Nonobstant les garanties matérielles liées à l’organisation des prochaines législatives, le scrutin pourrait pâtir d’une faible participation des électeurs.
Tout ne sera pas au poil dans l’organisation des prochaines élections législatives. En dépit de l’assurance donnée par la Commission électorale indépendante (Cei) quant aux garanties matérielles dans l’organisation du scrutin législatif, la Côte d’Ivoire ne pourra pas rééditer la performance enregistrée lors de la présidentielle de la fin de l’année 2010. Selon toute logique, les électeurs ne se bousculeront pas devant les bureaux de vote, le dimanche 11 décembre prochain. «Cela ne fait l’objet d’aucun doute que le taux d’abstention sera élevé lors des prochaines élections législatives», est persuadé un acteur de la société civile. De l’avis d’experts en questions électorales, plusieurs facteurs expliquent, par avance, cette faible participation des Ivoiriens à l’élection de leurs représentants au parlement. Au nombre de ces facteurs, font noter nos sources, il y a les conséquences des affrontements liés à la crise post-électorale. «La crise a occasionné beaucoup de décès et provoqué le déplacement de milliers de personnes encore sur les sites d’accueil. Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner quand on nous annoncera que le taux de participation a été faible », analyse Jean Bosson, chef de la Mission d’observation électorale de la Convention de la société civile ivoirienne (Mo-csci). « Les gens s’étant rendus compte que leur participation à la présidentielle a fini par déboucher sur une situation chaotique, ils peuvent valablement se demander si leur vote ne va pas déboucher sur d’autres palabres », apprend le politologue, Geoffroy Julien Kouao. Ces observations sont d’ailleurs partagées par de hauts responsables de la Commission électorale indépendante (Cei), l’organe qui pilote l’organisation du scrutin législatif. Toujours selon les explications de l’expert en questions électorales de la Csci, le climat de méfiance entre le pouvoir et l’opposition, en l’occurrence le Front populaire ivoirien (Fpi), n’est pas fait pour arranger les choses. « A partir du moment où un groupe ne se reconnaît pas dans ce qui est entrepris, il est clair qu’il ne peut pas demander à ses mandataires d’y prendre part», croit encore savoir, pour sa part, Geoffroy Julien Kouao.
Mais, si l’on en croit l’argumentaire de Jean Bosson autour de l’abstention, le facteur qui favorisera beaucoup plus, le ‘’boycott’’ du scrutin législatif risque d’être les palabres au sein des groupes politiques. « Dès lors que le mécanisme de désignation des candidats parrainés par les partis est sujet à contestations à l’intérieur de ces formations politiques, il y a fort à parier que ceux qui ne se reconnaissent pas dans le candidat désigné pourraient être tentés par l’abstention », pense notre interlocuteur. Son observation est d’autant plus plausible qu’au lendemain de la désignation des candidats des partis membres du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), les recalés de cette coalition ont clairement menacé de battre campagne soit pour le vote-sanction, soit pour l’abstention. Les ‘’frustrés’’ qui ont proféré ce genre de menaces proviennent en grande majorité du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda) et du Rassemblement des républicains (Rdr).
Autres facteurs, autres incidences. Selon un haut-cadre de la Cei, personne ne se doute que les 80% de participation enregistrés lors de la présidentielle ne seront pas atteints, à cause de l’enjeu même du scrutin législatif. « A la différence de l’élection présidentielle qui a un enjeu national, l’enjeu de l’élection des députés est local. Et, compte tenu du fait que les électeurs ne peuvent pas changer de circonscription pour choisir le candidat de leur choix, le risque d’abstention est grand quand les électeurs ne se retrouvent pas dans les arguments développés par ceux qui postulent dans leur localité », fait remarquer un responsable de la Cei. Cet avis est également partagé par Julien Kouao qui pense que le manque d’enjeu autour des législatives découle surtout du régime présidentialiste adopté par la Côte d’Ivoire. « Dans ce système, le président de la République apparaît comme la clé de voûte de toutes les institutions. Dès lors que ce poste-clé est pourvu, les Ivoiriens ne voient plus grand intérêt à prendre part à une élection de député d’autant plus que ni le président de la République, ni le chef du gouvernement ne sont aucunément responsables devant le parlement», renchérit M. Kouao, persuadé que les anciens députés n’ont rien fait pour rehausser leur image auprès de l’opinion. Mais, comme pour en rajouter au contexte défavorable à la participation des électeurs, le scrutin législatif est prévu le 11 décembre, c’est-à-dire à une période où, en général, les Ivoiriens ont le cœur à la fête. «La plupart des électeurs qui n’ont pu fêter la fin d’année 2010 sont-ils prêts à laisser passer l’occasion de faire la fête ? Quand on sait qu’en période de fête, les Ivoiriens partent en voyage, le risque que plusieurs personnes ne puissent pas voter existe réellement», avertit Dr Kouao.
Du manque de légitimité des députés
C’est sans doute pour cette raison que l’organe électoral a décidé de s’engager à fond dans la sensibilisation des électeurs. Hier, cette phase de sensibilisation a atteint son rythme de croisière avec la rencontre que la Cei a eue avec le corps préfectoral à Yamoussoukro. Selon toute évidence, l’institution dirigée par Youssouf Bakayoko ne pouvait pas rester les bras croisés face à la menace de l’abstention qui plane sur les législatives du 11 décembre. Car, c’est la légitimité même des prochains députés qui serait mise en doute si la participation des électeurs n’est pas élevée. « Même si ce sont deux électeurs qui se déplacent, l’élection est valide. Seulement, quelle légitimité aura le député élu par deux électeurs sur mille ? », s’est interrogé Dr Kouao. La Cei est donc contrainte de mettre de l’entrain dans sa campagne de sensibilisation puisqu’une abstention-record aux législatives équivaudrait à une sanction du peuple contre l’organisation de ce scrutin. Or, l’organe électoral, autrefois traversé par un clivage important, a plus que besoin de redorer son blason à travers l’organisation d’élections transparentes, justes, sans aucune contestation.
Marc Dossa
Tout ne sera pas au poil dans l’organisation des prochaines élections législatives. En dépit de l’assurance donnée par la Commission électorale indépendante (Cei) quant aux garanties matérielles dans l’organisation du scrutin législatif, la Côte d’Ivoire ne pourra pas rééditer la performance enregistrée lors de la présidentielle de la fin de l’année 2010. Selon toute logique, les électeurs ne se bousculeront pas devant les bureaux de vote, le dimanche 11 décembre prochain. «Cela ne fait l’objet d’aucun doute que le taux d’abstention sera élevé lors des prochaines élections législatives», est persuadé un acteur de la société civile. De l’avis d’experts en questions électorales, plusieurs facteurs expliquent, par avance, cette faible participation des Ivoiriens à l’élection de leurs représentants au parlement. Au nombre de ces facteurs, font noter nos sources, il y a les conséquences des affrontements liés à la crise post-électorale. «La crise a occasionné beaucoup de décès et provoqué le déplacement de milliers de personnes encore sur les sites d’accueil. Dans ces conditions, il ne faut pas s’étonner quand on nous annoncera que le taux de participation a été faible », analyse Jean Bosson, chef de la Mission d’observation électorale de la Convention de la société civile ivoirienne (Mo-csci). « Les gens s’étant rendus compte que leur participation à la présidentielle a fini par déboucher sur une situation chaotique, ils peuvent valablement se demander si leur vote ne va pas déboucher sur d’autres palabres », apprend le politologue, Geoffroy Julien Kouao. Ces observations sont d’ailleurs partagées par de hauts responsables de la Commission électorale indépendante (Cei), l’organe qui pilote l’organisation du scrutin législatif. Toujours selon les explications de l’expert en questions électorales de la Csci, le climat de méfiance entre le pouvoir et l’opposition, en l’occurrence le Front populaire ivoirien (Fpi), n’est pas fait pour arranger les choses. « A partir du moment où un groupe ne se reconnaît pas dans ce qui est entrepris, il est clair qu’il ne peut pas demander à ses mandataires d’y prendre part», croit encore savoir, pour sa part, Geoffroy Julien Kouao.
Mais, si l’on en croit l’argumentaire de Jean Bosson autour de l’abstention, le facteur qui favorisera beaucoup plus, le ‘’boycott’’ du scrutin législatif risque d’être les palabres au sein des groupes politiques. « Dès lors que le mécanisme de désignation des candidats parrainés par les partis est sujet à contestations à l’intérieur de ces formations politiques, il y a fort à parier que ceux qui ne se reconnaissent pas dans le candidat désigné pourraient être tentés par l’abstention », pense notre interlocuteur. Son observation est d’autant plus plausible qu’au lendemain de la désignation des candidats des partis membres du Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp), les recalés de cette coalition ont clairement menacé de battre campagne soit pour le vote-sanction, soit pour l’abstention. Les ‘’frustrés’’ qui ont proféré ce genre de menaces proviennent en grande majorité du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci-Rda) et du Rassemblement des républicains (Rdr).
Autres facteurs, autres incidences. Selon un haut-cadre de la Cei, personne ne se doute que les 80% de participation enregistrés lors de la présidentielle ne seront pas atteints, à cause de l’enjeu même du scrutin législatif. « A la différence de l’élection présidentielle qui a un enjeu national, l’enjeu de l’élection des députés est local. Et, compte tenu du fait que les électeurs ne peuvent pas changer de circonscription pour choisir le candidat de leur choix, le risque d’abstention est grand quand les électeurs ne se retrouvent pas dans les arguments développés par ceux qui postulent dans leur localité », fait remarquer un responsable de la Cei. Cet avis est également partagé par Julien Kouao qui pense que le manque d’enjeu autour des législatives découle surtout du régime présidentialiste adopté par la Côte d’Ivoire. « Dans ce système, le président de la République apparaît comme la clé de voûte de toutes les institutions. Dès lors que ce poste-clé est pourvu, les Ivoiriens ne voient plus grand intérêt à prendre part à une élection de député d’autant plus que ni le président de la République, ni le chef du gouvernement ne sont aucunément responsables devant le parlement», renchérit M. Kouao, persuadé que les anciens députés n’ont rien fait pour rehausser leur image auprès de l’opinion. Mais, comme pour en rajouter au contexte défavorable à la participation des électeurs, le scrutin législatif est prévu le 11 décembre, c’est-à-dire à une période où, en général, les Ivoiriens ont le cœur à la fête. «La plupart des électeurs qui n’ont pu fêter la fin d’année 2010 sont-ils prêts à laisser passer l’occasion de faire la fête ? Quand on sait qu’en période de fête, les Ivoiriens partent en voyage, le risque que plusieurs personnes ne puissent pas voter existe réellement», avertit Dr Kouao.
Du manque de légitimité des députés
C’est sans doute pour cette raison que l’organe électoral a décidé de s’engager à fond dans la sensibilisation des électeurs. Hier, cette phase de sensibilisation a atteint son rythme de croisière avec la rencontre que la Cei a eue avec le corps préfectoral à Yamoussoukro. Selon toute évidence, l’institution dirigée par Youssouf Bakayoko ne pouvait pas rester les bras croisés face à la menace de l’abstention qui plane sur les législatives du 11 décembre. Car, c’est la légitimité même des prochains députés qui serait mise en doute si la participation des électeurs n’est pas élevée. « Même si ce sont deux électeurs qui se déplacent, l’élection est valide. Seulement, quelle légitimité aura le député élu par deux électeurs sur mille ? », s’est interrogé Dr Kouao. La Cei est donc contrainte de mettre de l’entrain dans sa campagne de sensibilisation puisqu’une abstention-record aux législatives équivaudrait à une sanction du peuple contre l’organisation de ce scrutin. Or, l’organe électoral, autrefois traversé par un clivage important, a plus que besoin de redorer son blason à travers l’organisation d’élections transparentes, justes, sans aucune contestation.
Marc Dossa