Des litiges fonciers, on en connait en Côte d’Ivoire depuis des décennies. Mais celui de Kamabrou dans la sous-préfecture de Rubino (département d’Agboville) risque de prendre une autre tournure si rien n’est fait. Et pour cause. Sur invitation de la chefferie, nous nous sommes rendu le jeudi 11 août 2011 dans le village Kamabrou (plus de 30 km) d’Agboville, pour en savoir plus sur un litige foncier qui a viré sur le terrain politique. Le chef de Kamabrou, Germain Dédou Brou et sa notabilité, ont décidé de donner de la voix au cours d’une réunion tenue dans le village, après que le chef du grand campement de Namouédan, Niamien Kouamé, ait porté des accusations dans la presse contre les autochtones Abbey, en l’occurrence les propriétaires terriens. « Il était important qu’on fasse un démenti sur ce qui a été dit dans les journaux. Nous avons été éclaboussés, ce sont des propos qui nous ont indignés. Il n’y a jamais eu de problème avec les Baoulé », a réagi Jean-Omer Assoko Doffou, le secrétaire chargé de mission du chef du village de Rubino et membre du comité de crise postélectorale du conseil des chefs du département d’Agboville, aux accusations portées contre les autochtones. En effet, deux confrères ivoiriens ont rapporté courant juillet 2011 que les autochtones Abbey de Kamabrou voulaient exproprier les allochtones Baoulé, installés dans les forêts situées entre les localités d’Ananguié, Kamabrou et Allani, de leurs terres pour des raisons politiques. Ainsi dans la presse, le chef Niamien Kouamé de Namouédan, a accusé les autochtones de vouloir les spolier parce qu’ils considèrent qu’ils ont voté contre l’ancien président, Laurent Gbagbo, contrairement au message que leur avait lancé l’ancien directeur général de la SOTRA et ancien ministre de l’Industrie et du développement du secteur privé, Philippe Attey. « Je suis commissaire électoral du RHDP ici. Il y a des Abbey qui ont voté pour Alassane Ouattara », a-t-il soutenu, brandissant une carte de militant du PDCI. Le geste sera suivi automatiquement par le chef du village de Kamabrou et de plusieurs propriétaires terriens. « Je suis le petit frère de Philippe Attey. Il est en fuite actuellement ! Ce ne sont pas les Baoulé qui sont avec nous depuis 1937 qu’on va chasser. Je crois bien que ce sont plutôt eux qui veulent nous chasser », a poursuivi M. Assoko Doffou, assurant que le peuple Abbey s’est inscrit comme tous les Ivoiriens dans le processus de réconciliation nationale. Il s’est interrogé, comme plusieurs participants à la réunion, sur les intentions du chef de Namouédan.
Le PV qui change tout
Qui les avait accusés de vouloir détruire l’école de Zoubrou situé dans son grand campement et des plantations. De même, il avait affirmé dans la presse que ce serait plus de 5.000 personnes qui se retrouveraient sans rien s’ils étaient chassés. A en croire ces autochtones, la communauté Baoulé tente de « politiser » l’affaire pour avoir gain de cause dans le litige qui les oppose. Ils ont assuré que personne n’a été chassé des plantations et que tout ce qui a été dit sur eux ne reflétait pas la réalité. M. Assoko Doffou a brandi pour convaincre, un document qui donne les conclusions du litige foncier en question. Ce document est un procès verbal (PV) d’une réunion tenue en 2007 entre le chef de Namouédan, certains planteurs allochtones et allogènes et les propriétaires terriens. En présence du commandant de la brigade de gendarmerie de Rubino, Docteur commandant Sidiki Aboubacar Diallo, et des autorités préfectorales, une commission dite de conciliation a été mise en place pour trancher le conflit opposant les familles Baudou représentée par Roger Baudou et Offoria, aux habitants de Namouédan, représentés par leur chef, Niamien Kouamé et Yéo Navigué. La commission de conciliation, assistée du Tribunal coutumier de Kamabrou, a confirmé Roger Baudou et René Offoria propriétaires de leurs domaines respectifs, recommandé aux familles Baudou et Offoria et à la population de Kamabrou, la cession à l’Etat et au profit des villageois de Zoubrou-Namouédan de la superficie du site du village et son extension. Le tribunal a également condamné les défendeurs et certains villageois de Namouédan pour leurs tentatives de spoliation mais a confirmé que les plantations restent toujours aux mains de leurs créateurs. Sauf que le reste de forêt et de jachère doivent être restitués à Roger Baudou et à René Offoria. Sur cette base, les propriétaires terriens ont cédé des parcelles de terre à des opérateurs économiques, notamment à un certain Koblavy, dans la forêt de Namouédan. Il s’en est suivi plusieurs incidents jusqu’à ce que des éléments des Forces républicaines soient requis pour mettre de l’ordre. Plusieurs jeunes de Namouédan auraient été bastonnés. Après leurs explications, nous décidons de nous rendre dans ce village, situé à plusieurs km de Kamabrou. Notre arrivée dans le village coïncide avec celle du chef Niamien Kouamé, de retour du champ. Il arborait un tee-shirt de campagne du candidat Laurent Gbagbo et avait l’air fatigué. Il s’assoie dans une chaise blanche et demande les nouvelles. Lorsqu’il est informé de l’objet de notre présence dans son village, le chef Niamien Kouamé se braque : « Je suis seul ici. Je ne peux pas en dire plus. Mes collaborateurs sont encore en brousse ». Il argue que son tuteur, Roger Baudou, n’est pas présent et qu’il lui sera difficile de parler. Toutefois, il affirme qu’après une audience au tribunal d’Agboville, une cinquantaine d’ha de terre lui aurait été retiré. « Koblavy a pris la parcelle sans chercher à nous voir. On est plus de 5.000 personnes. Tous ces enfants vont partir où ? Moi je suis là depuis 1962. Les gens ont pris plus de 100 ha maintenant, c’est pourquoi on dit qu’on veut nous chasser », a-t-il déclaré sans plus de détails. En tout cas, à Kamabrou, les tuteurs des allochtones Baoulé de Namouédan estiment que leurs hôtes ont fait preuve « d’ingratitude ». A les entendre, ils voulaient simplement « rafraichir » leurs parcelles et les mettre aussi en valeur.
Hervé KPODION
(Envoyé spécial)
Le PV qui change tout
Qui les avait accusés de vouloir détruire l’école de Zoubrou situé dans son grand campement et des plantations. De même, il avait affirmé dans la presse que ce serait plus de 5.000 personnes qui se retrouveraient sans rien s’ils étaient chassés. A en croire ces autochtones, la communauté Baoulé tente de « politiser » l’affaire pour avoir gain de cause dans le litige qui les oppose. Ils ont assuré que personne n’a été chassé des plantations et que tout ce qui a été dit sur eux ne reflétait pas la réalité. M. Assoko Doffou a brandi pour convaincre, un document qui donne les conclusions du litige foncier en question. Ce document est un procès verbal (PV) d’une réunion tenue en 2007 entre le chef de Namouédan, certains planteurs allochtones et allogènes et les propriétaires terriens. En présence du commandant de la brigade de gendarmerie de Rubino, Docteur commandant Sidiki Aboubacar Diallo, et des autorités préfectorales, une commission dite de conciliation a été mise en place pour trancher le conflit opposant les familles Baudou représentée par Roger Baudou et Offoria, aux habitants de Namouédan, représentés par leur chef, Niamien Kouamé et Yéo Navigué. La commission de conciliation, assistée du Tribunal coutumier de Kamabrou, a confirmé Roger Baudou et René Offoria propriétaires de leurs domaines respectifs, recommandé aux familles Baudou et Offoria et à la population de Kamabrou, la cession à l’Etat et au profit des villageois de Zoubrou-Namouédan de la superficie du site du village et son extension. Le tribunal a également condamné les défendeurs et certains villageois de Namouédan pour leurs tentatives de spoliation mais a confirmé que les plantations restent toujours aux mains de leurs créateurs. Sauf que le reste de forêt et de jachère doivent être restitués à Roger Baudou et à René Offoria. Sur cette base, les propriétaires terriens ont cédé des parcelles de terre à des opérateurs économiques, notamment à un certain Koblavy, dans la forêt de Namouédan. Il s’en est suivi plusieurs incidents jusqu’à ce que des éléments des Forces républicaines soient requis pour mettre de l’ordre. Plusieurs jeunes de Namouédan auraient été bastonnés. Après leurs explications, nous décidons de nous rendre dans ce village, situé à plusieurs km de Kamabrou. Notre arrivée dans le village coïncide avec celle du chef Niamien Kouamé, de retour du champ. Il arborait un tee-shirt de campagne du candidat Laurent Gbagbo et avait l’air fatigué. Il s’assoie dans une chaise blanche et demande les nouvelles. Lorsqu’il est informé de l’objet de notre présence dans son village, le chef Niamien Kouamé se braque : « Je suis seul ici. Je ne peux pas en dire plus. Mes collaborateurs sont encore en brousse ». Il argue que son tuteur, Roger Baudou, n’est pas présent et qu’il lui sera difficile de parler. Toutefois, il affirme qu’après une audience au tribunal d’Agboville, une cinquantaine d’ha de terre lui aurait été retiré. « Koblavy a pris la parcelle sans chercher à nous voir. On est plus de 5.000 personnes. Tous ces enfants vont partir où ? Moi je suis là depuis 1962. Les gens ont pris plus de 100 ha maintenant, c’est pourquoi on dit qu’on veut nous chasser », a-t-il déclaré sans plus de détails. En tout cas, à Kamabrou, les tuteurs des allochtones Baoulé de Namouédan estiment que leurs hôtes ont fait preuve « d’ingratitude ». A les entendre, ils voulaient simplement « rafraichir » leurs parcelles et les mettre aussi en valeur.
Hervé KPODION
(Envoyé spécial)