Fini les compromissions et les arrangements de bas étage. Le Conseil constitutionnel, version Francis Wodié, vient d`envoyer, aussi bien au pouvoir qu`à l`opposition, un signal fort, quant à sa volonté de moraliser la classe politique ivoirienne. « Quand on est un homme de droit, c`est qu`on est droit », a-t-il dit lors de sa conférence de presse du mardi 31 janvier 2012. Les décisions d`invalidation prononcées par le conseil constitutionnel puisent leurs fondements dans l`esprit de cette phrase. Le président du Conseil constitutionnel a invalidé, le 31 janvier, dans 11 circonscriptions électorales, les résultats provisoires proclamés par la commission électorale indépendante donnant gagnant certains candidats. Il s`agit, notamment des circonscriptions de Bouna, Bono,Dikodougou, Duékoué, Facobly, Biankouma, Kouibly, Fresco, Tabou, Agboville (S/P) et Grand-Lahou. Deux ministres en fonction, Lobognon Agnima Alain-Michel ( Fresco Dahiri, Fresco et Gbagbam), Mme Kaba Nialé ( Bouna, Bouko et Bouna), ont été touchés. Bien plus, au moins cinq (5) candidats issus du parti au pouvoir, le Rassemblement des Républicains ( Rdr) retourneront devant les électeurs. Ce sont Yacouba Koné ( Bonon), Flamizana Touré ( Duékoué), Séa Jean-Honoré ( Facobly), Issa Coulibaly ( Dikodougou) et Kaba Nialé ( Bouna). Un militant du Parti démocratique de Côte d`Ivoire ( Pdci-rda), Jean- Djaha ( Grand-Lahou), Mamadou Dély ( Udpci, Biankouma) ainsi que des indépendants sortis des entrailles du Rdr, des ex-forces nouvelles et du Rdr, notamment ont aussi vu leurs « victoires » invalidées par le Conseil constitutionnel. Francis Wodié a frappé, sans ménagement et sans a priori. Par son arrêt, le nouveau président du Conseil constitutionnel a envoyé un signal fort à la classe politique ivoirienne, marquant, du coup, le début des élections propres en Côte d`Ivoire. « Il y a une terrible anomalie qui nous a été signalée. Nous avons constaté que même des personnes décédées ont voté, des absents aussi », a révélé le président du Conseil constitutionnel. Certains candidats, se croyant les plus futés, ont toujours eu en la triche, une planche de salut pour se faire élire. Une pratique bien ancrée dans les habitudes de ces candidats qui n`attendent que le jour du vote, pour soit, faire du bourrage des urnes, soit procéder par des intimidations, du fait de leur rang social, pour espérer remporter le scrutin. Ce verdict de Wodié fera donc réfléchir ces abonnés aux « braquages » des voix des votants. « Dans le déroulement de la campagne, on relève des Forces armées, des Frci ou des Dozos, des forces armées au service de certains candidats, l`utilisation des moyens de l’État, véhicules et autres, l`utilisation des signes et symboles de l’État et l`image du chef de l’État et la prolongation de la campagne au-delà de la période réglementaire », a énuméré Wodié comme autant de faisceaux de la fraude sur lesquels il s`est appuyé pour annuler ces votes. Wodié a stigmatisé le fait que cette tricherie « entre dans la stratégie de campagne de certains partis politiques ». Francis Wodié a exalté le principe de séparation des pouvoirs dans un État de droit, que la Côte d`Ivoire veut être. « Si le conseil constitutionnel à pour vocation de faire respecter la loi, c`est qu`il doit commencer, lui-même par respecter la loi. Nous avons reconnu l`anomalie de certaines situations, du point de vue du respect des principes fondamentaux de la démocratie et de l`éthique républicaine. Pour n`avoir pas prononcé de décisions aujourd`hui ne signifie pas que demain, le conseil constitutionnel ne se prononcera pas. Il ne faut pas confondre l’État et les partis, l’État et les individus », a-t-il également dit. Comme on le voit, certains « apprentis » tricheurs en ont pris pour leur grades. « Nous sommes le dernier recours et nous estimons avoir servi », s’est convaincu Wodié. Selon lui, le Conseil a fait son travail en toute indépendance et en toute impartialité. Signalons que le Conseil constitutionnel a été saisi de 110 requêtes pour 66 circonscriptions. « Le Conseil constitutionnel a dû prendre le temps d’examiner toutes les requêtes dont il a été saisi », a souligné Francis Wodié.
Armand B. DEPEYLA
Armand B. DEPEYLA