Un collectif d'élus et de cadres Wê originaires de Duékoué, Guiglo, Bangolo, Bloléquin et de tout le pays Wê, a accusé ouvertement hier mardi 24 juillet, le gouvernement ivoirien de « planifier » le génocide du peuple Wê. C'était lors d'une conférence de presse organisée dans un restaurant de Cocody-les 2 Plateaux. « Le gouvernement a planifié l'extermination du peuple Wê », a déclaré à la presse le doyen Nahi Doh, le porte-parole du collectif. Avant de poursuivre : « Nous accusons formellement l'Etat de Côte d'Ivoire, à travers son gouvernement, d'être directement responsable des tueries massives dont est victime notre peuple, en particulier pour ce qui concerne les massacres perpétrés par les FRCI et les Dozos, le vendredi 20 juillet 2012 à Duékoué. Nous dénonçons et condamnons l'attitude méprisante du gouvernement qui consiste à justifier l'attaque, l'incendie du camp de Nahibly et surtout les massacres de populations désarmées, sous les yeux des autorités préfectorales, par la prétendue présence de bandits dans ce camp ». Le porte-parole de ce collectif a estimé que cette expédition punitive contre un camp de réfugiés est « indigne et inadmissible », non sans inviter le gouvernement à prendre des mesures. Ainsi, selon ces cadres et élus Wê, le gouvernement devrait relever de leurs fonctions immédiatement, tous les responsables de l'Etat dans le département, retirer de toutes les forêts, campements et plantations, « les seigneurs de guerre tels que Ouédraogo Rémi alias Amadé Ouérimi et leurs troupes qui les occupent illégalement ». Les Wê veulent aussi que l'Etat « renvoie les dozos, censés être des chasseurs traditionnels dans leur aire culturelle du nord, procède à l'encasernement des FRCI, confie le maintien de l'ordre et la sécurité publique aux forces de police et de gendarmerie qui ont été formées à cet effet, en les dotant de moyens appropriés ». En outre, ils demandent que le gouvernement mette en place une commission d'enquête internationale, sans la CEDEAO, afin que les coupables des tueries soient recherchés et jugés. A les entendre, ces mesures constitueront pour ces cadres et pour le peuple Wê, « une opération de salubrité publique » et seraient « la condition pour restaurer la confiance entre le peuple Wê et le gouvernement ». Nahi Doh, qui était entouré de Jean-Gervais Tchéidé, le maire de Duékoué, Tihi Kpao et de bien d'autres cadres, a annoncé des actions en direction de la communauté internationale, des chancelleries et des organisations de la société civile. Selon un bilan provisoire annoncé par ces élus et cadres, l'attaque de Nahibly a fait 211 morts et de nombreux portés disparus. « La destruction des camps de réfugiés et les massacres des Wê à Duékoué s'inscrivent dans la logique d'extermination où à défaut, d'affaiblissement du peuple Wê dans le but d'annihiler toutes velléités de réorganisation en vue de récupérer leurs terres. Il y a donc lieu de s'inquiéter du sort des personnes enlevées par les FRCI ou portées disparues », a affirmé Nahi Doh. Par ailleurs, à en croire les cadres et les élus qui ont co-animé la conférence de presse, le camp de Nahibly a été détruit alors que l'ONUCI occupait des miradors et les alentours de l'espace. Un élagage tout autour du camp donnait une visibilité nette sur dix mètres aux soldats commis à la sécurité. De plus, selon M. Tchéidé, les visiteurs du camp étaient fouillés à l'entrée et à la sortie, et les tentes étaient numérotées. Ainsi, chaque numéro de tente correspondait à une famille bien identifiée par les administrateurs du camp. A les entendre, aucune visite n'était admise dans le camp après 21h. Cela a amené les conférenciers à s'interroger sur les réelles intentions de ceux qui ont commis ce massacre. Pour l'heure, il est question pour les cadres et élus Wê de s'organiser afin de retrouver et d'identifier les corps ou les disparus. Ils ont également annoncé qu'un grand rassemblement sera organisé très bientôt à Duékoué, « pour dire non au génocide Wê».
Hervé KPODION
Hervé KPODION