Il fallait avoir l’esprit particulièrement distrait pour ne pas être saisi de vertige, face à la première page du quotidien du FPI, qui affichait samedi dernier, veille des élections législatives : « Mascarade du 11 décembre : Démocratie, que ton âme repose en paix ». Une page noire, illustrée par un cercueil symbolisant la mise à mort de la démocratie dans notre pays. Le tournis gagne vite l’esprit. En effet, pourquoi un tel excès au moment où notre pays, la Côte d’Ivoire, tente de franchir l’une des dernières marches de la sortie de crise dont il est admis qu’elle était due, en grande partie, au manque de légitimité de nos institutions ? Ainsi donc, pour le FPI, la démocratie n’existerait plus en Côte d’Ivoire. Tout simplement parce qu’un parti politique a décidé, en toute souveraineté, de ne pas prendre part aux élections législatives. Cette position du parti des Refondateurs soulève des observations : d’abord au plan idéologique, on se rend compte que le parti de Laurent Gbagbo n’a pas tiré des leçons de l’histoire récente. Il croit que la Côte d’Ivoire lui appartient et que rien, dans ce pays, ne peut se faire sans lui. On se souvient d’ailleurs de ses slogans de campagne. Lui, « l’Ivoirien 100% » et « candidat des Ivoiriens contre les candidats de l’étranger ». Après avoir vainement tenté de voler la victoire du RHDP, le parti de Laurent Gbagbo a été battu et il devrait se rendre compte qu’il est totalement isolé, dans la scène politique nationale et internationale. L’option qu’il a prise de ne pas participer aux scrutins pourrait lui être fatale.
La deuxième observation se situe au plan de la stratégie politique. En appelant au boycott du scrutin d’hier dimanche 11 décembre, les partisans de Laurent Gbagbo croient pouvoir bénéficier des conséquences d’une faible participation. Si l’abstention semble traduire une crise de la représentation et peut poser la question de la légitimité du pouvoir politique élu avec une faible participation, il faut surtout se demander que peut gagner un parti politique, dans une abstention à ces élections législatives à laquelle tous les observateurs s’attendaient, peu ou prou. L’abstention, en général, résulte soit d’un désintérêt total pour la vie publique, soit d’un choix politique actif « consistant à ne pas se prononcer afin de montrer son désaccord sur les conditions d’organisation du vote ». Si les Ivoiriens se sont, en majorité, abstenus de participer aux votes, cela est, sans doute, du au manque d’enjeu réel du fait de la non-participation du FPI mais surtout à la hantise de la violence électorale tant redoutée et qui a marqué le premier trimestre de cette année 2011.
Dans tous les cas, le plus important était de tenir ces élections pour sortir le pays de l’exception. La Côte d’Ivoire aura son Assemblée nationale. Elle sera démocratique, légale et légitime pour plusieurs raisons. Tout le monde se souvient que le gouvernement ivoirien, par l’entremise du ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur, a tout mis en œuvre pour convaincre le parti de Laurent Gbagbo de mettre en avant l’intérêt supérieur de la Nation face à l’instinct de survie de certains de ses leaders. Plusieurs garanties ont été données, dont la libération de certains cadres du FPI sous le coup de procédures judiciaires, en détention préventive. Le Chef de l’Etat avait même promis faire entorse à l’Accord de Pretoria, sur la clé de répartition des responsabilités à la Commission Electorale Indépendante, afin d’y attribuer une vice-présidence au Front Populaire Ivoirien. Tout cela, avec en ligne de mire, un jeu électoral clair et transparent. Mais le FPI est resté bloqué. Du moins, croyait-il pouvoir remettre en cause la légitimité des députés sortis des urnes hier. Cela est loin d’être le cas.
En effet, cette élection est sous surveillance des Nations Unies. Gerard Koenders, le Représentant spécial du Secrétaire Général des Nations Unies en Côte d’Ivoire est chargé de certifier les différentes étapes du processus électoral. Jusque-là, rien à signaler. Le jeu est « ouvert et transparent », ont reconnu ses services. De la présentation des candidatures à la proclamation des résultats en passant par la campagne électorale, le comportement des médias d’Etat et le déroulement du vote, tout s’est passé dans les « conditions convenables ». Le processus, a dit l’ONUCI, a été inclusif. L’inclusion suppose que l’on tienne compte de la diversité des opinions et pas forcément de la coloration des partis politiques. Si le FPI est implicitement absent du scrutin, il n’en demeure pas moins que des dizaines de ses cadres, à défaut d’avoir le sceau du parti, se sont portés candidats « indépendants ». Des formations membres du CNRD, coalition sociopolitique à laquelle appartient le parti de Laurent Gbagbo, ont été dans la course. Et que dire de la présence du président actuel de l’Assemblée Nationale, Mamadou Koulibaly, il y a quelques mois, troisième vice-président de la formation bleue ?
En tout, on a abouti, à l’enregistrement de candidatures émanant de 34 formations et groupements politiques et de 439 candidats indépendants, sur les 946 dossiers en lice. Les électeurs ont donc eu le choix. Il ne leur a pas été imposé de candidat. Mieux, les partis membres du RHDP ont fait le jeu en s’ouvrant à la concurrence. Les contours de cette élection méritent d’être signalés. Près de 3000 observateurs nationaux et internationaux sont présents sur le terrain avec près de 25000 éléments des forces de sécurité. Les conditions d’un scrutin libre sont donc réunies. L’histoire récente nous enseigne que le peuple ivoirien a du mal à cicatriser ses plaies, comme on l’a vu en décembre 2000 lors des élections des députés de l’ancienne législature. Sortis du traumatisme de l’élection « calamiteuse », les Ivoiriens n’avaient pas répondu présents. Le taux de participation à cette élection, sans la participation du RDR d’Alassane Ouattara, était de moins de 33%. Mais, cela n’a pas empêché le FPI d’être fier d’une Assemblée Nationale qu’il contrôlait, en partie. La situation n’a donc guère changé.
On ne doit pas voir dans le faible taux de participation d’hier, l’adhésion de l’électorat au mot d’ordre de boycott lancé par le FPI. L’élection présidentielle passée, les Ivoiriens accordent, en général, très peu d’importance à la composition de l’Assemblée Nationale. Car, jusqu’à maintenant, le Parlement s’est toujours comporté comme un appendice du gouvernement. La vraie leçon, qu’il faut pouvoir en tirer est la suivante : pour un véritable jeu de la représentation légitime, il faut que notre pays sorte du régime présidentiel qui fait du Chef de l’Etat, un demi-roi au régime parlementaire, comme cela se voit de plus en plus dans certains pays africains. C’est ainsi que le peuple se sentira concerné, de plus près, par le choix de ceux qui, dans les faits, ne seront plus que des suiveurs, mais les détenteurs de son pouvoir PAR CHARLES SANGA
La deuxième observation se situe au plan de la stratégie politique. En appelant au boycott du scrutin d’hier dimanche 11 décembre, les partisans de Laurent Gbagbo croient pouvoir bénéficier des conséquences d’une faible participation. Si l’abstention semble traduire une crise de la représentation et peut poser la question de la légitimité du pouvoir politique élu avec une faible participation, il faut surtout se demander que peut gagner un parti politique, dans une abstention à ces élections législatives à laquelle tous les observateurs s’attendaient, peu ou prou. L’abstention, en général, résulte soit d’un désintérêt total pour la vie publique, soit d’un choix politique actif « consistant à ne pas se prononcer afin de montrer son désaccord sur les conditions d’organisation du vote ». Si les Ivoiriens se sont, en majorité, abstenus de participer aux votes, cela est, sans doute, du au manque d’enjeu réel du fait de la non-participation du FPI mais surtout à la hantise de la violence électorale tant redoutée et qui a marqué le premier trimestre de cette année 2011.
Dans tous les cas, le plus important était de tenir ces élections pour sortir le pays de l’exception. La Côte d’Ivoire aura son Assemblée nationale. Elle sera démocratique, légale et légitime pour plusieurs raisons. Tout le monde se souvient que le gouvernement ivoirien, par l’entremise du ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur, a tout mis en œuvre pour convaincre le parti de Laurent Gbagbo de mettre en avant l’intérêt supérieur de la Nation face à l’instinct de survie de certains de ses leaders. Plusieurs garanties ont été données, dont la libération de certains cadres du FPI sous le coup de procédures judiciaires, en détention préventive. Le Chef de l’Etat avait même promis faire entorse à l’Accord de Pretoria, sur la clé de répartition des responsabilités à la Commission Electorale Indépendante, afin d’y attribuer une vice-présidence au Front Populaire Ivoirien. Tout cela, avec en ligne de mire, un jeu électoral clair et transparent. Mais le FPI est resté bloqué. Du moins, croyait-il pouvoir remettre en cause la légitimité des députés sortis des urnes hier. Cela est loin d’être le cas.
En effet, cette élection est sous surveillance des Nations Unies. Gerard Koenders, le Représentant spécial du Secrétaire Général des Nations Unies en Côte d’Ivoire est chargé de certifier les différentes étapes du processus électoral. Jusque-là, rien à signaler. Le jeu est « ouvert et transparent », ont reconnu ses services. De la présentation des candidatures à la proclamation des résultats en passant par la campagne électorale, le comportement des médias d’Etat et le déroulement du vote, tout s’est passé dans les « conditions convenables ». Le processus, a dit l’ONUCI, a été inclusif. L’inclusion suppose que l’on tienne compte de la diversité des opinions et pas forcément de la coloration des partis politiques. Si le FPI est implicitement absent du scrutin, il n’en demeure pas moins que des dizaines de ses cadres, à défaut d’avoir le sceau du parti, se sont portés candidats « indépendants ». Des formations membres du CNRD, coalition sociopolitique à laquelle appartient le parti de Laurent Gbagbo, ont été dans la course. Et que dire de la présence du président actuel de l’Assemblée Nationale, Mamadou Koulibaly, il y a quelques mois, troisième vice-président de la formation bleue ?
En tout, on a abouti, à l’enregistrement de candidatures émanant de 34 formations et groupements politiques et de 439 candidats indépendants, sur les 946 dossiers en lice. Les électeurs ont donc eu le choix. Il ne leur a pas été imposé de candidat. Mieux, les partis membres du RHDP ont fait le jeu en s’ouvrant à la concurrence. Les contours de cette élection méritent d’être signalés. Près de 3000 observateurs nationaux et internationaux sont présents sur le terrain avec près de 25000 éléments des forces de sécurité. Les conditions d’un scrutin libre sont donc réunies. L’histoire récente nous enseigne que le peuple ivoirien a du mal à cicatriser ses plaies, comme on l’a vu en décembre 2000 lors des élections des députés de l’ancienne législature. Sortis du traumatisme de l’élection « calamiteuse », les Ivoiriens n’avaient pas répondu présents. Le taux de participation à cette élection, sans la participation du RDR d’Alassane Ouattara, était de moins de 33%. Mais, cela n’a pas empêché le FPI d’être fier d’une Assemblée Nationale qu’il contrôlait, en partie. La situation n’a donc guère changé.
On ne doit pas voir dans le faible taux de participation d’hier, l’adhésion de l’électorat au mot d’ordre de boycott lancé par le FPI. L’élection présidentielle passée, les Ivoiriens accordent, en général, très peu d’importance à la composition de l’Assemblée Nationale. Car, jusqu’à maintenant, le Parlement s’est toujours comporté comme un appendice du gouvernement. La vraie leçon, qu’il faut pouvoir en tirer est la suivante : pour un véritable jeu de la représentation légitime, il faut que notre pays sorte du régime présidentiel qui fait du Chef de l’Etat, un demi-roi au régime parlementaire, comme cela se voit de plus en plus dans certains pays africains. C’est ainsi que le peuple se sentira concerné, de plus près, par le choix de ceux qui, dans les faits, ne seront plus que des suiveurs, mais les détenteurs de son pouvoir PAR CHARLES SANGA