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Politique Publié le jeudi 1 mars 2012 | Nord-Sud

INTERVIEW/Adama Dahico après son soutien à Laurent Gbagbo : “Ce que je ressens aujourd’hui”

© Nord-Sud Par Christian
Presse nationale - Le quotidien "L`Expression" souffle sa première bougie en présence des ministres Sy Savané, Konaté et du Roi de Bassam
"L’Expression" a célébré son 1er anniversaire à Grand-Bassam, dans le cadre somptueux du Koral Beach, les 3 et 4 juin 2010. Photo: de g. à dr. Assoumane Bamba, Moussa Traoré et l`humoriste Adama Dahico
L’humoriste Adama Dahico a fait l’amère expérience de la politique lors de la dernière élection présidentielle. Après avoir soutenu Laurent Gbagbo au second tour des votes, l’artiste cherche à retourner à son métier sous le régime d’Alassane Ouattara. Une reconversion qui n’est pas toujours facile.
On vous a vu au dîner-gala de la Fondation Children of Africa après une longue absence de la scène artistique et politique. Est-ce le grand retour ?
C’est vrai qu’on ne me voit plus à la télévision nationale qui est en quelque sorte le baromètre de popularité et de la présence d’un artiste dans son pays. Mais, j’ai l’avantage de faire passer certaines interviews sur des chaînes de télé étrangères. Je participe à beaucoup de spectacles privés en ce moment, dans des paroisses, aux cérémonies qui ne font pas l’objet de campagne publicitaire. J’ai toujours dit que c’est parce que les politiciens faisaient la comédie à notre place que je suis allé à la politique et que quand ils comprendront qu’il faille faire la bonne politique, je reviendrai à la comédie. Je n’ai pas quitté le pays après les évènements du 11 avril. J’ai tenté de reprendre mes activités. Malheureusement, il y a eu certains blocages. L’environnement n’était pas aussi propice.

A quels types de blocages avez-vous été confronté ?
Au niveau de la télévision, c’était difficile avec mon image qui ne passe pas. Quand c’est comme ça, les gens pensent que je ne suis pas là. Pour d’au­tres, j’étais à l’extérieur. Il y a eu beaucoup d’interprétations. J’ai compris l’appel lancé par le président de la République pour la reconstruction de la Côte d’Ivoire, pour la paix et la réconciliation. La meilleure façon d’être acteur, c’est de reprendre son travail. Comme le mien, c’est l’art, je ne peux que passer par l’art pour rapprocher les Ivoiriens.

Parlant de censure, il y a une affaire selon laquelle un publi-reportage ne serait pas passé à la télé parce que vous y apparaissiez. Qu’en est-il ?
C’est après qu’on me l’a fait savoir puisque je suis une autorité politique et que j’ai été candidat à l’élection présidentielle, selon la responsable de la publicité et marketing Mme da Chagas de la RTI. Et qu’à ce titre, on ne peut pas utiliser mon image de politicien pour faire de la publicité.

Vous avez affirmé une fois, à Nord-Sud Quotidien, que vous n’étiez plus artiste mais politicien. Ne croyez vous pas que cette requête était justifiée ?
Non. Peut-être que je l’ai dit comme ça. Mais, c’est pour dire que l’humour tel que les gens le définissent, aujourd’hui, j’en suis un peu peiné. Il y a plus de plagiat que d’humour. Des gens se lèvent, racontent des blagues et se font appeler humoristes. Ce sont des choses qui dévalorisent la corporation. C’est vrai que j’ai été candidat aux élections présidentielles mais je ne suis pas un politicien en tant que tel. Ma profession c’est comédien et ma spécialisation c’est l’humour.

N’avez-vous pas perdu de votre valeur au plan artistique ? Pour avoir été candidat à l’élection présidentielle ?
Oui. Mais aussi parce que je ne joue plus qu’en privé, souvent dans des paroisses. Ce n’est pas le Adama Dahico qu’on a connu…
Non. Il ne faut pas confiner un artiste à des spectacles aux palais de la culture. Ce n’est pas parce que quelqu’un joue au palais de la culture qu’il a un haut niveau. Je ne suis plus à ce stade. Je préfère jouer en privé, devant des personnes de qualité. Et, ce ne sont pas des personnes que vous allez voir le plus souvent au palais. Il y a des chanteurs qui viennent de l’extérieur pour des soirées privées et repartent sans qu’on ne le sache. Je pense que c’est quand on a atteint un certain niveau qu’on est invité aux soirées privées. Ce n’est pas un niveau bas.

Avez-vous encore un public ?
Si les gens veulent politiser le public Adama Dahico, ils vont faire fausse route. Plus souvent, les gens se basent sur la position que j’ai prise sur le plan électoral. Si je dois me baser sur 46% de la population ivoirienne, qui était d’avis avec moi, je ferais sûrement le plein du palais de la culture. Ce n’est pas cela mon objectif. J’ai envie de pouvoir faire mon métier pour des personnes qui ont besoin de m’aimer. C’est vrai, il y a des gens qui ne se sentent plus concernés par mon art à cause de la position que j’ai prise, ils ont leurs raisons. Qu’ils ne me portent plus dans leurs cœurs, c’est leur droit. Mais, si je suis sur scène et si ces personnes sont honnêtes, elles diront que je suis professionnel et que je fais bien mon travail.

Ne cherchez-vous pas aujourd’hui à vous rapprocher de la Première dame ?
Qu’on arrête de spéculer sur des considérations qui ne font pas avancer la Côte d’Ivoire. Nous sommes dans une dynamique de réconciliation et de paix. J’ai entrepris des démarches pour faire mon métier. Je me suis rendu compte, à un moment donné, que des gens font croire qu’ils reçoivent des instructions. Parce qu’ils n’arrivent pas à prendre leur responsabilité. Ils se disent que si je m’engage avec Adama Dahico, est-ce que je n’aurais pas de problème dans mon entreprise, avec l’exécutif. Je me dis que j’ai été candidat à l’élection présidentielle, mais on ne sait pas qu’est-ce qui me lie à l’exécutif. C’est pour leur démontrer que je n’ai aucun problème avec l’exécutif pour qu’ils prennent leur responsabilité. Ils donnent l’impression d’avoir reçu des ordres alors qu’ils le font de leur propre chef. Je suis allé vers le cabinet de la Première dame et j’ai eu la chance d’être invité. Tous ceux qui m’ont vu, ont repris à m’appeler.

En un mot vous entretenez de bonnes relations avec le couple présidentiel…
J’ai été à l’investiture à Yamoussoukro. Le président m’a salué et a dit qu’il était content de me voir et que quand tout sera calme il me recevra. Je constate qu’il effectue de nombreux déplacements. C’est lui le président de la République. C’est à moi d’aller vers lui et demander qu’on me crée les conditions pour que je fasse mon travail. Je n’ai aucun problème avec le président. Si je n’ai pas quitté le pays, c’est que je veux le servir.

Regrettez-vous,aujourd’hui, d’avoir soutenu le président Laurent Gbagbo au second tour de l’élection présidentielle ?
Je n’ai pas envie de donner une réponse qui va créer d’autres polémiques. Ce que je dis, c’est que nous étions dans un jeu démocratique. On a posé des actes. Je suis un grand garçon. En toute chose, il y a des avantages et des inconvénients. On en tire les leçons et on avance.

Que devient le Festival du rire d’Abidjan ?
C’est un festival qui a un coût, une notoriété. On ne peut pas le faire sans l’aval des autorités. Ça implique toute une organisation. Si les gens ne sont pas libérés mentalement, s’ils ne sont pas compréhensifs, un tel festival ne peut se tenir. Nous comptons le faire cette année dans son format normal.

Interview réalisée par Sanou A.
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