les portes du paradis dont la recherche nous amène, entre autres rites de dévotion, à observer le jeûne pendant le Ramadan. Il nous faut donc, amener les fidèles à la réconciliation. Mais, surtout, à se réconcilier avec Dieu qui prescrit le jeûne pour nous rapprocher de Lui et pour la rémission de nos péchés.
Quel impact peut avoir une réconciliation avec Dieu et le processus de réconciliation nationale ?
Dieu est paix et Amour. C’est pourquoi, nous exhortons à l’amour du prochain. Notre slogan est « Pureté intérieure et paix universelle » parce que, pour nous, l’homme ne peut pas évoluer sans la paix. Un cœur animé de haine, de violence, de mépris, ne peut pas parfaitement adorer le Seigneur. Une âme animée de haine et de mépris de l’autre est impure à la prière, à l’adoration de Dieu. Quand nous avons détruit entre 2007 et 2010 plus de 4000 fétiches, c’était pour créer la concorde entre les hommes. Les fétiches sont en réalité, des maléfices qui sèment l’inhumanité entre les hommes. Les esprits conduits par les fétiches n’apprécient pas l’humanité entre les hommes. On cherche à affirmer la force mystique. Et on le fait dans le mal. A ce moment-là, c’est le satan qui conduit les hommes plus promptement à faire le mal à leurs prochains, à leurs frères, à leur lancer des mauvais sorts. C’est pourquoi, le Soufi est particulièrement mobilisé dans la neutralisation des fétiches. Chaque habitant de ce pays doit se poser cette question : pourquoi la Côte d’Ivoire a-t-elle basculé dans la guerre ? Chacun a sa part de responsabilité. Et le fondement de cette responsabilité collective, c’est l’éloignement de Dieu. Nous nous sommes détestés, nous nous sommes haïs. Nous avons oublié les valeurs fondamentales divines que sont l’amour, la tolérance et le pardon. Nous avons perdu l’amour de l’être humain. Nous n’étions plus en Dieu. Quand tu n’aimes pas ton prochain, comment peux-tu aimer et prier véritablement Dieu que tu ne vois pas ? Dieu a envoyé sur terre Ses messagers, notamment le sceau des prophètes, à savoir Mohamed (SAW) pour Sa miséricorde sur les hommes. Si nous n’œuvrons pas dans ce sens, c’est que nous nous sommes éloignés de Dieu. Par cette crise, Allah nous invite à une autocritique individuelle. Nous devons tous retourner à Dieu. La réconciliation ne peut réussir sans que nous-mêmes ne nous soyons réconciliées avec Dieu.
Il y a actuellement des poursuites qui sont engagées contre des présumés auteurs des violences postélectorales. Pour vous, cela dessert-il le processus de réconciliation ?
Dans tous les camps, il y a eu des victimes. Je le disais tantôt, nous nous sommes haïs. Le résultat de cette haine collective, c’étaient les dégâts dans tous les camps. Les victimes ne sont pas d’un seul côté. C’est vrai, il y a des concitoyens qui ont fait trop de mal. Il y en aura certainement, qui seront interpellés par la justice pour répondre de leurs actes. Mais, la paix véritable passe par le pardon des offenses d’hier. C’est vrai, c’est difficile de pardonner. Mais, le pardon est divin et Dieu est du côté de ceux qui mettent en pratique Ses recommandations. C’est Lui, qui prescrit le pardon. Nous-mêmes humains pécheurs, chaque jour, nous augmentons notre capital de péché. Mais, Dieu nous accorde Son pardon. Quand Dieu, qui pardonne nos fautes et nos péchés, nous demande d’en faire autant, il faut nous exécuter. C’est le lieu pour moi, d’inviter les musulmans à libérer leurs cœurs de la haine et leurs esprits de la vengeance. Entrons dans le Ramadan 2011, le cœur sans haine et sans esprit de vengeance. L’acceptation du jeûne implique la libération de nos esprits et du cœur, de la haine, du mépris et de la méchanceté. Si tant est que nous voulons tous entrer dans toutes les grâces de ce saint mois, il faut être dans toutes les dispositions appropriées dans ce sens. Et le pardon est l’une de ces dispositions divines.
Si on vous suit bien, vous êtes pour une justice positive…
Je ne suis pas un politicien. Je suis le guide spirituel de la communauté Soufi qui proclame l’amour et le pardon. Ce faisant, mon devoir, c’est d’appeler à la tolérance et non à la vengeance, à la justice des vainqueurs. Notre communauté musulmane a particulièrement payé le plus lourd tribut de cette guerre de l’égoïsme et de la haine. Près de vingt Imams ont été assassinés et plusieurs mosquées incendiées. Mais, il faut pardonner. Il faut savoir que, Dieu va tous nous juger, tôt ou tard, pour nos actes. Ce qui est important pour moi, c’est le pardon. Il faut pardonner. J’insiste sur le pardon du lourd héritage du passé, pour avancer dans l’œuvre de reconstruction et de construction d’une nation bâtie sur l’amour du prochain, la fraternité, l’acceptation et la communication des différences. Si tous ceux qui ont alimenté cette haine, cette violence inouïe, ont fait du bien, Dieu les jugera. S’ils ont fait du mal, Dieu les jugera. Le mal qu’ils auront semé, ils en récolteront le prix.
Pensez-vous qu’un appel peut être entendu surtout que de nombreux fidèles accusent les religieux de les avoir abandonnés. Pis, de n’avoir pas dit la vérité au Président Gbagbo et que plusieurs d’entre eux l’ont accompagné dans la voie de la confiscation du pouvoir ?
Quand la crise postélectorale a éclaté, moi j’étais déjà hors du pays. J’étais au Mali, pour la préparation du Maoulid international que mon maître et père spirituel Cheick El Hadj Cheick Soufi Bilal organisait. Etant personnellement impliqué dans la mobilisation à ce rendez-vous international des Soufis en terre malienne, il était important, que j’y aille pour l’organisation pratique de ce grand rassemblement dédié à notre prophète. Pour ceux des guides qui sont concernés, je pense que c’était un retrait stratégique pour certains. Quand les ennemis de l’Islam voulaient assassiner le Prophète, Dieu l’a instruit de fuir pour se mettre à l’abri à Médine. C’était donc, un repli d’ordre sécuritaire et non une fuite. Les chefs religieux étaient pourchassés. Des éléments armés ont été mis à leur trousse. Quand on veut t’assassiner et que tu t’asseois pour attendre tes agresseurs, c’est comme du suicide. Or, dans le coran, Dieu nous enseigne que le suicide ferme les portes du paradis. Tout guide se devrait donc, de se mettre à l’abri. Mais, je reconnais que beaucoup d’entre nous, même dans notre propre communauté, n’ont pas joué leur rôle et leur leadership de manière positive et exemplaire. Ceux qui ont tenté l’aventure suicidaire du coup d’Etat électoral avaient des guides religieux musulmans et chrétiens qu’ils écoutaient. S’ils avaient joué véritablement leur rôle, s’ils avaient pensé à l’intérêt de la nation et non, à leurs intérêts individuels, s’ils n’avaient pas été cupides, s’ils avaient fait preuve de courage devant l’histoire, la Côte d’Ivoire aurait pu éviter ces milliers de morts, ce gâchis humanitaire et économique. Nous sommes des ambassadeurs de Dieu, mais beaucoup ont oublié Dieu, pour leurs propres intérêts, pour leurs ventres, là où il fallait agir, dire la vérité, imposer son leadership pour éviter cette folie meurtrière. C’est dommage. Le remords ronge plusieurs guides religieux mais, ils peuvent encore aider leur pays. Il leur appartient de prendre leur place dans le processus de réconciliation nationale. Il faut qu’ils s’engagent dans cette voie pour ressouder les Ivoiriens et les réconcilier avec les valeurs de l’amour, de la fraternité, de la cohésion malgré les différences idéologiques, religieuses, politiques et ethniques. Pour ce faire, il ne faut pas se cantonner à Abidjan. Il faut sortir et aller prêcher la réconciliation dans les contrées reculées du pays, où le venin de la xénophobie, de l’Ivoirité a été largement et profondément inoculé. Il faut rentrer dans ces villages, dans ces localités reculées pour semer la graine du pardon, de la réconciliation. C’est Dieu qui nous a sauvés de cette calamité. Il offre ainsi, à nous tous, une nouvelle opportunité pour recréer la solidarité et la fraternité entre les Ivoiriens.
Réalisé par M Tié Traoré
A la suite du giga Maouloud 2011, que vous avez organisé récemment à Port-Bouët et dont les travaux ont planché sur la réconciliation, vous venez de placer le Ramadan 2011, sous le même thème. Pourquoi la réconciliation vous préoccupe-t-elle tant ?
Notre pays la Côte d’Ivoire vit une situation de déchirure de la cohésion sociale, depuis près d’une décennie voire plus. Ce contexte a débouché sur une crise postélectorale particulièrement violente et meurtrière. Aujourd’hui, il est question de rétablir la bonne entente entre les Ivoiriens, dans leur diversité. Si l’on emploie le mot rétablir, comme l’a dit, mon maître spirituel, le Cheikh Soufi Bilal, lors de sa conférence du Maouloud 2011, c’est qu’il y a eu une faille dans l’unité relationnelle, familiale, régionale ou nationale. Effectivement, il y a eu péril en Côte d’Ivoire par la faute des gens habités par les démons de l’intolérance. Aujourd’hui, il est question de sortir de la crise. Et nous sommes en phase avec ce processus, parce que la paix a une place de choix dans notre communauté. Je peux même dire sans exagérer, qu’elle est au cœur de notre philosophie spirituelle. Le slogan de la communauté Soufi, c’est la paix, le pardon, la tolérance. Sur nos drapeaux, il est écrit : « cramponnez-vous au câble d’Allah et ne soyez point divisés ». Avant la crise postélectorale, nous avons fait une caravane à l’intérieur du pays. Et la cohésion sociale était au centre de nos préoccupations. Comment cohabiter avec son frère dans sa différence ? Ce fut une interrogation que nous avons débattue. Il est dès lors, normal qu’après la crise, nous reprenions cette caravane sous le même thème d’actualité pour amener les cœurs et les esprits au pardon, au vivre ensemble. Tout bon chef religieux doit se dévouer pour la réconciliation. Quand on est avec Dieu, on rechigne à faire du mal à son prochain. On veut son bien et non, son malheur. On accepte l’autre comme soi. On ne lui souhaite que le bien. Et on s’interdit de nuire ou d’entraver à son bonheur. C’est lorsqu’on s’éloigne de Dieu, qu’on est animé par la haine, la méchanceté, le mépris de l’autre. On ne vit plus la fraternité humaine mais plutôt l’adversité. S’il n’y a pas de pardon entre nous, si on ne s’accepte pas dans nos différences qui relèvent de la volonté de Dieu, qui nous a fait naître de différentes communautés, nous allons nous fermer les portes du paradis dont la recherche nous amène, entre autres rites de dévotion, à observer le jeûne pendant le Ramadan. Il nous faut donc, amener les fidèles à la réconciliation. Mais, surtout, à se réconcilier avec Dieu qui prescrit le jeûne pour nous rapprocher de Lui et pour la rémission de nos péchés.
Quel impact peut avoir une réconciliation avec Dieu et le processus de réconciliation nationale ?
Dieu est paix et Amour. C’est pourquoi, nous exhortons à l’amour du prochain. Notre slogan est « Pureté intérieure et paix universelle » parce que, pour nous, l’homme ne peut pas évoluer sans la paix. Un cœur animé de haine, de violence, de mépris, ne peut pas parfaitement adorer le Seigneur. Une âme animée de haine et de mépris de l’autre est impure à la prière, à l’adoration de Dieu. Quand nous avons détruit entre 2007 et 2010 plus de 4000 fétiches, c’était pour créer la concorde entre les hommes. Les fétiches sont en réalité, des maléfices qui sèment l’inhumanité entre les hommes. Les esprits conduits par les fétiches n’apprécient pas l’humanité entre les hommes. On cherche à affirmer la force mystique. Et on le fait dans le mal. A ce moment-là, c’est le satan qui conduit les hommes plus promptement à faire le mal à leurs prochains, à leurs frères, à leur lancer des mauvais sorts. C’est pourquoi, le Soufi est particulièrement mobilisé dans la neutralisation des fétiches. Chaque habitant de ce pays doit se poser cette question : pourquoi la Côte d’Ivoire a-t-elle basculé dans la guerre ? Chacun a sa part de responsabilité. Et le fondement de cette responsabilité collective, c’est l’éloignement de Dieu. Nous nous sommes détestés, nous nous sommes haïs. Nous avons oublié les valeurs fondamentales divines que sont l’amour, la tolérance et le pardon. Nous avons perdu l’amour de l’être humain. Nous n’étions plus en Dieu. Quand tu n’aimes pas ton prochain, comment peux-tu aimer et prier véritablement Dieu que tu ne vois pas ? Dieu a envoyé sur terre Ses messagers, notamment le sceau des prophètes, à savoir Mohamed (SAW) pour Sa miséricorde sur les hommes. Si nous n’œuvrons pas dans ce sens, c’est que nous nous sommes éloignés de Dieu. Par cette crise, Allah nous invite à une autocritique individuelle. Nous devons tous retourner à Dieu. La réconciliation ne peut réussir sans que nous-mêmes ne nous soyons réconciliées avec Dieu.
Il y a actuellement des poursuites qui sont engagées contre des présumés auteurs des violences postélectorales. Pour vous, cela dessert-il le processus de réconciliation ?
Dans tous les camps, il y a eu des victimes. Je le disais tantôt, nous nous sommes haïs. Le résultat de cette haine collective, c’étaient les dégâts dans tous les camps. Les victimes ne sont pas d’un seul côté. C’est vrai, il y a des concitoyens qui ont fait trop de mal. Il y en aura certainement, qui seront interpellés par la justice pour répondre de leurs actes. Mais, la paix véritable passe par le pardon des offenses d’hier. C’est vrai, c’est difficile de pardonner. Mais, le pardon est divin et Dieu est du côté de ceux qui mettent en pratique Ses recommandations. C’est Lui, qui prescrit le pardon. Nous-mêmes humains pécheurs, chaque jour, nous augmentons notre capital de péché. Mais, Dieu nous accorde Son pardon. Quand Dieu, qui pardonne nos fautes et nos péchés, nous demande d’en faire autant, il faut nous exécuter. C’est le lieu pour moi, d’inviter les musulmans à libérer leurs cœurs de la haine et leurs esprits de la vengeance. Entrons dans le Ramadan 2011, le cœur sans haine et sans esprit de vengeance. L’acceptation du jeûne implique la libération de nos esprits et du cœur, de la haine, du mépris et de la méchanceté. Si tant est que nous voulons tous entrer dans toutes les grâces de ce saint mois, il faut être dans toutes les dispositions appropriées dans ce sens. Et le pardon est l’une de ces dispositions divines.
Si on vous suit bien, vous êtes pour une justice positive…
Je ne suis pas un politicien. Je suis le guide spirituel de la communauté Soufi qui proclame l’amour et le pardon. Ce faisant, mon devoir, c’est d’appeler à la tolérance et non à la vengeance, à la justice des vainqueurs. Notre communauté musulmane a particulièrement payé le plus lourd tribut de cette guerre de l’égoïsme et de la haine. Près de vingt Imams ont été assassinés et plusieurs mosquées incendiées. Mais, il faut pardonner. Il faut savoir que, Dieu va tous nous juger, tôt ou tard, pour nos actes. Ce qui est important pour moi, c’est le pardon. Il faut pardonner. J’insiste sur le pardon du lourd héritage du passé, pour avancer dans l’œuvre de reconstruction et de construction d’une nation bâtie sur l’amour du prochain, la fraternité, l’acceptation et la communication des différences. Si tous ceux qui ont alimenté cette haine, cette violence inouïe, ont fait du bien, Dieu les jugera. S’ils ont fait du mal, Dieu les jugera. Le mal qu’ils auront semé, ils en récolteront le prix.
Pensez-vous qu’un appel peut être entendu surtout que de nombreux fidèles accusent les religieux de les avoir abandonnés. Pis, de n’avoir pas dit la vérité au Président Gbagbo et que plusieurs d’entre eux l’ont accompagné dans la voie de la confiscation du pouvoir ?
Quand la crise postélectorale a éclaté, moi j’étais déjà hors du pays. J’étais au Mali, pour la préparation du Maoulid international que mon maître et père spirituel Cheick El Hadj Cheick Soufi Bilal organisait. Etant personnellement impliqué dans la mobilisation à ce rendez-vous international des Soufis en terre malienne, il était important, que j’y aille pour l’organisation pratique de ce grand rassemblement dédié à notre prophète. Pour ceux des guides qui sont concernés, je pense que c’était un retrait stratégique pour certains. Quand les ennemis de l’Islam voulaient assassiner le Prophète, Dieu l’a instruit de fuir pour se mettre à l’abri à Médine. C’était donc, un repli d’ordre sécuritaire et non une fuite. Les chefs religieux étaient pourchassés. Des éléments armés ont été mis à leur trousse. Quand on veut t’assassiner et que tu t’asseois pour attendre tes agresseurs, c’est comme du suicide. Or, dans le coran, Dieu nous enseigne que le suicide ferme les portes du paradis. Tout guide se devrait donc, de se mettre à l’abri. Mais, je reconnais que beaucoup d’entre nous, même dans notre propre communauté, n’ont pas joué leur rôle et leur leadership de manière positive et exemplaire. Ceux qui ont tenté l’aventure suicidaire du coup d’Etat électoral avaient des guides religieux musulmans et chrétiens qu’ils écoutaient. S’ils avaient joué véritablement leur rôle, s’ils avaient pensé à l’intérêt de la nation et non, à leurs intérêts individuels, s’ils n’avaient pas été cupides, s’ils avaient fait preuve de courage devant l’histoire, la Côte d’Ivoire aurait pu éviter ces milliers de morts, ce gâchis humanitaire et économique. Nous sommes des ambassadeurs de Dieu, mais beaucoup ont oublié Dieu, pour leurs propres intérêts, pour leurs ventres, là où il fallait agir, dire la vérité, imposer son leadership pour éviter cette folie meurtrière. C’est dommage. Le remords ronge plusieurs guides religieux mais, ils peuvent encore aider leur pays. Il leur appartient de prendre leur place dans le processus de réconciliation nationale. Il faut qu’ils s’engagent dans cette voie pour ressouder les Ivoiriens et les réconcilier avec les valeurs de l’amour, de la fraternité, de la cohésion malgré les différences idéologiques, religieuses, politiques et ethniques. Pour ce faire, il ne faut pas se cantonner à Abidjan. Il faut sortir et aller prêcher la réconciliation dans les contrées reculées du pays, où le venin de la xénophobie, de l’Ivoirité a été largement et profondément inoculé. Il faut rentrer dans ces villages, dans ces localités reculées pour semer la graine du pardon, de la réconciliation. C’est Dieu qui nous a sauvés de cette calamité. Il offre ainsi, à nous tous, une nouvelle opportunité pour recréer la solidarité et la fraternité entre les Ivoiriens.
Réalisé par M Tié Traoré