L’artiste Serges Kassy a quitté sa Côte d’Ivoire natale suite à la crise post électorale. Ce fervent supporter du Président Laurent Gbagbo se trouve en exil en France. Nous l’avons rencontré à Paris. Dans cet entretien, il crache ses vérités au pouvoir d’Abidjan, parle de Blé Goudé et dit sa foi en la libération prochaine de son champion. Entretien :
Que faites-vous en France ?
Nous sommes en exil en France. Car ayant échappé à la mort dans notre pays. Nous étions d’abord réfugiés au Ghana. Avant d’atterrir plus tard en France. Afin de vivre et de continuer notre carrière musicale. Dieu merci pour le moment, nous nous portons très bien. Par la grâce de Dieu, ça va.
Comment ça se passe en France ?
Tout se passe bien. Nous nous sommes mis à la disposition des mouvements patriotiques pour demander la libération du Président Laurent Gbagbo. A cet effet, nous nous préparons pour le 18 juin prochain. Toute l’Europe va bouger ce jour là. En tout cas, tout est fin prêt.
Comment s’est faite votre intégration ?
Aucune difficulté. Puisque d’Abidjan, on était en contact permanent avec les frères de la diaspora. Notre intégration a été facile.
Avez-vous des contacts avec Charles Blé Goudé ?
Je sais qu’il est vivant. Il se porte très bien. Pour le moment, nous ne sommes pas en contact avec lui.
Savez-vous où il se retrouve?
Vous voulez réellement savoir où il se trouve. Il n’est pas loin. Il est partout. Il est en chaque Ivoirien. Son esprit plane sur toute la Côte d’Ivoire.
A quand remonte votre dernière rencontre ?
La dernière fois que nous nous sommes vue, c’était le 3 avril 2011 à la résidence du Président Laurent Gbagbo. Nous avons fini une rencontre tard dans la nuit. Nous nous sommes séparés. Afin de nous revoir le lendemain. Malheureusement, la rencontre n’a pu avoir lieu. Puisque la violence est montée d’un cran.
Pour démobiliser les patriotes, d’aucuns soutiennent qu’il a «trahi» au moment où on avait besoin de lui…
Comment peut-on tenir de tels propos. C’est méchant. Dans la situation qui prévalait avec le largage des bombes et des tirs des soldats français et onusiens que pouvait-il faire ? Je ne le pense pas. Il est vivant aujourd’hui. Et toute la Côte d’Ivoire en est heureuse. Il porte l’espoir de tout un peuple. Il n’avait aucunement le choix, vu ce qui se passait au pays. Peut-on dire que tous ceux qui sont sortis vivants de cette guerre ont tous pris la tangente. C’est un faux débat. Comme nous le disons, le chef doit vivre pour poursuivre le combat plus tard. Et nous sommes convaincus que le sachant vivant, l’espoir renaît dans l’esprit des Ivoiriens. Pour nous, il est le symbole de la résistance ivoirienne. Raison pour lesquelle il est activement recherché par les nouveaux tenants du pouvoir d’Abidjan.
Et la musique ?
Nous sommes, en ce moment en studio, après avoir fini l’album de 14 titres dénommé «au nom des miens». Nous venons de terminer un single avec un artiste franco antillais la sortie est prévue pour l’été. Par ailleurs, la sortie de notre album est programmée pour la fin de l’année.
Envisagez-vous de faire des concerts en Europe...
En principe des concerts sont prévus en Europe dès la sortie de l’album. D’abord, nous serons le 2 juin prochain en concert au Danemark. Précisément à Copenhague. Et cela dans le cadre d’un grand festival avec le célèbre artiste jamaïcain Jah Turban.
Avez-vous tourné le dos à la politique...
Nous ne pouvons jamais tourner le dos à la politique. Nous sommes un artiste engagé. Nous allons continuer de dénoncer la Françafrique, l’emprise des Occidentaux sur les pays du tiers monde. Sans oublier la traîtrise de certains leaders africains à la tête de nos Etats au service des puissances étrangères. Nous n’allons jamais nous taire. Ceux qui pensent pouvoir nous fermer la bouche se trompent.
Quel rôle jouez-vous dans la mobilisation en Europe pour la libération du Président Laurent Gbagbo ?
Vous nous donnez l’occasion de féliciter tous les résistants Ivoiriens et Africains. Ils sont formidables. Surtout ceux de l’Hexagone. Ils ont pris la relève de ceux d’Abidjan après la chute du Président Laurent Gbagbo. Ils continuent de remuer ciel et terre en Europe et en Amérique. Afin de faire entendre leurs voix. Grâce à notre mobilisation exemplaire, tout commence à bouger. Tout le monde entier commence à avoir une autre vision sur la crise ivoirienne. Aujourd’hui, de nombreuses personnes sont convaincues de la libération prochaine du Président Laurent Gbagbo. Et cela grâce à la détermination sans faille des démocrates du monde entier.
Il a donc toutes les chances de s’en sortir ?
Tout le monde sait dans quelles conditions il a été déporté à La Haye. Il ne faudrait pas que l’on s’inquiète. La vérité divine sera du côté du Président Laurent Gbagbo.
A un moment, on a parlé de votre retour au pays. Qu’est-ce qui s’est passé exactement ?
Notre retour n’est pas pour le moment à l’ordre du jour. Ceux qui nous traquaient sont encore au pays. Nous ne pensons pas qu’ils aient changé d’avis. C’est à cause de notre soutien au Président Laurent Gbagbo qu’ils ont voulu nous éliminer. Or, notre position n’a pas changé. C’est-à-dire nous continuons de soutenir le Président Laurent Gbagbo. Ce soutien est sans ambigüité. Alors que nous continuons de le soutenir, notre retour au pays n’est pas pour maintenant. Nous tenons à notre vie. Pour le peuple. Parce que nous sommes leur bouche, leurs oreilles et leurs yeux.
Antoinette Hallany était-elle la démarcheuse ?
Antoinette Allany est une sœur avec qui nous avons fait beaucoup de choses. Dans les années 1990. Nous avons tous deux soutenu le Président Laurent Gbagbo. Nous avons de bons rapports. Il s’est trouvé qu’au cours d’une rencontre des artistes de la diaspora à un forum sur le Burida nous avons pris une photo ensemble. Y compris Gadji Céli. Cette photo est parue à la Une du journal Le patriote. Ils ont fait croire qu’elle nous a convaincus de rentrer au pays. Alors qu’il n’en était rien. Il n’a jamais été question de notre retour. Nous avons parlé de notre structure commune qui est le Burida. Voilà la vérité.
Un mot sur le Burida…
Tout le monde connaît notre position sur le Burida. Nous n’avons pas du tout apprécié le coup d’Etat qui s’est opéré dans cette structure. Le ministre de la Culture a pris en otage notre structure.
Que faut-il faire pour réconcilier les Ivoiriens ?
Nous allons être sincères avec vous. Les nouveaux tenants du pouvoir d’Abidjan ont raté le coche pour aller à la réconciliation. Ils avaient le choix entre tendre la main dès leur prise du pouvoir ou pratiquer la politique du vainqueur. Ils ont choisi de faire la chasse aux sorcières. Les militants pro Gbagbo sont traqués, emprisonnés. Certains ont leurs avoirs gelés. D’autres sont contraints à l’exil. C’est dommage. Ce qu’il faut faire, c’est de commencer à libérer tous les prisonniers politiques, de dégeler les avoir et de créer les conditions du retour des exilés et des refugiés. La constitution ivoirienne est contre l’exil. En plus, il faut débarrasser notre pays des éléments qui n’ont pas droit aux armes. En d’autres termes, on doit procéder au désarmement des ex-rebelles. N’oublions pas la réunification de l’armée. On remarque également que les nouveaux tenants du pouvoir ne font rien pour unir les Ivoiriens. Alors qu’il y a une soixantaine d’ethnie. On assiste à des clivages ethniques avec la politique de « rattrapage ». Ce sont les groupes d’un seul camp qui sont favorisés. Il ne peut y avoir de paix sans le Président Laurent Gbagbo. La réconciliation peut-être possible si le pouvoir joue franc-jeu. Hélas, nous remarquons qu’il ne le fait pas. La Côte d’Ivoire a besoin de tous ses enfants du Nord, Sud, Est et Ouest pour aller de l’avant.
Croyez-vous en la réconciliation...
La manière dont la réconciliation est conduite nous fait sourire. C’est de la comédie. Comment peut-on imaginer une réconciliation sans le Président Laurent Gbagbo et sa formation politique dont les cadres sont en prison et en exil ? La réconciliation n’est pas la sorcellerie. Il suffit de s’y mettre. La question de la libération du Président Gbagbo et celle des autres prisonniers est au centre de toute notre action. Nous tentons d’attirer l’attention des nouvelles autorités du pays et de celle de chefs d'Etat africains et d’ailleurs, sur la nécessité d’engager un vrai débat politique sur la réconciliation nationale dans notre pays. L’on ne peut pas imaginer une tentative de réconciliation qui exclurait le Président Gbagbo. Sous quelque angle que l’on aborde cette question, le Président Gbagbo reste une pièce incontournable dans le processus de réconciliation nationale. Il ne faut surtout pas oublier que le Président Gbagbo a fait le meilleur score à l’élection présidentielle. Hélas, la France est intervenue militairement avec ses bombes. Mais malgré cela, sans rancœur ni ressentiment, il est prêt, dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire, à participer à la construction de cette réconciliation. Vous comprenez donc que sa libération et celle des autres prisonniers d’opinion soit un préalable nécessaire. Nous constatons que le pays a du mal à décoller depuis le départ du Président Gbagbo. Cette situation est la traduction des sentiments de frustration et de ressentiments dont je parlais tantôt. En politique, la légitimité est l’énergie qui regroupe le peuple autour de l’action du gouvernement, elle nourrit l’espérance du peuple sur la capacité des dirigeants à trouver une solution à ses problèmes existentiels. Or sur ce point, le moins que l’on puisse dire est que la violence ne confère point la légitimité, elle la détruit au contraire. Alassane Ouattara, malgré toute sa bonne volonté, aura du mal à se défaire de l’image d’un président trop proche de l’étranger. Cela finit par desservir sa cause car sa légitimité s’en trouve affectée. Il a donc besoin de construire cette légitimité. Et cela ne peut se faire que par la volonté des Ivoiriens. D’où la nécessité du débat politique que nous appelons de tous nos vœux.
Ouattara peut-il remettre le pays sur les rails ?
Il lui sera difficile de réussir. Tout le monde sait dans quelles conditions il a pris le pouvoir. Aujourd’hui, les populations regrettent celui dont-on a provoqué la chute avec les bombes. Elles soutiennent que le Président Laurent Gbagbo est mieux. Ouattara a commencé à brader toutes les ressources de la Côte d’Ivoire à ses soutiens extérieurs. Notamment à la France. Avec Ouattara, c’est le retour de la servitude. C’est la misère. Les prix des denrées alimentaires augmentent chaque jour. L’insécurité et le racket sont devenus le lot quotidien des Ivoiriens. La pauvreté gagne du terrain. Le surendettement est de retour. Des travailleurs sont licenciés. Et pourtant, il avait promis créer des emplois. On renvoie des personnes de leur travail, parce qu’elles soutiennent le Président Laurent Gbagbo. C’est dommage pour la paix. On ne peut pas fonder sa politique sur son ethnie, sa région. Il n’est pas l’homme de la situation. Les populations ivoiriennes vivent une situation dramatique. La vie est devenue très chère. Sur le marché de l’emploi c’est catastrophique. Parce que la confiance est rompue. La peur qui étreint les Ivoiriens paralyse la dynamique sociale et économique C’est devenue plus frappant. Alassane a promis beaucoup d’argent en tenant compte de ses relations. Malheureusement, les pluies de milliards promises se sont avérées un leurre. Alassane lui-même se sent en insécurité. Il est surveillé par l’armée française et les Forces onusiennes. Il se met en sécurité et met les Ivoiriens dans l’insécurité. Il faut ramener la sécurité pour rassurer les Ivoiriens. Notamment en réhabilitant intégralement les policiers et les gendarmes. Entre lui et le Président Gbagbo la différence est nette.
Comment ?
On ne dit pas aux gens d’aimer le Président Laurent Gbagbo. Mais de reconnaître sa force. Malgré le contexte de crise politique marqué par la division du territoire national en deux, il a fait fonctionner correctement l’Etat. Il a assuré l’essentiel des engagements de la Côte d’Ivoire aussi bien sur le plan national que vis-à-vis de l’extérieur. Ses grandes performances des administrations fiscales qui ont permis de réaliser des records sans précédent dans une période aussi difficile, traduisent ainsi la volonté de la Côte d’Ivoire de vivre selon ses moyens en tournant le dos, définitivement, à l’endettement. Le poids de la dette hypothèque dangereusement la vie des générations à venir. Il vaut mieux en sortir maintenant au lieu de chercher à perpétuer le système d’endettement. La Côte d’Ivoire en a les moyens, aussi bien en termes de richesses qu’humains. Elle a une grande qualité et une diversité de compétences pour tenir ce pari. Après des mois de pouvoir, le régime d’Alassane Ouattara montre ses limites. Ce sont des apprentis. Ils ne peuvent en aucun cas remettre le pays sur pieds. Bien au contraire, ils ne font que l’enfoncer dans le gouffre. Les femmes n’ont pas tort dire que le Président Laurent Gbagbo est mieux. Bien que le pays fût coupé en deux, il a réussi à faire face aux obligations de l’Etat. Il n’y a jamais eu de retard dans le paiement des salaires des fonctionnaires.
François Hollande vient d'être élu Président en France. Votre commentaire…
Le départ de Nicolas Sarkozy est une action de Dieu. C’est un soulagement pour tous ceux qui sont épris de paix et de justice. La défaite de Sarkozy a été saluée par les Africains vivant en France. Il y a eu un tonnerre de d’applaudissements à l’annonce de sa chute. Les âmes de tous les morts qu’il a causés en Côte d’Ivoire, en Libye vont enfin reposé en paix. Nous avons dansé et chanté. Nous pensons qu’il doit payer. Il a fait trop de tort à notre pays et à l’Afrique. La défaite de Sarkozy n’est que le début. La fin du film n’est pas loin.
Qu'est-ce que vous attendez de François Hollande ?
Il promet de démanteler la Françafrique. C’est important pour nous. Attendons pour voir. En tout cas, il est loin d’avoir le tempérament mafieux, frileux et nerveux de Sarkozy. Nous allons le juger sur ses promesses. C’est vrai, il n’a pas été tendre avec le Président Laurent Gbagbo en 2004. Mais il faut savoir qu’à ce moment-là, il n’était pas au parfum de ce qui se passait dans notre pays. Aujourd’hui, beaucoup d’eau a coulé sous le pont avec le travail formidable des patriotes ivoiriens et africains. Il y a eu plusieurs rencontres entre eux et lui. François Hollande a une nouvelle vision. Il a un autre regard du Président Laurent Gbagbo. son élection fait trembler ceux qui vivent à Abidjan. Raison pour laquelle ils ont commencé à faire de la désinformation. Il faut remercier une dame comme Calixthe Beyala. Elle a fait un travail colossal. Nous demandons aux Ivoiriens de garder espoir. Les temps sont certes difficiles, mais notre jour de gloire n’est pas loin. Dieu nous parle à travers des signes. Ces derniers temps, il nous a envoyé des signaux forts. Et nous allons nous trouver bientôt pour sabler le champagne de la victoire.
Interview réalisée à Paris par :
Yacouba Gbané
Que faites-vous en France ?
Nous sommes en exil en France. Car ayant échappé à la mort dans notre pays. Nous étions d’abord réfugiés au Ghana. Avant d’atterrir plus tard en France. Afin de vivre et de continuer notre carrière musicale. Dieu merci pour le moment, nous nous portons très bien. Par la grâce de Dieu, ça va.
Comment ça se passe en France ?
Tout se passe bien. Nous nous sommes mis à la disposition des mouvements patriotiques pour demander la libération du Président Laurent Gbagbo. A cet effet, nous nous préparons pour le 18 juin prochain. Toute l’Europe va bouger ce jour là. En tout cas, tout est fin prêt.
Comment s’est faite votre intégration ?
Aucune difficulté. Puisque d’Abidjan, on était en contact permanent avec les frères de la diaspora. Notre intégration a été facile.
Avez-vous des contacts avec Charles Blé Goudé ?
Je sais qu’il est vivant. Il se porte très bien. Pour le moment, nous ne sommes pas en contact avec lui.
Savez-vous où il se retrouve?
Vous voulez réellement savoir où il se trouve. Il n’est pas loin. Il est partout. Il est en chaque Ivoirien. Son esprit plane sur toute la Côte d’Ivoire.
A quand remonte votre dernière rencontre ?
La dernière fois que nous nous sommes vue, c’était le 3 avril 2011 à la résidence du Président Laurent Gbagbo. Nous avons fini une rencontre tard dans la nuit. Nous nous sommes séparés. Afin de nous revoir le lendemain. Malheureusement, la rencontre n’a pu avoir lieu. Puisque la violence est montée d’un cran.
Pour démobiliser les patriotes, d’aucuns soutiennent qu’il a «trahi» au moment où on avait besoin de lui…
Comment peut-on tenir de tels propos. C’est méchant. Dans la situation qui prévalait avec le largage des bombes et des tirs des soldats français et onusiens que pouvait-il faire ? Je ne le pense pas. Il est vivant aujourd’hui. Et toute la Côte d’Ivoire en est heureuse. Il porte l’espoir de tout un peuple. Il n’avait aucunement le choix, vu ce qui se passait au pays. Peut-on dire que tous ceux qui sont sortis vivants de cette guerre ont tous pris la tangente. C’est un faux débat. Comme nous le disons, le chef doit vivre pour poursuivre le combat plus tard. Et nous sommes convaincus que le sachant vivant, l’espoir renaît dans l’esprit des Ivoiriens. Pour nous, il est le symbole de la résistance ivoirienne. Raison pour lesquelle il est activement recherché par les nouveaux tenants du pouvoir d’Abidjan.
Et la musique ?
Nous sommes, en ce moment en studio, après avoir fini l’album de 14 titres dénommé «au nom des miens». Nous venons de terminer un single avec un artiste franco antillais la sortie est prévue pour l’été. Par ailleurs, la sortie de notre album est programmée pour la fin de l’année.
Envisagez-vous de faire des concerts en Europe...
En principe des concerts sont prévus en Europe dès la sortie de l’album. D’abord, nous serons le 2 juin prochain en concert au Danemark. Précisément à Copenhague. Et cela dans le cadre d’un grand festival avec le célèbre artiste jamaïcain Jah Turban.
Avez-vous tourné le dos à la politique...
Nous ne pouvons jamais tourner le dos à la politique. Nous sommes un artiste engagé. Nous allons continuer de dénoncer la Françafrique, l’emprise des Occidentaux sur les pays du tiers monde. Sans oublier la traîtrise de certains leaders africains à la tête de nos Etats au service des puissances étrangères. Nous n’allons jamais nous taire. Ceux qui pensent pouvoir nous fermer la bouche se trompent.
Quel rôle jouez-vous dans la mobilisation en Europe pour la libération du Président Laurent Gbagbo ?
Vous nous donnez l’occasion de féliciter tous les résistants Ivoiriens et Africains. Ils sont formidables. Surtout ceux de l’Hexagone. Ils ont pris la relève de ceux d’Abidjan après la chute du Président Laurent Gbagbo. Ils continuent de remuer ciel et terre en Europe et en Amérique. Afin de faire entendre leurs voix. Grâce à notre mobilisation exemplaire, tout commence à bouger. Tout le monde entier commence à avoir une autre vision sur la crise ivoirienne. Aujourd’hui, de nombreuses personnes sont convaincues de la libération prochaine du Président Laurent Gbagbo. Et cela grâce à la détermination sans faille des démocrates du monde entier.
Il a donc toutes les chances de s’en sortir ?
Tout le monde sait dans quelles conditions il a été déporté à La Haye. Il ne faudrait pas que l’on s’inquiète. La vérité divine sera du côté du Président Laurent Gbagbo.
A un moment, on a parlé de votre retour au pays. Qu’est-ce qui s’est passé exactement ?
Notre retour n’est pas pour le moment à l’ordre du jour. Ceux qui nous traquaient sont encore au pays. Nous ne pensons pas qu’ils aient changé d’avis. C’est à cause de notre soutien au Président Laurent Gbagbo qu’ils ont voulu nous éliminer. Or, notre position n’a pas changé. C’est-à-dire nous continuons de soutenir le Président Laurent Gbagbo. Ce soutien est sans ambigüité. Alors que nous continuons de le soutenir, notre retour au pays n’est pas pour maintenant. Nous tenons à notre vie. Pour le peuple. Parce que nous sommes leur bouche, leurs oreilles et leurs yeux.
Antoinette Hallany était-elle la démarcheuse ?
Antoinette Allany est une sœur avec qui nous avons fait beaucoup de choses. Dans les années 1990. Nous avons tous deux soutenu le Président Laurent Gbagbo. Nous avons de bons rapports. Il s’est trouvé qu’au cours d’une rencontre des artistes de la diaspora à un forum sur le Burida nous avons pris une photo ensemble. Y compris Gadji Céli. Cette photo est parue à la Une du journal Le patriote. Ils ont fait croire qu’elle nous a convaincus de rentrer au pays. Alors qu’il n’en était rien. Il n’a jamais été question de notre retour. Nous avons parlé de notre structure commune qui est le Burida. Voilà la vérité.
Un mot sur le Burida…
Tout le monde connaît notre position sur le Burida. Nous n’avons pas du tout apprécié le coup d’Etat qui s’est opéré dans cette structure. Le ministre de la Culture a pris en otage notre structure.
Que faut-il faire pour réconcilier les Ivoiriens ?
Nous allons être sincères avec vous. Les nouveaux tenants du pouvoir d’Abidjan ont raté le coche pour aller à la réconciliation. Ils avaient le choix entre tendre la main dès leur prise du pouvoir ou pratiquer la politique du vainqueur. Ils ont choisi de faire la chasse aux sorcières. Les militants pro Gbagbo sont traqués, emprisonnés. Certains ont leurs avoirs gelés. D’autres sont contraints à l’exil. C’est dommage. Ce qu’il faut faire, c’est de commencer à libérer tous les prisonniers politiques, de dégeler les avoir et de créer les conditions du retour des exilés et des refugiés. La constitution ivoirienne est contre l’exil. En plus, il faut débarrasser notre pays des éléments qui n’ont pas droit aux armes. En d’autres termes, on doit procéder au désarmement des ex-rebelles. N’oublions pas la réunification de l’armée. On remarque également que les nouveaux tenants du pouvoir ne font rien pour unir les Ivoiriens. Alors qu’il y a une soixantaine d’ethnie. On assiste à des clivages ethniques avec la politique de « rattrapage ». Ce sont les groupes d’un seul camp qui sont favorisés. Il ne peut y avoir de paix sans le Président Laurent Gbagbo. La réconciliation peut-être possible si le pouvoir joue franc-jeu. Hélas, nous remarquons qu’il ne le fait pas. La Côte d’Ivoire a besoin de tous ses enfants du Nord, Sud, Est et Ouest pour aller de l’avant.
Croyez-vous en la réconciliation...
La manière dont la réconciliation est conduite nous fait sourire. C’est de la comédie. Comment peut-on imaginer une réconciliation sans le Président Laurent Gbagbo et sa formation politique dont les cadres sont en prison et en exil ? La réconciliation n’est pas la sorcellerie. Il suffit de s’y mettre. La question de la libération du Président Gbagbo et celle des autres prisonniers est au centre de toute notre action. Nous tentons d’attirer l’attention des nouvelles autorités du pays et de celle de chefs d'Etat africains et d’ailleurs, sur la nécessité d’engager un vrai débat politique sur la réconciliation nationale dans notre pays. L’on ne peut pas imaginer une tentative de réconciliation qui exclurait le Président Gbagbo. Sous quelque angle que l’on aborde cette question, le Président Gbagbo reste une pièce incontournable dans le processus de réconciliation nationale. Il ne faut surtout pas oublier que le Président Gbagbo a fait le meilleur score à l’élection présidentielle. Hélas, la France est intervenue militairement avec ses bombes. Mais malgré cela, sans rancœur ni ressentiment, il est prêt, dans l’intérêt de la Côte d’Ivoire, à participer à la construction de cette réconciliation. Vous comprenez donc que sa libération et celle des autres prisonniers d’opinion soit un préalable nécessaire. Nous constatons que le pays a du mal à décoller depuis le départ du Président Gbagbo. Cette situation est la traduction des sentiments de frustration et de ressentiments dont je parlais tantôt. En politique, la légitimité est l’énergie qui regroupe le peuple autour de l’action du gouvernement, elle nourrit l’espérance du peuple sur la capacité des dirigeants à trouver une solution à ses problèmes existentiels. Or sur ce point, le moins que l’on puisse dire est que la violence ne confère point la légitimité, elle la détruit au contraire. Alassane Ouattara, malgré toute sa bonne volonté, aura du mal à se défaire de l’image d’un président trop proche de l’étranger. Cela finit par desservir sa cause car sa légitimité s’en trouve affectée. Il a donc besoin de construire cette légitimité. Et cela ne peut se faire que par la volonté des Ivoiriens. D’où la nécessité du débat politique que nous appelons de tous nos vœux.
Ouattara peut-il remettre le pays sur les rails ?
Il lui sera difficile de réussir. Tout le monde sait dans quelles conditions il a pris le pouvoir. Aujourd’hui, les populations regrettent celui dont-on a provoqué la chute avec les bombes. Elles soutiennent que le Président Laurent Gbagbo est mieux. Ouattara a commencé à brader toutes les ressources de la Côte d’Ivoire à ses soutiens extérieurs. Notamment à la France. Avec Ouattara, c’est le retour de la servitude. C’est la misère. Les prix des denrées alimentaires augmentent chaque jour. L’insécurité et le racket sont devenus le lot quotidien des Ivoiriens. La pauvreté gagne du terrain. Le surendettement est de retour. Des travailleurs sont licenciés. Et pourtant, il avait promis créer des emplois. On renvoie des personnes de leur travail, parce qu’elles soutiennent le Président Laurent Gbagbo. C’est dommage pour la paix. On ne peut pas fonder sa politique sur son ethnie, sa région. Il n’est pas l’homme de la situation. Les populations ivoiriennes vivent une situation dramatique. La vie est devenue très chère. Sur le marché de l’emploi c’est catastrophique. Parce que la confiance est rompue. La peur qui étreint les Ivoiriens paralyse la dynamique sociale et économique C’est devenue plus frappant. Alassane a promis beaucoup d’argent en tenant compte de ses relations. Malheureusement, les pluies de milliards promises se sont avérées un leurre. Alassane lui-même se sent en insécurité. Il est surveillé par l’armée française et les Forces onusiennes. Il se met en sécurité et met les Ivoiriens dans l’insécurité. Il faut ramener la sécurité pour rassurer les Ivoiriens. Notamment en réhabilitant intégralement les policiers et les gendarmes. Entre lui et le Président Gbagbo la différence est nette.
Comment ?
On ne dit pas aux gens d’aimer le Président Laurent Gbagbo. Mais de reconnaître sa force. Malgré le contexte de crise politique marqué par la division du territoire national en deux, il a fait fonctionner correctement l’Etat. Il a assuré l’essentiel des engagements de la Côte d’Ivoire aussi bien sur le plan national que vis-à-vis de l’extérieur. Ses grandes performances des administrations fiscales qui ont permis de réaliser des records sans précédent dans une période aussi difficile, traduisent ainsi la volonté de la Côte d’Ivoire de vivre selon ses moyens en tournant le dos, définitivement, à l’endettement. Le poids de la dette hypothèque dangereusement la vie des générations à venir. Il vaut mieux en sortir maintenant au lieu de chercher à perpétuer le système d’endettement. La Côte d’Ivoire en a les moyens, aussi bien en termes de richesses qu’humains. Elle a une grande qualité et une diversité de compétences pour tenir ce pari. Après des mois de pouvoir, le régime d’Alassane Ouattara montre ses limites. Ce sont des apprentis. Ils ne peuvent en aucun cas remettre le pays sur pieds. Bien au contraire, ils ne font que l’enfoncer dans le gouffre. Les femmes n’ont pas tort dire que le Président Laurent Gbagbo est mieux. Bien que le pays fût coupé en deux, il a réussi à faire face aux obligations de l’Etat. Il n’y a jamais eu de retard dans le paiement des salaires des fonctionnaires.
François Hollande vient d'être élu Président en France. Votre commentaire…
Le départ de Nicolas Sarkozy est une action de Dieu. C’est un soulagement pour tous ceux qui sont épris de paix et de justice. La défaite de Sarkozy a été saluée par les Africains vivant en France. Il y a eu un tonnerre de d’applaudissements à l’annonce de sa chute. Les âmes de tous les morts qu’il a causés en Côte d’Ivoire, en Libye vont enfin reposé en paix. Nous avons dansé et chanté. Nous pensons qu’il doit payer. Il a fait trop de tort à notre pays et à l’Afrique. La défaite de Sarkozy n’est que le début. La fin du film n’est pas loin.
Qu'est-ce que vous attendez de François Hollande ?
Il promet de démanteler la Françafrique. C’est important pour nous. Attendons pour voir. En tout cas, il est loin d’avoir le tempérament mafieux, frileux et nerveux de Sarkozy. Nous allons le juger sur ses promesses. C’est vrai, il n’a pas été tendre avec le Président Laurent Gbagbo en 2004. Mais il faut savoir qu’à ce moment-là, il n’était pas au parfum de ce qui se passait dans notre pays. Aujourd’hui, beaucoup d’eau a coulé sous le pont avec le travail formidable des patriotes ivoiriens et africains. Il y a eu plusieurs rencontres entre eux et lui. François Hollande a une nouvelle vision. Il a un autre regard du Président Laurent Gbagbo. son élection fait trembler ceux qui vivent à Abidjan. Raison pour laquelle ils ont commencé à faire de la désinformation. Il faut remercier une dame comme Calixthe Beyala. Elle a fait un travail colossal. Nous demandons aux Ivoiriens de garder espoir. Les temps sont certes difficiles, mais notre jour de gloire n’est pas loin. Dieu nous parle à travers des signes. Ces derniers temps, il nous a envoyé des signaux forts. Et nous allons nous trouver bientôt pour sabler le champagne de la victoire.
Interview réalisée à Paris par :
Yacouba Gbané