Dans nos parutions du mardi 28 et du mercredi 29 février 2012, nous publions la requête du conseil de Laurent Gbagbo et aussi ses observations concernant le Greffe de la Cour pénale internationale. Nous avions également publié la déclaration du Juge Unique de la Cour déboutant l’avocat de l’ancien chef d’Etat ivoirien. Pour nos lecteurs, nous donnons lecture simplifiée des échanges de correspondance entre le Juge Unique de la Cour, le Greffe et l’avocat de Laurent Gbagbo.
Il nous faut d’abord rappeler que la demande d’aide judiciaire doit, conformément au règlement de la C.P.I., être adressée au Greffier de la Cour. Cela est clairement stipulé dans l’article 22 du Code de conduite professionnelle des conseils de la C.P.I. (ICC/ASP/4/32), qui précise que : «Quand le client bénéficie de l’aide judiciaire, les honoraires du conseil sont exclusivement versés par le Greffe de la Cour. Le conseil ne peut accepter de rémunération en nature ou en espèces d’une autre source (…)Toute violation par un conseil des obligations définies dans le présent article constitue une faute professionnelle qui fait l`objet conformément au présent code d`une procédure disciplinaire pouvant déboucher sur l`interdiction définitive d`exercer devant la Cour et la radiation de la liste des conseils, avec communication à l`autorité nationale compétente».
La Norme 133 du Règle du Greffe poursuit et indique que :«Les honoraires sont versés aux conseils selon un barème fondé sur un système d`honoraires fixes établissant le montant maximum pouvant être alloué à chaque phase de la procédure, y compris, le cas échéant, les honoraires des personnes assistant le conseil visées à la norme 68 du Règlement de la Cour, et des enquêteurs professionnels visés à la norme 137». Pour plus de lumière, il faudra comprendre qu’il y a différents stades dans un procès à la C.P.I. que l’on peut schématiser en cinq stades de procédure. Le premier stade de procédure part de l’enquête jusqu’à la comparution initiale de la Chambre préliminaire.
Le deuxième stade de procédure part de la Première audience de mise en état jusqu’à ce que la décision sur la confirmation des charges devienne définitive. Quant au troisième stade de procédure, il part de la décision définitive de confirmation des charges jusqu’à la fin des plaidoiries finales. Le stade de procédure n°4 part de la fin des plaidoiries finales jusqu’au prononcé de l’arrêt. Pour finir, le cinquième et dernier stade de procédure part de la phase d’appel jusqu’à la décision d’appel. Pour ce qui est de l’aide judiciaire accordée par la C.P.I., le Président Laurent GBAGBO ne peut disposer que d’une équipe de base composée uniquement d’un conseil principal qu’est Me Altit lui-même, d’un assistant juridique qu’est Mme Jennifer Naouri, et d’un chargé de gestion de dossier.
Cette équipe ne peut être renforcée qu’au troisième stade de la procédure par un Conseil associé.
C’est-à-dire de la décision définitive de confirmation des charges jusqu’à la fin des plaidoiries finales. Pour l’instant, le deuxième stade de procédure n’est même pas encore entamé. Il est important également de préciser qu’en fonction du nombre total des victimes et de l’épaisseur du dossier, le Greffier peut accepter que l’équipe de base soit agrandie lors des autres stades de procédures par des assistants supplémentaires.
Mais pour que cela soit le cas, il y a un contrôle strict établi à partir de données objectives. En d’autres termes, l’équipe de défense de Laurent GABGBO ne peut être composée que des trois personnes précitées. Vu que nous ne sommes, actuellement, qu’au deuxième stade de la procédure, toutes demandes d’allocation de ressources additionnelles devraient donc être justifiées par des paramètres objectifs liés au nombre des victimes, au nombre de pages du dossier, etc. Il ne s’agit donc pas d’une appréciation discrétionnaire du Greffier de la C.P.I. qui doit garantir un procès équitable à l’accusé. Rappelons les événements. Le 6 décembre 2011, Me ALTIT a introduit une demande d’aide judiciaire. Dans sa décision du 28 décembre 2011, le Greffier a octroyé une aide judiciaire totale au Président Laurent GBAGBO.
Le Greffier précisait alors que cette aide consistait, conformément et dans les limites financières du système d’aide judicaire de la Cour, en la prise en charge totale des coûts de la défense uniquement pour la phase préliminaire, soit du 28 décembre 2011 date de la décision, jusqu’à l’audience de confirmation de charges ; voyons ici, le premier et le deuxième stade de la procédure. Il est donc clair, l’encadrement de la période de l’aide judiciaire totale jusqu’à l’audience de confirmation de charges est tout à fait logique. Car, si les charges sont abandonnées lors de cette audience de confirmation de charges, l’aide judiciaire deviendrait sans objet pour la suite puisqu’il n’y a plus de procès. Le Greffier précisait encore que les dépenses engagées par Me ALTIT depuis le 6 décembre 2011, soit depuis la date de sa requête, seront également remboursées à condition toutefois que ces dernières revêtent un caractère raisonnable, effectif et efficace pour la défense. C’est ainsi que les sommes suivantes ont été allouées à Me ALTIT. 10.832 € par mois, soit 7.105.326,22 Francs CFA au titre des honoraires du Conseil principal. 6.113 € par mois, soit 4.009.865,14 Francs CFA au titre des honoraires de l’assistant juridique. 4.872 € par mois, soit 3.195.822,50 Francs CFA au titre des honoraires du chargé de gestion des dossiers. 76.000 € soit 49.852.732 Francs CFA pour les enquêtes. 4.000 € soit 2.623.828 Francs CFA par mois pour les frais de l’équipe (transports, fournitures de bureau …). Les sommes non utilisées sont reportées d’un mois sur l’autre. Nous rappelons que ces chiffres ont été pris dans le guide de la C.P.I. Toutes ces sommes couvrent donc la période allant du 28 décembre 2011 jusqu’à la fin de l’audience de confirmation de charges qui débute le 18 juin 2012, soit plus de 230.000 € pour 6 mois de procédure.
Les frais engagés depuis le 6 décembre 2011 pouvant également faire l’objet de remboursement, le 13 janvier 2012, Me ALTIT dépose à la chambre préliminaire III de la C.P.I. une requête relative au champ de l’aide judiciaire. En fait, Me ALTIT sollicitait une demande d’aide financière supplémentaire. Pour cela, Me Emmanuel ALTIT indique dans sa requête que si le Greffier de la C.P.I. a attribué une aide judiciaire à compter du 28 décembre 2011 jusqu’à l’audience de confirmations de charges, cette période ne couvrait pas la période du 30 novembre au 28 décembre 2011, ce qui justifie sa requête. La non prise en compte, selon Me ATLIT, de la période du 30 novembre au 28 décembre 2011, soit 1 mois, justifie selon lui cette nouvelle requête. Le conseil principal de Laurent Gbagbo ajoute que l’affaire étant particulièrement complexe, l’équipe de défense doit être organisée et composée de personnes ayant une expertise spécifique pour respecter les délais de procédure, ce qui justifie encore sa demande d’aide financière supplémentaire. Il souhaitait ainsi que son équipe soit agrandie d’un Conseil associé et de deux Assistants Juridiques.
Me ALTIT souhaitait en outre que l’allocation de 4.000 € par mois passe à 6.000 € eu égard aux nombreux voyages à La Haye qu’il doit effectuer, ainsi que pour couvrir les frais d’achat de matériel informatique ou de télécommunication.
Il souhaitait enfin que la somme de 76.000 € qui lui était allouée passe à la somme de 290.000 € pour les frais d’enquête. Au total, l’avocat de Laurent Gbagbo demandait à la Chambre Préliminaire III une aide financière supplémentaire de 417.146 €, en plus du budget de 230.000 € déjà accordé. Le 16 janvier 2012, la Chambre Préliminaire III par l’intermédiaire de son Juge Unique demandait au Greffier de faire ses observations sur la requête qu’elle venait de recevoir de la part de Me ALTIT. Ce qui a été fait le 19 janvier 2012. Le Greffier a d’emblée révélé que la Requête introduite par Me ALTIT ne se référait à aucune base juridique qui justifierait la saisine directe de la Chambre Préliminaire III sans préalablement passer par le Greffier. Le Greffier rappelait qu’une simple lecture de la norme 83-3 du Règlement de la Cour aurait permis à Me ALTIT de se rendre compte que sa requête devait être déposée devant le Greffier.
Une telle carence suffit à déclarer la Requête irrecevable puisque « en agissant de la sorte, le Conseil de la défense a manifestement agi en violation de la procédure » précitée. Sur le fond, le Greffier relève encore que la requête de Me ALTIT est non seulement mal fondée en droit, mais en plus totalement prématurée. Après avoir rappelé les textes applicables en la matière à Me ALTIT, le Greffier note que Me ALTIT n’a présenté aucun élément convaincant de nature à démontrer une prétendue insuffisance des ressources. En ce qui concerne l’argument de Me ALTIT relatif à la complexité de l’affaire, le Greffier rappelle que les affaires déférées devant une juridiction internationale sont par principe complexes. Le Greffier relève encore que « les arguments relatifs à la nécessité de faire preuve de diligence et d’agir de façon opérationnelle (…) ne remettent pas en cause la conclusion du Greffier sur le point examiné.
Au contraire, elle la conforte dès lors que la diligence et l’efficience sont des qualités nécessaires attendues en tout temps de tout conseil intervenant devant la Cour ». En d’autres termes, le Greffier estime qu’avec les fonds débloqués, un avocat compétent peut faire toutes les diligences nécessaires à la défense de son client à ce stade de la procédure. Le Greffier rappelle encore qu’un CD-ROM a été remis à Me ALTIT, et ceci dès sa désignation le 30 novembre 2011, pour l’aider à se familiariser avec la procédure de la C.P.I. ; et que cette information lui a été réitérée par un document remis le 3 janvier 2012. Le Greffier insiste encore sur le fait que cette information lui a été rappelée lors des nombreuses rencontres intervenues avec la Section d’appui aux conseils. Une simple lecture de la documentation aurait donc permis à Me ALTIT de connaître la procédure à suivre.
Le Greffier précise encore que les fonds alloués l’ont été en fonction des grilles mêmes de la C.P.I. et des paramètres objectifs et non exhaustifs déterminés par la Cour.
Le Greffier rappelle encore qu’il a été alloué à Me ALTIT des sommes extrêmement importantes qui n’ont pas encore été utilisées par ce dernier qui sollicite paradoxalement des fonds supplémentaires. Le même Bureau du Greffe continue et dit que sur simple demande, Me ALTIT aurait pû se voir émettre à disposition par le Greffe, un ordinateur portable sécurisé par la Cour aux fins des missions sur le terrain. Le Greffier relève ainsi qu’aucun élément sérieux ne vient étayer la demande de Me ALTIT et a sollicité de la Chambre préliminaire III que la requête soit déclarée irrecevable et que les écritures échangées entre le Greffier et Me ALTIT sur cette requête soient rendues publiques.
Le 24 janvier 2012, Me ALTIT a répliqué aux observations du greffier, en indiquant que ces observations étaient irrecevables car la rédaction ne respectait pas une interligne de 1,5. Il maintenait ses demandes financières et sollicitait que toutes les écritures restent confidentielles. Le 27 janvier 2012, la Chambre Préliminaire III de la C.P.I. note que Me ALTIT n’a pas respecté la procédure, et qu’il aurait du soumettre sa demande au greffier. La Chambre Préliminaire III a ainsi indiqué qu’en l’absence de saisine du greffier, elle n’est pas compétente pour se prononcer sur la demande du Conseil principal de Laurent Gbagbo. C’est comme si, au lieu de saisir le Tribunal, un avocat saisissait directement la Cour d’Appel. Cela n’a pas de sens.
La Chambre Préliminaire III a noté que le Greffier n’a pas respecté dans ses écritures une interligne de 1,5, elle a également déclaré la requête de Me ALTIT irrecevable. Elle a aussi déclaré irrecevables les observations du Greffier du fait du non respect de l’interligne. Elle a ordonné à Me ALTIT de rendre publique ses écritures au plus tard le 1er février 2012, et le 3 février 2012 pour le Greffier. Ce qui a été fait. En fait, les observations du Greffier et la décision de la Cour constituent une véritable déculottée juridique pour Me Emmanuel ALTIT qui se voit prendre une leçon de Droit sur 20 pages par le Greffier. Il est donc fort probable que Me ALTIT ne fasse pas une nouvelle demande devant le Greffier qui estime que c’est prématuré, à ce stade de la procédure.
Jean-Paul Oro à Paris
Il nous faut d’abord rappeler que la demande d’aide judiciaire doit, conformément au règlement de la C.P.I., être adressée au Greffier de la Cour. Cela est clairement stipulé dans l’article 22 du Code de conduite professionnelle des conseils de la C.P.I. (ICC/ASP/4/32), qui précise que : «Quand le client bénéficie de l’aide judiciaire, les honoraires du conseil sont exclusivement versés par le Greffe de la Cour. Le conseil ne peut accepter de rémunération en nature ou en espèces d’une autre source (…)Toute violation par un conseil des obligations définies dans le présent article constitue une faute professionnelle qui fait l`objet conformément au présent code d`une procédure disciplinaire pouvant déboucher sur l`interdiction définitive d`exercer devant la Cour et la radiation de la liste des conseils, avec communication à l`autorité nationale compétente».
La Norme 133 du Règle du Greffe poursuit et indique que :«Les honoraires sont versés aux conseils selon un barème fondé sur un système d`honoraires fixes établissant le montant maximum pouvant être alloué à chaque phase de la procédure, y compris, le cas échéant, les honoraires des personnes assistant le conseil visées à la norme 68 du Règlement de la Cour, et des enquêteurs professionnels visés à la norme 137». Pour plus de lumière, il faudra comprendre qu’il y a différents stades dans un procès à la C.P.I. que l’on peut schématiser en cinq stades de procédure. Le premier stade de procédure part de l’enquête jusqu’à la comparution initiale de la Chambre préliminaire.
Le deuxième stade de procédure part de la Première audience de mise en état jusqu’à ce que la décision sur la confirmation des charges devienne définitive. Quant au troisième stade de procédure, il part de la décision définitive de confirmation des charges jusqu’à la fin des plaidoiries finales. Le stade de procédure n°4 part de la fin des plaidoiries finales jusqu’au prononcé de l’arrêt. Pour finir, le cinquième et dernier stade de procédure part de la phase d’appel jusqu’à la décision d’appel. Pour ce qui est de l’aide judiciaire accordée par la C.P.I., le Président Laurent GBAGBO ne peut disposer que d’une équipe de base composée uniquement d’un conseil principal qu’est Me Altit lui-même, d’un assistant juridique qu’est Mme Jennifer Naouri, et d’un chargé de gestion de dossier.
Cette équipe ne peut être renforcée qu’au troisième stade de la procédure par un Conseil associé.
C’est-à-dire de la décision définitive de confirmation des charges jusqu’à la fin des plaidoiries finales. Pour l’instant, le deuxième stade de procédure n’est même pas encore entamé. Il est important également de préciser qu’en fonction du nombre total des victimes et de l’épaisseur du dossier, le Greffier peut accepter que l’équipe de base soit agrandie lors des autres stades de procédures par des assistants supplémentaires.
Mais pour que cela soit le cas, il y a un contrôle strict établi à partir de données objectives. En d’autres termes, l’équipe de défense de Laurent GABGBO ne peut être composée que des trois personnes précitées. Vu que nous ne sommes, actuellement, qu’au deuxième stade de la procédure, toutes demandes d’allocation de ressources additionnelles devraient donc être justifiées par des paramètres objectifs liés au nombre des victimes, au nombre de pages du dossier, etc. Il ne s’agit donc pas d’une appréciation discrétionnaire du Greffier de la C.P.I. qui doit garantir un procès équitable à l’accusé. Rappelons les événements. Le 6 décembre 2011, Me ALTIT a introduit une demande d’aide judiciaire. Dans sa décision du 28 décembre 2011, le Greffier a octroyé une aide judiciaire totale au Président Laurent GBAGBO.
Le Greffier précisait alors que cette aide consistait, conformément et dans les limites financières du système d’aide judicaire de la Cour, en la prise en charge totale des coûts de la défense uniquement pour la phase préliminaire, soit du 28 décembre 2011 date de la décision, jusqu’à l’audience de confirmation de charges ; voyons ici, le premier et le deuxième stade de la procédure. Il est donc clair, l’encadrement de la période de l’aide judiciaire totale jusqu’à l’audience de confirmation de charges est tout à fait logique. Car, si les charges sont abandonnées lors de cette audience de confirmation de charges, l’aide judiciaire deviendrait sans objet pour la suite puisqu’il n’y a plus de procès. Le Greffier précisait encore que les dépenses engagées par Me ALTIT depuis le 6 décembre 2011, soit depuis la date de sa requête, seront également remboursées à condition toutefois que ces dernières revêtent un caractère raisonnable, effectif et efficace pour la défense. C’est ainsi que les sommes suivantes ont été allouées à Me ALTIT. 10.832 € par mois, soit 7.105.326,22 Francs CFA au titre des honoraires du Conseil principal. 6.113 € par mois, soit 4.009.865,14 Francs CFA au titre des honoraires de l’assistant juridique. 4.872 € par mois, soit 3.195.822,50 Francs CFA au titre des honoraires du chargé de gestion des dossiers. 76.000 € soit 49.852.732 Francs CFA pour les enquêtes. 4.000 € soit 2.623.828 Francs CFA par mois pour les frais de l’équipe (transports, fournitures de bureau …). Les sommes non utilisées sont reportées d’un mois sur l’autre. Nous rappelons que ces chiffres ont été pris dans le guide de la C.P.I. Toutes ces sommes couvrent donc la période allant du 28 décembre 2011 jusqu’à la fin de l’audience de confirmation de charges qui débute le 18 juin 2012, soit plus de 230.000 € pour 6 mois de procédure.
Les frais engagés depuis le 6 décembre 2011 pouvant également faire l’objet de remboursement, le 13 janvier 2012, Me ALTIT dépose à la chambre préliminaire III de la C.P.I. une requête relative au champ de l’aide judiciaire. En fait, Me ALTIT sollicitait une demande d’aide financière supplémentaire. Pour cela, Me Emmanuel ALTIT indique dans sa requête que si le Greffier de la C.P.I. a attribué une aide judiciaire à compter du 28 décembre 2011 jusqu’à l’audience de confirmations de charges, cette période ne couvrait pas la période du 30 novembre au 28 décembre 2011, ce qui justifie sa requête. La non prise en compte, selon Me ATLIT, de la période du 30 novembre au 28 décembre 2011, soit 1 mois, justifie selon lui cette nouvelle requête. Le conseil principal de Laurent Gbagbo ajoute que l’affaire étant particulièrement complexe, l’équipe de défense doit être organisée et composée de personnes ayant une expertise spécifique pour respecter les délais de procédure, ce qui justifie encore sa demande d’aide financière supplémentaire. Il souhaitait ainsi que son équipe soit agrandie d’un Conseil associé et de deux Assistants Juridiques.
Me ALTIT souhaitait en outre que l’allocation de 4.000 € par mois passe à 6.000 € eu égard aux nombreux voyages à La Haye qu’il doit effectuer, ainsi que pour couvrir les frais d’achat de matériel informatique ou de télécommunication.
Il souhaitait enfin que la somme de 76.000 € qui lui était allouée passe à la somme de 290.000 € pour les frais d’enquête. Au total, l’avocat de Laurent Gbagbo demandait à la Chambre Préliminaire III une aide financière supplémentaire de 417.146 €, en plus du budget de 230.000 € déjà accordé. Le 16 janvier 2012, la Chambre Préliminaire III par l’intermédiaire de son Juge Unique demandait au Greffier de faire ses observations sur la requête qu’elle venait de recevoir de la part de Me ALTIT. Ce qui a été fait le 19 janvier 2012. Le Greffier a d’emblée révélé que la Requête introduite par Me ALTIT ne se référait à aucune base juridique qui justifierait la saisine directe de la Chambre Préliminaire III sans préalablement passer par le Greffier. Le Greffier rappelait qu’une simple lecture de la norme 83-3 du Règlement de la Cour aurait permis à Me ALTIT de se rendre compte que sa requête devait être déposée devant le Greffier.
Une telle carence suffit à déclarer la Requête irrecevable puisque « en agissant de la sorte, le Conseil de la défense a manifestement agi en violation de la procédure » précitée. Sur le fond, le Greffier relève encore que la requête de Me ALTIT est non seulement mal fondée en droit, mais en plus totalement prématurée. Après avoir rappelé les textes applicables en la matière à Me ALTIT, le Greffier note que Me ALTIT n’a présenté aucun élément convaincant de nature à démontrer une prétendue insuffisance des ressources. En ce qui concerne l’argument de Me ALTIT relatif à la complexité de l’affaire, le Greffier rappelle que les affaires déférées devant une juridiction internationale sont par principe complexes. Le Greffier relève encore que « les arguments relatifs à la nécessité de faire preuve de diligence et d’agir de façon opérationnelle (…) ne remettent pas en cause la conclusion du Greffier sur le point examiné.
Au contraire, elle la conforte dès lors que la diligence et l’efficience sont des qualités nécessaires attendues en tout temps de tout conseil intervenant devant la Cour ». En d’autres termes, le Greffier estime qu’avec les fonds débloqués, un avocat compétent peut faire toutes les diligences nécessaires à la défense de son client à ce stade de la procédure. Le Greffier rappelle encore qu’un CD-ROM a été remis à Me ALTIT, et ceci dès sa désignation le 30 novembre 2011, pour l’aider à se familiariser avec la procédure de la C.P.I. ; et que cette information lui a été réitérée par un document remis le 3 janvier 2012. Le Greffier insiste encore sur le fait que cette information lui a été rappelée lors des nombreuses rencontres intervenues avec la Section d’appui aux conseils. Une simple lecture de la documentation aurait donc permis à Me ALTIT de connaître la procédure à suivre.
Le Greffier précise encore que les fonds alloués l’ont été en fonction des grilles mêmes de la C.P.I. et des paramètres objectifs et non exhaustifs déterminés par la Cour.
Le Greffier rappelle encore qu’il a été alloué à Me ALTIT des sommes extrêmement importantes qui n’ont pas encore été utilisées par ce dernier qui sollicite paradoxalement des fonds supplémentaires. Le même Bureau du Greffe continue et dit que sur simple demande, Me ALTIT aurait pû se voir émettre à disposition par le Greffe, un ordinateur portable sécurisé par la Cour aux fins des missions sur le terrain. Le Greffier relève ainsi qu’aucun élément sérieux ne vient étayer la demande de Me ALTIT et a sollicité de la Chambre préliminaire III que la requête soit déclarée irrecevable et que les écritures échangées entre le Greffier et Me ALTIT sur cette requête soient rendues publiques.
Le 24 janvier 2012, Me ALTIT a répliqué aux observations du greffier, en indiquant que ces observations étaient irrecevables car la rédaction ne respectait pas une interligne de 1,5. Il maintenait ses demandes financières et sollicitait que toutes les écritures restent confidentielles. Le 27 janvier 2012, la Chambre Préliminaire III de la C.P.I. note que Me ALTIT n’a pas respecté la procédure, et qu’il aurait du soumettre sa demande au greffier. La Chambre Préliminaire III a ainsi indiqué qu’en l’absence de saisine du greffier, elle n’est pas compétente pour se prononcer sur la demande du Conseil principal de Laurent Gbagbo. C’est comme si, au lieu de saisir le Tribunal, un avocat saisissait directement la Cour d’Appel. Cela n’a pas de sens.
La Chambre Préliminaire III a noté que le Greffier n’a pas respecté dans ses écritures une interligne de 1,5, elle a également déclaré la requête de Me ALTIT irrecevable. Elle a aussi déclaré irrecevables les observations du Greffier du fait du non respect de l’interligne. Elle a ordonné à Me ALTIT de rendre publique ses écritures au plus tard le 1er février 2012, et le 3 février 2012 pour le Greffier. Ce qui a été fait. En fait, les observations du Greffier et la décision de la Cour constituent une véritable déculottée juridique pour Me Emmanuel ALTIT qui se voit prendre une leçon de Droit sur 20 pages par le Greffier. Il est donc fort probable que Me ALTIT ne fasse pas une nouvelle demande devant le Greffier qui estime que c’est prématuré, à ce stade de la procédure.
Jean-Paul Oro à Paris