La force militaire de la Cedeao menace d’intervenir au Mali en proie depuis le 17 janvier à la résurgence de la rébellion touareg. Le putsch du 22 mars, opéré par des militaires ulcérés par l’indolence du président Amadou Toumani Touré face à la rébellion, a plongé le pays dans le chaos et provoqué sa partition. Les rebelles du Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla) et le groupe Ançar Dine contrôlent toute la partie septentrionale au grand dam des putschistes, impuissants à freiner cette avancée fulgurante des hommes bleus du désert. En cas d’une intervention militaire, les casques blancs de l’Ecomog (Economic community of west African states cease-fire monitoring group) auront à affronter plusieurs adversaires à la fois. Les soldats ouest-africains devront déloger les putschistes retranchés au camp Soundiata Keita situé à 15 Km de la capitale. Cette partie semble théoriquement la plus facile en raison de la fragilité de la junte qui ne dispose pas d’assise réelle au sein de la troupe et de la population. Le capitaine Amadou Sanogo a été désavoué par la classe politique qui a rejeté son projet de convention nationale prévue jeudi. Le Front uni pour la sauvegarde de la démocratie (Fdr), plate-forme des principaux partis politiques, a dit non à cette « mascarade » des militaires. L’autre gros morceau que de la Cedeao doit affronter reste les rebelles du Mnla et leurs alliés islamistes d’Ançar Dine. Une telle opération nécessite d’importants moyens logistiques que seules grandes puissances peuvent fournir pour équiper les 3000 hommes prévus. La France par la voix de son ministre de la Coopération, a promis son aide matérielle mais a exclu toute intervention de ses soldats. Selon Henri Raincourt, « la France n’intervient plus aujourd’hui militairement. La France peut apporter du soutien logistique ». Autre bonne nouvelle, le géant de l’Afrique de l’Ouest, le Nigeria, a promis des hommes. L’ambassadeur de ce pays en a donné le gage mercredi au président Ouattara qui l’a reçu mercredi. « Pourquoi pas, si c’est ce qui sera la solution au problème, je crois que le Nigeria ne va pas hésiter», a indiqué Tuesday Obajuluwa. Selon Koné Bruno, porte-parole du gouvernement ivoirien, «la Côte d’Ivoire est prête à mettre toutes les ressources financières et humaines» pour une intervention au Mali. L’armée ivoirienne en pleine restructuration, peut-elle se permettre une opération à l’étranger? Rien n’est moins sûr. Le hic, la mise en place de cette force prendra du temps et l’Ecomog a laissé de tristes souvenirs lors de ses interventions au Liberia et en Sierra Leone. «Une action militaire de la Cedeao n’est pas possible ni souhaitable. La Cedeao n’a jamais montré son efficacité sauf une fois dans le cas du Liberia. Elle a 2 000 hommes et il lui faudra au moins un mois pour préparer l’offensive. D’ici là, il sera déjà trop tard », fait remarquer Philippe Hugon, chercheur à l’Iris. L’autre difficulté demeure l’immensité de la zone d’intervention. La partie contrôlée par le Mnla est adossée à l’Algérie, la Mauritanie et le Niger. Une implication de ces pays est nécessaire pour la réussite de cette mission commando. C’est dire que le président Ouattara a les patates chaudes entre les mains.
Nomel Essis
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