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Art et Culture Publié le samedi 3 septembre 2011 | Le Mandat

Interview/Tapsoba Joseph dit Chocho (Comédien burkinabé) : “Je suis déçu du cinéma burkinabé”

Tapsoba Joseph alias Chocho est sans doute l’un des comédiens les plus aimés du public burkinabè. Juriste de formation, titulaire d’une maîtrise en Droit, il a décidé de faire carrière dans le domaine du cinéma et du théâtre. Une carrière qu’il a embrassée depuis son jeune âge et dans laquelle il représente aujourd’hui une icône. Les films dans lesquels il a joué se comptent par dizaines. ‘‘Commissariat de Tampy’’, ‘‘Série noire à Koulbi’’, ‘‘Sam le Caïd’’, ‘‘Affaires publiques’’, la liste est loin d’être exhaustive. Mais, il dit être déçu du cinéma burkinabé. Dans cette interview, l’artiste s’est dévoilé.

Comment êtes-vous arrivé au cinéma ?
C’est le cinéma qui est venu me trouver puisqu’avant de faire le cinéma, je faisais du théâtre. Je suis arrivé au théâtre dès l’âge de cinq ans. Tous mes frères en faisaient. Ils étaient dans les mouvements catholiques tels que le scoutisme et j’en profitais. Egalement, dans le quartier où j’habitais, à savoir Samandin, il y avait des groupes de théâtre auprès desquels j’ai beaucoup appris. Donc, c’est depuis mon jeune âge que j’ai été piqué par le virus du théâtre et ce virus est resté en moi. Même pendant mes études, je continuais à faire du théâtre.

Pourquoi le surnom Chocho ?
Ce nom, on me l’a donné lors du tournage de la série Commissariat de Tampy. Quand une série passe et que tout le monde apprécie, on vous colle le nom sous lequel vous avez joué dans la série.

Vous dites avoir commencé le théâtre depuis votre jeune âge. Et le cinéma alors ?
J’ai commencé à faire le cinéma depuis 2000. Mais c’est en 2004 que j’ai commencé à être célèbre en jouant des rôles importants. Et depuis, j’ai joué dans beaucoup de films à l’intérieur comme à l’extérieur du pays.

Parmi les films dans lesquels vous avez joué, quel est celui qui vous a le plus marqué ?
C’est une question difficile à répondre parce que tous les films dans lesquels j’ai pu jouer, m’ont marqué. Mais pour vous répondre franchement, je dirais que pendant les tournages, c’est le film ‘‘Série noire à Koulbi’’. Dans ce film, j’ai vraiment bien travaillé pour défoncer le pied.

Vous participiez récemment au tournage du le film ‘‘Affaires publiques’’.. Mais depuis peu, il a été interrompu. Quelle explication donnez-vous à cette interruption?
C’est difficile à dire. Mais il me semble qu’il y a eu un problème entre la production et le monteur. Il paraît que le monteur a bloqué quelques cassettes prétextant que la production lui doit de l’argent. Je crois que c’est avec la direction de la RTB que vous pourrez avoir toutes les informations. Il semble que l’affaire est en justice. Si tout se passe bien, nous allons reprendre le tournage bientôt.

Depuis un moment, l’on voit beaucoup de personnes se tourner vers la comédie, le cinéma, le théâtre… Au regard de cela, peut-on dire que le 7ème art nourrit son homme ?
Il ne faut pas qu’on se trompe. Au Burkina Faso, l’art ne nourrit pas son homme. Ce n’est pas seulement dans la comédie, mais également dans les autres domaines artistiques. La raison est toute simple. Nous ne sommes pas soutenus par les autorités et en plus, il n’y a pas assez de producteurs au Burkina. Vous pouvez par exemple faire un film et attendre encore une année avant de faire un autre. Pensez-vous qu’à ce rythme, on peut vraiment se nourrir ? Mais nous sommes en train de nous battre pour changer les choses.

Quelle lecture faites-vous du cinéma burkinabè ?
Je suis déçu du cinéma burkinabè parce qu’il n’y a pas de producteur. C’est le réalisateur qui est producteur, distributeur et scénariste. Comment une seule personne peut-elle jouer quatre rôles à la fois ? Parfois, il est même comédien. Si bien que notre cinéma est en train de prendre du recul. Si vous prenez un peu nos films, vous vous rendrez compte que ce sont des plans fixes et cela détruit la qualité artistique du film. Egalement, les réalisateurs ne prennent pas le temps de remettre le scénario aux acteurs pour qu’ils puissent se préparer. Très souvent, c’est à la veille du tournage qu’on vous tend le scénario. Comment peut-on bien incarner un rôle dans ces conditions ? Actuellement, le cinéma burkinabè, c’est du "coupé-collé". On ne peut pas évoluer dans ces conditions.

Les acteurs du cinéma reçoivent-ils la totalité de leurs primes après leurs différentes prestations ?
Oui, mais au compte-gouttes. Vous pouvez signer par exemple un contrat de 500 000 francs Cfa pour un film et le réalisateur va vous donner 50 000, 25 000, souvent 10 000, jusqu’à ce qu’il finisse de vous rembourser. Et ça, c’est parce que vous êtes vigilant. Sinon, vous pouvez faire une année avant d’avoir votre dû. Cela prouve qu’on ne nous respecte pas.

Des projets ?
Je suis en train de construire un mini centre culturel dans le secteur 30, du Burkina Faso. Ceci, pour permettre aux artistes d’avoir un espace où apprendre à mieux s’exprimer. Cela s’inscrit également dans le cadre de la décentralisation, vu que tous les centres sont concentrés au centre-ville. C’est un petit complexe avec une salle de spectacle d’au moins 100 places, une petite bibliothèque et un espace pour enfants. J’ai loué deux cours pour faire ce centre.

Un appel à lancer
Le message que je formule à l'endroit de mes fans, c’est de leur demander d’être notre porte parole auprès des autres. Il leur appartient de nous valoriser. Il faut qu'ils s'impliquent davantage pour le succès de l'artiste burkinabé. Je souhaite que les cinéphiles et tous les Burkinabè, en général, consomment ce que nous produisons et que l'Etat accompagne l'artiste à travers la mise en place d'une structure pouvant faciliter l'accès aux finances. Aujourd'hui, tant que vous n'êtes pas connu ou que vous ne connaissez pas le réseau, vous ne pouvez pas avoir de financement.

Réalisée par EUPHRATE DJAKO, via le net
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