Encore un autre report de l’audience de confirmation des charges contre l’ex- président ivoirien, Laurent Gbagbo. La défense du Woody qui avait introduit une requête dans ce sens a eu gain de cause le 2 août 2012, alors que cette audience devait se tenir aujourd’hui 13 août. Elle peut donc s’enorgueillir, si l’on s’en tient aux réactions des pro-Gbagbo qui ont suivi immédiatement ce deuxième report, d’avoir encore marqué des points. Me Altit Emmanuel, l’avocat de Laurent Gbagbo et ses confrères démontrent au fil des jours qu’ils maitrisent les rouages de la justice internationale et que Laurent Gbagbo n’a pas eu tort de porter son choix sur eux. Depuis que cet avocat français a pris en main ce dossier, pour le moins épineux, l’espoir renait peu à peu dans le camp de l’ex chef de l’Etat, même s’il a essuyé un cinglant revers récemment, avec le refus du juge d’accorder une mise en liberté provisoire à ce très craint prisonnier. Laurent Gbagbo est poursuivi, selon le procureur de la Cpi, pour sa responsabilité, en tant que coauteur indirect, des assassinats, viols et autres formes de violence sexuelle, ainsi que de la persécution et autres actes inhumains perpétrés durant la crise qui a éclaté en Côte d’Ivoire au lendemain du second tour de l’élection présidentielle de novembre 2010. Si l’on fait abstraction d’un certains nombre de choses qui peuvent échapper au commun du mortel, on peut raisonnablement avoir peur pour Laurent Gbagbo. Mais, il faut se garder d’aller trop vite en besogne car, ne dit-on pas « honni soit qui mal y pense ». Mais, on ne peut pas s’empêcher de se demander à quoi peuvent bien répondre ces différents reports sollicités par la défense de Gbagbo qui clame pourtant que son client est innocent ? Quelle est cette stratégie de défense qui consiste à faire perdurer le calvaire de son client dans le fond d’une cellule de prison ? De deux choses l’une. Soit la défense de Laurent Gbagbo n’a pu encore réunir les éléments pour assurer une plaidoirie de qualité, soit elle est convaincue de la culpabilité de son client et donc s’accroche à tous les petits détails qui peuvent faire trainer cette audience, avec l’espoir sans doute que les choses évoluent au plan politique. Une autre piste, et non des moindres n’est pas à écarter. Celle des négociations, voire des tractations diplomatiques afin de trouver une ligne médiane, qui puisse mettre toutes les parties d’accord. Pour la paix et la réconciliation en Côte d’Ivoire, aucun sacrifice n’est assez grand. Car la Cpi reste avant tout un tribunal hautement politique. Ce qui, de toute évidence, pourrait changer la donne, même si, dans le camp des vainqueurs et pour la survie de leur régime, on estime que le procès doit avoir lieu. En tout état de cause, cette audience aura lieu un jour et Laurent Gbagbo sera situé sur son sort. Ce deuxième report inattendu ne saurait faire oublier les attaques meurtrières qui ont eu lieu entre le samedi 4 et le mercredi 8 août dernier à Yopougon, Akouédo, Abengourou et Agboville. Au total, selon des sources officielles, environ 12 personnes y on péri et plusieurs autres blessés. Certes jusqu’à ce jour, ces attaques n’ont pas été revendiquées, mais, en attendant les conclusions de l’enquête diligentée par le gouvernement, et sur la base des informations qui fusent çà et là, plusieurs pistes sont à explorer. Celle qui semble la plus plausible, conduit vers des militaires en colère. Le ministre de l’Intérieur, avec presque des «preuves» à l’appui a pointé un doigt accusateur vers les pro-Gbagbo au Ghana et en Europe. Beaucoup d’observateurs ne voient pas les choses dans un seul et unique sens comme le ministre Hamed Bakayoko, mais plutôt comme le PDCI qui a soutenu dans un communiqué que "les acteurs et les auteurs de ces agressions meurtrières sont généralement issus non seulement des rangs des milices pro-Gbagbo, mais également des dozos, des supplétifs démobilisés non indemnisés et de certains éléments incontrôlés des Frci". Quel milicien ou combattant pro-Gbagbo peut-il avoir le courage de mener une attaque contre un camp militaire aujourd’hui où les autorités ont quasiment verrouillé tout le territoire avec l’aide des forces impartiales? Quel Pro-Gbagbo peut-il se permettre alors que le pays est en pleine reconstruction, de mener une action qui mettrait en mal l’avancée de la Côte d’Ivoire ? En tout cas, s’il y en a parmi eux qui rêvent d’un changement de régime par la sédition, on peut dire qu’ils n’ont encore rien compris. Il faut avoir, cependant, le courage de le dire, ces attaques ont le parfum d’une révolte qui tire ses racines de la réforme de l’armée entreprise depuis peu, mais qui visiblement marque le pas. D’aucuns parlent même d’une guerre des chefs militaires venus de Bouaké avec leurs troupes. Chacun d’eux voulant le maximum de places pour intégrer ses éléments dans la nouvelle armée. Mais les critères pour y être retenu semblent trop «sélectifs» pour certains des supplétifs venus du nord qui n’ont pour tout «bagage» que leur Kalachnikov et gris-gris. De toute évidence, ils ne peuvent donc pas intégrer une armée qui se veut sérieuse. Il faut donc les indemniser au plus vite. Que dire des dozos, ces chasseurs traditionnels qui jouent les justiciers dans certaines localités du pays ? Ils attendent, eux aussi, d’être situés sur leur sort après «avoir risqué leurs vies» comme ils le prétendent, face aux canons de Laurent Gbagbo. Le président Ouattara est visiblement dans l’embarras. Car la nouvelle armée ne peut absorber tous les ex-combattants. Que faut-il donc faire au moment où ils montrent de plus en plus menaçants ? Là réside toute la question. Nous n’irons pas jusqu’à proposer aux autorités de faire comme au camp Thiaroye, mais des mesures drastiques s’imposent pour faire face à cette vague de violence et son corollaire de morts. La psychose gagne les populations encore sous le choc des évènements de 2011 où, selon la commission nationale d’enquête qui a rendu récemment ses conclusions, les deux camps ont commis des exactions sommaires. Il importe donc, au regard du rythme des attaques, de stimuler la réforme de l’armée, afin de résorber une bonne fois pour toutes, la question des supplétifs.
COULIBALY Vamara
COULIBALY Vamara