«ADO solution». Ce slogan de campagne de l’actuel Chef de l’Etat, qui, dans son esprit, se voulait un gigantesque programme de société, et qui lui a attiré plus de la moitié des suffrages des électeurs, est en passe, près deux ans après son élection à la fonction suprême, de virer en un véritable mirage pour le bas peuple ivoirien. C’est vrai, la ville d’Abidjan, grâce au programme présidentiel d’urgence (Ppu), débarrassée des dépôts sauvages d’ordures, respire un peu plus aujourd’hui un bel air. C’est aussi vrai que les rues ont été débarrassées des forces de l’ordre qui rackettaient, sans vergogne, les pauvres automobilistes et n’hésitaient pas, parfois, à ouvrir le feu, en cas de refus par ceux-ci de mettre la main à la poche, même si, par-ci et par-là, quelquefois, on note une agressivité de certains éléments des Frci contre les populations. La rigueur dans la gestion de la Respublica (chose publique) est de plus en plus perceptible et l’impunité s’institutionnalise aujourd’hui, avec le limogeage des grands commis de l’Etat, y compris des ministres. Là s’arrêtent les bons points… Au pays d’ADO, la solution fait place aujourd’hui à des équations insolubles. Au point que certains Ivoiriens voient l’horizon en pointillé. L’argent fait cruellement défaut et on n’arrive pas à s’expliquer ce phénomène. Les populations croupissent de plus en plus sous le poids des difficultés, ne pouvant plus, en tout cas pour les plus nombreux, à satisfaire les besoins primaires. Sur les marchés, les produits alimentaires sont hors de portée. Les prix du riz de grande consommation et la viande de bœuf viennent de connaitre une hausse pour le moins révoltante. Où allons-nous au juste avec «ADO solution» s’interrogent des Ivoiriens qui attendent de faire payer cher au RDR, parti au pouvoir lors des prochaines élections locales. Le constat, après plusieurs placebo du ministre Dagobert Banzio, est que le gouvernement affiche une impuissance nauséabonde. Les effets de l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative PPTE, que l’on brandi comme la panacée-parce que devant rapporter à l’Etat, au moins 500 milliards de Fcfa, ne se font toujours pas sentir dans le quotidien des Ivoiriens. Chaque jour qui passe, les denrées de premières nécessités voient leurs prix prendre l’ascenseur. Et comme pour pousser loin le bouchon de la colère des Ivoiriens, le Conseil des Universités publiques de Côte d’Ivoire (Abobo-Adjamé, Cocody et Bouaké) vient de fixer le droit d’inscription en première année à 100.000 Fcfa au lieu de 6000 Fcfa, à 200.000 Fcfa la maitrise et à 300.000 Fcfa le doctorat. Une majoration qui à tout point de vue donne le vertige et de l’insomnie aux parents d’élèves. A quoi répond cette hausse démesurée ? Voici un extrait des explications difficiles à avaler, données par les autorités universitaires : «Il n’y a pas d’augmentation, il faut une appropriation mentale d’un concept qui est la césure. Il y a une rupture, l’ordre ancien est mort, on le laisse à lui-même, et nous sommes dans un système qui est nouveau et qui a ses propres exigences, qui n’est pas redevable de l’ancien » (in Frat-Mat n°14301 du 26 juillet 2012). Faut-il en rire ou pleurer ? Quel est cet ordre nouveau qui ne tient pas compte du pouvoir d’achat des populations et dont l’objectif s’apparente à une volonté manifeste d’empêcher un grand nombre d’élèves, en particulier ceux issus des couches défavorisées d’accéder à la connaissance. La levée du bouclier observée, y compris dans les rangs du Rassemblement des Républicains (Rdr) est un indicateur de l’impopularité de cette décision qui s’apparente, dans un certain sens, à une torpille lancée contre le régime Ouattara. Car, la cible visée par ces «ces savants» est loin d’être fortuite. On ne peut pas s’empêcher de penser qu’ils veulent «mettre le feu» au temple du savoir, qui, on le sait, reste l’un des maillons très sensible de la société. Qui joue avec l’université joue à sa perte… Ils sont nombreux, les Ivoiriens qui, fassent au poids de leurs difficultés au quotidien, se disent nostalgiques du passé et font leur la pensée selon laquelle «le vrai bonheur on ne l’apprécie que lorsqu’on l’a perdu». De toute évidence, personne ne peut s’opposer à une révision des droits d’inscription à l’université, vu les sommes colossales que l’Etat vient d’investir, certainement par l’entremise d’un operateur économique privé, via le système BOT. Mais, cette augmentation doit s’appuyer sur une étude sérieuse, intelligible, réaliste, qui, elle-même tienne compte de l’environnement sociale, politique et économique du pays. Il ne serait pas exagérer de croire que derrière cette augmentation des droits d’inscription, se cache, in fine, une privatisation subtile des Universités publiques là où le Président de la République promettait une solution d’accès plus souple. A la vérité, rien ne justifie de tels montants, surtout que le pays vient de connaitre un allègement substantiel de sa dette extérieure. Combien seront-ils les parents d’élèves qui pourront inscrire leurs enfants à l’université au mois de septembre prochain ? Une décision politique devrait, en tout cas ramener les choses dans leur juste proportion. Sinon…
COULIBALY Vamara
COULIBALY Vamara