Le chef de l’Etat guinée était l’invité Afrique de RFI. Nous vous proposons ici un large extrait de son interview.
RFI : Depuis la victoire de François Hollande, quelle votre réaction ?
Alpha Condé : Evidemment, l’élection française en France regarde les Français, mais je suis toujours content que quelqu’un qui est de même tendance politique que moi soit président, notamment dans un pays comme la France qui a des relations très étroites avec la Guinée.
RFI : Votre premier communiqué, vous l’avez intitulé cher camarade.
AC : Mais c’est normal, parce que je le connais avant qu’il ne soit président. Et nous sommes des camarades. Nous sommes membres de l’Internationale socialiste et nous avons des rapports de camarades.
RFI : Vous le connaissez depuis longtemps ?
AC : Bien sûr, n’oubliez pas que j’ai passé une bonne partie de mon temps en France.
RFI : Quelles sont vos relations ? Est-ce que vous vous tutoyez par exemple ?
AC : Mais tous les membres de l’Internationale socialiste se tutoient. Mais maintenant qu’on est chef d’Etat, on se vouvoie. C’est la tradition.
RFI : Quel changement attendez-vous de François Hollande?
AC : Ce que nous attendons, c’est davantage de concertation entre l’Afrique et la France. Une évaluation plus exacte des situations qui prévalent dans chacun des pays africains. Cela éviterait quelques malentendus dans les rapports entre pays souverains.
RFI : Donc, il y a eu des erreurs d’évaluation ces dernières années.
AC : Tout n’a pas été correcte. Il y a beaucoup de choses à redresser. Mais cela s’est normal dans les rapports entre Etats. Nous attendons de la France qu’elle soit notre avocat dans les instances internationales, et, qu’elle s’intéresse davantage aux pays démocratiques.
RFI : « Je n’accepterai pas les élections frauduleuses d’où que ce soit », dit François Hollande.
AC : Mais les gens disent que j’ai été l’un des dirigeants africains qui ai le plus souffert des fraudes électorales dans mon parcours politique. Il va sans dire que je ne peux qu’apprécier François Hollande et qu’il soit attentif à la tenue d’élections régulières et transparentes.
RFI : Après la réélection très contestée de Joseph Kabila, François Hollande hésite à aller au sommet francophone de Kinshasa en octobre prochain. Qu’est ce que vous en pensez ?
AC : Moi, je fais confiance au président Diouf pour créer les meilleures conditions de bon déroulement du sommet. Quand à la présence du président Hollande, il revient à lui et à lui seul de décider.
RFI : Vous comprenez qu’il hésite?
AC : C’est lui qui doit décider qui doit aller ou pas en fonction de la manière dont les élections se sont déroulées. Je crois qu’il a suffisamment de conseillers pour lui dire quelle en est la situation et il décidera.
RFI : Sous le mandat de Nicolas Sarkozy, il y a eu plusieurs interventions militaires françaises en Afrique. Est-ce que vous attendez la même politique de François Hollande ou pas ?
AC : La meilleure façon de gérer les conflits, c’est de les éviter. Ce qui veut dire que nous devons renforcer davantage le dialogue et les politiques de prévention des conflits. Quant à la Côte d’Ivoire, je vous ferai remarquer que le président Alassane Ouattara est mon conseiller économique et moi, je suis son conseiller politique et que nos rapports sont très bons.
RFI : Donc vous pensez que la politique de Nicolas Sarkozy en Côte d’Ivoire était bonne ?
AC : Je n’ai pas apporté d’appréciation. Cela concerne les Ivoiriens.
RFI : Faut-il reformer le franc CFA?
AC : La Guinée n’a jamais été membre de la zone franc. Il revient aux pays membres de se prononcer. En ce qui nous concerne, nous sommes résolument pour l’intégration africaine. Cela passe par la création d’une zone économique et monétaire à l’échelle continentale.
RFI : Donc la Guinée n’envisage pas de rentrer dans la zone CFA?
AC : Mon conseiller économique, Alassane Ouattara m’a dit que pendant trois ans encore, j’ai besoin de la sécurité de ma monnaie. Donc quiconque me le dit, ne veut pas que la Guinée avance. J’ai besoin d’au moins trois ans pour avoir une monnaie flexible, donc d’avoir une monnaie guinéenne.
RFI : Pour pouvoir exporter facilement ?
AC : Non. Mais pour pouvoir équilibrer la macroéconomie. C’est-à-dire avoir plus de flexibilité dans la gestion des finances publiques.
RFI : Vous dite qu’il est votre conseiller économique et que vous êtes son conseiller politique. Quels sont les conseils politiques que vous lui avez donné qu’il a entendu ces derniers temps ?
AC : ça, c’est entre nous. Ce n’est pas à mettre sur la place publique. Ce sont des rapports entre deux chefs d’Etat et deux frères.
RFI : Est-ce que vous attendez une visite de François Hollande en Afrique dans les semaines ou les mois qui viennent ?
AC : Je suis certain que le président Hollande viendra en Afrique en fonction de son calendrier. Et je l’inviterai avec d’autant plus de plaisir que nous sommes de la même famille politique.
RFI : On dit que François Hollande connait mal l’Afrique. Est-ce que ça n’inquiète pas ?
AC : Le président Hollande, en tant que membre de l’Internationale socialiste, a eu à fréquenter beaucoup de partis africains. Je crois qu’il connait bien l’Afrique. Qu’il n’y ait pas de réseaux en Afrique, tant mieux.
RFI : Cela lui donne une certaine virginité vis-à-vis de la Françafrique et ses réseaux ?
AC : Bien sûr.
RFI : Comparé à Nicolas Sarkozy?
AC : Je n’ai pas fait de comparaison. Pourquoi voulez-vous que je m’ingère dans la politique française ? Je dis tout simplement que Jospin n’avait pas de réseaux, Hollande n’a pas de réseaux. Donc, ils n’ont pas de contraintes. Ils ont les mains beaucoup plus libres. J’espère que ça les rendra plus attentifs à l’évolution des peuples africains.
RFI : Quelle est la dernière fois que vous avez parlé à François Hollande ?
AC : Je ne me rappelle plus. On a parlé souvent. On a assisté à des réunions, mais il m’a envoyé son livre dédicacé et je lui ai répondu.
RFI : Livre qu’il a écrit en janvier?
AC : Oui, il m’a envoyé et je lui ai répondu. Parce qu’il m’a écrit une jolie dédicace.
RFI : Qu’est ce qu’il vous a écrit sur cette dédicace ?
AC : ça c’est entre lui et moi.
(…) Retranscrits par JCC et LO
RFI : Depuis la victoire de François Hollande, quelle votre réaction ?
Alpha Condé : Evidemment, l’élection française en France regarde les Français, mais je suis toujours content que quelqu’un qui est de même tendance politique que moi soit président, notamment dans un pays comme la France qui a des relations très étroites avec la Guinée.
RFI : Votre premier communiqué, vous l’avez intitulé cher camarade.
AC : Mais c’est normal, parce que je le connais avant qu’il ne soit président. Et nous sommes des camarades. Nous sommes membres de l’Internationale socialiste et nous avons des rapports de camarades.
RFI : Vous le connaissez depuis longtemps ?
AC : Bien sûr, n’oubliez pas que j’ai passé une bonne partie de mon temps en France.
RFI : Quelles sont vos relations ? Est-ce que vous vous tutoyez par exemple ?
AC : Mais tous les membres de l’Internationale socialiste se tutoient. Mais maintenant qu’on est chef d’Etat, on se vouvoie. C’est la tradition.
RFI : Quel changement attendez-vous de François Hollande?
AC : Ce que nous attendons, c’est davantage de concertation entre l’Afrique et la France. Une évaluation plus exacte des situations qui prévalent dans chacun des pays africains. Cela éviterait quelques malentendus dans les rapports entre pays souverains.
RFI : Donc, il y a eu des erreurs d’évaluation ces dernières années.
AC : Tout n’a pas été correcte. Il y a beaucoup de choses à redresser. Mais cela s’est normal dans les rapports entre Etats. Nous attendons de la France qu’elle soit notre avocat dans les instances internationales, et, qu’elle s’intéresse davantage aux pays démocratiques.
RFI : « Je n’accepterai pas les élections frauduleuses d’où que ce soit », dit François Hollande.
AC : Mais les gens disent que j’ai été l’un des dirigeants africains qui ai le plus souffert des fraudes électorales dans mon parcours politique. Il va sans dire que je ne peux qu’apprécier François Hollande et qu’il soit attentif à la tenue d’élections régulières et transparentes.
RFI : Après la réélection très contestée de Joseph Kabila, François Hollande hésite à aller au sommet francophone de Kinshasa en octobre prochain. Qu’est ce que vous en pensez ?
AC : Moi, je fais confiance au président Diouf pour créer les meilleures conditions de bon déroulement du sommet. Quand à la présence du président Hollande, il revient à lui et à lui seul de décider.
RFI : Vous comprenez qu’il hésite?
AC : C’est lui qui doit décider qui doit aller ou pas en fonction de la manière dont les élections se sont déroulées. Je crois qu’il a suffisamment de conseillers pour lui dire quelle en est la situation et il décidera.
RFI : Sous le mandat de Nicolas Sarkozy, il y a eu plusieurs interventions militaires françaises en Afrique. Est-ce que vous attendez la même politique de François Hollande ou pas ?
AC : La meilleure façon de gérer les conflits, c’est de les éviter. Ce qui veut dire que nous devons renforcer davantage le dialogue et les politiques de prévention des conflits. Quant à la Côte d’Ivoire, je vous ferai remarquer que le président Alassane Ouattara est mon conseiller économique et moi, je suis son conseiller politique et que nos rapports sont très bons.
RFI : Donc vous pensez que la politique de Nicolas Sarkozy en Côte d’Ivoire était bonne ?
AC : Je n’ai pas apporté d’appréciation. Cela concerne les Ivoiriens.
RFI : Faut-il reformer le franc CFA?
AC : La Guinée n’a jamais été membre de la zone franc. Il revient aux pays membres de se prononcer. En ce qui nous concerne, nous sommes résolument pour l’intégration africaine. Cela passe par la création d’une zone économique et monétaire à l’échelle continentale.
RFI : Donc la Guinée n’envisage pas de rentrer dans la zone CFA?
AC : Mon conseiller économique, Alassane Ouattara m’a dit que pendant trois ans encore, j’ai besoin de la sécurité de ma monnaie. Donc quiconque me le dit, ne veut pas que la Guinée avance. J’ai besoin d’au moins trois ans pour avoir une monnaie flexible, donc d’avoir une monnaie guinéenne.
RFI : Pour pouvoir exporter facilement ?
AC : Non. Mais pour pouvoir équilibrer la macroéconomie. C’est-à-dire avoir plus de flexibilité dans la gestion des finances publiques.
RFI : Vous dite qu’il est votre conseiller économique et que vous êtes son conseiller politique. Quels sont les conseils politiques que vous lui avez donné qu’il a entendu ces derniers temps ?
AC : ça, c’est entre nous. Ce n’est pas à mettre sur la place publique. Ce sont des rapports entre deux chefs d’Etat et deux frères.
RFI : Est-ce que vous attendez une visite de François Hollande en Afrique dans les semaines ou les mois qui viennent ?
AC : Je suis certain que le président Hollande viendra en Afrique en fonction de son calendrier. Et je l’inviterai avec d’autant plus de plaisir que nous sommes de la même famille politique.
RFI : On dit que François Hollande connait mal l’Afrique. Est-ce que ça n’inquiète pas ?
AC : Le président Hollande, en tant que membre de l’Internationale socialiste, a eu à fréquenter beaucoup de partis africains. Je crois qu’il connait bien l’Afrique. Qu’il n’y ait pas de réseaux en Afrique, tant mieux.
RFI : Cela lui donne une certaine virginité vis-à-vis de la Françafrique et ses réseaux ?
AC : Bien sûr.
RFI : Comparé à Nicolas Sarkozy?
AC : Je n’ai pas fait de comparaison. Pourquoi voulez-vous que je m’ingère dans la politique française ? Je dis tout simplement que Jospin n’avait pas de réseaux, Hollande n’a pas de réseaux. Donc, ils n’ont pas de contraintes. Ils ont les mains beaucoup plus libres. J’espère que ça les rendra plus attentifs à l’évolution des peuples africains.
RFI : Quelle est la dernière fois que vous avez parlé à François Hollande ?
AC : Je ne me rappelle plus. On a parlé souvent. On a assisté à des réunions, mais il m’a envoyé son livre dédicacé et je lui ai répondu.
RFI : Livre qu’il a écrit en janvier?
AC : Oui, il m’a envoyé et je lui ai répondu. Parce qu’il m’a écrit une jolie dédicace.
RFI : Qu’est ce qu’il vous a écrit sur cette dédicace ?
AC : ça c’est entre lui et moi.
(…) Retranscrits par JCC et LO