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International Publié le dimanche 8 juillet 2012 |

Editorial du Président de la Cour pénale internationale, Juge Sang-Hyun Song : la Cour pénale internationale a 10 ans

Le 1er juillet 2002, les trois premiers membres du personnel de la Cour pénale internationale sont entrés dans les locaux de la Cour à La Haye aux Pays Bas. Ce jour là entrait en vigueur le traité fondateur de la CPI, le Statut de Rome.

Dix ans après ce modeste départ, la CPI est devenue une institution internationale de premier plan, qui apporte la justice aux victimes lorsque celle ci ne peut être rendue au niveau national. Le Statut de Rome a été ratifié par 121 États et signé par 32 autres, qui ont ainsi indiqué leur intention d’y accéder.
 
La CPI est actuellement saisie de la situation dans sept pays et suit les développements survenant dans sept autres pays sur plusieurs continents : elle traduit dans les faits les principes consacrés par le Statut de Rome. En mars dernier, la Cour a rendu son premier jugement dans une affaire portant sur l’utilisation d’enfants soldats en République démocratique du Congo. Six procès sont en cours et neuf affaires sont en phase préliminaire. Ces procédures attestent que la communauté internationale ne tolère plus l’impunité des auteurs de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.
 
Les victimes occupent une place prépondérante dans le travail de la Cour. Des milliers d’entre elles peuvent désormais faire entendre leur voix devant la justice internationale, qui reconnaît leurs droits et leurs souffrances. Les procédures menées devant la CPI montrent bien, à l’échelle mondiale, que les enfants ne sauraient être utilisés comme soldats pendant les conflits, que l’utilisation des violences sexuelles comme arme de guerre est un crime international inacceptable, et que les tenants du pouvoir doivent protéger les droits humains fondamentaux des personnes prises dans un conflit.
 
Le soutien dont jouit la justice internationale à travers le monde croît d’année en année. Partout s’exprime la soif de paix, de justice, de primauté du droit et de respect de la dignité humaine. La CPI représente une communauté de nations partageant des valeurs et des objectifs tendant à assurer aux enfants, aux femmes et aux hommes du monde entier un avenir plus serein.
 
Mais pour nous rapprocher de nos objectifs suprêmes, il nous faut, plutôt que de nous réjouir de nos succès, identifier les aspects à améliorer et les obstacles encore à franchir, et redoubler d’efforts pour renforcer le système instauré par le Statut de Rome. En faisant preuve de sagesse et en unissant nos efforts, nous pouvons empêcher de terribles souffrances.
 
La CPI est la pièce maîtresse du système émergent de justice pénale internationale, mais les batailles les plus importantes de lalutte contre l’impunité sont livrées dans chaque pays, chaque société, chaque communauté, partout dans le monde. Les systèmes judiciaires nationaux doivent être suffisamment forts pour constituer le principal élément de dissuasion dans tous les pays, tandis que la CPI, « juridiction de dernier ressort », doit rester un filet de sécurité et ne traduire les criminels en justice que lorsque, pour une raison ou pour une autre, les juridictions nationales sont incapables d’agir. Dans un esprit de solidarité, les États parties au Statut de Rome ont exprimé leur détermination à unir leurs efforts pour veiller à ce que ce principe de complémentarité produise concrètement ses effets.
 
Pour la CPI, il est également essentiel d’obtenir la coopération des États et l’exécution de ses ordonnances. La Cour ne dispose pas d’une force de police. Elle dépend totalement des États pour l’exécution de ses mandats d’arrêt, la production des preuves et la comparution des témoins, entre autres aspects. Malheureusement, nombre de suspects visés depuis plusieurs années par des mandats d’arrêt de la Cour n’ont toujours pas été arrêtés. La volonté politique et la coopération internationale sont essentielles pour que ces personnes soient traduites en justice.
 
Dans notre lutte commune contre l’impunité et pour l’imputabilité, nous devons nous souvenir que la justice pénale internationale n’est qu’une des composantes d’un dispositif plus large de protection des droits de l’homme, d’atténuation des conflits et d’édification de la paix et de la stabilité. Il est vital de livrer là où il le faut d’autres efforts essentiels de prévention des conflits et de relèvement après les conflits, en conjonction avec les efforts des mécanismes judiciaires internationaux. La justice ne peut véritablement aider à prévenir la commission de crimes dans le futur que si elle est accompagnée par l’éducation, la démocratie et le développement.
 
Laissons nous guider par cet esprit de solidarité, au seuil de la deuxième décennie de la CPI, à l’heure où nous célébrons nos réalisations et exprimons notre conscience des défis qui restent à relever. Nous devons être unis dans notre détermination à mettre fin à l’impunité, ainsi qu’à l’anarchie, à la brutalité et au mépris pour la dignité humaine que cette impunité implique. À ce moment crucial, nous devons poursuivre cette lutte contre l’impunité avec une détermination renouvelée et une vigueur accrue. Nous ne saurions nous accorder de répit tant que chaque victime n’aura pas obtenu justice.
 
En ce 10e anniversaire de la Cour pénale internationale, j’appelle les États, les organisations et les peuples à se joindre à cette mission d’humanité.
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