Présidente Paulette Badjo, présidente de la commission nationale d’enquête sur les évènements de la crise postélectorale, a remis, hier, ses conclusion au chef de l’Etat, Alassane Ouattara. Séance tenante, ce dernier, à son tour, les remises à son premier ministre Ahoussou-Kouadio Jeannot, avec la consigne ferme que la justice engage des poursuites contre les auteurs. Paulette Badjo a dépeint à grands traits le tableau macabre des exactions ainsi commises sur la période du 30 octobre 2010 au 15 mai 2011 inclus. Sur 3248 personnes tuées, 1452 meurtres ont été commis par «les forces pro-Gbagbo», dont 1009 exécutions sommaires, 727 par les Frci dont 545 exécutions sommaires et 200 par les dozos. Le rapport épingle aussi « les groupes d’autodéfense » ou miliciens pro-Gbagbo. 57 autres sont le fait de ceux que la commission appelle, «diverses personnes». S’ajoutent, notamment, 3248 cas de «violations du droit à la vie», 8141 «atteintes à l’intégrité physique», 345 cas de « tortures », 194 cas de « viols», 265 « disparitions forcées » et 260 «détention arbitraires». Sur 15875 personnes auditionnées par la commission d’enquête, instance non judicaire, 13344 se sont révélées être des victimes. «Ces chiffres, a dit la présidente de la commission d’enquête, sont en deçà de la réalité». Visiblement scandalisé, la voix enrouée par l’émotion, Alassane Ouattara tentera, en vain, de se donner de la contenance, cachant difficilement son émotion au vu des nombreuses pertes en vies humaines et autres exactions. «Vous imaginez la peine que je ressens en écoutant le résumé du rapport de la Commission Nationale d’Enquête sur les atteintes aux Droits de l’Homme et au Droit Humanitaire survenues après l’élection présidentielle des 31 octobre et 28 novembre 2010. Ce moment est important pour les Ivoiriens, pour ceux qui vivent en Côte d’Ivoire et pour la Communauté internationale car ce rapport était très attendu», a-t-il dit, rendant hommage aux «nombreuses victimes qui n’ont pas hésité à témoigner librement et sans peur devant la Commission, des témoins qui ont apporté leur éclairage». «La Côte d’Ivoire a connu ces dix dernières années une crise militaro-politique. Cette crise a été longue et éprouvante. L’espoir des Ivoiriens était de retrouver la paix, la liberté et la démocratie par des élections libres, transparentes et crédibles. Malheureusement, les élections d’octobre et de novembre 2010, qui se sont bien déroulées dans l’ensemble, avec un taux de participation historique, ont débouché sur une crise sans précédent, marquée par des violations graves et massives des Droits de l’Homme et du Droit International Humanitaire» a-t-il déploré. «A mon tour, je remets ce rapport à Monsieur le Premier Ministre, Garde des Sceaux, Ministre de la Justice afin qu’il l’examine avec le plus grand intérêt, en vue de prendre les mesures qui s’imposent. Conformément à nos engagements, ce rapport sera rendu public afin que tous les Ivoiriens et tous ceux qui le souhaitent puissent en prendre connaissance (…) J’ai la ferme conviction que le processus enclenché atteindra l'objectif d'apaisement des cœurs et de réconciliation que nous nous sommes fixé s'il s'accompagne de réformes qui renforceront les garanties de non-répétition d’actes qui portent atteinte à la dignité humaine», a insisté le chef de l’Etat. La cérémonie qui a eu lieu dans la soirée à la salle des Pas perdus de la présidence, a réuni, outre le chef du gouvernement, le président de l’Assemblée nationale Guillaume Soro, le représentant spécial des Nations unies en Côte d’Ivoire, Berth Koenders, les présidents d’institutions, déverses chancelleries, les ministres des Droits de l’homme, de la Justice, de l’Intérieur et de la Défense notamment.
BENOIT HILI
BENOIT HILI