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Société Publié le jeudi 11 août 2011 | Le Nouveau Réveil

Enquête / Pinasse : Les voyageurs côtoient au quotidien la mort

© Le Nouveau Réveil
Drame / Grave accident de la circulation : un bus de la Sotra plonge dans la lagune
Un bus de la sotra desservant la ligne 19 (Adjamé - Vridi) plonge dans la lagune au niveau du pont FHB, le vendredi 05 août 2011.
La pinasse, je ne la connaissais que de nom mais je ne l'ai jamais pratiquée. Je n'en voulais même pas. A cause de ce que racontent des passagers. Ils nous font peur. Mais voilà qu'un jour, ma rédaction me demande de faire une enquête sur ces bacs. Les fameuses pinasses. Du coup une énorme frayeur m'a envahi. J'ai tremblé de tout mon corps. Depuis la réunion avec mon chef jusqu'au lendemain. Mais finalement, j'ai décidé de prendre mon courage à deux (02) mains et me jeter à l'eau. C'est ainsi que le 20 juillet 2011, je me suis rendu à Treichville. Au large de la lagune Ebrié. Dans un véritable " gloglo". C'est à cet endroit que se trouvent les gares des pinasses. Il en existe deux (02). L'une, organisée en entreprise et l'autre, appartenant à des particuliers. Je choisis par hasard de commencer par la gare en face de moi. Disons l'entreprise. Je m'approche et je lis en face de moi " Ticket obligatoire pour tout le monde même pour les corps habillés". Je tique mais je ne fais pas de commentaire sur cette précision. Je fixe au contraire la demoiselle au guichet. Et lui pose des questions. Elle me fixe à son tour et me répond avec dédain. " Je ne peux rien vous dire. Adressez-vous à nos patrons ". Je ne suis pas surpris mais j'insiste parce que je veux des informations. Un passager nous écoute. Il m'a l'air intéressé. Je me tourne vers lui et je lui demande de me donner la date de création de cette gare. " Les pinasses existent depuis longtemps. Au départ, les tickets étaient à quinze(15) francs Cfa. Maintenant, il est à deux cents francs. Du moins, dans cette gare ", m'explique-t-il. La pinasse, précise mon interlocuteur, fait le trajet Treichville-Plateau-Abobodoumé. Je décide de faire le parcours.

La traversée
Pour monter, il faut d'abord payer le ticket. Ce que je fais. La demoiselle me regarde droit dans les yeux et fait un sourire. Sans me dire plus. Je la comprends. Mais je continue mon aventure. Appareil photo en main, je prends quelques images en attendant que la pinasse fasse son plein. Le conducteur, contre toute attente, me fait signe de monter. Alors que nous n'étions qu'une vingtaine sur au moins deux cents (200) passagers que peut embarquer le bateau. Il était 8 heures 53 minutes. Je demande à mon voisin les raisons de ce départ précipité. " Ici, on ne fait pas de rang. Toutes les cinq (05) minutes, une pinasse est là ", me confie-t-il. Et poursuit en ces termes " Je suis prêt à vous donner des informations mais à condition que je reste dans l'anonymat. Vous savez, la pinasse est proche de nous que le bateau bus de la Sotra. Elle va pratiquement partout. A Mossikro, Abobo-Doumé, à Locodjro alors que les destinations de la Sotra sont limitées. La Sotra n'est pas proche des clients. Il faut qu'elle élargisse son réseau d'exploitation .Et puis, les quais sont ouverts à six (06) heures alors qu'au niveau des pinasses c'est à 04 heures 30 minutes. La pinasse nous arrange. Depuis 1998, je ne fais que l'emprunter ". Mon voisin, durant la traversée, n'a fait que faire l'éloge des pinasses jusqu'à l'arrivée à 9 heures 08 minutes. Soit seize (16) minutes pour le trajet dans ce bateau avec un confort acceptable. Au retour, je décide d'emprunter la pinasse des particuliers. Je saute dans un taxi pour Abobo-Doumé. Une fois dans ce quartier, je me rends à la gare des pinasses. Là, le spectacle est effrayant. Des bateaux de toutes sortes y sont stationnés.

La sécurité
Quand j'ai vu l'état des pinasses, j'ai commencé à trembler de tout mon corps. Ce sont des bacs artisanaux. Construits pour la plupart en bois. De vieilles pinasses. Elles sont dépourvues de tout matériel de sécurité. Elles n'ont même pas d'outils de sauvetage. La gare, n'en parle pas. Elle est bouillante. Il y a du monde. On ne sait pas qui fait quoi. C'est dans cette atmosphère que je me suis retrouvé. Tout seul. Je me sentais un peu perdu. Mais à la fin, avec une petite dose de courage, je m'approche d'un des travailleurs pour lui poser ma préoccupation. Il me ramène à son patron que" j'attaque" par la suite. Ce dernier me ramène à son tour à un autre patron. " Je ne peux pas parler. Si je prends le risque, je serai sanctionné ", me dit-il. Mais qui peut me donner les informations ? Il me répond que seul le grand patron est habilité à me parler. Mais où se trouve-t-il ? Mon interlocuteur me fait savoir que ce dernier est à la mairie pour une séance de travail. " On dirait que vous ne payez pas les taxes ? " lui demandais-je. " Oui, mais maintenant, on va le faire " me rassure-t-il. Et vos pinasses, il semble que parfois elles tombent en panne en pleine lagune ? L'homme me fait un sourire au coin et se met à table " Mais on arrive à la réparer ", tente-t-il de me convaincre. Sans savoir qu'auparavant, un passager habitué de ces bateaux, m'avait raconté son calvaire lorsque le moteur de la pinasse qu'il avait emprunté les avait lâchés en plein voyage. Il a fallu plusieurs tentatives pour rallumer la machine. Depuis, ce voyageur m'a confié qu'il a " divorcé " d'avec les pinasses. Bref, après cette conversation je paye mon titre de transport. Il est de 150 francs Cfa. On ne me donne pas de ticket. Je prends place cependant dans la pinasse. Il est plein à craquer comme un œuf. On est entassé à l'intérieur comme des sardines. "Une pinasse n’est jamais pleine", plaisante un passager pour dénoncer la surcharge de l’engin. On continue le trajet. Dans le bateau, se trouve le moteur avec un bruit assourdissant qui agresse les oreilles. Mon cœur bat. Très vite. Mais je suis déjà à l'intérieur de la " caisse". Il est trop tard de renoncer au voyage. Les marchepieds en bois sont par endroits fatigués. Les passagers eux, ne s'en occupent pas. L'essentiel c'est d'arriver. La pinasse démarre. Elle tangue. Quelques gouttes d'eau nous mouillent. Un silence plat règne à l'intérieur. Je regarde autour de moi. Personne ne parle. A côté, je vois un passager qui lit sa Bible. Je pousse un ouf de soulagement. " Dieu est là " me disais-je intérieurement. L'engin poursuit son trajet. Passe par le quai de la gare Sotra (bateau bus Abobo-Doumé). Aucun bateau n'est accosté. Les nombreux passagers continuent d'attendre. Nous, nous continuons notre voyage. Jusqu'au Plateau.

La sérénité
Il faut manger du lion pour prendre parfois la pinasse. Mais le danger auquel cette machine expose les passagers ne les inquiète aucunement. Bien au contraire, c'est avec joie et enthousiasme qu'ils empruntent la pinasse. " On ne craint rien. Depuis longtemps nous voyageons à bord des pinasses. Elles nous arrangent ", a fait savoir M. Kouassi Alexis que j'ai abordé à sa descente d'une pinasse. Mais quand j'ai vu l'état dans lequel se trouvent ces bacs et la sérénité des passagers, je suis tombé des nues. Surtout qu'aucun reproche n'est fait aux propriétaires. C'est plutôt l'arrivée qui compte. La preuve, ils sont nombreux, ces jours-ci, à envahir tous les jours les gares de ces bateaux de fortune malgré le danger.

Concurrence
Sur la lagune, les bateaux de la Sotra ne sont pas les seuls à circuler. Il y a au contraire plusieurs autres bacs. Les pinasses particulièrement. Et ils sont les plus nombreux. Dans la lagune, on ne voit que ces engins. Dans tous les sens. Quand les bateaux bus, eux, sont moins fréquents. Pourtant ce sont ces canots qui payent les impôts, les taxes communales et autres. Un constat que j'ai fait quand j'ai décidé de mettre fin à mon aventure au Plateau aux environs de 11 heures. Sain et sauf. Heureusement. Dje km
cathycelio@yahoo.fr
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